Petit piment de Alain Mabanckou

Petit piment de Alain Mabanckou

Catégorie(s) : Littérature => Africaine , Littérature => Francophone

Critiqué par CC.RIDER, le 14 septembre 2015 (Inscrit le 31 octobre 2005, 65 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 864ème position).
Visites : 5 593 

Orphelin au Congo

Non loin de Pointe Noire (Congo), Moïse, jeune orphelin au nom imprononçable et affublé du surnom de « Petit Piment », a été recueilli à la naissance dans un orphelinat dirigé par l'autoritaire et très corrompu Dieudonné Ngoulmoumako qui a engagé ses nombreux cousins pour faire office de « surveillants de couloir ». Avec son unique ami, Bonaventure Kokolo, fils naturel et abandonné d'un fonctionnaire du service des eaux, ses rares plaisirs sont les leçons de catéchisme atypique pour ne pas dire loufoque de l'aumônier Papa Moupelo. Mais un jour, celui-ci disparaît mystérieusement alors que la « révolution socialiste » commence à bouleverser le pays. Une section de jeunes pionniers de la Révolution est même créée dans l'orphelinat...
« Petit Piment » est à la fois un roman social et un témoignage sur la vie des orphelins du Congo, enfants abandonnés car souvent fruits d'amours illicites qui sont élevés durement, « à la chicote » et qui, quelquefois, deviennent enfants des rues avant de terminer leur vie comme SDF ou comme handicapés mentaux. La composition du livre est assez particulière. Il démarre sur un ton détaché, truculent et même picaresque et finit par un drame qui semble aussi surprenant qu'inattendu. Le lecteur qui s'est pris d'empathie et de compassion pour le petit héros se retrouve obligé de reconsidérer son jugement, déçu qu'il est de l'absence de happy end. Mais cette petite ombre au tableau mise à part, il en reste un ouvrage délicieux qui se dévore plus qu'il ne se lit tant la plume d'Alain Mabanckou est légère et élégante et tant ses personnages sont originaux, attachants et pleins d'humanité. Quelle merveilleuse plongée sans concession dans la réalité du Congo ! Avec une grande lucidité et une belle honnêteté, l'auteur ne craint pas d'énoncer des vérités qui dérangent comme le fait que l'esclavage était présent en terre africaine bien avant l'arrivée des Blancs ou que toute la politique actuelle du pays est conditionnée par les pesanteurs tribales et ethniques. Un roman passionnant à ne pas manquer.

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Tranches de vie

8 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 24 octobre 2015

En première page , Alain Mabanckou présente ainsi son roman : « En hommage à ces errants de la Côte sauvage, qui , pendant mon séjour à Pointe Noire, me racontèrent quelques tranches de leur vie, et surtout à « Petit Piment » qui tenant à être un personnage de fiction parce qu’il en avait assez d’en être un dans la vie réelle »

Petit Piment devient alors personnage principal et narrateur, interrompant régulièrement le récit de l’aventure de sa vie pour relater le parcours de personnages secondaires, tout aussi pittoresques les uns que les autres, ou pour leur donner la parole, leur laissant alors le soin de se raconter.
Ce procédé de l’histoire dans l’histoire ne rompt en aucun cas l’intérêt de la lecture, les personnages s’intégrant parfaitement dans le récit. Ces orphelins, héros cabossés dès leur plus jeune âge, éclopés de la vie, qui errent, en quête d’un peu de répit et de douceur forment une fresque picaresque. Leurs misères, leurs tribulations sont racontées avec légèreté, sans pathos, souvent avec tendresse, toujours avec humour .

Mabanckou, et c’est là l’autre intérêt du roman, a pris soin de placer leurs infortunes dans le contexte politique du Congo , de ses conflits ethniques, de sa rivalité avec le Zaïre, et de son passage au socialisme . Cela vaut au lecteur dans la première moitié de l’ouvrage, des passages savoureux où l’auteur trace des portraits sans concession des représentants du PCT , Parti Congolais du Travail, en particulier du directeur de l’orphelinat, personnage imbu de son rôle, burlesque et ridicule dans ses tentatives de formater les esprits des orphelins, de les « conscientiser » par des discours ampoulés truffés des grands mots clés de la Révolution.

Une lecture agréable , où la saveur du discours imagé des personnages, révélateur de leur culture, de leurs traditions animistes, se mêle à la froide et conventionnelle rhétorique des nouveaux maîtres politiques .

Un savoureux voyage au Congo .

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