Avant-dernier acte

L’enfant rieur
Henry Bauchau
Récit
ISBN 978-2-330-00135-3


Récit de son enfance et des premières années de sa vie d’adulte, entre 1916 et l’occupation allemande de la Belgique jusqu’à la guerre des dix-huit jours en 1939 lorsque les troupes nazies réoccupent ces territoires.


«L’enfant est né en 1913 dans l’élégance , la propreté douteuse et les conflits sociaux de la Belle Epoque, mais il n’est vraiment venu à la vie qu’en août 1914, lorsque les Allemands ont envahi et brûlé la ville de Louvain qui était celle de sa famille».
Toute la famille doit se réfugier à Blémont où ils se sont vite sentis «de trop».
En 1918, installation à Bruxelles et fin de la guerre. Le petit Henry souffre de voir son père humilié, déconsidéré par sa famille.

Les conséquences de cette fuite et les difficultés d’adaptation auprès de son grand-père et de ses oncles seront le premier traumatisme de l’enfant rieur!

Il y a des auteurs que l’on admire et d’autres que l’on aime. Henry Bauchau est de ceux pour lesquels j’ai un attachement particulier.

Pourquoi? Parce qu’il fait preuve tout au long de ses journaux-mémoires d’une sensibilité particulière qui m’a touché. Le récit de son enfance illustre ou évoque les sources et éléments déclencheurs de cette facette de sa personnalité. Entre autres , l’attachement et l’admiration pour son frère aîné Olivier, le respect de l’autorité morale de son père. Une partie de cette autorité sera exercée par la pratique de la religion chrétienne et l’éducation dans des écoles catholiques.

Il se reproche à plusieurs reprises de ne pas oser faire front à ses dogmes et obligations. Je suis assez âgé pour me souvenir de cette emprise catholique dans toutes les sphères de la société belge de cette époque. L’Eglise et ses représentants exerçaient de façon explicite ou diffuse une autorité morale à tous les niveaux.

Des ennuis de santé lui imposeront des séjours en montagne et de longues périodes d’inaction mais favoriseront de longues heures de lecture et donc d’ouverture sur le monde.
Henry Bauchau, à l’exemple de son frère, ne se défait de l’autorité parentale qu’après son entrée à l’université et la rencontre de Mary, sa première épouse. Mary fantasque et dépensière qui lui donnera deux enfants dont Patrick Bauchau qui deviendra acteur.

J’ai apprécié que l’auteur ait vécu dans des quartiers de Bruxelles que j’ai bien connus. J’envie parfois les Parisiens qui peuvent retrouver les décors de leur ville dans de nombreuses oeuvres littéraires. Certains lieux sont encore hantés par les auteurs ou les héros de ces livres.



La quatrième partie du récit évoque la drôle de guerre de 1939 où tous ces cavaliers se transforment en cyclistes depuis que les chevaux avaient été remplacés par les véhicules motorisés des armées modernes. C’est à la fois le chaos et la débandade avec toutefois quelques échappées pour rejoindre la jolie Laure dont il venait de tomber amoureux.

J’ai été triste d’apprendre que Henry Bauchau n’avait pu atteindre sa centième année de vie, puisque né en 1913 et décédé en 2012, un an après la parution de ce livre.
Mais quelle belle et longue existence. Avocat, soldat, psychanalyste, directeur d’école, écrivain, ayant vécu longtemps dans la précarité n’étant reconnu qu’après la publication d’Antigone et d’autres romans à l’écriture parfaitement limpide et maîtrisée.
Je préfère cependant la délicatesse et la proximité de ses mémoires et j’ai hâte de lire le dernier texte qu’il aurait eu la force de dicter avant de nous quitter. L’occupation allemande, la vie avec Laure, la psychanalyse et l’écriture, la fin de vie feront sans doute l’objet de ce dernier acte.

Merci à lui.

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  L'enfant rieur [Texte imprimé], récit Henry Bauchau

  de Bauchau, Henry
  Actes Sud / Domaine français (Arles)
  ISBN : 9782330001353 ; 12,10 € ; 02/11/2011 ; 336 p. ; Broché

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