Alabama 1963 de Ludovic Manchette, Christian Niemec

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Littérature => Policiers et thrillers

Critiqué par Jfp, le 27 novembre 2020 (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 7 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 010ème position).
Visites : 4 730 

polar noir et blanc

Une plongée dans le quotidien de Birmingham, Alabama, en cette année 1963 où, malgré le vote récent des lois fédérales ayant mis fin à la ségrégation, celle-ci demeure bel et bien ancrée dans les mentalités. Dans cet état du Sud, blancs et noirs ne se côtoient pas, et il est même très mal vu de se fréquenter, de quel côté que l’on soit. Pourtant, il est de tradition que les femmes noires soient embauchées comme domestiques dans les belles villas des blancs, à condition bien sûr qu’elles entrent et ressortent par la porte de service. Cette belle harmonie va être rompue lorsqu’Adela Cobb, noire, et Bud Larkin, blanc, vont se rencontrer à la faveur d’une mauvaise plaisanterie d’un des anciens collègues policiers de ce dernier. Bud, raciste et alcoolique invétéré, vit seul dans un local jamais rangé ni nettoyé, où il exerce tant bien que mal la profession de détective privé depuis qu’il a été exclu des rangs de la police à la suite d’une bavure assez grave. Adela lui rend visite après la publication d’une annonce pour une place de femme de ménage. Le premier moment de surprise passé, ces deux-là vont finir par s’entendre tant bien que mal et le viol et l’assassinat de plusieurs fillettes noires, qui n’intéresse guère la police locale, va être l’occasion de les voir coopérer et se mettre en chasse pour découvrir le ou les assassins. Un polar original, qui en dit long sur la façon dont les mentalités ont beaucoup de mal à évoluer, avec un final inattendu. Une réussite…

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On naît seul... on meurt seul !

10 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 25 septembre 2024

ALABAMA 1963 de Ludovic Manchette, Christian Niemec "le cherche midi 2020" 377,- pages

Sur un air de polar américain cet excellent texte, écrit à quatre mains, est bel et bien le fruit de deux auteurs s'exprimant en français.
Au début des années 1960, Birmingham est l'une des villes américaines les plus divisées sur le plan racial, à la fois d'un point de vue culturel et législatif. Les citoyens noirs sont confrontés à des disparités économiques et juridiques, ainsi qu'à une répression violente dès qu'il tentent d'attirer l'attention sur leurs problèmes.
En 1963, la ville de Birmingham, dans l’État d'Alabama, est « probablement la ville où la ségrégation est la plus rigoureuse de tous les États-Unis », selon les mots de Martin Luther King. Bien que sa population de presque 350 000 habitants soit à l'époque à 60 % blanche et 40 % noire, la ville ne compte aucun Noir parmi ses officiers de police, pompiers, vendeurs dans les grands magasins, conducteurs de bus, employés de banque ou caissiers. Les secrétaires noirs n'avaient pas le droit de travailler pour des professionnels blancs. Les emplois accessibles aux Noirs étaient limités aux travaux de force dans les aciéries de Birmingham, aux emplois de service domestique et d'entretien, ou au travail dans les quartiers noirs. N'oublions pas la mort de Kennedy qui secoua l'Amérique et, signe des temps, un porteur du cercueil présidentiel était noir.

C'est donc dans ce contexte que s'écrit ce douloureux roman, qui c'est vrai a des similitudes avec LA COULEUR DES SENTIMENTS.
Des petites filles noires disparaissent… on les retrouve plus tard, violées. Mais elles sont noires et la police (blanche) prend l'affaire très à la légère.
Le père d'une des petite disparue va donc trouver un détective privé blanc (stupeur). Le dit enquêteur chassé de la police pour une bavure, est une espèce de Robert Mitchum, alcoolique, désœuvré qui n'a gardé que deux amis de son ex brigade, le reste de l'équipe lui tournant le dos. Il y a bien la serveuse du bar où il a ses habitudes…. Elle lui fait presque oublier sa devise, qui avait toujours été : « On naît seul, on meurt seul. » Il la tenait de son paternel, qui ne lui avait pas appris grand-chose d’autre. « On naît seul, on meurt seul ».
Vient alors ADELA, une noire qui a lu une annonce de recherche d'une femme de ménage… et elle se présente chez Bud. Peu à peu ces deux-là deviendront complices au courroux du KKK de la population blanche et noire. car on ne se mélange pas.

Voilà donc un roman bien tapé, bien écrit et qui aborde les thèmes lourds avec décence. Avec de petites touches gaies et tendres comme la canadienne nouvellement arrivée dans ce pays de fous qui ne comprend rien aux codes de la ville et qui croit naïvement que le lavoir WHITE ONLY c'est pour laver le linge blanc et COLOURS ONLY pour les couleurs !

Mais tout n'est pas rose, même si le livre se termine dans la tristesse, une timide touche d'espoir se lit avec bonheur.
Un tout grand livre à qui je décerne 5 étoiles.
Bravo aux auteurs, aux lecteurs et à la Maison d’éditions LE CHERCHE MIDI… pour cette perle !

Le polar des années 60

10 étoiles

Critique de Jordanévie (, Inscrite le 27 septembre 2022, 49 ans) - 28 avril 2024

Livre qui m'a fait penser à "La couleur des sentiments "par son style empreint d'humour quand c'est Adela qui conduit l'histoire.
C'est un polar très bien écrit et qui se lit très facilement. La fin est perceptible mais cela ne gâche rien.
On ressent la ségrégation des années 1960.
L'assassinat de Kennedy, les lois raciales, le kkk et la musique forment un fond à ce roman.
Je n'ai pas lâché le roman, lu d'une traite.

Our Day Will Come !

7 étoiles

Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 10 septembre 2023


Birmingham (Alabama) en 1963.
Adela Cobb, veuve dynamique noire se bat au quotidien pour élever ses 3 enfants. Femme de ménage pour de riches familles blanches.
Bud Larkin est un ancien policier blanc, destitué pour avoir tué accidentellement un collègue un jour de beuverie.
Il est aujourd'hui détective privé, socialement effondré. Il vit dans un appartement jonché de détritus, se lève chaque matin avec la gueule de bois.
En l'espace de quelques semaines, de jeunes filles noires disparaissent et sont retrouvées mortes, violentées.
Les circonstances vont réunir Adela et Bud , improbable duo sur la piste du meurtrier.
1963 est une année charnière aux états-unis. La marche des droits civiques sur Washington, l'assassinat de JF Kennedy vont amorcer le changement.
Le Ku Klux Klan, le "White Only" et "Colored" vacillent mais continuent de montrer les dents et de prôner la ségrégation. les suprématistes blancs ne veulent rien lâcher.

Un roman encensé par la critique qui m'a terriblement déçu. Oui, le duo "Adela/Bud" est bien vu mais tellement caricatural. L'humour qui parsème les dialogues très moyen, l'enquête inintéressante et la résolution de l'affaire tombe comme un "cheveu sur la soupe".
Néanmoins l'ambiance de la période est agréable. Billie Holiday, les Ronettes et les Four Seasons créent une bande son dansante mais tout cela peine à réhausser le force du roman.
Une lecture agréable mais un thème qui aurait mérité un traitement de fond plus puissant .

le Sud du temps de la ségrégation

7 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 9 juin 2023

La ségrégation, en 1963, à Birmingham – Alabama, n’est pas un vain mot même si les choses, via divers actes législatifs, sont en train de bouger. On imagine mal à quel point ce fut violent, drastique et à vrai dire toujours un peu patent, insidieux, même de nos jours. Ludovic Manchette et Christian Niemec mettent les points sur les i sur ce sujet en nous contant cet «Alabama 1963, avec ses deux protagonistes principaux : le détective déchu, et blanc, Bud Larkin, et la femme de ménage digne et fière, mais noire, Adela Cobb.
C’est le meurtre de fillettes noires qui va mettre ces deux-là en contact, un contact à la base hautement improbable. Adela va jouer le rôle de « facilitatrice » dans les tentatives de contact de Bud Larkin auprès de la population noire (a priori contact impossible dans le contexte de ces années 60) et Bud Larkin va jouer le rôle de l’enquêteur, qui se soucie de ces meurtres et cherche à les résoudre, à la place de la police locale qui s’en soucie comme de sa première chemise.
Un peu dichotomique tout ça mais éclairant et agréable à lire d’un bon rythme. C’est vrai qu’on y retrouve largement l’atmosphère de La couleur des sentiments, de Kathryn Stockett, en plus dramatique mais, de la même manière que les chiens ne font pas des chats, le Sud des USA reste le Sud des USA et le racisme n’y était (est ?) pas un vain mot.

Elle monta dans le bus pour régler le trajet au chauffeur, avant de redescendre, pour remonter par la porte du fond, réservée aux Noirs. Comme Sid, elle aurait aimé s’assoir, surtout par cette chaleur, mais malheureusement toutes les places étaient prises. Enfin, pas toutes. Ce n’était pas les sièges libres qui manquaient à l’avant, Mais ceux-là étaient réservés aux Blancs, et les Noirs ne pouvaient s’y asseoir que lorsqu’il n’y avait aucun Blanc. Or il y en avait un ce soir, qui avait dû se perdre… Même si officiellement la loi avait changé sept ans plus tôt, les mœurs avaient la vie dure à Birmingham. La seule chose qui avait changé depuis la déségrégation des bus, c’est que la population blanche les avait désertés au profit des voitures particulières.

Un grain de sel dans la poivrière

9 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 6 février 2023

Le grain de sel, c’est Burt Larkin ; ancien policier devenu détective privé après avoir tué son collègue sous l’emprise de l’alcool.
La poivrière, c’est le quartier noir de Birmingham où habitent Adèle Cobb, ses trois enfants, et son beau-frère. C’est aussi le quartier où des petites filles sont enlevées et tuées.
La police ne s’intéresse pas vraiment à ces disparitions d’enfants noirs, même si elles se multiplient.
Les parents d’une fillette disparue se décident à aller voir Burt. Celui-ci , toujours aussi ivre, vit dans un appartement infect en compagnie de son chien et de son chat.
C’est sur une farce de ses anciens collègues qu’Adèle et Burt vont se rencontrer.
Mais qu’un blanc et une noire travaillent ensemble est très mal vu en Alabama en 1963. En particulier par le Ku Klux Klan.
Un roman passionnant tout au long du livre. L’enquête bien sûr mais aussi l’évolution des rapports entre les personnes, l’admirable Adèle qui accepte les règles sociales, tout en arrivant à se faire respecter, ainsi que Burt, « bougon alcoolique et raciste » prêt à enfreindre la ségrégation en vigueur pour ces enquêtes ignorées par la police et à montrer l’admiration qu’il éprouve pour sa "secrétaire".
Sans oublier l’humour pour aider à compenser les meurtres odieux.
Seul bémol pour moi, la façon de résoudre le mystère de ces disparitions et de retrouver le coupable.
Très bon livre

Vraiment excellent.

10 étoiles

Critique de Ayor (, Inscrit le 31 janvier 2005, 52 ans) - 20 novembre 2021

Incontestablement une de mes meilleures lectures de l'année, j'ai dévoré ce roman au sujet certes sensible, mais qui parfois m'a fait rire, allégeant du coup la noirceur des principales thématiques abordées.

Dynamique, sans aucune fausse note, des personnages hyper attachants et une histoire passionnante qui se dégomme en une journée devant un bon feu de cheminée... Que demander de plus ?

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