Homo Deus, Une brève histoire de l'avenir de Yuval Noah Harari

Homo Deus, Une brève histoire de l'avenir de Yuval Noah Harari
(Homo deus a brief history of tomorrow)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Essais , Sciences humaines et exactes => Spiritualités

Critiqué par Saule, le 29 mars 2018 (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (27 303ème position).
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La fin de l'histoire ?

Dans son précédent ouvrage, "Sapiens - Une brève histoire de l'humanité" (un grand succès), l'auteur m'avait vraiment passionné en racontant comment le Sapiens était parvenu au sommet de la pyramide des espèces et à coloniser la terre grâce à la révolution cognitive : en acquérant la pensée et la capacité de créer des groupes humains soudés par une même "religion" le Sapiens avait obtenu un avantage décisif sur les autres espèces (et notamment notre cousin le Néanderthal).

Le nouveau livre débute sur le constat que les religions monothéistes sont "passées" (des gens qui étudient des vieux textes et appliquent des préceptes dépassés ne font pas le poids face aux ingénieur de la Silicon Valley !). L'époque du Dieu extérieur est révolue, depuis l'humanisme on sait que Dieu est une construction imaginaire humaine (c'est lui qui le dit !). La religion actuelle c'est l'humanisme. Dans l'humanisme, on croit au libre-arbitre, on croit que chaque homme est unique et libre, on croit à la conscience (à l'âme ?). Chacun sait ce qui est bon pour lui (pour autant qu'il accède à son moi profond). Le Bien c'est ce qui est bon pour moi, le Mal c'est de faire du tort à un autre.

Mais au 21ème siècle tout s'accélère : la science démontre que ce "Moi" est un mythe : l'homme n'est pas un mais plusieurs. Cette partie est choquante de prime abord mais passionnante, en particulier ses explications sur les deux "moi" : le moi narrateur et le moi expérimenteur. Il explique que notre "conscience" est un algorithme biologique. C'est du matérialisme pur et dur et parfois dérangeant à lire mais ça m'a fait vraiment penser. A partir du moment où notre conscience est un algorithme il montre bien que la science peut mieux faire que nous et que nous allons vite être dépassés. Pour prendre un exemple, un homme qui souffre de trouble dépressif aura bien plus de chance d'être secouru par la science qu'en allant à la recherche de son moi intime par je ne sais quelle voie ésotérique ! Vraiment il fait mouche.

Dans la dernière partie du livre il explique que la nouvelle religion qui s'ébauche est le "dataisme", cela à nouveau de manière assez convaincante. Les données sont partout, c'est l'heure du tout connecté, et facebook en sait plus sur moi que mon meilleur ami. Il est évident que les machines pourront déterminer bien mieux que notre soi-disant "Moi intérieur" ce qui est bon pour nous (quel travail prendre, quel conjoint, ...). Il est déjà avéré que des algorithmes couplés à des données peuvent prendre des bien meilleures décisions dans plein de domaines (l'octroi de prêts bancaires, etc.). Les conséquences sont dramatiques car le couple humanisme - libéralisme qui a si bien réussi avec le capitalisme est radicalement remis en cause : l'homme en tant que travailleur n'aura plus d'utilité puisque dans quasi tous les métiers les machines feront mieux (cela semble avéré, il donne de nombreux exemples). Le libre arbitre est un mythe, et on pourra bientôt rendre l'homme égal aux "Dieu" (immortalité, capacité de créer des intelligences, etc.), on se tournera volontiers vers la nouvelle religion, celle des datas, pour résoudre tout nos problèmes. C'est à ce moment que tout devient très effrayant...

En résumé un essai intéressant mais il y a des redites (par rapport au premier notamment). Le ton est toujours aussi plaisant mais, plus que dans le premier, on ne discerne pas la frontière entre ce qui est avéré et pas, on ne sait pas toujours si l'auteur parle en son nom. Il est beaucoup question de religion, mais jamais au sens métaphysique, c'est au sens de construction "imaginaire" humaine et l'auteur est parfois de parti pris.

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Des interrogations pertinentes mais un peu trop bavardes

6 étoiles

Critique de Koolasuchus (Laon, Inscrit le 10 décembre 2011, 35 ans) - 17 décembre 2023

Les critiques précédentes ayant plutôt bien résumé ce livre je vais donc me contenter d'aborder mon ressenti sur cet ouvrage dont, il faut bien l'avouer, j'ai eu du mal à comprendre au début de quoi il voulait vraiment parler. Il faut dire aussi que je n'ai pas lu le premier livre de l'auteur et je ne sais pas si cela permet de mieux appréhender celui-ci mais dans tout les cas je ne savais pas trop dans quoi j'allais m'engager. L'introduction m'a donc laissé quelque peu perplexe, l'auteur ayant tendance notamment à réutiliser le même schéma pour son argumentaire ce qui donne un peu l'impression de tourner en rond ou d'avoir une succession d'exemples aboutissant toujours à la même conclusion.

Au fur et à mesure de la lecture j'ai toutefois réussi à être un peu plus intéressé. Plusieurs idées ou théories développées dans ce livre sont en effet très crédibles et au vu de ce qu'il se passe aujourd'hui on peut vraiment se demander quel sera la place de l'être humains non plus dans les siècles mais dans les décennies à venir. Évidemment, sur certains point cela peut faire mal à son amour-propre car on déteste s’entendre dire que l'on n'est qu'un amas de cellules dont les émotions ne nous appartiennent pas vraiment mais ne sont que le résultat de procédés chimiques. On reste en effet très attaché à la notion de libre-arbitre et si l'on nous dit qu'en réalité il n'existe pas et que l'on devrait laisser des algorithmes décider à notre place ce qui est mieux pour nous je ne sais pas si beaucoup de gens seraient nombreux à l'accepter.

Bien sur, il ne s'agit dans l'ensemble que d'hypothèses mais elles restent assez crédibles car l'auteur sait très bien étayer ses arguments. Toutefois, au vu de la conclusion de son ouvrage je me suis quand même demandé si quatre cent pages étaient des plus nécessaire car j'ai trouvé que plusieurs passages étaient assez verbeux et manquaient un peu de concision. C'est bien de vouloir développer ses arguments mais parfois on avait l'impression que l'auteur utilisait la technique de l'étudiant qui n'a qu'une ou deux idées pour sa dissertation et qui brode bien plus qu'il n'en faut dessus.

Dans l'ensemble cela reste tout de même une lecture que j'ai trouvé très instructive permettant d'amener des questionnements très pertinents mais peut-être un peu trop longue pour ce qu'il y avait véritablement à dire.

Une spéculation un peu glaçante sur l'avenir de l'humanité

8 étoiles

Critique de Nav33 (, Inscrit le 17 octobre 2009, 76 ans) - 21 février 2019

L'hypothèse la plus extrême qui est développée dans cet essai est la suivante :
Nous , Homo Sapiens , ne serions finalement qu'une étape de l'évolution , et serions susceptibles d'évoluer à plus ou moins longue échéance : par la voie de manipulation génétique et/ou sous forme d'humains augmentés par un nombre croissant de prothèses artificielles en connexion avec l'univers numérique. Plus radicalement encore notre conscience ne serait qu'une illusion et comme d'ailleurs tous les êtres vivants nous ne serions que le résultat de réactions biochimiques et que le support d'algorithmes . Ces algorithmes pourraient continuer d'exister en dehors de nous dans le monde du silicium ,voire même se débarrasser de nous ou du moins nous soumettre dans l'avenir. C'est d'ailleurs le sort que nous homo sapiens avons déjà réservé aux autres êtres vivants qui nous ont précédés dans l'évolution
On ne sait quel crédit Yuval Noah Harari accorde personnellement à cette hypothèse , qu'il commence par étayer à travers plusieurs chapitres d'arguments , en semblant par moment parler en son nom propre comme une sorte de Dr Folamour . Ce serait bien sûr lui faire injure d'en rester à cette image.
Il est probable qu'avec une part de malice, il veut nous provoquer intellectuellement .
D'ailleurs à la fin du livre quelques lignes de l'auteur nous rassurent quand même sur le fait qu'il ne s'agit que d'une hypothèse. Dans un autre chapitre il rappelle aussi que chaque époque a décrit le fonctionnement du cerveau avec les analogies de son époque. Dans le passé l'analogie avec des canalisations et des valves avait servi de représentation et aujourd'hui ce sont les ordinateurs qui servent de modèle interprétatif. (L'auteur ne semble pas affirmer de manière plus systématique qu' il ne faut pas confondre la représentation schématique nécessaire à l'étude scientifique et la réalité ultime des choses que nous n'atteindrons jamais ; mais peut-être l'ai-je mal lu ou mal compris , ou me suis endormi sur une page)
Autre provocation surprenante quand le nazisme est qualifié « d'humanisme évolutionniste ». Une terminologie à replacer dans le contexte de son analyse historique de l'époque moderne qui débute au 15ème siècle , et replace l'homme au centre de l'univers dans un monde sans dieu . Cette évolution historique se manifeste désormais de manière prédominante en un « humanisme libéral »
Mais finalement , même si nous ne sommes pas que des algorithmes, nous devons quand même affronter un avenir sans objectif et sans boussole au milieu d'un déluge incontrôlable d'informations , de systèmes et d'objets connectés en réseaux et sans que personne ne soit en mesure de les contrôler. Il ne peut plus y avoir de pilote dans l'avion , car le monde est trop complexe et en évolution trop rapide. En combinaison avec les nanotechnologies et les biotechnologies, l'intelligence artificielle continuera à se développer en étant à la fois solution et problème …

Au final c'est évidemment un livre stimulant , éblouissant de culture tous azimuts et rempli d'humour souvent grinçant. Peut-être un peu moins intéressant que Sapiens une brève histoire de l'humanité. L'auteur a bien sûr l'excuse habituelle : les prédictions sont difficiles , surtout en ce qui concerne l'avenir

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