Maisons habitées de Philippe Leuckx
Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie
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Ma terre, ma maison
Dans ce petit recueil fait de courts poèmes en vers ou en prose, Philippe Leuckx évoque avec une douce nostalgie sa terre natale celle qui lui a donné la vie, l’envie d’écrire et l’inspiration. « Ma poésie a puisé je crois à la terre natale la sève du silence des granges, le silence des sillons longés pour désherber, la patience des mains pour le pis des vaches, l’odeur des blés, des herbes, la solitude des yeux curieux. Ma poésie vient de cet enfant-là. »
Certes ce plat pays chanté par le Grand Jacques n’est pas le mien mais, comme Philippe, je porte toujours sous mes semelles la terre de ma campagne, celle où j’ai lu les premières lignes d’une très longue série. Et, l’homme de la terre que je suis resté au fond de mon âme, est profondément touché par l’amour que Philippe porte à sa terre, à sa ville, à sa maison natale. On sent que si lui a habité sa maison, elle, elle l’habite encore et l’habitera jusqu’à sa mort. Sa terre, comme sa ville, comme sa maison, est poème, elle a fait germer les mots qui aujourd’hui composent sa poésie. « C’est une ville ancienne où serpentent des ruelles, des impasses. Sans doute le passé y a-t-il niché des placettes, des belvédères, des parcs.
Elle existe en plein cœur
Elle est inépuisable
Ses réseaux sont poèmes. »
Et ce fameux hasard qui fait souvent trop bien les choses dans certaines œuvres littéraires, a réuni mes mots, même si mon talent est beaucoup plus modeste, avec ceux de Philippe au creux d’un monde virtuel où ils pourraient créer un univers chthonien nourri de nos nostalgies réciproques parfumées à l’odeur de nos fraîches campagnes. Je ne connaissais rien des origines de Philippe avant de lire ce recueil, je savais seulement qu’il a un grand talent littéraire, qu’il m’émeut souvent et, aujourd’hui, je sais pourquoi.
« On a le souvenir touché ».
Les éditions
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Maisons habitées
de Leuckx, Philippe
Bleu d'encre
ISBN : SANS000054628 ; 10/11/2018 ; 36 p. ; Broché
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"J'assume mes greniers d'enfance"
Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 7 mars 2019
" Si les voix se perdent dans les creux, je gravis leur silence."
Dans la première partie, "J’assume mes greniers" (quel belle formule !), c’est le domaine dévolu plus à l’air, à l’avenir, à l’envol tandis que, dans la seconde, intitulée La maison, les gravats, le poète rend davantage compte de l’effondrement, du retour à la terre et de l’attachement à hier.
"J’assume mes greniers d’enfance
Poussière frelons trésors
Par la lucarne vers les jardins"
Racines et ramure, dirait-on d’un arbre.
" Ma poésie je crois a puisé à la terre natale (…) ma poésie vient de cet enfant-là. "
Mais la pluie n’est jamais loin, elle est la part menaçante de l’air, la part du ciel qui, en s’égouttant, nous atteint, nous déplore.
" La pluie intruse est entrée jusqu’au vif de nos veines. Avec le sang imbu de notre pauvre passé. "
C’est donc sous le signe de la verticalité que s’inscrit cette nouvelle aventure du poète alors qu’il nous parle plus souvent d’espace, d’étendue déclinée en villes et en fleuves. Ou bien il resserre son point de vue, modifie sa manière. Tous le composants de l’habitation, fenêtres, grenier, murs sont (ré)animés sous sa plume pour révéler un nouveau pan d’intériorité.
Dans la seconde partie, la maison se fait tombe, enfonçant la terre natale dans la langue maternelle, remet au jour les sensations ensevelies, ranimant le souffle des êtres qui l’ont habitée et qui l’enchantent désormais. Avec, de même, la lumière pour faire briller les langueurs.
La maison, par le fait même, qu’elle protège, dissimule, est ce lieu où se déploie l’intime, où elle joue à plein, se découvre. Où tombent les masques, la chair du sentiment apparaît.
"Une maison qu’incendie tout regard
Elle est là à broyer le noir des combats
La pleine mesure des peines
Engrangées"
La poésie de Leuckx qu’on pourrait dire feutrée, chuchotée, ne ménage pas les ardeurs, les cris étouffés, les blessures à vif.
" Les enfants pelures d’orages sont griffés de partout ; à la lente venue des nuit, le cœur mêle à l’effroi / toutes nos couleurs."
Le baume voisine avec la blessure ; le souvenir est onguent et plaie. Le poème, ce couteau qui taille dans la langue, entame une part du poète. Si le miracle a lieu, si le poème apparaît, il n’est pas sans sacrifice chez son auteur : l’exercice de la poésie est à ce prix.
"Tu recueilleras la moindre trace
L’objet sauvé des joues d’un enfant au jouet
Le plus petit sang d’âme
Qui révèle au grand jour
Sa douce mesure de miracle."
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