NOTES sur les NOMS de la NATURE de Philippe Annocque, Florence Lelièvre (Dessin)

NOTES sur les NOMS de la NATURE de Philippe Annocque, Florence Lelièvre (Dessin)

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Eric Eliès, le 27 novembre 2017 (Inscrit le 22 décembre 2011, 50 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (40 526ème position).
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Les apparences sont trompeuses !

Comment souvent avec Philippe Annocque, ce petit livre est un OLNI (objet littérairement non identifiable). A première vue, cette mince plaquette paraît être un recueil de courts poèmes, tels des haïkus disposés deux ou trois par pages, mais - presque en simple application du titre ! – il ressemble davantage à une sorte de compilation des notes de bas de pages d’un commentateur facétieux sur un savant ouvrage de biologie…

Digressant à petites touches sur la taxinomie des plantes et des animaux, dont il semble être un amateur éclairé, Philippe Annocque joue des images trompeuses suscitées par le nom scientifique ou d’usage pour susciter des réflexions amusées sur ce que sont ou ne sont pas les plantes et les animaux que nous croyons connaître.

La baie de genièvre / est en fait / un galbule / contrairement à la baie d’if / qui est plutôt / une arille / contrairement à la tomate / car elle, / c’est une baie.

Il ne faut pas se fier aux apparences : / la taupe marsupiale / ce n’est pas une taupe / car la taupe / n’est pas marsupiale.

De tous les insectes ailés / encore vivants de nos jours / le plus ancien est / l'éphémère.

Même si le ton du recueil est avant tout celui de la fantaisie savante, comme si un spécialiste prenait le temps d’une pause pour se divertir de ses austères travaux scientifiques, une certaine poésie se dégage du recueil à travers quelques réflexions sur le langage et sur le pouvoir des mots, qui ont la capacité de révéler la présence des choses ignorées en les faisant jaillir du quotidien :

Le nom donne à voir / ce qui nous échappait. / Depuis que je sais le nom / de l’accenteur mouchet / il y en a plein mon jardin.

Assumant le « je » qui est une des clefs de la poésie, le recueil se nourrit d’anecdotes vécues (notamment sur les champignons, dont Philippe Annocque est de toute évidence un spécialiste) et contient aussi quelques échos de l’enfance, quand les mots inconnus qu’on découvre au hasard d’une encyclopédie ou d’un dictionnaire suscitent l’émerveillement et, comme des formules magiques, tissent d’étranges liens entre la sonorité du mot et la réalité de la chose elle-même.

Quand j’étais petit / je disais "gorile" / sans mouiller l’ « l » / On me corrigeait. / Je n’étais pas convaincu. / Le gorille était viril. / Le gorille n’était pas fille.

« Le cydippe, / comme tous les cténaires, / est parfaitement adapté / à la vie pélagique. » J’ai lu cette phrase / quand j’étais enfant. / Je m’en souviens.

Sans chercher à approfondir toutes les nuances de ces réminiscences, comme Proust le fait dans « Nom de pays » en rêvant aux villes d’Italie ou au royaume des Cimmériens, Philippe Annocque évoque sa fascination pour les animaux disparus ou venus de contrées lointaines et même, avec un sourire amusé, rend justice à l’enfant mal compris par la maîtresse d’école :

« Trouvez-moi des mots / avec la syllabe "do" » / C’est il y a très longtemps, au cours / élémentaire. / Une main s’est levée, / qui ne ressemble pas encore / à la mienne. / - Dodo. / « D’accord ; mais venant de toi, / je suis surprise d’entendre / un mot aussi enfantin. » / Je ne savais pas / qu’on l’appelait aussi "dronte". / Alors je me suis tu.

Les textes sont accompagnés de dessins en noir et blanc, dont le trait épais confère une densité charnelle aux plantes et animaux, avec un remarquable pouvoir d’évocation dans la représentation du « phallus impudique », qui mérite bien son nom !

Au final, ce petit livre s'apparente à une boîte de friandises qui se dégustent très rapidement et laissent un petit goût de « pas assez », même si on peut prolonger le plaisir de lecture en se plongeant dans le dictionnaire (car il faut être un spécialiste pour maîtriser le vocabulaire employé par l'auteur !). Ce n'est pas tant un recueil de poèmes qu'un livre à picorer pour y trouver de quoi sourire des faux-semblants du langage. On est souvent proche du calembour savant... Pour être tout à fait franc, malgré le plaisir de lecture qu'il procure, ce recueil me semble un peu anecdotique par rapport aux œuvres plus ambitieuses de Philippe Annocque.

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De jolies pensées d'histoire naturelle

7 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 3 décembre 2017

Ces petites pensées sur le nom des plantes et animaux rappellent la découverte de l'histoire naturelle faite à l'âge d'enfant, portant sur des réalités plus complexes. Ces micro-fragments s'avèrent effectivement poétiques, mais n'éclairent pas toujours la lectrice et le lecteur sur les réalités évoqués plus que décrites, si bien que le dialogue à distance avec l'auteur ne demeure pas permanent. Aussi l'ouvrage, rafraichissant, reste-t-il un peu court.

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