Hamlet de William Shakespeare
( Hamlet)
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Théâtre , Littérature => Anglophone
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Le chef d'oeuvre de Shakespeare ?
Je ne vous ferai pas l'affront de résumer la pièce la plus célèbre du répertoire Shakespearien, la plus longue aussi, pour vous raconter plutôt quelques anecdotes sur sa création et son interprétation.
Les siècles ont passé mais cette pièce est certainement l'une des plus disséquées et des plus étudiées. Nombre de spécialistes ne s'accordant pas encore sur la nature du fantôme du roi par exemple...
L'origine d'Hamlet se perd dans les limbes de l'histoire du nord de l'Europe, pays celtes ou scandinaves, mais il est à peu près certain que Shakespeare a tiré l'essentiel de sa pièce d'un ouvrage écrit au XIIème siècle par Saxo Grammaticus (que je vous recommande d'ailleurs) qui se veut une histoire du Danemark et qui s'intitule La geste des Danois. L'un des chapitres est consacré au Prince de Jutland, Amlethus, qui simula la folie pour venger la mort de son père.
En ce qui concerne son interprétation, les nombreuses escarmouches en France furent bien souvent le résultat des erreurs de traduction. Je ne sais pas si on trouve encore aujourd'hui la traduction d'Hamlet due à Marcel Pagnol, mais dans une excellente préface, celui-ci révèle les erreurs de traduction qui firent de la pièce un momument d'absurdités au début du XXème siècle (et à la fin du XIXè aussi d'ailleurs). Les grands sujets de discussion portèrent sur son aspect physique et sa folie.
A titre d'exemple, voici quelques erreurs dûment relevées par M. Pagnol :
Lors du dialogue entre Hamlet et Ophélie, au troisième acte, les propos tenus par le prince sont relativement crus et obscènes. Les traducteurs s'empressèrent donc de gommer cet effrayant aspect mais il en résulta des phrases compliquées et ridicules, et pour tout dire...incompréhensibles.
Enfin, une erreur de traduction fut également à l'origine de discussions sans fin sur l'une des tirades les plus célèbres, et probablement d'une erreur de compréhension. Jugez plutôt : Au début de la pièce, après qu'Hamlet ait vu le fantôme de son père, il entame un monologue qui va expliquer toute sa conduite future. Le vers anglais était celui-ci : "While memory holds a seat, In this distracted globe !". La plupart des traducteurs crurent qu'il s'agissait du globe terrestre, et par conséquent, le vers français n'avait aucun sens. Marcel Pagnol proposa alors une autre solution. Et si par "globe" Hamlet voulait dire sa tête, son crâne ? Après avoir vu le fantôme, il sentait qu'il devenait fou... distracted globe. On peut donc se demander si le pauvre Hamlet a simulé la folie jusqu'au bout, ou bien s'il était plutôt la proie de crises nerveuses, et de folies passagères contre lesquelles il ne pouvait rien...
Bref, le mieux est encore de lire et de relire Hamlet, qui a toujours été une de mes pièces préférées, et que, personnellement, je considère comme le chef d'oeuvre du grand maître.
A noter également, que parmi toutes les adaptations cinématographiques, de Laurence Olivier à Kenneth Brannagh, aucune n'a trouvé grâce à mes yeux, hormis l'adaptation de la formidable pièce de Tom Stoppard "Rozencrantz et Guilderstein sont morts" interprétés par les excellents Tim Roth et Gary Oldman. Avis aux amateurs.
Les éditions
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Hamlet [Texte imprimé] William Shakespeare préface et traduction d'Yves Bonnefoy
de Shakespeare, William Bonnefoy, Yves (Autre)
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070370696 ; 5,00 € ; 24/11/1978 ; 402 p. ; Poche -
Hamlet [Texte imprimé] William Shakespeare traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats dossier et notes réalisés par Mériam Korichi lecture d'image par Alain Jaubert
de Shakespeare, William Jaubert, Alain (Collaborateur) Korichi, Mériam (Editeur scientifique) Déprats, Jean-Michel (Traducteur)
Gallimard / Folioplus classiques
ISBN : 9782070306794 ; 6,30 € ; 01/12/2005 ; 304 p. ; Broché -
Hamlet [Texte imprimé] William Shakespeare traduction de Jean-Michel Déprats,... édition présentée et annotée par Gisèle Venet,... texte établi par Henri Suhamy,...
de Shakespeare, William Suhamy, Henri (Editeur scientifique) Venet, Gisèle (Editeur scientifique) Déprats, Jean-Michel (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio. Théâtre.
ISBN : 9782070304301 ; 2,98 € ; 25/08/2008 ; 405 p. ; Broché -
Hamlet [Texte imprimé] Shakespeare texte original, trad., introd., notes, chronologie et bibliogr. par François Maguin
de Shakespeare, William Maguin, François (Editeur scientifique)
Flammarion / G.F..
ISBN : 9782080707628 ; 2,98 € ; 04/01/1999 ; 541 p. ; Poche -
Hamlet [Texte imprimé] William Shakespeare traduit de l'anglais par François-Victor Hugo
de Shakespeare, William Hugo, François-Victor (Traducteur)
J'ai lu / Librio (Paris).
ISBN : 9782290335291 ; 1,06 € ; 28/01/2004 ; 127 p. ; Poche -
Hamlet
de Shakespeare, William
Methuen Publishing Ltd
ISBN : 9780416179200 ; 3,27 € ; 29/04/1982 ; 550 p. ; Broché -
Hamlet
de Shakespeare, William Dujour, Florence (Commentaires) Hugo, François-Victor (Traducteur) Herbinet, Sylvie (Traducteur)
Hachette
ISBN : 9782011685353 ; EUR 4,50 ; 21/08/2002 ; 256 p. ; Poche -
Hamlet, Shakespeare
de Shakespeare, William Herbinet, Sylvie
Hachette
ISBN : 9782012814141 ; 2,95 € ; 04/03/2009 ; 223 p. ; Broché -
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Les critiques éclairs (18)
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Oui, un chef d'oeuvre
Critique de Thorpedo (, Inscrit le 22 octobre 2009, 45 ans) - 6 avril 2020
J'ai découvert avec un immense plaisir cette pièce qui relève franchement du génie.
Tout y est : la prose, bien sûr, mais aussi et surtout le rythme dans la narration. Enfin, Shakespeare a cette incroyable capacité à décrire précisément et avec peu de mots, à tenir son lecteur en haleine et surprendre, toujours. Tout sonne juste, dans cette œuvre finalement philosophique.
Hamlet fait sans aucun doute partie de ces livres que l'on relit.
à déguster sans retenue
Critique de Cédelor (Paris, Inscrit le 5 février 2010, 52 ans) - 30 novembre 2019
Pourquoi ? Je vais essayer de le justifier en peu de mots. On connaît la qualité des pièces de Shakespeare, intrigue, personnages, langue, dénouement, mais ici il s’est vraiment surpassé avec Hamlet. La trame de l’histoire est mythique, avec nombre de scènes fortes et marquantes, le fantôme du père de Hamlet, Hamlet philosophant devant un crâne, la folie d’Ophélie, etc, des personnages très forts, et le dénouement tragique, les retournements de situation, les mots célèbres comme l’archi-connu « to be or not to be », les tirades magnifiques, la poésie percutante, les interrogations métaphysiques profondes, et le théâtre dans le théâtre, trait de génie. N’en jetez plus, la coupe est pleine !
J’ai vibré, admiré, été étonné, et suis ressorti de là tout essoré et ébaubi ! En un mot, grandiose.
J’ai lu cette pièce dans une édition pour lycéens, qui donne des clés de lecture et offre des comparaisons avec d’autres œuvres littéraires ou picturales, comme la poésie de Rimbaud « Ophélie », la pièce de théâtre « Hernani » de Victor Hugo, le tableau « La nef des fous » de Jérôme Bosch, toujours très intéressants et vient en plus de la pièce d’Hamlet comme du sucre vanille sur une délicieux tarte aux mirabelles bien chaude !
Hamlet, à déguster sans retenue.
des répliques savoureuses
Critique de Deinos (, Inscrit le 14 février 2009, 62 ans) - 20 mai 2015
Funestes conséquences
Critique de Ngc111 (, Inscrit le 9 mai 2008, 38 ans) - 16 juillet 2014
Hamlet est une œuvre bien plus dense et foisonnante que Macbeth, plus volumineuse tout simplement. Mais on est loin de s'en plaindre car l'intrigue reste d'une simplicité et d'une clarté absolue, les personnages sont en nombre relativement restreint pour ne jamais diluer cette sensation et le rythme reste soutenu du début à la fin.
Et si la base de la trame est bien la vengeance, la multiplicité des thèmes abordés et des propos relatés fait que la pièce n'a jamais besoin de trouver un second souffle. Tout semble s'enchaîner naturellement.
Ainsi le personnage d'Ophélie servira à Shakespeare (entre autres choses) à parler d'amour et des questions gravitant autour comme la condition sociale (Polonius ne peut ainsi concevoir qu'un prince comme Hamlet puisse s'unir à sa fille simple enfant de conseiller), l'amour véritable (Hamlet concèdera à la jeune demoiselle qu'il ne l'aime pas réellement mais la trouvait belle physiquement) voire le danger du romantisme toujours un peu mensonger.
Laërte pourrait être quant à lui le personnage symbolisant les conséquences, forcément funestes, de l'action de vengeance et sera le déclencheur du final macabre.
Contrairement à Macbeth, Hamlet est beaucoup moins orienté vers le fantastique (hormis ce qui concerne le spectre) et vers la notion de Mal et de maléfique. Gertrude, la reine, si l'on peut critiquer la durée de son deuil et son manque d'honneur suite au choix rapide et "incestueux" (tel qu'il est qualifié dans le livre) de se lier au frère de son défunt mari, est pourtant épargnée par le Spectre, et de fait par Hamlet qui, sans lui pardonner, réduit son ressenti à une humiliation (par la pièce de théâtre) et à une confrontation verbale pleine d'aigreur et piques cyniques. Même Claudius, objet de la haine d'Hamlet, n'est pas fondamentalement présenté comme un méchant absolu, tyrannique même si bien sûr sa volonté de conservation de pouvoir le pousse au crime.
Ainsi Shakespeare mon tout son talent dans la nuance et dans la fragilité des apparences. Dans Macbeth on pouvait trouver le Mal absolu dans les personnages de Macbeth et sa femme... avant de démontrer que cela n'était pas tout fait exact si l'on rentrait plus profondément dans les faits. Entre la présentation des personnages sous un certain angle et la nature de leurs actes (avec les causes et conséquences morales qui en découlent) il y a une différence qui fait toute la puissance de l'écriture du dramaturge.
C'est ce que l'on retrouve donc dans Hamlet sous un angle différent avec des personnages finalement moins entourés d'une aura négative et pourtant froidement monstrueux dans leurs actes.
Le talent de l'auteur est indéniable pour construire sur une intrigue courte et simple, tout un développement autour de personnages dont on identifie très rapidement les caractéristiques, et qui pourtant ont tous des degrés de lecture psychologique plus élargis que prévu. La plume de Shakespeare est effarante de beauté, de style et d'efficacité et donne un relief incroyable à chaque intervention, souvent long monologue captivant. Loin de se résumer au bizarrement très célèbre "être ou ne pas être", ce drame en cinq actes est un trésor de phrasé qui enchante du début à la fin.
Complexe d'Oedipe?
Critique de Apor8613 (, Inscrit le 16 novembre 2012, 34 ans) - 1 décembre 2013
Cependant, je suis un peu déçu par le premier acte de la pièce car on nous donne l'assassinat du père d'Hamlet comme vérité admise, plusieurs témoins ayant vu son fantôme. J'aurais préféré que le doute persiste jusqu'à la fin de la pièce afin que le lecteur lui-même se pose des questions sur la folie du personnage.
On peut se demander si Hamlet ne développe pas une forme de complexe d'Oedipe, tout au long de la pièce le personnage montre une certaine obsession pour sa mère qui l'affectionne particulièrement. La trame de la pièce ne serait donc pas la vengeance de son père mais plutôt la sur-protection de sa mère, il refuse de voir sa mère avec un autre homme, il aurait pu inventer une histoire pour s'en débarrasser.
GLOBE - signification
Critique de Sadako (, Inscrite le 3 juillet 2013, 58 ans) - 3 juillet 2013
Et si par "globe" Shakespeare voulait dire le théâtre? N'était ce pas le nom du théâtre dans lequel il jouait?
En effet il joue beaucoup de "la mise en abîme" et tout cela n'est que "je" = "jeu"... Une merveille vraiment dans la forme et le fond!
Du grand théâtre
Critique de Vladivostok (, Inscrit le 14 mars 2013, 38 ans) - 19 mars 2013
Vous avez bien lu : éviter Shakespeare.
Mais, à la lecture d'Hamlet, on a envie de répondre à Bukowski qu'on ferait mieux de l'éviter lui plutôt que de se priver d'une littérature aussi exquise, aussi profonde.
Alors, certes, Shakespeare n'est pas Français, nous ne lisons donc pas dans la langue d'origine. Il est vrai que cela peut être préjudiciable.
Mais l'intérêt principal d'Hamlet réside dans l'intrigue. Aussi, les personnages attirent rapidement l'attention du lecteur.
Les répliques du prince Hamlet sont tout simplement grandioses. Se dégagent d'elles une profondeur.
Tout cela pour dire qu'il ne faut aucunement se priver d'un tel joyau.
Un chef-d'oeuvre !
Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 9 mars 2013
Cette tragédie est un chef-d'oeuvre. Les dialogues sont magnifiques, d'une grande poésie et d'une force que peu de dramaturges ont égalé. Hamlet est bouleversant par sa solitude et sa force. On le sent à la fois fort en jouant un rôle et en masquant ses états d'âme, et à la fois fragile parce qu'il est seul face à des forces qui le dépassent.
On a l'impression de connaître par coeur cette pièce car l'on connaît quelques citations, quelques tableaux ou mises en scène, mais rien ne remplace la lecture d'une telle merveille. On reconnaît aussi certains thèmes familiers de l'oeuvre shakespearienne : la folie, le théâtre du monde, la vengeance, les manipulations ...
Cette pièce est d'une richesse incroyable. Tout amoureux de la poésie et de son langage ne peut que tomber amoureux d'une telle tragédie.
Sublime.
Critique de Coward (, Inscrite le 3 juin 2012, 29 ans) - 3 juin 2012
J'avoue que lire du Shakespeare ne me tentait pas du tout avant de voir l'adaptation du metteur en scène David Bobée de la pièce d'Hamlet. C'était tellement sublime que j'ai lu la pièce quelques jours après. Je préfère la voir que la lire, mais j'ai vraiment adoré. J'ai rarement autant pleuré pour un livre...
Bref, il m'a donné envie de lire d'autres pièces de Shakespeare, et je compte bien me mettre bientôt à une nouvelle pièce de cet auteur !
Homme, t'es-tu caché dans la folie?
Critique de Tim (Limas, Inscrit le 3 août 2011, 30 ans) - 1 avril 2012
Bon, je me suis suffisamment insurgé contre les personnes qui n’ont eu de cesse de me rabâcher cette citation sans me parler une seule fois de ce que vit Hamlet, si si je vous jure ! (En plus j'aurais choisi celle-ci,moi, "il faut que je sois cruel, rien que pour être humain", mais bon...)
Alors, Hamlet, je peux enfin t’acclamer. Mais qu’il est dur de parler après l’avoir lu. J’ai tout d’abord été absorbé par le premier acte, fantôme des ténèbres, apparition divine, hallucination on ne saurait dire à la vue du roi mort, père d’Hamlet, qui nourrit dès le début l’intrigue à venir. Oui Hamlet va s’engouffrer dans un territoire dont on ne revient pas, la vengeance. Venger quelqu’un est toujours très cruel, maladroit et franchement stupide, mais venger quelque en mode Hamlet, c’est simplement sublime, c’est élever le crime à la hauteur de la vertu.
Le personnage d’Hamlet constitue en son sein, la puissance qu’il faut pour insuffler cette élévation. Il est un jeu de miroir, de facettes, de mensonges et de vérité. Il joue de nous comme il joue de lui car au fond Hamlet n’est qu’un acteur, il ne vise alors que l’instant esthétique, la grandiloquence des sentiments, il s’épanche comme il ne le devrait pas. Cet acteur joue son spectacle, sa vengeance ; et la misérable fin que vont connaître ses victimes ne tient que de leur rôle de spectateur. Ils sont impuissants devant cette force tragique.
A vrai dire, le rôle que tient justement chaque personnage est nettement visible lors de la représentation du spectacle qui permettra de pousser le frère du roi à avouer son crime. Mise en abyme donc. Merveille d’écriture, en effet, je m’explique. La mise en abyme permet à Shakespeare de métamorphoser les personnages de cette pièce en spectateur, ce que nous étions à la lecture de ce livre. Or Hamlet, lui se veut à l’écart de ce jeu, renforçant vivement cette impression qu’il échappe à toute sentence et contraste ainsi avec ses opposants. Hamlet transperce l’œuvre et c’est à ce moment qu’on comprend que les rapports de force ne basculeront jamais, pas même dans la mort puisque Hamlet est un acteur, il ne peut pas mourir. Hamlet a donc d’ores et déjà gagné et pourtant il reste tant à faire.
A la fin de la mise en scène du crime du défunt roi, les masques tombent, ceux de l’espion Polonius et ceux du malveillant Claudius. Polonius est tué, premier chapitre de la vengeance.
Mais intéressons nous particulièrement au charmant personnage d’Ophélia, douce fille scandaleusement naïve. Elle paye les frais de la douleur d’Hamlet et ne trouve refuge que dans la mort, une mort provoquée. Un suicide murmura-t-on, un suicide constatera-t-on, un accident fustigera-t-on. Il est d’ailleurs drôle de voir que la grâce d’Ophélia se retrouve dans les mots d’un fossoyeur indélicat, écrasant les crânes, maltraitant les cadavres. Mais c’est de la sorte qu’Ophélia trouve en fait chez le lecteur un certain apitoiement et de manière simultané un profond dégoût pour cette jeune fille. Elle est remplie de charmes mais elle est détestable. Ophélia trouve le rachat de sa vertu dans sa mort, cela est paradoxalement magnifique. Sa mort nettoie ses péchés, ceux d’être une sage petite fille, car elle meurt comme les grandes, une mort spectaculaire! Lancée dans l’eau, sa robe bouffante effleurant l’air dans un dernier mouvement, sifflant dans sa chute et percutant violemment les flots, lourds comme la pierre froide où elle reposera. Puis, l’eau s’échappe sous cette silhouette de candeur, les flots la broie, l’emmène mordre le fond de la rivière et goûter à la purulence des algues moisies, des insectes noyés, des pierres noires. Ophélia est morte et Ophélia est née. Hamlet, lui seul pouvait nourrir l’amour d’un tel personnage. Deuxième chapitre de la vengeance, Hamlet cède l’avantage.
Voici, l’une des scènes que j’affectionne le plus dans toute l’œuvre, la fin, évidemment ! Comment meurt un personnage digne de ce nom, je vais vous le dire, il entraîne avec lui son monde, autant physiquement que psychologiquement. La bataille oppose Laertes à Hamlet, Claudius parie et Gertrude regarde. Gertrude meurt tout d’abord, elle révèle le larcin. L’empoisonnement ainsi la pièce s’achèvera, puis vient le tour de Claudius, dans la foulée c’est Hamlet qui est blessé. Dans un élan de vie (non de mort) il blesse Claudius. Ce dernier meurt, victoire pour Hamlet qui meurt. Troisième chapitre de la vengeance, Hamlet sort vainqueur définitivement.
Oui c’est concis, c’est léger comme fin. C’est aussi très pesant et lourd, imaginez un instant la scène, la salle du château voit de quatre cadavres couler le sang. Le peuple à la vue de ce spectacle pleure son héros, Ophélia sera compagne de tombeau. Le peuple a perdu son roi, pas Claudius, ni Hamlet père, mais bien Hamlet, le jeune. Fortinbras dit ceci : « Enlevez les corps : un tel spectacle ne sied qu’au champ de bataille », eh bien, la vengeance n’est-elle pas une bataille ? Que les cadavres pourrissent alors. Pour nous Hamlet est encore vivant, mais pour eux il est mort, pour eux vous êtes fous et pour vous vous êtes vous.
J'entends encore ici, des siècles après son écriture, les cris de folie que chacun pousse à la lecture. Shakespeare tu es un génie, car je suis Hamlet et que nous le sommes tous. Quatrième chapitre de la vengeance, c'est à nous de gagner.
Son chef d'oeuvre
Critique de Marlène (Tours, Inscrite le 15 mars 2011, 47 ans) - 22 décembre 2011
« Avec l’amorce d’un mensonge, on pêche une carpe de vérité. »
Critique de Monde Vrai (Long Beach, Inscrit le 6 décembre 2011, - ans) - 7 décembre 2011
Une grande pièce de théâtre classique qu'on ne présente plus, mais qui toutefois est souvent un peu trop vite classée ou excessivement simplifiée: Cela est d'autant plus dommageable à mon avis parceque que cette tragédie oedipienne analysée 30000 fois, ainsi que les mythes grecs, a aussi grandement inspirée la plupart des oeuvres d'hier et d'aujourd'hui, et donc nous.
D'autre part on aura rarement fait aussi moderne que la fiction dans la fiction, et avouons que nous sommes nombreux une fois achevés le déroulement des actes, à nous demander si Hamlet feint la folie et le trouble ou est vraiment prince. Telle est la question.
Aimer, ou ne pas aimer
Critique de Nance (, Inscrite le 4 octobre 2007, - ans) - 23 avril 2010
"But break, my heart; for I must hold my tongue."
Critique de Stavroguine (Paris, Inscrit le 4 avril 2008, 40 ans) - 13 mars 2010
Plus encore que dans les phrases ci-dessus, toute la tragédie du Prince de Danemark se joue dans son incapacité à venger la mort infâme de son père que le spectre de celui-ci lui a révélée dans la fraîcheur de la nuit. Dès lors, la résolution d’Hamlet n’aura de limite que l’incapacité de son bras à frapper celui qui lui a volé son père, sa mère et son trône, et qui le mènera à une folie à peine feinte, puis à la mort pour qu’enfin, condamné, le prince du Danemark fasse face à ses responsabilités.
L’histoire est connue, mais comment rendre hommage au grand classique de Shakespeare, probablement la meilleure et la plus belle tragédie jamais écrite. Loin du classique tiraillement entre honneur et amour, seul Hamlet fait face à Hamlet dans sa quête de vengeance : les occasions pour l’accomplir sont innombrables, mais Hamlet préfère tirer des coups de semonce à répétition, d’éveiller la méfiance jusqu’à se condamner lui-même plutôt que d’agir. A l’inverse, Hamlet aurait aussi pu se contenter de ne rien faire, jugeant l’obstacle insurmontable : personne sinon lui ne connaît le secret qui lui a été révélé et nul n’attend d’action de sa part si ce n’est un père trépassé. Toute la tragédie d’Hamlet se joue donc avec et pour lui-même, ce qu’Hamlet s’obstine à nier, préférant se voir en jouet d’un destin qu’il ne maîtrise pas et qui conduira les siens, lui-même, et jusqu’au royaume de son père dans les abîmes.
Le thème de ce jeune homme face à lui-même et des responsabilités trop lourdes, devant à la fois tuer le père et l’honorer est fort, profond et éminemment moderne. Il est servi par une écriture qui l’égale en tout et surtout en beauté. Les vers en vieil anglais de la version originale sont magnifiques, mais pourront confronter les plus chevronnés anglophones à des difficultés aussi insurmontables que la quête du prince, aussi, il est bon d’avoir une bonne traduction sous la main. Mais quelle puissance dans l’écriture du dramaturge anglais ! Certaines des sentences de la pièce comptent parmi les plus célèbres de la littérature moderne : « être ou ne pas être », « il y a quelque chose de pourri au royaume de Danemark », elles sont innombrables et presque noyées dans les tirades et d’autres morceaux de littérature tous plus excellents les uns que les autres auxquels se mêlent jeux de mots, réplique cinglantes, humour et sens de la répartie. Shakespeare joue admirablement de la folie réelle et feinte de Hamlet pour lui conférer une liberté absolue dans ses propos et une insolence réjouissante.
Hamlet est plus qu’un classique : c’est un chef-d’œuvre à lire et à relire régulièrement, à annoter, à apprendre même et à citer. C’est un livre à toujours avoir à porter de main pour, un soir, l’ouvrir au hasard et y lire une page ou une tirade. Où qu’elle se trouve, on y trouvera l’émerveillement et tout ce que se doit d’être la littérature. Comme son père, Hamlet se meurt et devient immortel.
slings and arrows
Critique de Magicite (Sud-Est, Inscrit le 4 janvier 2006, 46 ans) - 4 janvier 2006
Fan
Critique de Ju-kun (, Inscrit le 9 janvier 2005, 36 ans) - 9 janvier 2005
Le film de Laurence Olivier est admirable!
Critique de Heathcliff (, Inscrit le 30 septembre 2004, 43 ans) - 2 octobre 2004
Certes, il y a les coupures..mais il n'a jamais prétendu livrer un film "copie conforme au texte"..il l'a qualifié d'"essai d'Hamlet".. Quant à son interprétation du héros, c'est bien simple: PERSONNE ne peut atteindre son génie.
Surprise!
Critique de FightingIntellectual (Montréal, Inscrit le 12 mars 2004, 42 ans) - 20 juillet 2004
J'ai été surpris....j'ai entendu parler de Hamlet nombre de fois sans jamais avoir pu le lire....maintenant que c'est chose faite, j'ai Shakespeare encore en plus haute estime que je ne l'avais déjà. Hamlet est, selon moi un exemple typique de la névrose vécue au masculin, sans censure d'une violence collatérale. Une oeuvre sensible et qui expose les dessous des pensées de l'homme.
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