Yamabuki de Aki Shimazaki
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Comme un bouquet
C'est un livre à offrir en lieu et place d'un bouquet, puisqu'il en tient lieu, disait une critique littéraire à la radio belge. Et elle compare le subtil équilibre entre les lignes de fond et les touches intimistes du roman à l'ikebana, l'art de composer un bouquet.
Ce livre est en effet très harmonieux, la belle couverture s'allie avec la qualité de l'édition et l'écriture toute en pudeur et en retenue. L'auteur dégage de son récit une profonde empathie pour ce couple âgé dont la vie nous est dévoilée par petites touches. Leur première rencontre, un coup de foudre, a lieu juste après la guerre et le roman couvre donc une large période de l'histoire du Japon ce qui est un aspect très intéressant du roman également. Un Japon entre tradition et modernité, où le rôle de la femme a évolué et reste toujours un subtil équilibre entre la vie familiale et l'indépendance.
Une belle découverte pour moi que cet auteur, grâce à critiqueslibres !
Les éditions
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Yamabuki [Texte imprimé], au coeur du Yamato Aki Shimazaki
de Shimazaki, Aki
Actes Sud / Babel (Arles)
ISBN : 9782330077174 ; EUR 6,80 ; 07/06/2017 ; 125 p. ; Poche
Les livres liés
Les critiques éclairs (3)
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mon samurai
Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 3 janvier 2023
Le Jardin des amours japonaises
Critique de Libris québécis (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans) - 3 août 2014
Pourrais-je oublier
Ce désir ardent qu’est l’amour ?
Ces trois vers du waka (poème) d’Otoma no Yakamochi résument Yamabuki d’Aki Shimazaki, une Montréalaise d’origine japonaise qui a écrit toute son œuvre en français. Pour le dernier roman de sa pentalogie Au coeur du Yamato, elle présente son héroïne devenue octogénaire, qui revisite les amours qui l’ont portée au cours de son existence.
Le premier mari d’Aïko ne voyait pas en elle un avenir prometteur. Dès leur prime rencontre, il lui remit un waka peu flatteur sur le yamabuki (corète), une plante aux belles fleurs jaunes qui ne donne pas de fruits. Le poème lui donna raison. Sa femme s’avéra stérile après une fausse couche. Cinq ans plus tard, elle divorça de cet homme imbu de lui-même. Comme il lui fallait gagner sa vie, elle quitta Fukuoka, sa ville natale, pour Tokyo afin de s’initier à la cérémonie du thé. Dans le train, un jeune homme glissa sur ses genoux un billet, telle une fleur, lui avouant son coup de foudre pour elle. Peu de mois plus tard, ils unirent leur destinée pour le meilleur qui triompha du pire tout au cours de leurs 56 ans de mariage. À la question d’une amie, Madame S., qui lui demandait si elle referait sa vie avec le même homme, la réponse fut instantanée et positive. Après plus d’un demi-siècle de vie conjugale, la vieillesse d’Aïko ne parvient pas à mettre un terme à sa ballade des gens heureux. On comprend que sa nièce Zakuro, amoureuse d’un représentant commercial, veuille fêter toutes ces années vécues ensemble.
Cet hymne à l’amour « ne se fout pas du monde entier » comme le chante Édith Piaf. Derrière ce roman se cache toute la vie nipponne, qui se restructure après l’amère défaite aux mains des Américains. Quand « tout est politique, tout est possible », dit l’un des personnages. Chacun veut participer à la reconstruction du pays anéanti par les bombes atomiques, tout en tenant compte des traditions qui distinguent ce peuple, tels les salons de thé, l'ikebana, l'art de composer un bouquet… La femme se glisse dans ce monde nouveau en délaissant le miaï (mariage arrangé) et en s’impliquant auprès d’un mari appelé à participer à l’ère du renouveau. Ça reste encore une femme soumise aux impératifs culturels, qui se sont quand même assouplis. Mais chacune veut aimer librement et refuser le prétendant qui ne répond pas à ses aspirations, tel l’amoureux de Zakuro qui défend l’exploitation de la force nucléaire.
Au jardin des amours, ce roman est une rose, disons plutôt un beau yamabuki pour Aïko, dirait Roger Whittaker. Aki Shimazaki offre le dernier roman de sa pentalogie, dont la trame retisse les blessures de son pays natal en entremêlant la tradition et le modernisme avec, comme fond de toile, les morts et les prisonniers entassés peut-être encore dans les goulags russes. C’est un petit bijou d’une centaine de pages, présenté dans un écrin qui fuit l’ostentatoire. Un tel cadeau pourrait traduire les bons sentiments des hommes japonais encore incapables d’exprimer leur amour par des « je t’aime.» bien sentis.
L'IKEBANA,UNE TRADITION PROTECTRICE
Critique de TRIEB (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 73 ans) - 25 mai 2014
Pour assurer son choix, elle décide de prendre conseil auprès de sa tante , femme mûre et expérimentée . En apprenant la future visite de sa nièce, Aïko Toda remonte le fil de ses propres souvenirs , de sa jeunesse dans le japon de l’après-guerre, marqué par l’occupation américaine, le sort des prisonniers de guerre japonais détenus en Sibérie , et dont on ne sait s’ils sont toujours vivants ou exécutés . Elle se souvient des usages du Japon d’alors, de la bonne éducation que l’on doit acquérir pour trouver un mari . On y apprend qu’elle admire son époux, salarié d’un entreprise prestigieuse . Il voyage, se comporte comme un samouraï , sert les intérêts de son pays , contribue à sa restauration . L’auteure décrit les aspects de la vie quotidienne d’alors, le poids du miaï, sorte d’institution des mariages arrangés, qui pesait sur les destinées des Japonaises …
« En réalité, il n’y a rien de moderne dans la façon dont Zakuro et Toshio se sont rencontrés . Après tout, c’est un miaï , comme dans le cas de mon premier mariage avec H (…) Ce qui me semble curieux , c’est qu’une fille aussi libérée que Zakuro compte sur autrui pour trouver son futur compagnon. »
Elle y décrit, avec une tendresse certaine, le poids des traditions dans la vie du Japon d’alors, l’apprentissage de la cérémonie du thé, la maîtrise de l’art de l’Ikebana.
« Elle m’explique tout en continuant d’arranger les fleurs : -A cause de l’esprit militariste et de la guerre, nous avons perdu nos traditions artistiques. »
Les deux destins de ces femmes semblent à l’origine bien dissemblables ; pourtant , Aki Shimazaki dessine un parallèle entre Zakuro , jeune femme éprouvée par les abandons de son fiancé , un soutien inattendu qu’il apporte à l’implantation d’un site industriel au cours d’une réunion publique, et celui de sa tante Aïko . Cette dernière évoque longuement la vision qu’elle a de son futur fiancé , dans un train entre Fukuoka et Tokyo . Elle est séduite, et reçoit de la part de ce jeune homme un billet l’invitant à le contacter …Elle songe également à son premier mariage, complètement raté , qui lui a fait prendre une distance sérieuse avec l’institution . Pourtant, cet homme l’épousera , en dépit de son infertilité .
Le roman est écrit avec un style très simple, dépouillé, des phrases courtes qui percutent . Il illustre à merveille la permanence de la recherche du bonheur au travers des époques, des cultures, des vies marquées par l’histoire immédiate.
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