Mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar
Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Littérature => Romans historiques
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Un régal ! Quelle Intelligence, quel style !
Hadrien a été empereur à Rome de 117 à 138 après J.-C. Il est établi que Yourcenar s’efforça de ne faire dire à son personnage que ce qu’il aurait dit, ou aurait pu dire.
Si, parfois, des paroles ou des pensées nous paraissent de notre époque c'est, en partie, parce que les questions qu’Hadrien abordent sont évidentes et font partie intégrante des hommes de tous les temps et même de l’Histoire.
L'Empereur est vieux et malade, dans sa " Villa Hadriana " un peu à l'extérieur de Rome (ses vestiges existent toujours et valent le détour). Il passe sa vie en revue mais avec un certain recul, sans passion. Il médite sur le corps humain, la maladie, mais aussi l’amour et dit : " Il n’est pas indispensable que le buveur abdique sa raison, mais l’amant qui garde la sienne, n'obéit pas jusqu'au bout à son dieu. " Le jugement de l’histoire sera fait par ses actes. Cela ne lui plaît pas beaucoup, mais il reconnaît que c’est le seul moyen de juger un homme parmi les autres " puisque c'est peut-être l'impossibilité à s'exprimer et à se modifier par l'action qui constitue la différence entre l’état de mort et de vivant. ".
Il parle de ses parents, des Grecs, qu’il aime tant.Pour lui, il est évident que l’incessant accroissement de l'empire est une forme de cancer qui finira par le tuer (à comparer avec les idées d’Hélène Carrère d'Encausse sur l’Union Soviétique).
A la mort de Trajan, il accédera enfin au pouvoir. Son but est de tenter de reculer la fin de l’empire romain, qu’il sent cependant comme inévitable.
De l’esclavage il dit : " Je doute que toute philosophie du monde parvienne à supprimer l'esclavage : on en changera tout au plus le nom. Je suis capable d'imaginer des servitudes pires que les nôtres, parce que plus insidieuses : soit qu’on réussisse à transformer les hommes en machine stupides et satisfaites, soit qu’on développe chez eux un goût du travail aussi forcené que la passion de la guerre chez les races barbares. A cette servitude de l'esprit, ou de l'imagination humaine, je préfère encore notre esclavage de fait ".
Il verra le développement de la religion chrétienne, qu’il n'aime pas. La croissance de cette religion reviendrait pour lui à mener le monde à la décadence à cause de sa volonté d'égalité entre les hommes.
Une dernière citation : " Plus l’Etat se développe, enserrant les hommes de ses mailles exactes et glacées, plus la confiance humaine aspire à placer à l'autre bout de cette chaîne immense l’image adorée d'un homme protecteur. ". Nous voici un peu revenu à la pensée de Dostoïevski, Camus et Rimbaud, mais par un autre biais.
Ce livre est une réflexion sur l'homme, l’amour, l'art, la mort, la politique et l'Histoire. L'intelligence d’Hadrien et de Yourcenar affleure tout au long des pages. Laissez-vous aussi porter par cette écriture qui vous donnera un plaisir aussi sensuel et savoureux qu’un morceau de chocolat que vous laisseriez fondre, lentement, entre la langue et le palais.
Les éditions
-
Mémoires d'Hadrien [Texte imprimé] Marguerite Yourcenar
de Yourcenar, Marguerite
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070369218 ; 8,60 € ; 01/01/1977 ; 364 p. ; Poche -
Mémoires d'Hadrien, suivi de Carnets de notes de "Mémoires d'Hadrien"
de Yourcenar, Marguerite
Gallimard / Folio
ISBN : 9782072535710 ; 01/01/2015 ; 364 p. ; Format Kindle
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Les critiques éclairs (25)
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Sublime
Critique de Bookivore (MENUCOURT, Inscrit le 25 juin 2006, 42 ans) - 10 juin 2021
Pendant ma pause déjeuner, je file à la FN*C du coin, juste à côté, et je l'achète (c'est le genre de livre qu'on trouve très facilement). Je le commence un jour ou deux plus tard, et je n'arrive pas à le lâcher tellement j'accroche.
L'histoire, c'est une partie de la vie de l'empereur romain Hadrien (son fameux mur en Ecosse... sa belle histoire d'amour et d'amitié avec ce jeune éphèbe, Antinoüs...).
Le coup de génie de Yourcenar, c'est de l'avoir écrit comme s'il s'agissait vraiment des mémoires d'Hadrien (ne manquent plus que des mentions du style [lacune du texte] insérées de ci de là pour parfaire l'illusion). Or, Yourcenar a été obligée de broder, d'inventer, de fictiviser (bizarre, ce mot, mais j'assume) les mémoires, vu que l'on ne sait sans doute pas grand chose de la vie d'Hadrien, pas autant que ce qui est raconté ici.
Mais pendant la lecture, on a vraiment l'impression de lire un texte antique tout juste remanié pour qu'il soit plus accessible au lecteur contemporain.
Un grand roman. Même si je préfère encore plus "L'Oeuvre Au Noir".
Le Sceptre et la Plume
Critique de Elko (Niort, Inscrit le 23 mars 2010, 48 ans) - 14 février 2021
Choisir l’autobiographie fictionnelle d’un empereur romain permet d’aborder à la fois la grandeur d’une figure historique et l’intimité d’un homme. Et quel personnage qu’Hadrien ! Cet inlassable administrateur, comptable d’un demi-monde, en constante mission diplomatique ou militaire de l’Orient à la Bretagne, des steppes d’Europe centrale à l’Égypte, mais aussi indéfectible amoureux de la culture grecque, reste un homme soumis aux mêmes passions que le commun. A ceci près qu’il a le pouvoir de commanditer l’exécution des fâcheux ou l’institution d’un culte divin à un amant disparu.
Magistral!
Un Grand Livre
Critique de Cédelor (Paris, Inscrit le 5 février 2010, 52 ans) - 29 décembre 2020
Il s’y révèle un homme intelligent, raisonnable, réfléchi, lucide, mystique. Qui s’intéresse à l’astronomie, aux sciences, aux arts, à la marche de monde, grand politique à la fois clairvoyant et humble, rempli de certitudes et de doutes sur ce qu’il accompli et compris de sa vie. Un empereur philosophe, très humain dans ses faiblesses et pourtant d’une conscience humaine bien au-dessus du commun, qui s’interroge et questionne souvent sur le sens de la vie et qui a peur de la mort.
Est-ce que le véritable Hadrien était-il réellement comme il se décrit dans ce livre ? On a parfois une sensation d’incrédulité qu’un homme de son temps, aussi haut placé qu’il l’était, puisse avoir une vision philosophique de l’existence aussi élevée et pénétrante. Marguerite Yourcenar a passé des années, toute une vie presque, à écrire ce livre d’anthologie, en puisant à de multiples sources qu’elle donne dans ses carnets de notes, appendice aux Mémoires d’Hadrien. Tout un monumental travail de recherches et de réécriture, qui a abouti à ce monumental chef d’œuvre.
En dehors de la précision historique indéniable qui permet de nous immerger dans le monde du IIème siècle reconstitué au plus fidèlement possible tel qu’il était alors avec les divers personnages qui ont vécus en même temps qu’Hadrien et qui sont presque tous historiques, l’auteure a aussi mis beaucoup d’elle-même et de ses propres réflexions dans la pensée d’Hadrien, qui exprime ainsi des concepts qui ne semblent pas être de son temps. Le véritable Hadrien n’était certainement pas ainsi mais qu’importe. C’est fidèle historiquement et rempli à chaque page de réflexions d’une grande richesse de jugement, du plus grand intérêt.
Et la beauté du style dans lequel cette longue lettre fictive est écrite ajoute à notre plaisir. C’est tout en une prose de belles lettres à la fois mélancolique et nostalgique. Le tout donne une perfection jamais atteinte dans le genre roman historique, une œuvre unique, un Grand Livre. Une perfection littéraire qui n’évite toutefois pas certaines longueurs ici ou là et qui n’enlève rien à sa qualité littéraire et son intérêt historique et philosophique.
Chef d'oeuvre !
Critique de Thorpedo (, Inscrit le 22 octobre 2009, 45 ans) - 23 mars 2020
Le style est absolument unique, d'un lyrisme splendide et suave.
Le fond est tout aussi brillant que la forme; réflexions politiques, philosophiques, sociales et juridiques ; tout y est.
J'ai beaucoup appris sur le principat d'Hadrien; j'ai même cru, l'espace de 300 pages, que je le lisais.
Un livre à lire, absolument !
Un puits de sagesse bienveillante
Critique de Chiron (, Inscrit le 1 août 2019, 35 ans) - 1 août 2019
On a vraiment peine à croire que ce récit, très limpide, a été travaillé et retravaillé sans cesse.
Au final un livre à lire et à relire, toujours avec un grand plaisir.
Bonnes lectures!
Ennuyant..
Critique de Fabs (, Inscrit le 17 novembre 2011, 40 ans) - 12 juin 2019
Mais le récit manque de peps! Le choix d'une biographie avec un narrateur à la première personne y est sans doute pour beaucoup, l'écriture ronflante aussi. Clairement le style et l’enquête historique ont pris le pas sur le récit... Dommage pour le lecteur!
On s'y croirait
Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 75 ans) - 27 octobre 2016
C'est après avoir visité la villa d'Hadrien à Tivoli que j'ai souhaité lire ce livre. D'où ma note simplement moyenne, car sans cette visite (passionnante) l'intérêt de la lecture aurait sans doute été moins évident.
Histoire racontée par soi-même
Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 21 décembre 2014
Le livre est intéressant avec des descriptions sur la difficulté à pacifier tout ce monde conquis par les romains. Cette plongée dans l'histoire du point de vue d'un personnage historique est loin d'être ennuyeuse.
IF-1214-4307
Le pouvoir, l'âge, la stratégie, la psychologie
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 24 juillet 2014
Ce roman historique de nature biographique, rédigé à la première personne, nous replonge dans le monde de l'Empire romain du IIème siècle après Jésus-Christ, à une époque où les puissances barbares commencent à poindre, d'où son inquiétude sur la pérennité de l'Empire. Des connaissances assez solides sur l'histoire antique s'avèrent relativement utiles pour la compréhension de ce livre. J'avoue avoir dû me documenter, pour être certain d'apprécier les éléments et allusions rapportés. Il n'est donc pas intégralement grand public, ce qui en fait une oeuvre austère. C'est dommage, car elle s'avère éminemment brillante, pour les raisons rappelées ici avant moi. Il mérite sa réputation.
l'empereur et marguerite
Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 17 août 2013
Comment le roman peut-il écrire l'histoire?
Critique de Fa (La Louvière, Inscrit le 9 décembre 2004, 49 ans) - 21 juin 2011
Le pari de Marguerite Yourcenar est d'écrire la vie de l'Empereur Hadrien telle qu'elle aurait pu être, sur la base de sources largement décrites dans la note de fin de volume. Ce roman parvient à dresser un tableau convaincant, vivant, de l'Empire à l'époque d'Hadrien, sur le plan politique spirituel ou culturel. Evidemment, et Yourcenar ne le nie pas, le roman reste écrit au XXème avec les questionnements que cela implique.
Une des questions essentielles reste le rapport de l'homme à l'absolu : les dieux se délitent et le christianisme ne marque pas encore l'Empire de son empreinte. Certes les hommes continuent de croire (ou faire semblant) à l'Empereur et à son caractère divin, mais on sent que le coeur n'y est pas, surtout lorsqu’on s'élève vers les hautes sphères du pouvoir où l'Empereur lui-même est face au vide. Yourcenar pose remarquablement la question de savoir ce que peut faire l'homme une fois seul face à lui-même et au poids de ses responsabilités.
Sur le plan du style, magnifique, tout simplement.
Pour conclure je vous recommanderai de ne pas faire l'impasse sur les notes collationnées en fin de volume. Elles illustrent et amplifient cet excellent roman.
Un portrait trop indulgent ?
Critique de Grégoire M (Grenoble, Inscrit le 20 septembre 2009, 49 ans) - 10 juin 2010
Un portrait monolithique que j'ai lu avec un certain ennui même si la richesse historique et le souci de reconstitution reste indéniable.
Une écriture époustouflante
Critique de Mieke Maaike (Bruxelles, Inscrite le 26 juillet 2005, 51 ans) - 26 décembre 2009
Malgré la grande qualité de ce livre, il manque à mon sens la petite étincelle qui aurait permis au lecteur de se passionner lui aussi pour ce personnage de l'Antiquité, de se voir titiller sa curiosité pour progresser à un rythme plus grand dans cette biographie et de tourner les pages avec une plus grande avidité. Il faut plus aborder cette œuvre comme un essai historique voire un traité de philosophie que comme un roman, raison pour laquelle je ne lui mets pas 5 étoiles, avec beaucoup de regrets tant l'écriture est superbe et l'histoire, magistrale.
Mais qu'à cela ne tienne, je reste subjuguée par la beauté de certains passages que je ne me lasse pas de relire, tel que celui-ci: « Avec la plupart des êtres, les plus légers, les plus superficiels de ces contacts suffisent à notre envie, ou même l'excèdent déjà. Qu'ils insistent, se multiplient autour d'une créature unique jusqu'à la cerner tout entière; que chaque parcelle d'un corps se charge pour nous d'autant de significations bouleversantes que les traits d'un visage; qu'un seul être, au lieu de nous inspirer tout au plus de l'irritation, du plaisir ou de l'ennui, nous hante comme une musique et nous tourmente comme un problème; qu'il passe de la périphérie de notre univers à son centre, nous devienne enfin plus indispensable que nous-même, et l'étonnant prodige a lieu, où je vois bien davantage un envahissement de la chair par l'esprit qu'un simple jeu de la chair. »
Ni dieux, ni maîtres (ou comment Hadrien est Yourcenar)
Critique de L'archer vert (, Inscrit le 19 janvier 2006, 43 ans) - 4 juillet 2009
C'est cette phrase, tirée de la correspondance de Gustave Flaubert, qui poussa Marguerite Yourcenar à entreprendre l'écriture de ce livre, les mémoires de l'empereur romain Hadrien. Au seuil de la mort, Hadrien écrit au futur Marc Aurèle (celui qui meurt au début de GLADIATOR, pour vous situer ;-) ), souhaitant lui laisser un testament biographique et philosophique. Hadrien revient sur sa vie, son enfance en Espagne, son travail de longue haleine sur les frontières germaines et à Rome pour gagner les grâces de son cousin Trajan afin que celui-çi l'adopte et qu'il puissent lui succéder comme empereur. Il revient également sur son règne, comment il stoppa la soif conquérante de Trajan afin de moderniser et d'asseoir la puissance de l'Empire, sa vision humaniste du pouvoir. Il revient également sur le grand drame de sa vie, le suicide de son jeune amant, Antinoüs.
Yourcenar souhaite dépeindre et restituer les pensées d'un homme lucide, qui se serait éloigné des automatismes de pensée des religions. L'Hadrien de Yourcenar est un réaliste, qui regarde la vacuité de la vie humaine droit dans les yeux. Il se sait mortel, mais sait qu'il peut laisser une trace dans l'Histoire -voire peut-être l'influer. Plutôt qu'a celui d'un (ou des) dieu(x), il s'expose au jugement de ceux qui le suivront. Une pensée très moderne, sans doute très éloignée du véritable Hadrien, bien que son règne fut celui d'un lettré réformateur et bâtisseur (il fait partie de ce qu'on appelle des « cinq bons empereurs » qui se sont succédés jusqu'à Marc Aurèle). Autobiographie fictive -mais excellemment documentée-, le livre en révèle en fait plus sur la vision de la vie de Marguerite Yourcenar que sur celle d'Hadrien.
Long mais beau
Critique de Norway (Entre le Rhin, la Méditerranée et les Alpes !, Inscrite le 7 septembre 2004, 49 ans) - 29 avril 2009
Cependant le style de Marguerite Yourcenar est une merveille, il coule de source et entraine le lecteur vers la beauté esthétique de la grande littérature.
Voyage dans l'Antiquité romaine
Critique de Avada (, Inscrite le 26 avril 2007, - ans) - 28 octobre 2008
L'entrée dans « les Mémoires d'Hadrien » est difficile tant la culture de Yourcenar est immense et son écriture riche, travaillée, sans concessions aux clichés littéraires. J'ai lu, dans les carnets de notes adjoints (édition Gallimard) que Yourcenar avait passé beaucoup d'années à écrire ce livre, recherchant tout ce qui avait été écrit sur Hadrien, visitant tous les lieux importants dans la vie de l'empereur et trouvant l'inspiration dans la contemplation des oeuvres d'art liées à son histoire. Le livre est le résultat d'un travail énorme. Il est donc naturel que le lecteur ait des difficultés à pénétrer dans cet univers, comme dans celui de Proust par exemple.
J'ai aimé le roman d'amour, le roman historique, le roman philosophique et psychologique. Mais ce qui m'a le plus touchée, c'est que j'ai réalisé, grâce au livre, quelle richesse culturelle représentait l'empire pour les Romains. Il est tout à fait extraordinaire qu'Hadrien ait passé si peu de temps à Rome, choisissant de visiter tous les pays conquis et de découvrir la singularité de chacun, tout en y apportant les rénovations et embellissements nécessaires.
Finalement, le roman offre au lecteur un véritable voyage dans l'Antiquité et la pensée antique.
Par contre, j'ai été assez surprise de constater que le narrateur de Yourcenar jetait un regard plutôt négatif sur sa vie passée... alors qu'il me semble avoir eu une existence magnifique et passionnante !
Un roman qui réconcilie l'histoire et la littérature.
Merci encore à Jules d'avoir recommandé aussi chaudement ce livre !
Roman ou essai ?
Critique de Béatrice (Paris, Inscrite le 7 décembre 2002, - ans) - 5 octobre 2008
Sublime écriture
Critique de Arval (Papeete, Inscrite le 8 mars 2008, 56 ans) - 14 mars 2008
magistral
Critique de Happy (, Inscrite le 22 novembre 2007, 52 ans) - 5 février 2008
Je ne vais pas commenter ce que d'autres ont dit mieux que moi.
j'espère seulement découvrir d'autres récits aussi puissants et évocateurs, ma vie de lectrice sera comblée.
Hadrien, empereur romain
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 8 décembre 2007
« Mémoires d’Hadrien » n’est pas précisément le genre d’oeuvre facile à lire, qu’on dévore soutenu par la curiosité d’un rebondissement à venir ou d’une fin qu’on n’imagine pas. Il faut au contraire absorber page à page, digérer progressivement cette somme de ce qui a dû être une gigantesque enquête, que Marguerite Yourcenar nous délivre de manière têtue et inexorable. Quelqu’un a évoqué un morceau de chocolat qu’on laisse lentement fondre sous la langue … oui c’est cela, ou plutôt un caramel, un qui ne fond pas vite et qu’on garde très longtemps.
« Mémoires d’Hadrien » a fait partie pour moi de ces livres qui me mettent « en panne », comme un bateau encalminé. Je perds mon rythme (plutôt boulimique en la matière) et je regarde avec désespoir les pages se tourner trop lentement, la pile des « en-attente » croître, incapable que je suis alors de lire vite. Le caramel est là, il faut qu’il fonde. « Belle du seigneur » de Cohen m’avait fait cet effet aussi, dans une moindre mesure.
« Mémoires d’Hadrien » c’est un bloc, un monolithe. Et du dur. Marguerite place, et sensément, dans la bouche et le raisonnement d’Hadrien des choses inouies et qu’il faut digérer.
Là, Hadrien n’est pas encore Empereur :
« Nous connaissons encore assez mal la configuration de la terre. A cette ignorance, je ne comprends pas qu’on se résigne. J’envie ceux qui réussiront à faire le tour des deux cent cinquante mille stades grecs si bien calculés par Eratosthène, et dont le parcours nous ramènerait à notre point de départ. »
De quoi peut bien parler Yourcenar, là. Je ne suis pas féru en grec antique et ne connais pas cet Eratosthène. Aurait-il imaginé la terre ronde ? ?
Mais Marguerite Yourcenar ne néglige pas pour autant la forme. Il y a une belle écriture, poétique par moments :
A certains jours, sur la steppe, la neige effaçait tous les plans, déjà si peu sensibles ; on galopait dans un monde de pur espace et d’atomes purs. Aux choses les plus banales, les plus molles, le gel donnait une transparence en même temps qu’une dureté céleste. Tout roseau brisé devenait une flûte de cristal. »
Il y a sans arrêt de grands moments d’intelligence et de réflexion. C’en est fatigant !
« J’aurais voulu reculer le plus possible, éviter s’il se peut, le moment où les barbares au-dehors, les esclaves au-dedans, se rueront sur un monde qu’on leur demande de respecter de loin ou de servir d’en bas, mais dont les bénéfices ne sont pas pour eux. Je tenais à ce que la plus déshéritée des créatures, l’esclave nettoyant les cloaques des villes, le barbare affamé rôdant aux frontières, eût intérêt à voir durer Rome. »
En exergue, Marguerite Yourcenar s’explique sur l’oeuvre et sa genèse. Ca a été de toute évidence sa grande oeuvre. Ecrite et réécrite sans cesse, commencée à vingt ans en 1924 ;
Ce livre a été conçu, puis écrit, en tout ou en partie, sous diverses formes, entre 1924 et 1926, entre la vingtième et la vingt-troisième année. Tous ces manuscrits ont été détruits, et méritaient de l’être. »
« Travaux recommencés en 1934 ; longues recherches ; une quinzaine de pages écrites et crues définitives ; projet repris et abandonné plusieurs fois entre 1934 et 1937. »
…
« En tout cas, j’étais trop jeune. Il est des livres qu’on ne doit pas oser avant d’avoir dépassé quarante ans. On risque, avant cet âge, de méconnaître l’existence des grandes frontières naturelles qui séparent, de personne à personne, de siècle à siècle, l’infinie variété des êtres, ou au contraire d’attacher trop d’importance aux simples divisions administratives, aux bureaux de douane ou aux guérites des postes armés. Il m’a fallu des années pour apprendre à calculer la distance entre l’empereur et moi. »
« Il m’a fallu des années pour apprendre à calculer la distance entre l’empereur et moi. » Finalement, c’est en 1951 que sortira la première édition !
Oui une vie serait justifiée par l'écriture d'un tel livre...
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 11 juin 2007
"Que dire après cela ?" C'est vrai ! Mais aussi, que lire après cela ?...
Seuls de très grands auteurs comme Camus, Faulkner, Dostoïevski ou quelques autres peuvent tenir la route face à une telle femme et une telle oeuvre.
Celui qui passe à côté sera passé à côté de quelque chose de très important.
J'ose dire que ce livre est à la littérature ce que "Guernica" est à la peinture.
que dire après ça ?
Critique de C.line (sevres, Inscrite le 21 février 2006, 47 ans) - 31 mai 2007
Marguerite Yourcenar donne corps et vie à cet empereur avec un foisonnement de nuances incroyable.
Ici, pas question de n'envisager Hadrien que comme un dirigeant ... Mais bel et bien comme un homme à part entière avec ses joies, ses souffrances, ses doutes, ses obligations, ses conflits intérieurs, ses amours...
Lire les mémoires d'Hadrien c'est lire l'âme d'un homme qui tente de tout mener de front dans un souci d'équité et de justesse. Mais comment concilier tout ça dans la Rome antique ?
Un CHEF D'OEUVRE !!!!
Inégalable
Critique de DM (, Inscrit le 5 avril 2004, 50 ans) - 5 avril 2004
Une pierre a tremblé
Critique de Renardeau (Louvain-la-Neuve, Inscrite le 6 avril 2001, 66 ans) - 9 décembre 2001
Vivre libre en étant au pouvoir ?
Critique de Claude S. (Wavre, Inscrit le 7 août 2001, 60 ans) - 8 décembre 2001
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