Le bleu de la mer s'est enfui de Nour Cadour

Le bleu de la mer s'est enfui de Nour Cadour

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Débézed, le 28 novembre 2025 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 78 ans)
La note : 8 étoiles
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Lutter avec des mots

Née en Lozère en 1990, Nour est d’origine syrienne, sa mère a quitté son pays natal pour fuir la guerre civile et ses horreurs alors que son père était détenu dans les geôles les plus sévères du régime autoritaire en place à cette époque. Dans ce recueil composés de courts poèmes construits souvent de vers très courts, Nour raconte les violences et les horribles traitements endurés par son père et ce qu’elle a elle-même ressenti quand elle est allée dans son pays d’origine. Elle raconte avec ses mots sensuels, charnels, émouvants, terribles, …, tous les sévices endurés par son père et ses collègues de détention. Elle intitule ses poèmes avec un mot désignant une partie de son corps : les membres, les organes, les éléments fonctionnels, les éléments, même les plus infimes, constitutifs de son corps et ceux qui permettent de ressentir, voir, goûter, sentir, entendre, éprouver, comprendre, …, comme pour nous montrer qu’elle a été touchée dans toutes les fibres de son organisme par ce qu’elle sait de la vie de son père et des autres victimes du régime.

Elle dit aussi la vie de sa mère « Femme-gare sans destination » qui a dû prendre le chemin des migrants après avoir connu le viol: - « … / Alors je les ai sentis, nue, / un à un, / en moi, / mon visage tourné vers mon citronnier » - et affronter l’hostilité de trop nombreux autochtones des pays d’accueil, « La rage de vivre » pour sa fille et le mari qu’elle toujours espéré retrouver. Avant de partir, elle a résisté et même en exil elle résiste toujours car « Notre résistance à nous / c’étaient / la poésie / et l’artisanat, / les mots / et la beauté. // … ».

Nour est venue, elle, Syrie, pour voir ce pays déchiré entre des clans, des ethnies, des religions, des mouvements politiques, confessionnels, mafieux, …, tous manipulés par des puissances étrangères cherchant quelques profits directs ou indirects. Alors que « Cette terre est à nous, / à lui, /à toi, / à moi, / et à tous les autres » réunis dans un vaste œcuménisme de paix et de solidarité.

Pour compléter ce recueil, Nour raconte comment elle a écrit des lettres que son père n’a jamais écrites pour faire croire à sa mère qu’il vivait encore dans la souffrance certes mais pas dans une souffrance aussi cruelle que celle qu’il subissait réellement. La mère n’a jamais lu ces lettres mais, elle, Nour, a reçu des mains d’un anciens prisonnier les lettres que son père n’a jamais pu faire passer à sa mère. C’est peut-être la punition la plus cruelle qu’ils ont tous les trois endurées ?

Dans ces poèmes courts écrits en vers courts composés parfois d’un seul mot plus souvent de mots juxtaposés comme pour leur donner plus de force, plus de résonnance, plus d’impact, pour que son message de paix et de liberté soit entendu par tous, Nour affirme avec virulence sa liberté de penser : « Ils peuvent me voler tout mon corps, / mais ma tête, / ils ne l’auront jamais ». Ce texte m’a ému, ébranlé, bousculé, il m’a rappelé les textes d’une poétesse libanaise qui vit non loin de l frontière syrienne…

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