Amour perdu de William Cliff

Amour perdu de William Cliff

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Débézed, le 5 mai 2015 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 201ème position).
Visites : 3 910 

Nostalgie sensuelle

Un homme plus très jeune, presque vieux, ayant aimé, aimant encore, les hommes, les hommes jeunes, les garçons juste pubères, évoque ses émois, ses attirances, ses désirs, ses étreintes, les émotions qu’il a eues tout au long du voyage que fut sa vie entre la Belgique, la France, les Amérique du nord et du sud et ailleurs encore, en des poésies voluptueuses, jamais vulgaires, toujours joliment rythmées.

« et aujourd’hui hanté par ce souvenir j’ai
Tenté de le rimer pour en faire un poème ».

Ses amours appartiennent à un autre temps, elles sont passées, mais elles agitent toujours la mémoire et les hormones du vieil homme, nostalgique sans vraiment jamais regretter.

« C’est bête de s’aimer et de tant se comprendre
en sachant bien pourtant qu’il faudra se déprendre ».

Il se souvient encore des amours passées, des amours fugaces, des amours désirées et non obtenues, des amours entrevues, échappées, des étreintes passagères, des étreintes virtuelles, de toutes ses situations qui lui ont fait monter la volupté en tête et l’ont toujours obligé à partir, à aller voir plus loin parce qu’on ne peut pas tutoyer l’inaccessible.

« Je dus m’éloigner parce que la vie est telle
qu’on ne peut pas toucher aux êtres de lumière ».

Conscient d’avoir caressé les anges, le vieil homme se penche sur son passé pour s’interroger sur ses moments de glorieuse faiblesse.

« Je suis un faible qui s’adonne à la misère
au lieu d’avoir un ange à aimer comme un frère, »

Conscient qu’il n’est plus temps pour lui de songer à une autre vie.

« « N’est-il déjà pas trop tard » se dit-il
« déjà trop tard pour refaire sa vie ? » »

Conscient qu’il devrait privilégier l’amour sincère et désintéressé, meilleur ami contre la solitude souvent compagne complice de la vieillesse, aux étreintes passagères et fougueuses des jeunes gens qu’il a souvent courtisés.

« Mais ce que je préférerais par-dessus tout,
c’est ta simple présence dont les dieux jaloux
me priveront toujours d’avoir la jouissance ».

Un magnifique recueil de poésie d’un érotisme raffiné, d’une sensualité exacerbée, une ode à la beauté des corps, à la délicatesse des sentiments et des sensations, un texte charnel, d’une chair délicate et suave, des vers beaux comme l’amour d’un éphèbe.

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Des poèmes comme des instantanés d'êtres désirés

8 étoiles

Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 22 mars 2023

Entrer dans un recueil de poèmes de William Cliff, c'est accepter d'errer avec lui de ville en ville, de pays en pays, de rencontrer des hommes pour des relations éphémères. Ses poèmes semblent des notes de voyage, des impressions sur une expérience qui l'a marquée à la façon d'un journal intime poétique. La structure du recueil ne semble pas répondre à une structure particulière. Le lecteur constate qu'il rencontre beaucoup d'individus, mais le poète regrette parfois de ne pas avoir pu développer davantage la rencontre. Malgré la quantité importante d'individus évoqués dans ce recueil, la solitude est présente. Le poète semble se réaliser en accumulant les conquêtes et en voyageant sans cesse comme s'il n'avait pas de port de d'attache.

Les poèmes de William Cliff sont faciles à appréhender. Ils ne présentent pas de difficultés particulières pour la compréhension. Il y a souvent ce ton de la confidence dans ses poèmes comme si le poète nous racontait directement ses expériences sans qu'il y ait une surcharge d'effets stylistiques. Les textes sont souvent à la fois sensuels et crus. Il met à nu les hommes dans tous les sens du terme et explore de nombreuses fantaisies sexuelles comme il découvre de nouvelles contrées. Il semble même parfois amusé par les désirs de certains. Sa franchise est touchante parfois tant le poète se révèle désinhibé.

J'imagine que certains de ses textes peuvent déranger par leur côté direct. Certaines allusions surgissent d'un seul coup dans ses poèmes sans crier gare.

Ton authenticité

"Toute la nuit j'ai rêvé de tes yeux immenses
dont je pensais saisir l'essence dans ton corps
( souvent on veut avoir de l'autre la substance
en ravissant sa chair comme son seul trésor ),

toute la nuit j'ai vu ta substance idéale
m'être livrée par la conquête de ta peau
comme si en buvant ta force séminale
je prendrais la lueur de ton regard si beau.

Or je voyais aussi cette lascivité
ne jamais arriver à ta fierté profonde
et que malgré le plaisir qu'elle avait goûté,
elle était toujours hantée par un autre monde

c'est-à-dire la lueur émanée du regard
et qui était répandue dans ta contenance
alors ne dussé-je pas chercher à avoir
par une autre expérience cette chose étrange ;

Mais quelle expérience faut-il que je fasse
pour avoir cette grâce qui ne vit qu'en toi
et qu'étant éloigné des charmes de ta face
je la possède même si tu n'es pas là ?

Je regrette beaucoup de n'être pas resté
à Barcelone pour faire ta connaissance
et ainsi obtenir cette authenticité
dont désormais toujours je pleurerai l'absence."

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