L'aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane
Catégorie(s) : Littérature => Africaine , Littérature => Francophone
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LA TENTATION DE L'OCCIDENT
On ne présente plus Cheikh Hamidou KANE véritable « sage » de la littérature Africaine, et Sénégalaise en particulier, d’origine Peul, né en 1928, haut fonctionnaire, gouverneur de la région de Thiès et plusieurs fois ministre dans son pays, il a également été représentant de l’UNICEF en Afrique.
Il est surtout un des plus grands écrivains Africains actuels et l’auteur d’un livre, en partie autobiographique, écrit en 1959, publié en 1961, déjà devenu un classique de la littérature Négro-Africaine, «L’aventure ambiguë ».
De quoi nous parle de livre ? Et bien c’est avant tout l’histoire et les aventures d’un jeune garçon Samba Diallo, passé de l'école traditionnelle Africaine à celle des Occidentaux. En effet au début du récit Samba Diallo, qui est le fils du chef de la tribu des Diallobé, jeune élève surdoué suit l’enseignement du maître coranique, qui est le grand sage et le gardien des traditions du peuple des Diallobé. Mais avec l’arrivée du colonisateur Français et de son école à l’Occidentale, son père, malgré des fortes réticences, décide de l’envoyer suivre l’enseignement dispensé par les écoles des blancs…
L’objectif avoué de son père est d’affronter les nouveaux défis imposés par le colonisateur. Pour lui le meilleur moyen est de tenter de les assimiler à la tradition des Diallobé, pour que son peuple ne sorte pas vaincu mais renforcé par confrontation des deux civilisations. Et quoi de mieux pour cela que d’envoyer son propre fils étudier avec les colonisateurs, dans l’école des colonisateurs…
Quelques années plus tard nous retrouvons Samba Diallo à Paris, jeune et brillant intellectuel africain en France, étudiant du Quartier latin, dans le cadre de ses études universitaires de Philosophie…
Le roman de Cheikh Hamidou KANE tente avant tout de répondre à certaines questions, entre autres : Comment concilier la culture Africaine, avec ses traditions ancestrales et sa pensée, et celles venues d’Occident, apportées lors de la colonisation ? L'une ne peut-elle pas apporter sa pensée, sa richesse, sa philosophie à l'autre ? Ou doivent-elles éternellement être opposées par leurs origines et leurs passé ?...
J’admets volontiers qu’il s’agit ici d’une œuvre phare de la littérature Africaine, encore d’actualité aujourd’hui, j’avoue toutefois que je suis passé complètement à côté du style littéraire de l'auteur. Le livre est « décousu » et nous présente une sorte de série de sketch qui se suivent plus ou moins avec toujours le personnage de Samba Diallo en fil rouge. Chacun de ces « scènes de vie » ayant une signification plus ou moins philosophique que l’écrivain laisse le soin de découvrir au lecteur.
Mais que de problèmes pour suivre l’histoire sans s’y perdre…
Et puis l’auteur ne nous facilite pas non plus la tâche avec sa multitude de personnages à peine esquissés, beaucoup trop typés et qui disparaissent du récit (La Grande Royale, Lucienne…) comme par enchantement !...
C'est un livre grave, triste, qui pose beaucoup de questions, le récit est dépouillé, rigoureux, pudique, tout en demi-teinte, en clair-obscur. Mais malheureusement si Cheikh Hamidou KANE est sûrement un grand écrivain il n’est certainement pas un grand pédagogue...
Il s'interroge un peu sur tout et tout au long de son livre…
Sur la fascination qu'exerce l'Occident, sur la foi, sur le métissage, sur le matérialisme occidental, sur la vérité, sur Dieu…
Mais qui trop étreint, mal embrasse et à la fin on n’en retient pas grand-chose, et l’auteur n’apporte que des réponses partielles et superficielles à des questions qui pourtant auraient mérité que l’on s’y attarde beaucoup plus…
Je reste donc finalement sur un sentiment de lecture plus que mitigé concernant ce livre…
A noter que ce livre a reçu le Grand prix littéraire d'Afrique noire en 1962, et que Cheikh Hamidou KANE l'a également reçu une deuxième fois en 1984 pour l'ensemble de son oeuvre.
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Les éditions
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L'Aventure ambiguë
de Kane, Cheikh Hamidou
10-18
ISBN : 9782264036933 ; 6,10 € ; 03/01/2003 ; 191 p. Poche
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Roman d'apprentissage d'un héros écartelé entre deux cultures
Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 45 ans) - 9 juillet 2025
Le roman permet de mesurer l'ambiguïté de la situation d'hommes en proie avec le système créé par la colonisation. C'est le choc des cultures, l'inquiétude d'effacer sa culture au profit de valeurs non cautionnées. L'auteur donne à entendre les deux camps. L'écrivain semble affectionner les dialogues ce qui permet d'entendre diverses personnes sur la question et ces dialogues argumentatifs sont vraiment intéressants et riches. Ils soulèvent des problèmes profonds sans pour autant trancher et imposer une seule lecture. Ce roman peut être lu comme un roman d'apprentissage dans lequel Samba va se former intellectuellement, moralement et religieusement au contact de personnages qui auront un rôle dans cette construction mentale comme son Maître, son père dit "Le Chevalier", Lucienne, La Grande Royale ...
Le roman est bref et comporte des ellipses qui permettent de sauter de nombreuses années parfois. L'on se focalise ainsi sur les passages les plus importants dans la construction du moi de Samba. Les chapitres sont vifs et les discussions intéressantes pour comprendre le mal-être d'individus formés par des idéologies pas toujours compatibles avec facilité. L'écriture de Cheikh Hamidou Kane est soignée et belle. Le vocabulaire est précis et l'auteur a la capacité de donner vie à ses séquences narratives. Le lecteur parvient aisément à visualiser toutes les séquences et certaines sont très fortes comme celle qui ouvre le roman dans laquelle le Maître se montre très violent avec Samba. Les personnages secondaires ne sont pas négligés et sont bien définis par l'écrivain. Ce roman fait autorité en Afrique et figure dans les programmes du lycée, mais se lit facilement et suscite un intérêt même chez un lecteur occidental. Un classique !
"Le pays des Diallobé n’était pas le seul qu’une grande clameur eût réveillé un matin. Tout le continent noir avait eu son matin de clameur.
Etrange aube ! Le matin de l’Occident en Afrique noire fut constellé de sourires, de coups de canon et de verroteries brillantes. Ceux qui n’avaient point d’histoire rencontraient ceux qui portaient le monde sur leurs épaules.
Ce fut un matin de gésine. Le monde connu s’enrichissait d’une naissance qui se fit dans la boue et dans le sang."
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