Oeuvres poétiques de Gilbert Lely

Oeuvres poétiques de Gilbert Lely

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie , Littérature => Francophone

Critiqué par Eric Eliès, le 9 février 2015 (Inscrit le 22 décembre 2011, 49 ans)
La note : 10 étoiles
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L'oeuvre incandescente d'un immense poète du XXème siècle

S’il me fallait, parmi la foule des poètes du XXème siècle injustement méconnus, proposer un nom pour définir le poète maudit de ce siècle, je choisirai sans hésiter celui de Gilbert Lély, absent de quasi toutes les anthologies (sauf celle de Bernard Delvaille) mais dont l’œuvre poétique est d’une densité sans égale. Jamais avant lui, à l’exception de Sade (dont Lély fut d’ailleurs le brillant et passionné biographe) et peut-être également de Pierre Louÿs, la langue française n’a porté une telle volonté de scandale avec une aussi grande pureté formelle. Mais là où Sade se veut philosophe et disserte, de manière souvent bancale, sur les fondements naturels de sa théorie libertaire (selon laquelle le plus fort a le droit de jouir sans entrave et peut donc à sa guise disposer des plus faibles), Lély ne se veut que poète, soucieux de sceller dans le texte les plus subtiles nuances de la passion amoureuse dont il dévoile toute l’amplitude, avec une maîtrise absolue de la langue.

La poésie de Gilbert Lély, au-delà de son formalisme et de sa rigueur, se nourrit à la fois d'onirisme et d’instants vécus avec l'ambition de «rendre assimilables les éléments nutritifs de la réalité ». S'appuyant sur la précision de la langue classique, qu'il maîtrise parfaitement, et sur la force fantasmatique des images surréalistes, cette poésie repose sur une haute exigence de vérité et de sincérité qui a fortement marqué ses lecteurs, dont Yves Bonnefoy qui a souligné à plusieurs reprises l’importance de cette œuvre dont la lecture fut pour lui une révélation.

Au-delà des moments intensément vécus dont il cherche à ressusciter la présence disparue, Gilbert Lély, avec un grand souci du détail vrai, puise dans l’Histoire (principalement la période révolutionnaire contemporaine de Sade) et les grands mythes (notamment grecs, même si ce recueil est surtout riche d’une traduction versifiée de La folie Tristan dans la version du manuscrit d’Oxford, où la liberté de Lély se montre soucieuse de respecter le texte et son époque) l’essence de drames éternels, mêlant inextricablement l’amour, la violence et la mort (le viol est un thème récurrent), qu’il parvient à renouveler en créant une tension sexuelle d’une force inouïe. La sexualité omniprésente, parfois de manière très explicite (comme dans le poème L’épouse infidèle), a souvent une dimension métaphysique ou cosmique (comme ci-dessous dans les deux vers qui achèvent "La sertisseuse du cri"), comme si elle était un levier capable de faire basculer l’univers en éveillant les forces primitives contre lesquelles la religion et la civilisation moderne ont dressé des remparts.

O luxe de mon sperme dans la nuit de tes cuisses !
Là-haut, la semence homologue de la Voie Lacté


Précédé d’un admirable avant-dire de l’auteur, que je recopie ci-dessous in extenso :

Un homme, conscient de l’exiguïté de son aire, mais jaloux de laisser une trace des objets de son désir, a écrit ces pages maniaques, comme un qui gravait des devises sur les parapets fluviaux.
Hors de la monotone affluence poétique, dans un langage non daté, il n’a voulu que rendre compte, seulement attentif à la netteté de sa voix.
Non, je ne vous passerai pas sous silence, filles de la dignité du hasard, justifications adorables, ô seules preuves de la vie !
Voici le nouveau Troïlus, les nuits de Vaugirard, les démons, les sylphides, voici le songe de la Coste, nuptial amandier en fleur.
Vêtir les ossements dispersés de l’amour.

cette édition est divisée en 3 parties distinctes :
• Ma civilisation : ce recueil mi-vécu mi-rêvé, écrit et composé pendant la seconde guerre mondiale (et qui a fait l’objet de plusieurs éditions), est placé sous l’égide de Sade. Confronté à l’Occupation, Gilbert Lély a eu l’intuition que la violence de Sade n’était que l’écho de la violence politique de la Terreur, une sorte de contre-feu qui exacerbait les non-dits d’une époque.
• La folie Tristan : Lély a traduit et librement adapté la quintessence de la version d’Oxford, en vers octosyllabes respectueux de la poésie et de la pensée médiévales.
• L’épouse infidèle : ce recueil mêle poèmes en alexandrins rimés et textes en prose, où la précision de la langue et du vocabulaire parvient à susciter une sorte d’état de grâce qui transcende l'indicible et l'obscénité obsessionnelle de son principal sujet...

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