Ils vivent la nuit de Dennis Lehane

Ils vivent la nuit de Dennis Lehane
(Live by night)

Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers , Littérature => Anglophone

Critiqué par Salocin, le 19 avril 2013 (Inscrit le 12 décembre 2012, 43 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (15 509ème position).
Visites : 6 415 

Encore du très bon Lehane

Le privilège m’est donné de rédiger la première critique du dernier roman de Dennis Lehane, « Ils vivent la nuit », qui constitue une suite de la fresque historique du Boston des années 1920, initiée avec « Un pays à l’aube ». Il est, paraît-il, prévu qu’un dernier ouvrage achève ce qui constituera alors une trilogie.

Je n’ai pas grand chose à dire sur la qualité de l’œuvre, de très bonne facture, et qui ravira les amateurs, dont je fais partie, de Denis Lehane. Il faut pour cela ne pas avoir été dérouté par le virage littéraire amorcé par l’écrivain avec « Un Pays à l’Aube », et dont les critiques de l’époque étaient très élogieuses (s'il fallait comparer, je dirais toutefois que j'ai préféré "Ils vivent la nuit")

« Ils vivent la nuit » se situe dans la droite lignée d’un « Pays à l’aube». Le lecteur suit l’ascension mafieuse de Joe Coughlin, frère de Danny (héros du 1er opus), à l’époque de la prohibition à la fin des années 20 aux Etats-Unis. C’est une histoire de gangster, de coups bas, de trahisons, de règlements de compte qui se lit aisément et avec un plaisir certain grâce au talent de conteur de Lehane. Ce dernier restitue aussi à merveille l’ambiance d’une époque, celle d’une Amérique gangrenée par ses trafics illégaux et touchée de front par la crise de 1929.

Comme à son habitude également, Lehane met en scène une histoire qui touche directement les sentiments du lecteur en raison de l’importance qu’il attache à développer la psychologie, les états âmes ou les souffrances de ses protagonistes. Il y a également une aventure amoureuse qui, si elle paraît superficielle au début du livre, prend de la consistance le roman avançant.

La seule critique que je ferai à ce livre, et qui pourrait également s’appliquer à « Un pays à l’aube » est la dimension linéaire de l’histoire. Car ce qui a fait pour moi le succès de Lehane et la réussite incontestée d’ouvrages, tels que Mystic River ou Shutter Island, est la narration d’histoires complexes, de destins croisés, de passés ténébreux qui se traduisent dans la construction littéraire par des flash-backs et des rebondissements incessants. Le talent de Lehane est de composer des intrigues humaines puissantes faites de dénouements imprévus ce qui a d’ailleurs contribué à nourrir les adaptations cinématographiques de ses romans. « Ils vivent la nuit » est de ce point de vue teintée d’un classicisme presque dépassé. La seule novation concerne la surprenante entrée en matière du livre puisque la fin est annoncée dès la 1ère page, effet de style certes mais qui produit tout de même son effet ; je vous livre les 3 premières phrases du roman :

« Quelques années plus tard, sur un remorqueur dans le golfe du Mexique, Joe Coughlin verrait ses pieds disparaître dans un bac de ciment frais. Pendant que les douze gangsters embarqués avec lui attendraient d’être assez loin en mer pour le jeter par-dessus bord, il laisserait son regard se perdre dans les flots écumeux à la poupe, tout en écoutant le moteur ahaner. Il lui viendrait alors à l’esprit que presque tout ce qui s’était produit de notable dans sa vie –en bien comme en mal- avait été mis en branle ce matin là, lorsqu’il avait croisé pour la première fois la route d’Emma Gould ».

Entrée en matière brillante et dont la qualité littéraire prend toute sa dimension la fin du livre approchant. Je n’en dis pas plus pour ne pas dévoiler le dénouement..

Ce livre est excellent et fera bonne figure dans ma bibliothèque pour compléter ma collection des romans de Lehane. Il prouve aussi s’il le fallait que Denis Lehane est aujourd’hui l’un des plus grands écrivains contemporains de romans noirs - je le préfère au maître James Ellroy, dont le style plus dense, est plus oppressant, parfois étouffant.

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  Coughlin

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Une suite moins convaincante.

6 étoiles

Critique de Sotelo (Sèvres, Inscrit le 25 mars 2013, 41 ans) - 4 janvier 2024

Suite de "Un pays à l'aube", "Ils vivent la nuit" conte l'histoire de Joe, le frère de Danny (héros du premier roman), notamment son ascension au sein de la pègre de Boston. Toujours aussi bien écrit, le livre m'a néanmoins beaucoup moins convaincu que son prédécesseur, que ce soit de par son héros auquel personnellement je n'ai pas accroché, que par son intrigue, que j'ai trouvée au final assez classique. Lehane oblige, ça reste solide, mais personnellement c'est aussi peu marquant.

Coughlin - 2

8 étoiles

Critique de Bookivore (MENUCOURT, Inscrit le 25 juin 2006, 42 ans) - 28 juin 2023

Joe Coughlin ne veut pas être flic, il choisira une voie totalement différente : il entre dans la délinquance, la criminalité, par la petite porte (des magouilles, de plus en plus importantes ; des coups fourrés qui réussissent ou pas), et va rapidement grimper les échelons. Ce second tome de la trilogie que Lehane lui a consacrée (un personnage de fiction) est une belle petite réussite, un roman parfois dur, souvent drôle (des dialogues parfois irrésistibles), qui sera adapté au cinéma par Ben Affleck (réalisateur et acteur sur ce coup). A lire.

Au pays des fédoras

7 étoiles

Critique de ARL (Montréal, Inscrit le 6 septembre 2014, 38 ans) - 28 juin 2017

Mon premier contact avec "Live by Night" s'est fait par l'entremise du film de 2016 réalisé par Ben Affleck. J'en étais sorti avec l'impression d'une histoire assez solide diluée dans un scénario un peu maladroit. Certains des personnages secondaires m'avaient toutefois beaucoup accroché, assez pour me donner l'envie de lire le roman de Lehane, de qui je n'avais jamais rien lu et que je ne connaissais qu'à travers les adaptations de ses œuvres au cinéma.

Le décor de cette histoire de gangstérisme est plutôt familier: années 20, prohibition, bars clandestins et attaques à la mitraillette. Lehane parvient cependant à éviter certains des clichés majeurs du genre et de l'époque, bien qu'une légère impression de déjà-vu accompagne certains passages. On peut toutefois se demander à quel point il est encore possible de livrer un produit purement original sur des thématiques aussi souvent exploitées.

Le roman de Lehane se démarque à mon sens sur deux plans: son héros, qui s'éloigne considérablement des archétypes habituels des personnages de gangsters, et ses personnages secondaires et tertiaires fascinants, parmi lesquels figurent une ex-héroïnomane devenue évangéliste et un chef de police torturé par les méfaits que commet son plus jeune fils. Lehane ne réinvente pas grand-chose, mais ses talents de conteur sont indéniables. On tourne les pages sans pouvoir s'arrêter, sans effort, mais sans grande récompense au final. "Ils vivent la nuit" demeure un divertissement de qualité qui plaira aux amateurs du genre.

Grand roman noir

9 étoiles

Critique de Killing79 (Chamalieres, Inscrit le 28 octobre 2010, 45 ans) - 23 juin 2013

Dennis Lehane nous fait suivre avec intérêt la génèse, l'évolution puis l'envol d'un jeune dans le système mafieux. Même si intrinsèquement on ne valide à aucun moment le choix de carrière de Joe, on se prend au jeu et les péripéties de ce délinquant notoire nous fascinent jusqu'à la dépendance. Dans le milieu sous haute tension de la pègre, son côté humain le rend plus accessible qu'il ne voudrait le faire paraître et en fait un personnage finalement attachant. Ses faiblesses émotionnelles, surtout liées aux femmes, le conduisent toujours sur la brèche et plus il prend du grade, plus il prend le risque de perdre tout ce qu'il a gagné et tout ce qu'il aime. Mais son destin semble inexorablement tracé et ses actes sans retours dans ce milieu de batailles et de trahison.
Cette fresque initiatique se déroule à la période particulière de la prohibition en Amérique, qui constitue un tableau idéal pour les aventures criminelles de Joe Coughlin.
"Ils vivent la nuit" est la suite "d'un pays à l'aube" mais peut se lire indépendamment et j'ai d'ailleurs hâte de lire ce premier opus tant les éloges sont nombreuses à son sujet.
Dennis Lehane ne semble plus être seulement un très bon auteur de polars mais aussi un très grand conteur de roman noir.

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