Le chagrin entre les fils de Tony Hillerman

Le chagrin entre les fils de Tony Hillerman
( The shape shifter)

Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers

Critiqué par Vda, le 14 juillet 2007 (Inscrite le 11 janvier 2006, 49 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 003ème position).
Visites : 5 922  (depuis Novembre 2007)

Hillerman renoue les fils de l'histoire navajo

Joe Leaphorn est à la retraite. Ancien lieutenant de la police tribale navajo, il reçoit une lettre d’un collègue rencontré au début de sa carrière. Cette lettre le renvoie à une affaire de vol, le vol de deux seaux de pin pignon, et à une affaire d’incendie accidentel dans lequel un homme recherché par le FBI avait péri.
Cet incendie dans lequel a disparu une vieille couverture narrative navajo, contraire aux préceptes du Dineh, contraire à sa recherche de l’harmonie, l’hozro. Or, voilà qu’objet de la lettre, et joint à celle-ci, se trouve une photographie sur laquelle se distingue ladite couverture. La couverture a-t-elle réellement brûlé ?

De ce point de départ, fil à fil, se construit l’écheveau du roman d’Hillerman. De cette première question, d’autres naissent, l’ombre du crime et de la mort entoure un Joe Leaphorn fatigué, isolé, esseulé.
La couverture a-t-elle réellement brûlé, le criminel défunt dans l’incendie est-il réellement mort, lui qui planifiait si froidement ses crimes, tout en ne laissant derrière lui aucun indice, aucun témoin ?

Roman de la fatigue, de l’essoufflement. Les comparses de Leaphorn sont comme lui des êtres laissés au bord du chemin.
Le sergent Jim Chee et l'agent Bernie Manuelito, de retour de leur voyage de noces à Hawaï, apparaissent fugacement. Leur présence, pleine de vie, forme un contrepoint.
Hillerman renoue avec ce qu’il y a de plus agréable dans ses romans navajo, l’évocation d’un univers autre, un univers en mutation du fait de l'immixtion du monde occidental. D’une trame classique, linéaire, épurée, il construit une intrigue âcre et douce-amère à la fois. Faisant reposer l’histoire sur le vieillissant et pensif Leaphorn, il amplifie le côté nostalgie, fin d’une époque de son roman. Le monde navajo est-il en train de disparaître ?

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navajo blues

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 17 mai 2024

Dans ce dernier polar, écrit deux ans avant sa mort, Tony Hillerman remet en selle le lieutenant Joe Leaphorn, maintenant en retraite de la Police Tribale Navajo, à la poursuite d’un criminel autant cruel qu’habile à se transformer. Une tapisserie traditionnelle, datant du dix-neuvième siècle et décrivant par le menu les souffrances du peuple navajo, censément brûlée lors d’un incendie, refait surface dans un magazine de luxe. Il n’en faut pas plus pour éveiller le flair de notre ex-lieutenant, et le voilà parti pour une chasse haletante, pleine de rebondissements et, comme il se doit, de références aux vieilles légendes et traditions du peuple indien. On ne s’ennuie jamais dans les romans de Tony Hillerman et ce dernier opus ne déroge pas à la règle. Dépaysement et frissons au programme…

Lire « entre les fils », de laine, pas les fils.

9 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 19 juillet 2010

« Le chagrin entre les fils » vient après « L’homme squelette » à la fin duquel Jim Chee épousait Bernie Manuelito. Effectivement ils sont partis en voyage de noces à Hawaï. Ca va donc être à Joe Leaphorn de reprendre du service. Reprendre du service ? Pas vraiment puisque retraité de la Police Navajo. Mais bon sang ne saurait mentir et il va s’engager dans l’action, pour la bonne cause, quitte à prendre des libertés avec la stricte légalité. Une première pour Leaphorn !
« Le chagrin entre les fils » vient après « L’homme squelette », mais surtout … c’est le dernier, the last, il n’y en aura plus. Tony Hillerman emmène avec lui au paradis Navajo ces policiers qu’il a su si bien faire vivre sous nos yeux.
Très beau dernier épisode, meilleur que le précédent. Episode du crépuscule, crépuscule de Joe Leaphorn bien touché par la vieillesse, surtout quand il faut repasser à l’action. En l’occurrence lorsqu’une tapisserie navajo emblématique, relatant la déportation des Navajos via une longue marche assimilable à une espèce de génocide du XIXème siècle, censée avoir été détruite dans un incendie au début de la carrière de Leaphorn semble refaire surface par le biais d’un reportage photo sur une villa de luxe. Les anciens réseaux de Leaphorn s’activent pour comprendre le miracle. L’affaire s’avère de suite plus sulfureuse puisque le criminel censé avoir brûlé avec la tapisserie lors du même incendie n’est peut être pas … Et tout ceci peut se révéler potentiellement dangereux …
Toujours le même, et dernier, amour de Tony Hillerman pour le pays et la civilisation Navajos. Un vrai bonheur de lecture quand c’est allié à un grand respect de la psychologie des personnages.
Allez, un petit dernier pour la route !

« Le grondement du tonnerre fut tel que l’ancien lieutenant Joe Leaphorn hésita un moment avant de descendre de son pick-up sur le parking des visiteurs. Il posa un regard attentif sur les nuages qui s’amoncelaient dans le ciel, à l’ouest, tout en entrant dans le bâtiment de la Police Tribale Navajo. La fin de l’automne, pensa-t-il. La saison de la mousson presque terminée. De très beaux nuages de brouillard au-dessus de la chaîne des Lukachukai, ce matin, mais rien pour annoncer une pluie femelle vraiment bénéfique. Juste un bruyant orage mâle. Ce serait bientôt la saison de la chasse, médita-t-il, ce qui aurait autrefois signifié beaucoup de travail pour lui. »

Le testament de Leaphorn/Hillerman

10 étoiles

Critique de Nav33 (, Inscrit le 17 octobre 2009, 76 ans) - 18 octobre 2009

Le chagrin entre les fils est le dernier (Hélas the last et non the latest) roman de Tony Hillerman qui est décédé depuis. Tony Hillerman s’identifiait volontiers au personnage de Leaphorn (et se disait agacé par celui de James Chee) , d’où l’impression que laisse ce récit (voir critique précédente de VDA) d’un « Joe Leaphorn fatigué, isolé, esseulé » .
L’autre impression est que Tony Hillerman /Leaphorn s’est radicalisé dans ce dernier roman en franchissant la ligne rouge de l’illégalité en participant à l’élimination physique du criminel ex-agent de la CIA . Il fait aussi un dernier clin d’œil au Sud Est asiatique et à son roman fétiche Moon avec la victime vietnamienne de cette intrigue.
J’ai vraiment beaucoup aimé ce roman où culmine l’humanisme de Tony Hillerman . C’est un des meilleurs avec « Moon » et surtout le « voleur de temps »

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