Manifeste poétique

J’ai déjà lu de nombreux ouvrages de Iocasta, notamment des recueils de haikus ou de poèmes de formes japonaises, mais c’est la première fois que je lis un recueil de poèmes autobiographiques dans lequel elle raconte sa vie : son enfance et sa jeunesse en Roumanie, son émigration en Belgique et sa vision du monde actuel tel qu’elle le voit et combien cette perception l’inquiète. Son éditeur présente cet opus comme « un manifeste poétique, le portrait d’une femme, mère et citoyenne du mone ». Un opus composé de poèmes de formes diverses qui pourrait, si elle n’était pas aussi jeune, être considéré comme un texte testamentaire mais, à mon avis, il s’agit plutôt d’un bilan au midi de sa vie de femme et d’auteure.

Elle commence ce recueil par le long séjour au Maroc au cours duquel elle a voisiné avec une famille syrienne, « Début des années 80, / Deux familles : une roumaine et l’autre syrienne / Se partageaient l’énorme terrasse d’un immeuble / Du boulevard Mohamed V à Oujda au Maroc »… ». Première expérience de cohabitation positive. Au Maroc où au pays, le temps de l’enfance restera le temps de l’insouciance, de la joie de vivre au soleil et de jouer avec les amis de la rue ; « Le soleil, / Le soleil de ma petite enfance / Réchauffera toujours ce souvenir ». Il n’en n’est pas de même lors de son adolescence où elle prend conscience de la réalité du pouvoir autoritaire et de la sévérité de sa mère, une double peine pour une toute jeune fille qui voudrait vivre libre. « Parfaitement docile / Oh, tellement soumise ! / Rires et joies contenus, / Toute son adolescence / En vain se consume ». « … / le communisme et mes parents / double censure / double peine ». Devenue jeune fille, elle suit des études qui lui apportent une certaine liberté : quitter les parents et manifester contre le pouvoir. « … / toute révolte doit se faire / Et le compte sera toujours juste ». A cette époque, vient aussi le temps de l’amour, des amours, « Fautifs nous deux ? / Oh, que non ! / Il n’y a rien de plus puissant que l’amour,/ Nantis parmi les nantis ».

Les études terminées, l’auteure fait le choix de l’émigration, « Partie avec la brise du renouveau, / Libre, je le suis enfin ! / Un jeu d’enfant pourtant / Mère et père, vous le voyez, / Emmurées, je ne le suis pas ! ». Oubliés la révolution et les parents trop sévères, elle trouve la liberté à l’Ouest où elle découvre une autre culture, d’autres mœurs, un nouvel amour pour construire une famille solide et stable qui accueille des enfants. Mais, jamais elle n’oubliera le point de départ de son existence, de son histoire, « Ma langue, / Mes Roumains semblables, / Ma contrée natale, / Ma chère Roumanie ».

Sa vie stabilisée, la confiance en-elle retrouvée, elle se tourne vers le problèmes du monde, un monde en folie qui ne sait donner que dans la violence et la manipulation pour que ceux qui possèdent acquièrent encore plus. Elle lutte pour les femmes violentées, pour les peuples écrasées, torturés, massacrés, pour la planète détruite sans scrupule aucun… elle sait que c’est dans la poésie que le monde pourrait trouver une certaine quiétude, un réel équilibre entre les êtres et les peuples, une nouvelle joie de vivre ensemble…C’et dans un texte plein d’empathie et d’émotion qu’elle nous livre son histoire et sa vision du monde actuel, « Monde menacé et menaçant, / Entourés de dangers / Nous redécouvrons notre fragilité / … ». Ce texte c’est aussi comme un devoir de mémoire et de transmission de ce qui fut l’espoir et de ce qu’il devrait être encore pour les générations suivantes.

Iocasta a vécu, elle a vu, elle a compris, elle a écrit, elle raconte, elle transmet pour que les nouvelles générations ne commettent pas les mêmes erreurs : « Oubliée est la vieille année / Un nouvel an demain / Regardons en nous-mêmes / Si l’espoir y est toujours ».

Message de la modération : Editeur à compte très participatif

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  Cris et libertés [Texte imprimé], manifeste poétique Iocasta Huppen

  de Huppen, Iocasta
  l'Harmattan
  ISBN : 9791042809386 ; 14,00 € ; 31/07/2025 ; 140 p. Broché

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