Holocauste de Charles Reznikoff

Holocauste de Charles Reznikoff
(Holocaust)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par JPGP, le 27 août 2023 (Inscrit le 10 décembre 2022, 77 ans)
La note : 10 étoiles
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Charles Reznikoff et l'enfer

Le trauma de la Shoah demeure évidement chez ceux qui l’ont vécu mais aussi chez ceux qui lui ont échappé. Ne l’ayant pas connu mais en fidélité à l’Histoire, aux étangs noirs et sombres des cercles de l’Enfer, Charles Reznikoff - né en 1894 à Brooklyn de parents russes émigrés aux Etats-Unis pour échapper aux pogroms et qui a grandi dans ce qu’il a appelé le ghetto juif de Brownsville - .à l’effet réel de simple représentation préfère son prolongement à travers une œuvre nocturne mais lumineuse.

Celui qui fonda avec George Oppen et Louis Zukofsky, le mouvement « objectiviste » a écrit Holocauste, écrit à partir des comptes-rendus des procès de Nuremberg et d’Eichmann. Reznikoff y développe une vision factuelle, froide et apparemment « neutres » des drames de l’Histoire. La cruauté, les injustices, l’arbitraire, l’inhumanité est implacable et reste paradoxalement un des témoignages les plus impityables même si à l’inverse d’Imre Kertész, Primo Levi ou Boris Pahor il a échappé aux camps.

Demeure la nécessité de la vigilance dans une approche aussi instinctive qu’expérimentale qui dépasse le simple travail de mémoire. L’œuvre est forte, sans concession, profonde mais dégagé de tout pathos. Dans le foisonnement des formes, surgit une commémoration de vies écrasées. Se crée une familiarité du visible et de l’invisible, de l’être avec le champ de forces illimitées des bourreaux. Tout est dit. Reznikoff laisse entendre le grondement des bottes, suggère la germination d’arbres nourris de la chair des victimes innocentes. Si bien qu’aucun lecteur n’est indemne. I

Il y a là vertiges et appels, pulsations, jaillissement pour témoigner de l’Histoire et de ses horreurs mais afin d’inventer autre chose que la mort. Le poète a dû apprendre à la désapprendre. Cela demande parfois une vie. Apprendre n’est pas prendre, c’est se défaire, rompre le joug des répétitions et des faux savoirs. L’acte créateur crée des branches nouvelles au réel dans la vibration des images aussi terribles qu’ouvertes. La croissance du monde a lieu où la mort fut donnée.

Jean-Paul Gavard-Perret

Message de la modération : §1 et 2 partiellement repris de https://editionsunes.fr/catalogue/…

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