Un long voyage en terres inconnues.

Si ce n'est une indécision sur son orientation, rien ne prédisposait ce fils d'une famille bourgeoise de la rue d'Auteuil (16è arr. de Paris) a entreprendre ce lointain périple qui scellera d'ailleurs toute sa carrière. Plus attiré par la littérature que par la chimie à laquelle sa famille le destinait, l'ancien élève du lycée Janson de Sailly entre après divers "petits boulots" à la revue DOCUMENTS récemment créée par Georges Bataille et Georges Henri Rivière. C'est là que M. Leiris rencontre Marcel GRIAULE, l'ethnologue qui changera sa vie. En effet, M. Griaule embarque M. Leiris dans l'expédition DAKAR - DJIBOUTI, mission ethnographique et politico-économique (l'Etat Français est le commanditaire) afin de contrer l'influence grandissante de la Grande Bretagne dans la région. La traversée du continent d'ouest en est (du Sénégal à l'Ethiopie)dure de 1931 à 1933 et se compose d'une équipe de linguiste, ethnologue, musicologue, peintre, naturaliste et cinéaste, plus Leiris agissant comme "chargé de missions" et tenancier du carnet de route. C'est ce carnet de route publié sous le titre de l'Afrique fantôme. Sauf que cette publication rédigée au jour le jour et c'est tout son intérêt, s'avère très vite être un journal intime. Car si le récit quotidien rend compte des conditions de travail de l'équipe, M. Leiris y inclus pour une large part ses sentiments, ses interrogations tant sur lui-même que sur la pratique de l'ethnologie. L'Afrique Fantôme c'est la chronique d'une vie chamboulée par des terres et des pratiques inconnues bien éloignées de la vie orchestrée et rangée du jeune homme. Il l'évoque sans détours, franchement, portant un regard critique sur son éducation et sa sexualité. Parfois ennuyeux, il ne se passe rien, le voyage est monotone, souvent introspectif, on ressent les six années de psychanalyse de l'auteur, le récit ne manque pas d'intérêt sur les découvertes ethnologiques bien que l'écrivain doute souvent ouvertement de la sincérité des populations pour révéler leurs rites et pratiques. Le futur ethnologue consacre un long passage sur son étude de la possession chez les AMHARA et le culte des ZAR. Voici donc un regard personnel , humainement riche sur un voyage initiatique qui rapportera des milliers d'objets, de photos et de fiches et près de deux kilomètres de film. L'ouvrage plutôt imposant (plus de 600 pages) s'apprécie en lecture fragmentée plus que dans la continuité. Grâce à lui nous connaissons mieux un homme, l'auteur, et les hommes africains et coloniaux.

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  L'Afrique fantôme

  de Leiris, Michel
  Gallimard
  ISBN : 9782070711888 ; 18,90 € ; 01/01/1988 ; 655 p. ; Broché

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