Zoartoïste et autres textes de Catherine Gil Alcala

Zoartoïste et autres textes de Catherine Gil Alcala

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Théâtre , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Mercure, le 18 décembre 2017 (Inscrit le 17 décembre 2017, 44 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 201ème position).
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Zoartoïste et autres textes de Catherine Gil Alcala

jeudi 9 novembre 2017, par Françoise Urban-Menninger, dans e-litterature.net.

Zoartoïste est une œuvre théâtrale totalement inclassable qui nous plonge d’emblée dans une fantasmagorie onirique doublée d’une loufoquerie débridée que l’artiste décline en quinze miroirs.

Catherine Gil Alcala possède ou plus exactement est possédée par une écriture à nulle autre pareille qui nous ouvre la flamboyance baroque de territoires insoupçonnés, voire archaïques ayant partie liée avec notre inconscient collectif et les archétypes tels que les concevait Carl Gustav Jung.

C’est ainsi que le titre même de cet opuscule "Zoartoïste", Catherine Gil Alcala "l’a entendu dans un rêve", affirme-t-elle dans une interview. " Zoartoïste" est un mot valise où l’on retrouve pêle-mêle : zoo, Zoroastre, Artaud, taoïste, artiste, autiste, théiste....On peut également ajouter "Zarathoustra" de Nietzsche qui renvoie à Zoroastre, le prophète de l’éternel retour.

On songe encore aux textes surréalistes d’Arrabal, notamment à son poème "Clitoris" ou à "Viva la muerte", on peut de même évoquer l’humour de Jarry, la folie d’Artaud mais aussi les tragédies antiques...

L’écriture de Catherine Gil Alcala est tout cela à la fois et bien plus encore ! Dans le miroir sept, les images abondent, débordant la page, faisant imploser le poème sous les mots :"Je tombe, hérissée dans le vide, les veines des branchages des arbres déracinés saignent sur l’horizon, des nuages vrombissant d’insectes s’échappent de l’écorce qui explose".

Délire, transe, poésie exorcisante ou exutoire théâtral, Catherine Gil Alcala revient à la source même du cri qui génère toutes les béances jusqu’à faire parler ou hurler les bouches d’ombre qui hantent nos nuits.

Un rythme incantatoire à la fois hallucinant et hypnotique confère à cet ouvrage un souffle quasi démiurgique. Tel Icare, l’auteure franchit les lignes de l’indicible pour se brûler les ailes au soleil d’une poésie oraculaire où les mots sont de chair et de sang.

Catherine Gil Alcala fait s’écrouler toutes les frontières mentales pour créer un art total qui mêle la poésie, le théâtre, la danse, la musique, la peinture... C’est une funambule qui telle"La jeune fille méduse" dans le miroir quatorze "glisse vers une autre rive de l’autre côté de la vie".

L’écriture déroutante mais toujours envoûtante de Catherine Gil Alcala n’a pas fini de nous charmer au sens vrai du terme, c’est dire son pouvoir enivrant et son emprise magique sur le lecteur !

Françoise Urban-Menninger

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Les mystères de Catherine

7 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 18 janvier 2021

Ce recueil se compose de deux textes : une première partie étiquetée par l’éditeur théâtre poésie et une seconde présentée comme des « Contes défaits en forme de liste de courses ». Je ne veux pas commenter les deux textes séparément car l’auteure a précisé, dans une interview, qu’elle écrit du théâtre et de la poésie car elle est venue au théâtre par la poésie et parce que les auteurs de théâtre dans l’antiquité étaient des poètes. Avant de lire cette interview, j’avais déjà noté sur un petit papier que ce texte évoque pour moi des cours d’histoire ancienne dans lesquels on nous a appris que la tragédie est née des mystères sanctifiés, en Grèce antique, à l’occasion de grandes fêtes religieuses, je pensais plus particulièrement aux Mystère d’Eleusis. Dans le théâtre de Catherine, il n’y pas vraiment de dialogue, il y a surtout de la poésie en prose composant comme des incantations, des déclamations, comme dans les mystères antiques avant qu’un soliste s’isole pour donner la réplique au chœur provoquant ainsi naissance de la tragédie. Ces textes, adressés à des divinités inconnues, religieuses ou païennes, évoquent la genèse de l’humanité, l’aventure mythologique, les légendes, les dieux, les terres-mères et les géants. « Le monde mythologique jaillit dans la plaie ouverte du traumatisme… »

Ces textes bien qu’évoquant l’antiquité, sont un véritable travail de recherche sur une nouvelle forme d’expression, j’ai pensé notamment à Philippe Jaffeux avec lequel j’ai évoqué ses travaux. Catherine semble, elle, chercher une nouvelle manière d’écrire et peut-être aussi de déclamer des pensées, des impressions, des sentiments pour exprimer comment elle ressent la nature humaine, pour dire ses réflexions sur le plus profond des racines de la conscience et de la pensée humaine. D’où provient tout ce que les hommes véhiculent en eux depuis qu’ils ont commencé leur longue mutation vers les êtres qu’ils sont aujourd’hui avec toutes leurs qualités mais surtout toutes les tares qu’ils n’ont jamais pu évacuer. Ses aïeux lui ont transmis un bagage culturel très composite, très mélangé, très imagé, peu livresque, très pratique, peu théorique. Elle a brassé tous ces matériaux dans un syncrétisme culturel pour composer un langage très personnel et inventer une théogonie répondant aux questions qu’elle se pose.

Pour composer Zoartoïste, elle a créé une série de personnages très improbables, imaginaires, évanescents, oniriques, … : Une voix de noyé dans un rêve, L’essaim d’une voix dissoute, L’onde radiophonique qui traverse l’univers, Génie infantile, Enfant lutine, La mort, …, et encore beaucoup d’autres. Une foule de personnages qui déclame des incantations s’inspirant de la mythologie. « Le soldat Achille, armé d’une arête de cétacé, attaque une licorne de mer qui lui transperce le talon… ». Elle puise dans les légendes anciennes, à la source du monde chthonien, du monde des forces telluriques : le serpent, le python, …, qui reviennent souvent dans ses textes pour annoncer, dans une vision apocalyptique, la destruction du monde par l’humanité irresponsable. Son monde déborde de la putréfaction des produits qu’il a surconsommé sans aucune modération, sans aucun discernement.

Des mystères de la Grèce antique aux grands problèmes qui menacent l’avenir de notre planète, Catherine Gil Alcala, dans un délire verbal fantasmagorique gorgé de mots qui résonnent entre eux, invente un autre monde, une autre culture, une langue propre à elle, des croyances personnelles, une façon pour elle d’affronter les turbulences qui s’annoncent. Je ne pourrais conclure sans évoquer le gros travail que Catherine a réalisé sur les assonances dont je ne propose que ce court exemple : « Conte de faits délictueux de délicieux crimes onctueux de croquemitaine ! ».

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