Vivre à présent de Nadine Gordimer

Vivre à présent de Nadine Gordimer
(No time like the present)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Littérature => Africaine

Critiqué par Tistou, le 26 mars 2019 (Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans)
La note : 7 étoiles
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Roman sud-africain post apartheid

« Depuis 1991, la promesse d’une vie meilleure pour tous tarde à se concrétiser et les inégalités sociales remplacent l’ancienne ségrégation sociale. Un roman passionnant sur ce que signifie être de nos jours sud-africain, avoir des racines et aider à façonner l’avenir de son pays. »

« Vivre à présent » est le dernier roman publié par Nadine Gordimer, qui a alors 89 ans, peu avant de mourir. Il présente la caractéristique de décrire la situation post apartheid, de 1994 aux années 2000, et se trouve de ce fait beaucoup plus confus (et a été certainement plus confus également à écrire) tant la situation en 2012, 21 ans après la fin de l’apartheid, est des plus compliquées et pas vraiment satisfaisante pour les vieux routiers de l’ANC (African National Congress) qui ont mené le combat dans les années sombres.
Il me semble aussi que la traduction (de David Fauquemberg) n’aide pas, manquant à mon goût singulièrement de fluidité (ou peut-être est-ce l’écriture elle-même à la base ?).
J’ai trouvé Nadine Gordimer moins à l’aise dans cette situation à décrire l’évolution récente de l’Afrique du Sud débarrassée de la ségrégation mais engluée dans moult contradictions que dans ses écrits de lutte contre l’apartheid, tel « Histoire de mon fils », par exemple, beaucoup plus dichotomiques bien évidemment. Par ailleurs elle devient singulièrement plus vieille quand elle écrit « Vivre au présent ». Quel est le facteur principal ou les facteurs qui font que « Vivre au présent » est moins facile à lire … ?
On ne peut lui reprocher en tout cas un quelconque parti-pris. Thabo Mbeki, Jacob Zuma, ne sont pas ménagés et leur statut d’anciens combattants ne les met pas à l’abri des critiques formulées sous la plume de Nadine Gordimer.
Steve, blanc d’extractions chrétienne et juive, est marié à Jabulile, noire zoulou. Leur situation en ces temps d’apartheid révolu n’est plus illégale mais ils se sont mariés, au Zwaziland, pendant l’apartheid, du temps où tous deux militaient pour l’ANC et le mariage interracial totalement inconcevable. Steve, ingénieur chimiste, fabriquant des bombes artisanales, et Jabulile ont tous deux été emprisonnés mais ils peuvent maintenant mener une vie au grand jour.
Steve est devenu assistant universitaire et Jabulile avocate. Ils ont tous deux conservé leur idéal mais sont confrontés (comme j’imagine Nadine Gordimer) à la reproduction des inégalités et des iniquités mais cette fois-ci par les leaders noirs issus de leur rang. Corruption, népotisme, incompétence d’où découlent misère toujours plus grande, immigration zambienne et des pays voisins durement réprimée, inégalités toujours plus béantes … Nadine Gordimer ne s’attache pas qu’à la situation d’ex combattants de l’ANC mais aussi à des couples homosexuels qui, eux aussi, sortent de la clandestinité. Elle en fait une chronique type « Chroniques de San Francisco » d’Armistead Maupin (mais en beaucoup plus littéraire pour dire vrai) qui décrit la désillusion généralisée qui est celle, n’en doutons pas, de Nadine Gordimer herself.
C’est prenant, éclairant mais ça reste une lecture difficile (pour les raisons évoquées en tête).

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