Du bois dont on fait les pipes de San-Antonio

Du bois dont on fait les pipes de San-Antonio

Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers

Critiqué par Kalie, le 8 février 2014 (Sarthe, Inscrit le 4 juillet 2010, 54 ans)
La note : 8 étoiles
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Pour l'amour de m'man

Si Félicie, la maman de San-Antonio, ne s’était pas mise à chialer comme une madeleine devant son poste de télévision, rien ne serait arrivé. Sur l’écran, une mère éplorée dont le fils a été kidnappé par un fou sadique participe à une émission TV. Le malade est interné dans un hôpital psychiatrique. S’il avoue les meurtres de deux enfants ; il nie celui dont il est question dans l’émission, malgré les preuves accablantes contre lui. Pour sa môman, San-Antonio se fait passer pour fou (cf. le dialogue décalé et drôle avec le psychiatre) puis interné. Son plan est de faire évader le psychopathe pour pouvoir le « cuisiner ». Là, notre policier commet une erreur en cachant chez lui à Saint-Cloud, ce tueur d’enfants bon chic bon genre, surtout avec le petit Antoine sous son toit…

Pour une fois pas de grand voyage, San-Antonio enquête à domicile. Frédéric Dard nous entraîne dans une chasse à l’homme, à première vue des plus classiques, dans Paris. C’est sans compter l’intelligence du psychopathe, le tempérament du gamin et la révélation finale comme souvent chez l’auteur, peu vraisemblable mais étonnante. Le récit est ponctué de quelques scènes gore, histoire de faire monter la tension (âmes sensibles s’abstenir). Dans cette aventure, San-Antonio est aidé de Bérurier (ah ! ses frasques sexuelles cradingues avec sa femme et… une cousine !), de Pinaud (aux déductions toujours utiles mais ici handicapé par des hémorroïdes), de Mathias (ses innombrables chiards et sa mégère de femme) ainsi que de sa « Musaraigne », future épouse de notre commissaire : la jeune et jolie Marie-Marie. Ses amis ne sont pas de trop car notre policier est touché au plus profond de lui-même par le drame qui se joue. Il tombe même malade durant une bonne partie du livre (passages pas très utiles à l’enquête mais bon…). Chose amusante : le livre datant de 1982, l’auteur fait quelques sous-entendus sur la gauche arrivée au pouvoir.

Sinon, le style de Frédéric Dard est toujours aussi coloré avec :

ses jeux de mots : « Président de la raie biblique », « deux places au Palais des Congrès pour Jauni Alité », « chère loque omelette », « comme disait sein-vin-sang-d’épaule » ou « comme disait cinq-vain-sans-deux-pôles », « La bête du j’ai-vos-dents » etc.

ses tournures de phrases dont il a le secret : « je les accompagne, nous ne serons pas trop de tous » etc.

ses inventions et détournements linguistiques : « Nous droppons au portail… », « Oh ! moi, je regarde par terre, findenonrecevoir-t-il. » ou encore le verbe « niannianer », « en pénélopant devant sa tapisserie », « Vous allez me les récupérer Frédéric-Frédéric. » (pour dare-dare, allusion faite au nom de l’auteur) etc.

ses nombreuses digressions plus cocasses les unes que les autres : « Mes moyens ne me permettent pas d’inventer des gadgets foireux. Ce qui fait notre force au Fleuve, c’est le rendement. Les prix sont étudiés ; le calibrage, la promotion, tout… Y a que les auteurs qui n’ont pas bien étudié, mais à quoi bon se crever l’oigne à apprendre puisque c’est pour oublier tout de suite après les examens ? », « Les hommes sont moches. Tu les regardes, tu comprends que c’était pas la peine. On aurait aussi bien pu demeurer absents, à tout jamais, dans les intersidérations cosmiques. La Terre, planète morte. De la caillasse supra-saharienne. Mais « Il » a créé l'oxygène à « Son » image. Et l'azote. L'hydrogène ; tout le fourbi. « Il » a voulu l'infusoire. « Il » a eu ce caprice pour le protozoaire ; et tout s’est déclenché. Et nous voilà, m’man : toi, moi, tous les pas beaux, les biscornus, bancroches, minus, mesquins, connards, enculés de frais ; tout le monde, comprends-tu ? Qu’est-ce que tu dis ? Que « Sa » volonté soit faite ? Elle est faite rassure-toi. Dans le cul la balayette, m’man. Profoundly ! Regarde-la, en couleur, « Sa » volonté. En train de gnagnater sur un rectangle verre. Tu la vois bien, dis ? Tu admires la façon qu’elle purule ! Qu’elle rengorge ! Non, non, sois tranquille : je ne blasphème pas, c’est pas mon genre. Je me soumets. Je « Le » remercie bien humblement pour le cadeau phénoménal. Je t’ai, tu compenses le reste. Ma planète c’est toi. « Il » m’a tout donné pour un seul de tes regards… » etc.

ses notes de bas de page : « Je sais bien qu’on ne s’excuse pas, mais qu’on prie quelqu’un de vous excuser, seulement quand t’écris en bon français les lecteurs débandent » ou « Pas demain la veille qu’il gloupera des Snntn-Aaoio » : « Pour varier un peu, j’ai écrit San-Antonio en mettant les consonnes d’un côté et les voyelles de l’autre, ça ne fait chier personne et ça m’amuse » etc.

sa vulgarité bon enfant : « l’amour sauvage, bon, pour s’dégorger la glandaille, ça a son charme… pour s’sentir d’attaque aux prouesses, l’homme il faut qu’il ave le ventre plein et les couilles vides… » etc.

Moi, je suis client.

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Les éditions

  • Du bois dont on fait les pipes [Texte imprimé], roman San-Antonio
    de San-Antonio,
    Fleuve noir / San-Antonio
    ISBN : 9782265048034 ; 2,79 € ; 02/10/1992 ; 220 p. ; Poche
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