Je n'ai plus peur de Jean-Claude Guillebaud

Je n'ai plus peur de Jean-Claude Guillebaud

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Essais

Critiqué par Christian Adam, le 30 novembre 2014 (Inscrit le 30 novembre 2007, 50 ans)
La note : 2 étoiles
Moyenne des notes : 5 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 3 étoiles (57 339ème position).
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Dégobiller Guillebaud - Lettre ouverte aux Français pessimistes qui en ont marre de se faire narguer par des docteurs « malades d’espérance »

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**AVERTISSEMENT** Ceci n’est pas une critique de livre. Ceci est un pamphlet méchant et cruel, bourré de moquerie et de mordacité à l’adresse de tous les optimistes soi-disant « informés » qui s’imaginent encore pouvoir « changer la vie ». C’est un impitoyable pied de nez aux archanges altermondialistes, aux décroissants qui se veulent « réenchanteurs », et aux « transitionneurs » qui se rêvent « défricheurs » de solutions alternatives. À travers les coups de boutoir portés à une poupée vaudou nommée « Guillebaud » - dont la lecture préalable n’est nullement requise pour comprendre ce qui va suivre - c’est toute la nébuleuse des papis « sauveurs du monde » de la race des Edgar Morin, des Stéphane Hessel, des Raoul Vaneigem, et des Michel Serres que j’accablerai de raillerie. En ce sens, le papi Guillebaud n’est qu’un papillon parmi tant d’autres, pris dans le filet de ma dérision. Il s’agira de remettre à leur place les trafiquants du positive thinking – convaincus qu’il est encore temps de « sauver les baleines » - les colporteurs de boniments qui tiennent boutique d’un « autre monde possible », les espéranteux invétérés qui vous annoncent naïvement l’avènement d’une « civilisation plus conviviale et empathique », les gazetiers qui vous brandissent la une des « bonnes nouvelles » (comme s’il n’était pas encore assez clair que c’en est bel et bien fichu pour vos petits-enfants), mais surtout, les préparateurs et les « conditionneurs » de mentalités de l’espèce des Guillebaud et des Attali qui poussent l’impudence jusqu'à prendre de haut le mal qui vous ronge : souverains pontifes et contents de l’être, ils font penser à ces médecins nonchalants qui, désireux que vous leur fichiez la paix, pressés d’en finir avec votre cas, se dépêchent de vous prescrire de lénifiants cachets d’espérine, dans l’espoir de vous redonner le « goût de l’avenir »... Avenir ? Mais quel avenir ??? À l’issue de ce manifeste cynique pour une Pessimist pride (rire), il ressortira qu’il n’y a d’espoir à attendre que de la « vorace Ironie » (Baudelaire) : elle seule peut encore « sauver » ce qui reste du monde quand on a tout détruit. Ou pour paraphraser le mirifique Muray : le monde est détruit, il s’agit maintenant de se payer la tête de ses embaumeurs...

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À Philippe Muray, à Olivier Bardolle, à Baudouin de Bodinat, et à tous ceux qui ont compris le peu d’avenir que contient le temps où nous sommes...




« Je ne connais rien de plus cruel, en ce bas monde, que les optimistes de décision. Ce sont des êtres d’une méchanceté tapageuse, et dont on jurerait qu’ils se sont donné pour mission d’imposer le règne aveugle de la sottise. On me dit le plus souvent que l’optimisme est un devoir, parce que si nous voulons changer le monde, il faut d’abord croire que c’est possible. [..] Laissez, laissez aux pédagogues du “tout va bien” cette philosophie que tout dément dans la pratique de la vie... » (Aragon)

« L’optimisme criminel s’avance avec ses armes peintes en rose, la bouche pleine de miel et de bons conseils, et cette taie irisée devant l’œil, qui fait voir le monde comme une alléchante confiserie. [..] J’éprouve un désir couteau de lacérer le monde criminel des optimistes. Ceux qui se paient de mots et de mensonges. Je ne suis ni cynique ni désabusé, lucide seulement.» (René Pons)

« La phrase la plus bête qu’aucune oreille humaine ait jamais entendue est celle qui a trait « aux lendemains qui chantent ». Quel autre lendemain pour vous que la pourriture, que la dissolution et que le néant ? » (François Mauriac)

« L’optimisme m’est toujours apparu comme l’alibi sournois des égoïstes, soucieux de dissimuler leur chronique satisfaction d’eux-mêmes. Ils sont optimistes pour se dispenser d’avoir pitié des hommes, de leur malheur.» (Georges Bernanos)

« Oui, un autre monde va être possible, et même inéluctable, mais il ne ressemblera probablement pas à ce que les altermondialistes avaient imaginé. [..] La dissolution comme solution, telle est bien la volonté secrète qui sous-tend les faits et gestes des Occidentaux qui, fatigués d’eux-mêmes jusqu’à la nausée, n’aspirent plus qu’à se débarrasser une fois pour toutes de leur responsabilité historique. En somme, hâtons-nous de tout oublier et qu’on n’en parle plus. C’est ainsi que la vie des hommes, tels que nous la connaissons depuis quelques milliers d’années, est en train de prendre fin pour laisser la place à autre chose. Autre chose à laquelle nul n’est tenu de collaborer, et pour laquelle il n’est pas non plus obligatoire de se réjouir. Libre à chacun de pratiquer la suspension du jugement et de rechercher l’ataraxie en solitaire, tout en profitant des derniers instants de liberté dont il dispose encore pour se délecter de ces moments exquis, si caractéristiques des fins de civilisation, en accrochant à sa face s’il le souhaite – et pour faire bonne figure – le sourire reposant du Bouddha. » (Olivier Bardolle, La vie des hommes)

« Selon des études d’opinion spécialisées dans la « joie de vivre », les Français seraient le peuple le plus déprimé de la Terre. [..] Ce vieux peuple qui a tout connu, tout vécu, épuisé par toutes les guerres perdues, sait ce que c’est la tragédie de l’histoire. [..] Il a du flair pour renifler les catastrophes à venir. Il les voit venir de loin, bien avant les autres [..] et les Français, conscients de ce qui arrive, ne sont pas loin de penser que l’expérience humaine, sous la pression du nombre, est en train d’échouer. Alors, ils font un peu la gueule, c’est compréhensible. Ils n’ont pas envie d’aller vivre dans l’espace ni au fond des océans, ils n’ont pas envie de se nourrir d’insectes, ils ne souhaitent pas échanger leurs vieux organes fatigués contre des prothèses, ils ne veulent pas non plus stocker leurs gamètes dans l’azote liquide pour pouvoir un jour féconder une femme qui aura l’âge de leur petite fille, les Français, majoritairement, sont de l’ancien monde...» (Olivier Bardolle, La vie des hommes)


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**N.B Avant de lire le pamphlet qui suit, prière de regarder la vidéo suivante d’à peine 2 minutes, où l’on voit Guillebaud se trémousser dans toute la splendeur de son optimisme :

http://dailymotion.com/video/…


« Les railleurs sont ontologiquement pessimistes…» (Jean-Claude Guillebaud, Une autre vie est possible)

« Ce n’est pas par la colère, c’est par le rire que l’on tue.» (Nietzsche)




Françaises et Français,

Le réservoir d’espoir en une vie meilleure serait drôlement tari si dans votre course vers le Néant de diligents pompistes de la carrure de Jean-Claude Guillebaud n’étaient pas là, postés à chaque tour de piste, pour faire le plein de Sens et vous remonter le moral. Rien qu’à l’entendre et à le voir si serein et si confiant dans l’avenir, le moral de vos ménages se porte déjà mieux. Quoi de plus anxiolytique en effet pour affronter le peu d’avenir que ses paroles antidouleur ? Comment ne pas succomber à ce beau sourire paisible, réconfortant comme une rosée matinale, zygomatiquement décontracté, ce sourire bon-chrétien, ces cernes télégéniques empreintes de sagesse, ce visage « la-vie-est-belle », et toute cette foi espérancielle en action qui nous parvient « en direct » de son jardin privé situé vraisemblablement au cœur du 14ième arrondissement. C’est sûr, incarner l’héroïsme de potager et des plates-bandes en reprenant vaillamment le flambeau de l’Espoir n’est pas à la portée du premier venu : que l’on n’aille pas croire par exemple que c’est le smicard de banlieue, ou le zonard déclassé, bavant à l’année longue pour joindre les deux bouts qui pourront faire preuve d’un tel optimisme. Attention toutefois, car Guillebaud ne verse pas dans les mièvreries de bazar, ne fait pas commerce de croquembouches pralinés, non non !, c’est un grand voyageur qui s’est frotté aux aspérités du Réel, un vieux de la vieille qui en a vu des vertes, des blettes et des pas mûres dans sa vie, à qui il est même arrivé de tâter de l’amerrrr : oui oui, de l’amer ! Comme quoi même les petits-bourgeois des éditions du Seuil peuvent, eux aussi, être enclins aux « humeurs ténébreuses » ; même eux sont parfois pris en sandwich entre un sinistre bourdon et un fieffé cafard. Que croyiez-vous ?? Évidemment que Jean-Claude a lu son Dostoïevski ! Évidemment qu’il s’est imbibé des ambiances apocalyptiques à la Jérôme Bosch, assez pour qu’il n’oublie pas de trimballer sa trousse de pinceaux de chez Castorama© dans tous les salons du livre et qu’il ne néglige pas de vous peindre l’avenir en quelques traits sombres, histoire de vous prouver que lui n’est pas « dupe » et qu’on ne le prendra pas en flagrant délit d’« optimisme naïf et béat ». Vous aurez donc compris que Guillebaud est un « lucide », pas l’idiot du village global né de la dernière pluie : « À bien des égards, le pessimisme est justifié. Pas question de lui opposer un optimisme trop claironnant qui fermerait les yeux sur les périls. » (Une autre vie est possible, 21) Bref, votre Jean-Claude est un « chercheur d’espérance » qui ne triche pas avec les mots, ce n’est donc pas lui qui manquera aux précautions d’usage du genre « Loin de moi d’ignorer les défis colossaux que nous aurons à relever », « Le péril guette, mais nous en prenons acte », « Tout n’est pas rose au pays des Bisounours », etc. De là à se répandre en jérémiades, prendre la pose du « penseur crépusculaire », avoir la mine tristounette, ce n’est pas trop son truc au Guillebaud : « Désespérer avec ostentation, sauf s’il s’agit de littérature, est un dandysme qui ne m’a jamais tenté » (id., 17).

Ne boudons donc pas la science infuse lorsqu’elle sort du bec d’un oiseau de bon augure, surtout s’il est chroniqueur au Nouvel Obs et que, se trouvant dans le secret des dieux, il nous explique, clés du Royaume en main, que « ce que nous prenons pour des effondrements, ce ne sont que des métamorphoses. Ce n’est pas l’histoire humaine qui fait naufrage, c’est une séquence de celle-ci qui s’achève ; ce n’est pas « le » monde qui nous tombe sur la tête, c’est « un » monde qui fait place au suivant » (id., 115). Vous voilà au moins rassurés sur ce point, vous pouvez ranger vos parapluies : « le » monde ne vous tombera pas sur la tête. Les yeux dessillés et grands ouverts, vous pouvez même regagner vos cabines et dormir tranquille : tous les tonitruants teasers sur le Titanic en train de naufrager et tout le tam-tam hypnotiseur autour de la Fin du Monde ne procédaient apparemment que du battage médiatique. C’est Jean-Claude, votre « enquêteur du désarroi contemporain », qui vous le dit du haut de son poste de vigie. Il n’y a pas de quoi s’alarmer donc : ce n’est pas la fin du monde que vous êtes en train de vivre, c’est simplement la fin d’un monde. Nuance ! Ou le commencement d’un monde, pour reprendre le titre d’un autre livre prophétique et « provocateur » pour nos temps sinistrosés. Mais quel monde tout de même ! Un monde hypertendu, grippé, fatigué de lui-même, dont les habitants s’efforcent tant bien que mal de prendre leur mal-être en patience alors qu’ils n’en peuvent plus ni d’eux-mêmes ni de leurs semblables, et au moment même où tout est sur le point de craquer... C’est dire à quel point les baudets excédés que vous êtes tous en ont gros sur l’attelage en ce début de 21ième siècle. Heureusement, vous n’êtes pas seuls, Guillebaud s’est improvisé Guide spirituel pour vous réconforter et vous sustenter : des carottes tendues au bout du naseau - afin que les récalcitrants parmi vous continuent d’avancer - il en a plein la selle, et des plus roboratives, dont cette pensée positive selon laquelle ce ne sont pas des « crises » ou des « turbulences » que vous seriez en train de traverser, mais des mutations. Par conséquent, rien ne sert de braire ou de brailler, il va juste falloir vous réconcilier comme l’a fait Guillebaud avec l’abomination qui vient et vous adapter au plus vite aux mutations qui vous attendent au tournant. Vous avez perdu votre job parce que votre boîte s’est délocalisée ? Mutation. Un sentiment d’angoisse vous prend à la gorge du fait de ne plus vous retrouver dans un décor que l’on bazarde le lendemain alors qu’on venait de l’ériger la veille ? Mutation. L’étau démographique se resserre sur votre espace vital à un rythme effrayant, induisant une sensation d’enfermement planétaire ? Mutation. Circulation frénétique de marchandises, d’individus jetables, interchangeables, délocalisables, brassage incontrôlé de flux migratoires, et bientôt ce Grand remplacement de population tant redouté par les Renaud Camus, les Richard Millet et les Éric Zemmour ? Mutation encore. Tout va trop vite, au gré des innovations permanentes qui excédent les capacités naturelles d’adaptation d’un être humain normalement constitué ? Mutation, vous dit Guillebaud ! La dénaturation programmée défigurerait tout ce qui bouge autour de vous - êtres et choses - vous procurant une sensation d’étrangeté, lui vous assurerait que c’est à une « mutation » que vous avez affaire. Enfin, le monde entier se détraquerait sous vos yeux ébahis - qui ne demandent pourtant qu’à comprendre - que ce serait encore une mutation ! Pour survivre en milieu mutagène, soyez aussi flexibles et « adaptables » que possible, jusqu’à vous en fracturer le coccyx s’il le faut, il y va de votre capacité à rester en phase avec le Système, à positiver quel que soit par ailleurs le mal réel dont vous pourriez souffrir. Mutez-vous, transgénisez-vous, mélangez-vous, hachez-vous menu afin de mieux vous fondre dans la soupe métisse mondiale - car, avertit Guy l’expert ès mutations, « que nous le voulions ou non, nous serons pluriels et métis » (Guillebaud, in Le commencement d’un monde, p.10) - et puis, changez de sexe au besoin, vous serez « tendance », on vous likera, et vous saurez vous montrer à la hauteur des temps hautement prometteurs qui viennent. Tenez bon les bardots : après la Mutation, tout ira pour le mieux, c’est tonton Guy le Beau qui vous le jure de son air « tout va très bien Madame la Marquise ». Déjà, voyez-vous, « un monde totalement autre respire en effet sous les ruines » (Une autre vie, 121)...

[...]

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Il n'a (presque) plus peur !

7 étoiles

Critique de Fotso (, Inscrit le 14 décembre 2014, 48 ans) - 14 décembre 2014

Dans cet ouvrage, Jean-Claude Guillebaud se dévoile, pour la première fois vraiment.
L’éditeur et le journaliste, l’homme enfin, s’exprime et se livre. Par là-même, puisqu’il « offre sa poitrine aux flèches » en l’écrivant, il prouve au lecteur que le titre lui-même n’est pas menteur. Sincère, il écrit conserver certaines peurs résiduelles mais il déclare qu’elles ne le terrorisent plus. Son statut ainsi apaisé, il parle enfin de cette fameuse « espérance » qu’il distingue nettement de l’espoir. Pour lui, l’espoir est un état, l’espérance est un mode de fonctionnement.
Plusieurs chapitres durant, il relate, non sans risques pour sa pudeur, des épreuves de vie, des parcours atypiques et les leçons qu’il a tirées.
Ce livre démontre un beau parcours envers lequel je n’ai pas manqué de faire un rapprochement (sur le plan de la démarche uniquement) avec l’ouvrage : Olivier Le Naire "Pierre Rabhi semeur d’espoirs" éditions Actes Sud, 2012.

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  Réaction à la lettre ouverte de Christian Adam 58 Blue Boy 14 janvier 2015 @ 07:57

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