Numa Roumestan de Alphonse Daudet
Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Littérature => Romans historiques
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Le pittoresque sans le romanesque
Le roman retrace l’irrésistible ascension de Numa Roumestan, monté de son Midi pour conquérir une belle situation à Paris, qui le pousse à se lancer en politique dans le parti légitimiste, où il grimpera rapidement tous les échelons jusqu’au poste de ministre de l’Instruction, grâce à sa faconde souriante, sa facilité à promettre tout à tout le monde, et peut-être aussi son avantageux mariage avec la fille d’un riche conseiller à la cour d’appel de Paris. Sa carrière suivrait un cours paisible s’il n’avait imprudemment – une fois de plus- assuré de son appui un brave tambourinaire provençal qui, de confiance est monté à Paris avec sa sœur, mais qui, ne rencontrant pas le succès escompté, dépérit dans les bas-quartiers. La sœur ne se résigne pas à la situation et va troubler la vie du ministre, notamment en jouant sur ses infidélités conjugales.
Un sujet bien politique qu’Alphonse Daudet traite avec plus de pittoresque que de romanesque, sans la causticité, la distance ironique qu'un tel thème méritait. On imagine ce qu’en aurait fait un Flaubert ou un Mirbeau. Par contre, Daudet excelle dans l’art de brosser un tableau grandiose (« Une fête aux arènes », « Une soirée au ministère »,…), d’agencer une grande scène, (« l’audition de la jeune candidate », « la vengeance d’Audiberte »), de peindre un vaste paysage, de croquer un personnage ou le portraiturer en majesté, autant de pages qui semblent destinées à figurer directement dans une anthologie.
Par ailleurs, le roman est traversé par un clivage constant : le tempérament méridional, en opposition avec celui du nord. Jusqu’à la caricature, Alphonse Daudet, lui-même né dans le Midi, souligne les traits spécifique du méridional, pour s’en émerveiller et en présentant comme des qualités jusqu’aux faiblesses des personnages appartenant à ce type. Numa Roumestan, au patronyme emphatiquement empreint de latinité, voire de romanité, incarne la grandeur de la France du Sud et galvanise sa population, même et surtout quand elle est exilée à Paris.
« On en parlait légèrement, de ce second ménage du ministre dans un petit pied-à-terre très commode, tout près de la gare, où il pouvait se reposer des fatigues de la Chambre, libre des réceptions et des grands tralala. Bien sûr que l’exaltée madame Mèfre aurait poussé de beaux cris si pareille chose se fût passée dans son ménage ; seulement, pour Numa, c’était sympathique et naturel.
Il aimait le tendron : mais est-ce que tous nos rois ne couraient pas, et Charles X, et Henri IV, le vert-galant ? Ça tenait à son nez Bourbon, té, pardi !....
Et à cette légèreté, à ce ton de gouaillerie dont le Midi traite toutes les affaires amoureuses, se mêlait une haine de race, l’antipathie contre la femme du Nord, l’étrangère et la cuisine au beurre. »
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