Jeux Sans Frontière de PtiLuc
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Une bédé pour réfléchir un peu ...
Parler avec un peu d’humour, avec un certain sens critique, avec la volonté de pointer du doigt certains dysfonctionnements des organisations non gouvernementales (ONG) qui travaillent en Afrique, tout cela au moment où le virus Ebola est en train de faire des ravages et où les fameuses ONG se déclarent dépassées par les évènements, peut être difficile, délicat et dangereux pour l’auteur. Quand il s’agit d’une bande dessinée, que l’auteur est Ptiluc, on ne se rassure pas et on aurait envie de crier : attention, danger ! Pourtant, quand on a terminé la lecture de sa dernière bande dessinée, Jeux sans frontière, on se dit qu’il a eu raison de l’écrire – et de la dessiner – tout en constatant qu’il abordait là un sujet qu’il connaissait bien, qu’il refusait d’être un donneur de leçon et qu’en aucun cas il ne préconisait de tout arrêter en laissant les Africains se débrouiller seuls… Rassurés, on peut donc feuilleter ensemble cet album qui fait à la fois rire et réfléchir !
Remarquer que rire et réfléchir ont toujours été les objectifs de Ptiluc, un auteur de bandes dessinées atypique que l’on connait bien pour ses utilisations des animaux, souvent les Rats mais aussi les Cochons, pour pointer du doigt les actions humaines. Une sorte de La Fontaine du neuvième art… Mais cette fois-ci, pour aborder les actions humanitaires en Afrique, il a préféré utiliser des personnages humains et laisser les animaux à leur savane et leur forêt…
Cette bédé va présenter plusieurs tableaux qui vont aller de l’arrivée en Afrique d’une équipe jusqu’au retour avec l’accueil dans le studio d’une radio. On a donc un cycle complet d’une action même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’une histoire complète, structurée avec un scénario précis. Ici, on sent bien que Ptiluc a voulu montrer différents visages de l’action humanitaire, des plus acceptables aux plus douteux, en passant par l’influence de la politique, de l’argent, des armes… oui, souvent nous sommes plus dans un pamphlet que dans une fiction simple. Mais tous les critiques de la société vous le diront, c’est en exagérant le trait que l’on peut pointer ce qui ne fonctionne pas ou pas assez bien !
Nos liens avec l’Afrique sont trop marqués par un colonialisme historique et ce n’est pas le Belge Ptiluc qui nous dira le contraire. Du coup, même un jeune qui se croit entièrement libre, qui part en mission en Afrique pour aider, peut se retrouver piégé par cette façon condescendante de traiter ces peuples que finalement nous croyons toujours inférieurs… L’acteur d’ONG agit de bonne foi mais peut blesser, faire des erreurs, être manipulé, aider des grosses sociétés qui ne cherchent qu’à s’enrichir sur le dos des peuples africains… Bref, le meilleur peut entrainer le pire ou comme nous disait mon père, les bonnes intentions ne suffisent pas !
On trouvera aussi dans cet album des douaniers véreux, des Africains corrompus, des Occidentaux pourris jusqu’à la moelle, des enfants soldats, des vendeurs d’armes prêchant pour la paix, des journalistes inconséquents… Ptiluc nous montre tout cela pour que nous ayons conscience, quand nous donnons à ces ONG que cela doit nous pousser à les contrôler. Nous ne leur donnons pas seulement de l’argent pour nous donner bonne conscience, non, c’est pour agir dans le respect de ces populations qui ont déjà bien assez souffert... Complexe, quoi, ce que ne cache absolument pas Ptiluc qui respecte d'ailleurs toutes ces femmes et ces hommes qui agissent en Afrique…
Une bande dessinée que j’ai beaucoup appréciée et qui m’a donné l’occasion de rencontrer Ptiluc que je ne connaissais pas encore. J’espère avoir rapidement le courage et le temps de vous proposer la retranscription de cet entretien ce qui vous donnera encore plus envie de lire l’album, j’en suis certain !
Bonne lecture à tous !
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