Ce qui n'est pas écrit de Rafael Reig
(Lo que no está escrito)
Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers , Littérature => Européenne non-francophone
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Décevante paella espagnole
Déception que ce livre de l'espagnol Rafael Reig : Ce qui n'est pas écrit.
On avait fait confiance aux éditions Métailié et à de bonnes critiques lues on ne sait plus où, mais la paella hispanique n'était finalement pas à notre goût.
Tout cela partait pourtant d'une bonne idée assez originale puisque Rafael Reig fait s'entrecroiser trois histoires dans son bouquin.
Carlos et Carmen ont divorcé il y a quelques temps et ne sont plus en bons termes. Carmen a cependant consenti à ce que Carlos emmène leur fils en week-end pour une rando en montagne.
Carlos qui se pique d'être écrivain, lui a laissé un manuscrit à lire (Carmen travaille dans une maison d'édition). Et nous voici embarqués pour trois romans pour le prix d'un : l'histoire de la virée calamiteuse de Carlos et son fils, l'histoire écrite par Carlos (un polar qui pastiche les Orchidées de Miss Blandish) et l'histoire de Carmen qui lit l'histoire de Carlos.
Dès les premières pages on se doute que tout cela va très mal finir : Carlos carbure au whisky et la rando avec son fils fait immédiatement penser au roman de David Vann (une ombre qui pèse d'ailleurs lourdement sur le bouquin de Rafael Reig).
Le faux roman inclut dans le vrai ressemble fort à une vengeance de Carlos envers son ex-femme et celle-ci commence bien vite à regretter d'avoir laissé son fils partir avec son père.
Après une mise en route laborieuse on se dit que, ça y'est, on tient le bon bout quand le faux polar de Carlos (écrit il y a quelques semaines) commence à décrire des faits qui ressemblent étrangement à ce qui se passe aujourd'hui même ...
Mais non, Rafael Reig ne réussit finalement pas à tirer tout le parti de sa bonne idée et chacune des histoires se terminera aussi laborieusement qu'elle a commencé.
Les éditions
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Ce qui n'est pas écrit [Texte imprimé]
de Reig, Rafael
Métailié / Bibliothèque hispanique
ISBN : 9782864249436 ; 18,00 € ; 16/01/2014 ; 238 p. ; Broché
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un début laborieux
Critique de Ellane92 (Boulogne-Billancourt, Inscrite le 26 avril 2012, 49 ans) - 11 septembre 2014
Carmen, elle, se réjouit et s'inquiète à la fois de ce weekend. Carlos a laissé, avant de partir, un manuscrit sur sa table. Une note indique qu'il souhaite juste qu'elle le lise. Dès les premières pages, Carmen est troublée par les éléments sordides qu'il contient, d'autant que cette fiction évoque une réalité, celle de sa rencontre avec ce jeune poète talentueux sans le sou et sans relation. Au fur et à mesure de cette lecture noire et scabreuse, le doute s'insinue en elle : pour quelle raison Carlos lui a-t-il confié ce manuscrit ? S'agit-il d'une revanche sur le passé, d'un avertissement, ou d'une intention ? Mais pour elle, il n'était pas si facile de continuer à lire : elle en savait trop. Elle en lisait trop, plus que ce qu'il y avait dans la page : elle lisait ce qui n'était pas écrit. Peut-être que c'était ça, l'obstacle : elle cherchait quelque chose entre les lignes et ça l'empêchait de voir ce qu'elle avait sous les yeux.
J'avoue avoir eu vraiment beaucoup de mal avec la première moitié de ce roman, qui mélange pour l'essentiel trois points de vue : celui de Carlos, celui de Carmen, et des passages de "La femme morte", le manuscrit cause de bien des interrogations. L'univers décrit est sordide, avec un intérêt particulier pour tout ce qu'il y a en-dessous de la ceinture, et pas qu'à des fonctions reproductives. Les personnages m'ont paru stéréotypés, engoncés dans un contexte (le loser qui veut faire ses preuves, l'adolescent malhabile, la femme partagée entre assumer ses actes et culpabiliser) qu'ils n'ont visiblement et masochistement pas envie de quitter. L'auteur semble n'avoir aucune compassion ni aucune affection pour ces héros malmenés qui hésitent entre brutalité envers eux-mêmes et les autres, élucubrations répétitives sur des évènements du passé, culpabilisation à outrance, etc… Enfin, des réflexions plus ou moins philosophiques, ésotériques et, grosso-modo, démagogiques, sur les liens entre un auteur et un lecteur viennent ponctuer un texte qui évoque une histoire au point mort. L'auteur est dans le livre, pas dehors. C'est le livre qui, pour être lu, nous oblige à imaginer qu'il a un auteur. Nous inventons l'auteur comme nous inventons des dieux. Mais si j'interprète bien les intentions de l'auteur (ce dont je ne mettrai pas ma main à couper!), cette première moitié de l'ouvrage sert à planter un décor, un contexte, à donner au lecteur une représentation de l'histoire et des personnages, de façon à pouvoir le surprendre dans la seconde partie du livre.
J'ai trouvé la seconde moitié du livre plus intéressante. Le point de vue de Carlos est moins présent ; à la place, on suit un peu les pensées de Jorge. Comme Carmen, je me suis surprise à essayer de lire, entre les lignes, ce qui n'était pas écrit, pour deviner ce qui le serait. Le roman sordide tourne au roman noir, pour nous amener à un final fataliste.
Rafael Reig tisse, avec plus ou moins de bonheur, différents thèmes dans cet écrit étrange : la place du père, les illusions sur les autres, les liens auteur-lecteur, l'échec, la fiction et la réalité (qu'un peu de réalité se retrouve dans une fiction, passe, mais l'inverse ?) etc… Au final, on s'apitoie sur ces personnages qui portent malgré eux le masque que d'autres leur ont donné : ils n'arrivent pas à trouver leur place, coincés par ce qu'on attend d'eux, ce qu'ils pensent que les autres attendent d'eux, par ce qu'ils attendent d'eux-mêmes. Dans ce piège des illusions, les fantasmes deviennent un écran de fumée réel qui peine à masquer une réalité pitoyable.
Un roman sombre que j'ai, au final, plutôt apprécié.
C'était un de ces beautés époustouflantes et peu durables qui apparaissaient près des zones industrielles comme des champignons après la pluie. Riquelme les connaissait par cœur : à treize ans, elles portaient des petites culottes avec des cœurs imprimés ; à quinze, elles mettaient des strings de trapéziste de cirque ; à vingt, des culottes noires ou rouges, encore minuscules, mais ça ne leur semblait déjà plus indispensable de se laver tous les jours.
Elle interrompit sa lecture un peu gênée, avec la sensation que, dans ce qu'elle était en train de lire, il y avait un piège enterré sous le feuillage des mots, dissimulé entre les culs, les nichons et les pistolets, et prêt à sauter si elle posait le pied dessus sans s'en rendre compte.
Sous ces phrases qui racontaient une violence mensongère, il y avait un mal véritable, un traquenard dont elle ne saurait pas se libérer si elle tombait dedans.
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