Le Capitaine et les rêves de Björn Larsson

Le Capitaine et les rêves de Björn Larsson
( Drommar viv havet)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Sibylline, le 2 décembre 2004 (Normandie, Inscrite le 31 mai 2004, 74 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 268ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
Visites : 4 934  (depuis Novembre 2007)

L'âge du capitaine

Ce roman nous conte l’histoire d’un Capitaine de cargo plutôt atypique et philosophe qui, d’escale en escale, rencontre des personnes dont il va, involontairement d’ailleurs, modifier la vie.
Björn Larsson ne décrit pas ses personnages. Il le dit sans détour, il trouve préférable que ses lecteurs les imaginent eux-mêmes. Il pense que chacun obtient ainsi de meilleurs résultats. C’est un point de vue que l’on peut admettre. Pour ma part, j’ai été parfois un peu perdue du fait que je n’arrivais pas à estimer une fourchette d’âge pour ce fameux capitaine, axe du roman. Il m’a semblé changer d’âge à différents moments du récit. A quoi cela a-t-il pu être dû ? Je l’ignore. Je n’ai pas eu de problèmes avec les autres personnages. Alors, sans doute qu’en effet, une précise description physique n’est pas nécessaire, mais quelques indications ne nuisent pas…
Ceci dit, j’ai bien aimé ce roman à l’architecture si stricte. Le récit s’y poursuit au fil d’un itinéraire balisé d’avance. Le Second du navire et quatre personnages parlent d’eux-mêmes et du Capitaine et on suit la progression de l’affaire au long de ces cinq récits toujours repris. Jusqu’à la fin où la rencontre de tous et la participation du Capitaine amènent un mélange des chapitres. Quand je dis que chacun parle, je m’exprime peut-être mal. Il ne s’agit pas de différents récits à la première personne mais de différents récits à la troisième personne, vus dans l’axe du personnage choisi.
C’est là un livre très prenant et qui se lit sans difficulté et avec intérêt, mais j’ai trouvé qu’il y avait comme une baisse de régime dans le dernier tiers, au moment où les personnages se retrouvent. Cela se passe sous le signe des « rencontres qui ne se font pas ». Ils m’y ont semblé trop soumis aux conventions et « coincés ». Faire des centaines de kilomètres pour se rencontrer et ne rien se dire d’un peu authentique « de peur d’être importun, de paraître mal élevé » !!! Autant, dans la vie, parfois, il faut savoir se taire, autant, à d’autres moments, être humain, c’est savoir parler, dire les choses, c’est avoir le courage de poser les questions, au risque même de prendre la réponse en pleine figure. La vie, c’est ça. L’ignorer, c’est perdre son temps. Il y a là quelques pages qui piétinent un peu (à mon avis).
Je déplorais donc la lâcheté des personnages et je commençais à désespérer de ce roman quand, tout de même, une fin plus nerveuse et même pleine de rebondissements a rattrapé le tout et m’a permis de refermer ce livre sur un sentiment de satisfaction.
Cet ouvrage est une ode à la vie, à la liberté et finalement à l’athéisme. Larsson y revient plusieurs fois de la façon la plus claire et conclut : « La seule chose qui comptait était que, selon toute apparence, il était possible de vivre même s’il n’y avait rien en quoi espérer dans l’au-delà et à peine sur cette terre _ possible, malgré tout, de mener de ce côté-ci de la tombe une vie qui ait un sens. ». On sent que ce message est une préoccupation majeure de l’auteur et le sens de ce livre.
Mme Legrand ou Jacob ne peuvent accepter l’idée que la vie passe sans laisser de traces, mais le Capitaine, vrai sage, n’y voit, lui, rien à redire.

« Le capitaine et les rêves » a obtenu le Prix Médicis étranger en 1999.

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Une merveille

10 étoiles

Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 14 novembre 2014

Encore un roman suédois de grande envergure, et un auteur de premier plan !
Le capitaine Marcel va donc donner ce coup de pouce, offrir cette « main secourable », nécessaires à l’accomplissement du destin des autres personnages : Rosa Moreno, la jeune serveuse espagnole, orpheline et dont le jeune frère est mort tragiquement noyé ; Madame Le Grand, veuve d’un armateur et qui se console en invitant tous les marins qui débarquent à Tréguier et la surnomment Maman ; Peter Simpson, le joaillier irlandais féru de Beauté, dont le père, membre de l’IRA, a été abattu, et Jacob Nielsen, expert informatique danois qui a passé sa vie à gagner de l’argent pour devenir rentier à cinquante ans, tous quatre enfermés dans leur rêve d’une autre vie. Quand ils rencontrent Marcel, ils s’aperçoivent qu’il existe « un autre monde et des gens tout à fait différents », auxquels il ne leur « était jamais arrivé de consacrer une pensée. Mais il en allait ainsi de tant de choses et de tant de gens, et même de la plupart, pouvait-on dire. »

Tous quatre, un beau jour, sans se connaître ni se concerter, décident de partir à la recherche de ce capitaine, dont l'aura les a frappés, car ils devinent qu’il va leur apporter quelque chose, ils sentent confusément que « seul parmi eux tous, il osait vivre comme s‘il ne disposait que d‘une seule vie. » Ils se retrouvent donc à Kinsale, en Irlande, où ils savent que le cargo de Marcel fait relâche de temps en temps. Et le capitaine finit effectivement par y revenir. Étonné de les trouver réunis sur le quai, il invite ces terriens à une croisière d’une semaine à bord de son cargo. Occasion pour chacun de comprendre qu’il faut cesser « de courir sans arrêt après tout un tas de choses qui n‘avaient aucune importance au regard de l‘humanité », et qu‘on peut s‘évader loin de « l‘automobile et la télévision [qui] avaient presque mis fin à toute forme de rapports sociaux véritables. »

« Ce qui compte, c'est ce qui continue à vivre […]. Pas ce que les gens pensent ou croient », disait souvent Yann, le mari de Mme Le Grand. Peter, Rosa; Jacob et "Maman" vont comprendre ça à l’issue de journées fertiles en échappées vers ce qui est insaisissable. Rosa trouvera un père pour son enfant, Peter détecte la femme qui a, comme lui, l’œil ému par la Beauté, Jacob et "Maman" découvriront ensemble qu’une rencontre concrète vaut bien tous les surfs sur le Net ou la mise en fiches de tous les marins entrevus. Quant à Marcel, tel le Comte de Monte Cristo à la fin du roman de Dumas, il quitte le cargo définitivement pour fuir seul sur un voilier, où il sera en tête à tête avec lui-même, à la recherche de ses propres rêves.

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  Rencontre Björn Larsonn 6 Sibylline 12 septembre 2016 @ 07:02

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