Les amertumes de Bernard-Marie Koltès
Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Théâtre
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THÉÂTRE EXPÉRIMENTAL PAR BERNARD-MARIE KOLTÈS!
La famille et ses disputes quotidiennes sont au cœur de la pièce «Amertumes», ce qui entraîne sans doute sa construction comme «morcelée» en 16 tableaux. (C’est d’ailleurs le titre exact de la pièce: «Les Amertumes. Spectacle en seize tableaux transposés d’Enfance de Gorki»).
Nous faisons la connaissance d’une famille qui au départ nous semble tout à fait «ordinaire», il y a les parents, dont nous ne connaîtrons jamais le nom, qui nous sont uniquement présentés comme le Vieux et la Vieille. Il y a aussi leurs trois enfants: leur fille Varvoia qui, au début de la pièce, assiste à l’enterrement de son mari Maxime, dont elle est enceinte et qui justement va accoucher pendant la cérémonie funéraire.
Et puis, il y a ses deux frères Piotre et Mikail. Ces deux-là oscillent entre haine et amour envers leurs parents. Ils sont très fâchés avec leur père, à qui ils reprochent de ne pas vouloir leur céder de son vivant leurs part d’héritage, afin de pouvoir concrétiser leurs rêves, et reprochent à leur mère d’être bien trop passive et soumise à leur père, qui la frappe et la maltraite régulièrement!..
Cette pièce est transposée du livre «Enfance», le premier tome de l’autobiographie de l’écrivain russe Maxime GORKI (1868 – 1936) (1). C’est le premier écrit pour le théâtre que Bernard-Marie KOLTÈS (1948 – 1989, ci-après dénommé BMK) a mis en scène et interprété, en 1970, à Strasbourg avec la troupe du Théâtre du Quai qu’il avait fondée.
BMK avait vingt-deux ans, au moment où il a écrit cette pièce, c’est dire le génie précoce de son auteur! Restée inédite, elle n’est parue qu’en avril 1998 (soit plus de dix ans après la mort de son auteur), afin de faire connaître les vraies pièces de théâtre de BMK, à partir des manuscrits originaux annotés par l’auteur, puisque des versions plus ou moins authentiques circulaient à l’époque.
Que dire de plus sur cette pièce de théâtre? Comme souvent BMK nous propose ici un théâtre expérimental, loin, très loin des modèles narratifs traditionnels. Il y a notamment la scène qui est divisée en trois plateaux différents, où la pièce se déroule en même temps avec des personnages différents. L’objectif de BMK est ici de faire participer le public, de le mêler au spectacle, en «immersion», comme on le dit aujourd’hui.
Compte tenu de cela, la portée de ce spectacle se situe dans l’expérience immédiate pour le spectateur, qui est comme dans les coulisses de sa création. Celui-ci peut alors entrer dans les limites de «l’expérience», découvrant au fur et à mesure l’évolution du «jeu» des acteurs, et la fragilité des conventions sur lesquelles il est établi.
Comme toujours chez l’auteur français, c’est écrit dans une langue limpide, jaillissante, surgissante, corrosive, non sans une certaine poésie d’ailleurs. Cela se lit facilement, et quelques heures de lecture suffisent. Une écriture qui vient témoigner avec force des qualités d'un écrivain en devenir qui, dès ses premières lignes, pose les fondations d'un univers rare, et une langue portée par un rythme et un phrasé unique dans la littérature française. Le lecteur attentif peut déjà repérer les prémices d’un grand écrivain et des grandes œuvres à venir.
Encore une fois, sans doute pas le texte le plus simple pour aborder l’œuvre de l’auteur de théâtre contemporain le plus joué à travers le monde. Je ne conseillerais donc pas cette pièce à un novice de l’œuvre de BMK, puisque pas assez représentative de son style et de son talent. Par contre, pour celui qui a déjà une expérience avec le théâtre de l’auteur français… Pourquoi pas?...
(1) : Cf. ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/7149
Les éditions
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Les amertumes
de Koltès, Bernard-Marie
les Éditions de Minuit
ISBN : 9782707316516 ; 9,50 € ; 04/11/1998 ; 59 p. ; Poche
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