Chemins de poussière rouge de Ma Jian
( Hong chen)
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Passionnant et autobiographique récit de voyage d'un dissident chinois
Un passionnant et autobiographique récit de voyage : Chemins de poussière rouge de Ma Jian, un chinois exilé à Londres avec donc une écriture tout à fait occidentale.
Dans les années 1980, Ma Jian est un intellectuel dissident à Pékin, et pour fuir les tracasseries politiques, il se lance dans un périple à travers la Chine de Den Xiaoping : un voyage très pittoresque, riche de culture et vraiment passionnant dans les profondeurs de l'immense Chine, du Pacifique aux déserts et jusqu'aux confins du Tibet.
Quelques extraits apéritifs :
"L'homme qui dort dans le lit à côté du mien ronfle bruyamment. Il va finir par me rendre fou. Il est chauffeur routier. Il a toujours peur que quelqu'un lui vole son essence la nuit, il a donc roulé ses barils jusque dans le dortoir. Les vapeurs sont asphyxiantes. Je pars demain dès que je me lève."
"C'est agréable de passer une journée à écrire des lettres. On a l'impression de voyager à travers l'espace."
"Ma pauvreté me permet de me déplacer aussi librement qu'une feuille au vent, mais, parfois, j'aimerais qu'une pierre me tombe dessus et me cloue au sol."
"Je me souviens de la légende des collines au Sable chantant. Une armée de guerriers impériaux campait une nuit dans le désert et une soudaine tempête de sable les enterra vivants. On raconte que, si le vent souffle dans la bonne direction, on peut entendre les fantômes des soldats hurler à l'intérieur des dunes."
Les éditions
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Chemins de poussière rouge [Texte imprimé], roman Ma Jian traduit de l'anglais par Jean-Jacques Bretou
de Jian, Ma Bretou, Jean-Jacques (Traducteur)
Éd. de l'Aube / L'Aube poche (La Tour d'Aigues)
ISBN : 9782752601964 ; 2,98 € ; 12/01/2006 ; 452 p. ; Poche
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Tous les chemins mènent à l'homme.
Critique de Bertrand-môgendre (ici et là, Inscrit le 9 mars 2006, 69 ans) - 8 mars 2014
En septembre 1981 Hu Yaobang fit un discours qui déstabilisa les artistes et intellectuels du pays : il y proclama les dangers d’un « libéralisme bourgeois »
Ma Jian, auteur, peintre, photographe vit à Běijīng. Dans son appartement sis au 53 passage Nanxiao, il reçoit beaucoup d'artistes. Surveillé, emprisonné, il était allé trop loin dans sa prise de liberté d’expression : il dut faire son autocritique et devient cible désignée sous le couvert de la campagne « contre la pollution spirituelle », lancée en septembre 1983 par Hu Qiaomu. Contrairement à ce que l’on pense, cette campagne n’était pas tout à fait une remise en cause des progrès réalisés depuis 1978. Elle se voulait centrer dans le rééquilibrage politique qui penchait depuis en faveur des forces conservatrices.
Condamné à rentrer dans le rang, Ma Jian décide de fuir « en avant ». Au vue de son budget limité, il se retrouve vagabond sur les routes de son pays immense, avec dans la poche quelques adresses d’amis à visiter.
Ce livre relate le parcours d’un « vagabond céleste » pendant les trois ans que dura son périple.
Il y eut une quête spirituelle : il prononce ses vœux bouddhistes laïques tout en continuant à se poser des questions ; une quête sur soi : se connaître soi-même avant de découvrir les autres puis les épreuves aidant il prit acte de ses limites physiques ; une quête découverte d’un autre ailleurs et l’ouverture aux personnes semblant vivre sur une autre planète ; une quête journalistique, photographique et reportage écrit, parsemée çà et là de curiosités touristiques. Son parcours se transforme peu à peu en travail d’ethnologue avide de noter les moindres détails d’une peuplade ou d’une autre encore marquées par des us et coutumes ancestrales.
Son travail de journaliste lui facilite la prise de notes minutieuses, bien que la dimension artistique de son regard apporte une sensibilité d’humaniste parfois contemplatif, souvent admiratif, au final simplement philosophique.
Cherche-t-il la foi, ou bien un sentiment de sécurité ?
Devenu vagabond déraciné, est-ce Bouddha qui guide son chemin ?
Ouvert à toutes les réponses, il s’abandonne aux marques du destin qui jalonnent sa route. Jusqu’au jour où, au Tibet, la lassitude prenne le dessus et naisse en lui le besoin viscéral de retrouver ses repères citadins.
Quelques notes :
« Les gens passent leur temps à se battre les uns contre les autres alors que le véritable ennemi est le temps lui-même. »
Ma Jian présente un peu de sa philosophie de vie à Ai Xin, une amie croisée en cours de route. Elle lui demande :
— Qu’est-ce que tu recherches ?
— Je veux voir mon pays, en connaître chaque rivière, chaque montagne. Je veux voir des gens différents, connaître des manières de vivre différentes.
— Pourquoi voyages-tu ?
— La Chine est un trou noir, je veux plonger dedans. Je ne sais pas où je vais, je sais juste que je devais partir. Tout ce que j'étais, je le porte en moi ; tout ce que je serai m'attend sur la route que je veux prendre. Je veux penser debout, être en cavale perpétuelle. Plus jamais je ne supporterai de passer ma vie enfermé dans une pièce.
— Tu veux changer ce pays ?
— Je veux juste le connaître, le voir de mes propres yeux...
Pas de comparaison possible entre Kerouac et Ma Jian. Le seul point de convergence provient de cette volonté commune des deux écrivains à vouloir parcourir leur pays respectif.
Question écriture, je trouve que Ma Jian jongle avec les mots, les idées, les réflexions sur sa quête perpétuelle d'un autre ailleurs.
À Běijīng son professeur d'art lui dit : « ...que la peinture peut-être dangereuse particulièrement celle représentant des personnages. Il vaut mieux produire des paysages... L'écriture est moins risqué pour moi. Je peux me cacher dans un labyrinthe de mots, parmi les détails de la vie des gens »
Est-ce cette forme de retenue qui donne l'impression que « les auteurs de romans chinois contemporains ont un niveau culturel proche de zéro, qu'ils écrivent mal, ils sont lâches et n'ont aucun courage... » dixit Wolfgang Kubin, professeur d'études chinoises à l'université de Bonn ?
Il me semble, sans vouloir détenir la vérité, que les écrivains vivant en Chine ne sont toujours pas libres de ce qu'ils produisent.
Il faut vraiment que les auteurs vivent à l'étranger pour se libérer des contraintes politiques.
J'imagine qu'il est trop tard pour recommander ce roman qui paraît déjà vieux. De mon côté, et dans l'état modeste de mes connaissances du pays, c'est le livre que je retiens et que je propose aux jeunes qui désirent s'immerger dans une civilisation bien éloignée de la nôtre.
"Tout le monde ici rêve du jour où il pourra chanter de désespoir par la fenêtre"
Critique de Stavroguine (Paris, Inscrit le 4 avril 2008, 40 ans) - 18 mai 2008
On s'embarque donc dans une espèce de road movie fataliste à la recherche de liberté et de foi aux côtés de cet intellectuel qui devient peu à peu indigent et étranger à son propre pays. Une bonne occasion pour nous, occidentaux, de découvrir les aspects moins connus de la Chine en se détachant du monstre économique qui se développe sur la côté Est pour rentrer dans une Chine profonde, mosaïque d'ethnies minoritaires vivant dans la maladie, la précarité et l'exclusion d'un territoire immense frappé par les inégalités.
Du Nord intellectuel au Sud Est dynamique, puis du centre reculé et sous-développé au Tibet (vu avec la vision d'un Han, c'est appréciable), Ma Jian nous dresse le tableau d'une Chine qui semble devoir s'unifier et mettre fin à ses propres contradictions avant de pouvoir conquérir le monde.
C'est surtout dans cet aspect social, presque anthropologue, que le livre se montre intéressant. Etat des lieux d'un pays en pleine expansion et surtout en pleine mutation, Chemins de poussière rouge apporte un éclairage bienvenu sur un pays toujours entouré d'obscurité propice à toutes les craintes.
Cependant, depuis 20 ans, les choses ont certainement dû changer si bien que ce témoignage, s'il reste intéressant, a peut-être perdu de sa pertinence et que, dès lors, son manque de souffle épique par certains endroits, se fait ressentir.
On appréciera néanmoins l'apport culturel qu'il constitue ainsi que certains passages très réussis et une écriture alliant poésie et noirceur très plaisante (même si par moment, la traduction - en deux temps: la version française est traduite de l'anglais, non pas du chinois - semble ne pas être à la hauteur).
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