Comment vivre ? - une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse de Sarah Bakewell

Comment vivre ? - une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse de Sarah Bakewell
(How to live or A life of Montaigne in one question and twenty attempts at an answer)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Critiques et histoire littéraire , Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Pucksimberg, le 22 mai 2013 (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 901ème position).
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Une biographie de Montaigne digne de ce nom et un art de vivre !

Ce livre est un véritable phénomène d'édition aux Etats-Unis et en Angleterre. Il a été salué aussi dans "Le Magazine littéraire" et l'auteure a été invitée récemment sur le plateau de "La Grande librairie" pour évoquer cette biographie de Montaigne que l'on découvre sous un nouveau jour. Son tour de force est d'évoquer d'une manière très personnelle le grand écrivain humaniste, tout en évoquant ses idées et son regard sur le monde. Sarah Bakewell contextualise aussi les écrits de l'auteur, ce qui permet au lecteur de comprendre clairement certains épisodes historiques, peut-être oubliés. De plus, cette biographie n'est pas déconnectée de la littérature. L'on sait aussi ce qu'en ont pensé Pascal, Malebranche, les libertins, les auteurs romantiques ... Une oeuvre intelligente, passionnante et accessible qui fait de la connaissance un plaisir.

A la manière des "Essais" de Montaigne, ce texte se découpe en plusieurs chapitres qui tendent tous à répondre à la question : Comment vivre ? A travers plusieurs réponses, Sarah Bakewell convoque instants de vie de l'auteur, épisodes historiques, réflexions philosophiques ... Cet art de vivre n'est pas daté. Montaigne donne des clés qui ont encore tout leur sens aujourd'hui et qui permettent à l'homme de mieux vivre et de se comprendre. Comme dans les "Essais" dont les chapitres manquent parfois d'unité, à cause des digressions de l'écrivain, Sarah Bakewell semble s'amuser en usant de ce même principe. On passe d'une idée à l'autre, d'une anecdote à une autre avec la même fluidité que celle qu'utilisait Montaigne.

Le livre comporte aussi des gravures, des photographies de vieux manuscrits, des tableaux qui illustrent les divers chapitres et font de cette oeuvre une petite bible pour tout amoureux de Montaigne. Ce livre est en quelque sorte une longue introduction, une belle présentation des Essais, et suscite l'envie de se replonger dans le texte de ce grand auteur qui n'hésitait pas à parler de ses problèmes sexuels et de ses défauts.

Ce livre est d'une grande richesse et nous rappelle que lire Montaigne c'est se lire.

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Les éditions

  • Comment vivre ? [Texte imprimé], une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse Sarah Bakewell traduit de l'anglais par Pierre-Emmanuel Dauzat
    de Bakewell, Sarah Dauzat, Pierre-Emmanuel (Traducteur)
    Albin Michel
    ISBN : 9782226246936 ; 23,49 € ; 27/03/2013 ; 489 p. ; Broché
  • Comment vivre ? Une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse
    de Bakewell, Sarah
    le Livre de poche / Le Livre de poche
    ISBN : 9782253000648 ; 8,90 € ; 15/10/2014 ; 576 p. ; Poche
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Un frère humain

9 étoiles

Critique de Poet75 (Paris, Inscrit le 13 janvier 2006, 68 ans) - 22 mars 2021

S’il y a quelques lecteurs assidus de mon blog, ils se souviennent peut-être d’y avoir déjà lu le nom de Sarah Bakewell, essayiste britannique se spécialisant, semble-t-il, dans l’histoire des philosophies et des philosophes. Il y a tout juste un an, en effet, dans un article paru sur mon blog, je ne tarissais pas d’éloges quant à l’ouvrage dans lequel cette écrivaine narrait les aventures, si l’on peut dire, de l’existentialisme (dans Au café existentialiste, paru initialement en 2016). Mais auparavant, en 2010, Sarah Bakewell s’était attelée à une histoire conjointe à une méditation et réflexion au sujet de Michel de Montaigne (1533-1592), l’auteur fameux des Essais. C’est ce livre que je viens à présent de lire avec autant de bonheur, sinon plus encore, que celui que j’avais ressenti avec les aventures des existentialistes. Il faut dire qu’à choisir, je me sens beaucoup plus proche, je pourrais presque dire plus intime, de Montaigne que de n’importe lequel des philosophes dont il était question dans Au café existentialiste, à commencer par Martin Heidegger et Jean-Paul Sartre.
Avec Montaigne, c’est autre chose. Comme nombre de ses lecteurs, je suis tenté de me dire, à l’instar d’André Gide, « à quel point je le fais mien… il me semble que c’est moi-même ». Ou encore, Stefan Zweig qui, contraint à un exil qu’il subissait de manière insupportable, trouvait en Montaigne un ami véritable : « Ici est un Toi, dans lequel mon Moi se reflète, ici est abolie la distance qui sépare une époque de l’autre. »
Oui, nonobstant le français tel qu’il fut écrit par Montaigne et qui compte nombre de différences avec celui que nous écrivons aujourd’hui, plus de 400 ans après sa mort, il reste tout à fait possible d’élire l’auteur des Essais comment un compagnon qui aide à vivre. C’est d’ailleurs sous cet angle que l’analyse et le raconte Sarah Bakewell : Comment vivre ?, s’intitule son livre, et son sous-titre ajoute : Une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse. Cela étant dit, n’attendons pas de ce livre des recettes facilement transposables, mais bien plutôt le compagnonnage d’un homme qui sut traverser des temps difficiles, à une époque où, entre deux accalmies, faisaient rage les guerres de religion, à une époque où les épidémies étaient fréquentes, à une époque où un homme malade (car Montaigne souffrit, toute sa vie, de coliques néphrétiques) ne pouvait guère espérer un secours efficace de la médecine, à une époque où, à chaque voyage, l’on pouvait être agressé et rançonné… Montaigne ne fut pas (ou pas uniquement) un philosophe de chambre : il entreprit plusieurs voyages, dont un qui dura des mois, le menant en Italie en passant par l’Allemagne et la Suisse, avant de devoir rentrer à Bordeaux où l’on venait de l’élire comme maire. Il exerça donc aussi les fonctions d’un élu et intervient quelque peu au plan politique, y compris le plus élevé du royaume.
Mais Montaigne n’était pas homme du genre à se targuer de quoi que ce soit. Si beaucoup de lecteurs se reconnaissent en lui, c’est, parce qu’en se décrivant lui-même, en faisant état de ses doutes, en mettant en avant son scepticisme même, il tend à chacun une sorte de miroir. Blaise Pascal (1623-1662) eut beau jeu de juger « sot » ce projet de se peindre, c’est pourtant, ce faisant, que l’auteur des Essais trouva une multitude de lecteurs qui reconnurent en lui un frère en humanité. Certes, la réception de Montaigne évolua au fil du temps, au gré des éditions, au gré, surtout, des changements de mentalité, si bien que si certains louèrent des aspects de Montaigne, ils en dénigrèrent d’autres. Sarah Bakewell, et c’est un des points forts de son livre, s’attache précisément à inventorier la multiplicité des interprétations de Montaigne, nous rappelant, d’ailleurs, au cours d’un des chapitres, que c’est en Angleterre que Montaigne trouva quelques-uns de ses plus fervents admirateurs (mais, il faut le dire, au prix de traductions plus ou moins approximatives). Sans négliger les faits marquants de la vie de Montaigne (un accident de cheval qui faillit lui coûter la vie, son amitié avec La Boétie (1530-1563), celle aussi avec Madame de Gournay (1565-1645), ses voyages, son engagement en tant que maire, etc.), Sarah Bakewell se plaît surtout à rendre compte de l’écriture à la fois simple et complexe des Essais : un livre qui, paradoxalement, du fait de sa simplicité même, peut paraître parfois déroutant. Montaigne se permettait tout dans ce livre, chaque fois qu’il abordait un sujet, il se plaisait à le quitter dès qu’il pouvait, selon son inspiration. Les Essais abondent en digressions : c’est ce qui fait à la fois leur charme et leur difficulté. Encore une fois, ne prenons pas Montaigne comme un maître à penser, il ne l’aurait pas souhaité, mais comme un compagnon qui aide à vivre et à penser. Sur ce terrain-là, il n’a pas son égal, d’autant plus que, jusqu’au bout, même s’il fut maire de Bordeaux, il est resté un homme simple, presque ordinaire, mais un observateur avisé qui, par exemple, s’interrogea le jour où sa chatte vient le troubler au cours de son travail avec la volonté expresse de jouer. C’est à partir de là, à partir de faits aussi banals que celui-là qu’il s’est ingénié à écrire : Pascal avait décidément bien tort, ce n’était pas « un sot projet » que celui qu’avait conçu Montaigne ! 9/10

Mieux que l’original

8 étoiles

Critique de Romur (Viroflay, Inscrit le 9 février 2008, 51 ans) - 14 novembre 2015

Sous un titre un peu racoleur, Sarah Bakewell nous offre une plongée passionnante dans la vie et l’œuvre de Montaigne.
La lecture est facile, le récit vivant, tissant les liens entre l’œuvre de Michel Eyquem et les épisodes de sa vie, décryptant la structure des Essais, nés de l’empilement de notes et de réflexions personnelles sur une vingtaine d’années. Érudite, Sarah Bakewell montre comment en amont Montaigne a puisé dans la philosophie antique et comment en aval, de Pascal à Zweig en passant par Voltaire et Nietzsche, les essais ont nourri la réflexion des écrivains et philosophes.
Par moment, le cadre qu’elle s’est imposée avec sa vingtaine de chapitres censés constituer une vingtaine de réponses parait un peu artificiel et elle est obligée d’en déborder, mais l’ensemble reste globalement équilibré.
Rendant Montaigne familier et humain, Sarah Bakewell vous donnera certainement envie de (re)lire ses essais. Oserais-je dire que je m’y suis essayé et que j’ai abandonné très vite cette lecture parfaitement indigeste ?

Les clefs de lecture des Essais

9 étoiles

Critique de LaVillatte (, Inscrite le 11 juillet 2012, 49 ans) - 19 août 2015

Une tentative précédente de lire seule les Essais de Montaigne ayant été un échec mais mon envie de découvrir cette oeuvre étant intacte, je me suis plongée avec intérêt dans ce livre.
L'approche est à la fois simple, conviviale et érudite. En plus de faire une biographie de Montaigne, Sarah Bakewell introduit toutes les références culturelles et littéraires nécessaires pour goûter sa vie et son oeuvre.
La mise en perspective à travers les différentes réceptions que les Essais purent avoir au cours du temps apporte une dimension supplémentaire à cette étude et illustre parfaitement l'identification qu'eurent les différents lecteurs à la personnalité de Montaigne.
En conclusion, je recommande vivement la lecture de ce livre qui donne des clefs de lecture des Essais.

Plongée au cœur du 16ème siècle en compagnie d’un grand humaniste

10 étoiles

Critique de Colen8 (, Inscrite le 9 décembre 2014, 83 ans) - 12 août 2015

C’est une lecture jubilatoire, insolite, romanesque et moderne sur la vie et l’œuvre de Montaigne qui nous est offerte. Sa traduction elle aussi remarquable ne peut être que le fait d’un écrivain ayant une fine connaissance du vocabulaire et des mœurs de l’époque. Ni vocation, ni ambition n’ont poussé vraiment Montaigne à devenir cet écrivain qui séduit ses lecteurs siècle après siècle par sa légèreté, sa modestie, sa bienveillance envers les êtres vivants. Formé au latin, encouragé par son père, il se nourrit des lectures d’Ovide, Cicéron, Virgile ou Tacite. Son amitié avec La Boétie si brève car interrompue par la mort de celui-ci à 33 ans l’incite à le faire publier. C’est ainsi qu’il entre dans le monde de l’édition.
Peu enclin à faire carrière au Parlement de Bordeaux où des études supposées de droit l’ont conduit, il décide à 37 ans de se retirer en ses terres. Loin du misanthrope enfermé dans sa tour que des esprits chagrins ont voulu nous transmettre, c’est ici le portrait d’un modéré en toute chose, courageux sans témérité, honnête, séducteur, sociable mais par-dessus tout attaché à la liberté. Pendant 20 ans il se consacrera aux « Essais », dont le succès immédiat se poursuivra dans le monde entier, en dépit d’une mise à l’index de près de deux siècles. Il y aura néanmoins des interruptions à cette retraite voulue. Un voyage en Europe de 17 mois pour tenter de soigner des calculs rénaux qui finiront par l’emporter, un mandat à la Mairie de Bordeaux, des déplacements où il sera amené à exercer ses qualités de diplomate. Esprit curieux se reconnaissant dans les écoles philosophiques des stoïciens, des épicuriens et des sceptiques, enclin au doute, porté à la lenteur, il se laisse aller à des observations sans règle particulière sur lui-même et sur le monde.
C’est aussi un rappel historique des guerres de religion marquées de fanatisme et de violence, d’une guerre de succession qui verra l’avènement d’Henri IV non sans que Montaigne ait été sollicité de jouer les médiateurs. En dépit de nos formidables progrès, le parallèle avec notre époque vient à l’esprit : ruptures de la tradition, impuissance des dirigeants, révolutions, conflits interminables, manifestations contre les privilèges. Même les « Métamorphoses » d’Ovide, que Montaigne lisait avec délectation évoquent les avatars actuels des jeux vidéo et des films de science fiction.

L’auteur, sa vie, son œuvre

6 étoiles

Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 27 octobre 2013

Bon je n’aime pas le genre et ne suis donc pas une bonne référence critique en la matière. J’ai trouvé cette biographie un peu ennuyeuse. J’en sauve les aspects philosophiques et les considérations existentielles qui m’intéressent beaucoup plus et me donnent envie de lire les auteurs directement à la source.

Les vingt chapitres d’inégale longueur sont agrémentés de photo et dessins qui illustrent le texte. Elles nous rappellent qu’à cette époque, les hommes en justaucorps montraient leurs jambes et les femmes les cachaient sous de longues robes. Le style est alerte et quelques traits d’humour expliquent pourquoi les anglo-saxons ont toujours aimé la simplicité de cet auteur nombriliste précurseur du développement personnel ou du mouvement slow, plus adepte de recettes et de trucs que de grandes théories. L’auteure nous dit que Montaigne n’enseigne que lui, un exemple ordinaire d’être vivant dans lequel bon nombre se reconnaissent. Et c’est cela qui a fait et fait toujours son succès.

IF-1013-4104

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