Mountolive de Lawrence Durrell

Mountolive de Lawrence Durrell
(Mountolive)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par CCRIDER, le 29 octobre 2004 (OTHIS, Inscrit le 10 janvier 2004, 76 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 268ème position).
Visites : 5 551  (depuis Novembre 2007)

Un diplomate bien tranquille

La saga d'Alexandrie se développe et s'ancre un peu plus profondément dans le drame dans ce troisième volet du "Quatuor" .
L'intrigue nous confronte à la fin tragique de Pursewarden , le poète et écrivain qui finit par se suicider au cyanure . Le complot de Nessim , le richissime copte amoureux de Justine la reine de beauté juive , se développe et prend corps . Il ne s'agit plus d'un aimable cercle de doux étudiants de la Kabbale , mais bien de dangereux comploteurs qui trafiquent des armes pour en procurer aux colons israéliens pour leur permettre de se battre contre les Palestiniens qui se retrouvaient à l'époque en position de force au départ des Anglais .
" Toute notre fortune a passé dans la lutte qui est sur le point de s'engager ici ...Les Anglais et les Français nous aident , ils n'y voient pas malice ... Ils sont dans une situation lamentable parce qu'ils n'ont plus de désir de se battre , ni même de penser ... Les juifs au contraire , représentent un élément jeune: ils sont le poste avancé de l'Europe dans ces marécages croupissants d'une race moribonde ." Déjà !?
" Nous savons , dit encore Durrell , que nos jours sont comptés depuis que les Français et les Anglais ont perdu le contrôle au Moyen-Orient . Nous , les communautés étrangères , avec tout ce que nous avons édifié ici , nous sommes petit à petit absorbés par la poussée arabe , la marée musulmane ..." Déjà!?
Nous voilà bien loin de l'aimable adagio du début de la saga . Nous sommes en plein drame : le complot est découvert , le frère de Nessim en paiera de sa vie les frais .
Quand à David Mountolive , le jeune et fringant diplomate britannique qui donne son nom au titre , c'est en fait un personnage secondaire . Il a quitté Alexandrie assez jeune pour mener une brillante carrière dans divers ambassades et bien longtemps après , pour revenir au Caire et à Alexandrie pour y voir toutes ses illusions et ses amours sombrer ...
Un livre magnifique qui donne à réfléchir sur la vanité des choses et les dérisoires efforts des hommes pour s'inscrire dans la longueur du temps historique . Les tendances lourdes des évènements majeurs ont toujours leurs racines bien loin en arrière ...

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Troisième roman du « Quatuor d’Alexandrie »

10 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 8 juin 2012

« Le quatuor d’Alexandrie constitue l’œuvre majeure de Lawrence Durrell. Il s’agit d’une histoire racontée à quatre voix (Justine – Balthazar – Mountolive et Cléa), une histoire alexandrine, de cette ville d’Egypte, Alexandrie, où le statut d’apatride semble celui qui convient (convenait ?) le mieux. Dans les quatre romans, on reviendra sur la même histoire peu ou prou, valse lente entre une dizaine de protagonistes à Alexandrie, mais la même histoire sera revisitée à chaque fois par un personnage différent, apportant un éclairage supplémentaire ou noyant dans une ombre inquiétante ce qu’on croyait avoir compris …
Et voici donc Mountolive, qu’on découvre au début de ce « Mountolive » jeune diplomate du Foreign Office, venant faire son initiation à la carrière, à l’Egypte et au monde compliqué de l’Orient, chez Leïla et Falthaus Hosnani. Soient les mère et père de Nessim et Narouz, ni plus ni moins. C’est au cours de ce séjour de quelques mois que Mountolive deviendra l’ami de Nessim mais aussi, et peut-être surtout, l’amant de Leïla. C’est l’occasion de revisiter une nouvelle fois l’histoire initiale déployée dans « Justine », en remontant d’abord plus avant dans le temps et en finissant plus loin, encore un peu plus loin, à l’époque où sur la fin de sa carrière Mountolive obtient en quelque sorte son bâton de Maréchal ; le poste d’ambassadeur au Caire. L’occasion de se rapprocher de Leïla qu’il n’avait pas revu depuis … des lustres (l’amour n’est jamais simple ni heureux sous la plume de Lawrence Durrell, dans la vie réelle peut-être pas non plus, d’ailleurs).
A ce titre, « Mountolive » nous éloigne un temps de l’histoire initiale, mais c’est pour mieux nous apporter les éléments complémentaires qui permettent d’interpréter … mieux ( ?) … différemment ( ?) l’histoire initiale. Lawrence Durrell jette en quelque sorte les fondations solides, objectives, sur lesquelles il aurait pu baser toute la tragédie de son « Quatuor ». Mais le « Quatuor » ne serait pas le « Quatuor » s’il avait procédé ainsi. C’eût été un roman en quatre tomes quand il est en fait bien plus. Un peu ce qu’est un prisme diffractant à une banale lentille optique !
L’affaire prend, contre toute attente, un tour politique qu’eût été bien en peine de soupçonner notre pauvre Darley, héros initial. Un tour politique dans lequel Nessim et Narouz jouent un rôle de premier plan, ainsi que Mountolive évidemment. Et au cours duquel le rôle de Darley apparait définitivement comme un élément très secondaire.
On ne peut négliger non plus l’histoire particulière qui unit Mountolive et Leïla et qui aurait constituer un ouvrage à part. Là encore, la virtuosité de Durrell éclate au grand jour, capable d’intégrer un roman spécifique à une immense histoire observée de tous les points cardinaux possibles.

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