Lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke

Lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke
( Briefe an einen jungen Dichter)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Critiques et histoire littéraire , Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Vigno, le 16 juin 2002 (Inscrit le 30 mai 2001, - ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 9 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 696ème position).
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L'Art poétique de Rainer Maria Rilke

Franz Xaver Kappus (1883-1966), 19 ans, cadet dans une école militaire autrichienne, découvre que Rainer Maria Rilke (1875-1926) a fréquenté la même institution que lui quelques années auparavant. Ayant écrit quelques poèmes, il décide de les envoyer au maître. Quelque mois plus tard, Rilke lui répond. S'en suivra une correspondance de quelques années. Kappus fera publier en 1929, trois ans après le décès de Rilke, les dix lettres que celui-ci lui avait écrites entre 1903 et 1908. Ainsi sont nées les Lettres à un jeune poète, traité ou mieux « art poétique », que tous les apprentis écrivains ont potassé, du moins dans les cours de création littéraire.
Comment expliquer que Rilke ait pu répondre avec autant de sérieux à ce jeune apprenti officier complètement inconnu? Malheureusement, l'histoire n’a pas conservé les lettres de Kappus et, même si Rilke y fait souvent allusion, on ne peut s'en faire une opinion claire. Toujours est-il qu'au travers de ces lettres, l’auteur explore avec beaucoup de profondeur le phénomène de la création. Ici, point de trucs littéraires, de cours de rhétorique, mais plutôt une série de questionnements sur le phénomène de la création. Comment sait-on qu’on est véritablement poète? « Cherchez en vous-mêmes. Explorez la raison qui vous commande d'écrire; examinez si elle plonge ses racines au plus profond de votre cœur; faites-vous cet aveu : devriez-vous mourir s'il vous était interdit d'écrire. Ceci surtout : demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit; me faut-il écrire ? Creusez en vous-mêmes à la recherche d'une réponse profonde. Et si celle-ci devait être affirmative, s'il vous était donné d'aller à la rencontre de cette grave question avec un fort et simple « il le faut », alors bâtissez votre vie selon cette nécessité; votre vie, jusqu'en son heure la plus indifférente et la plus infime, doit être le signe et le témoignage de cette impulsion. »
Comment faire pour que la puissance de la créativité puisse s’épanouir? « Une seule chose est nécessaire: la solitude. La grande solitude intérieure. Aller en soi-même, et ne rencontrer, des heures durant, personne - c'est à cela qu'il faut parvenir. »
En fait, Rilke explique qu'il faut, comme on le dirait aujourd'hui, « travailler sur soi », « cultiver son jardin secret », garder une certaine distance avec les autres, ne jamais sacrifier à l’ironie, se maintenir à une certaine hauteur qui n’est pas hautaine. « L’art n’est, lui aussi, qu'un mode de vie. »

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Une oeuvre incontournable

9 étoiles

Critique de Saumar (Montréal, Inscrite le 15 août 2009, 91 ans) - 5 août 2011

Les lettres du jeune poète sont d’abord un essai sur les créations de l’esprit énonce, Bernard Grasset, dans « Rilke et la vie créatrice ». Ces lettres, écrites entre 1903 et 1908, sont les réponses adressées au jeune Xavier Kappus qui demandait conseil, au sujet de ses poèmes, au poète Rainer-Marie Rilke. D’une profondeur inouïe, cette œuvre révèle la sincérité et l’humilité de ce grand auteur. Il y a dans ses réflexions une telle façon de les faire ressentir que tout lecteur, quelque peu doué qu’il soit en poésie, en gardera longtemps l’empreinte.

La dominante de son œuvre est la solitude qui est l’ultime difficulté : « Une seule chose est nécessaire, la grande solitude intérieure. Aller en soi même, et ne rencontrer durant des heures personne, c’est à cela qu’il faut parvenir. (…) Il est bon d’être seul parce que la solitude est difficile. Il est bon aussi d’aimer, car l’amour est difficile. L’amour d’un être humain pour un autre, c’est peut-être l’épreuve la plus difficile pour chacun de nous, c’est le plus haut témoignage de nous-mêmes; l’œuvre suprême dont toutes les autres ne sont que les préparations ». En plus de la solitude et de l’amour, Rilke mentionne d’autres valeurs à considérer pour l’inspiration de l’écrivant : Dieu, la sexualité, la vie et la mort, mais surtout la patience en soi même dans l’attente de l’inspiration. Si la contrainte de créer persiste, il restera toujours l’enfance dit le poète : cette précieuse richesse, ce trésor des souvenirs: « Tout ce qu’il vous advient de penser quand vous vous reportez à votre enfance est bon. Vous éprouvez angoisses et tourments en évoquant votre enfance dans tout ce qu’elle a de simple et de secret, tournez là votre esprit ». Suivre ce petit guide de Rainer-Maria Rilke qui dit d’entrer en soi et découvrir en soi, c'est-à-dire percevoir les choses vraies, qu’à travers ce qu’on est ou ce qu’on est devenu, qu'à travers ses connaissances et ses expériences.C’est ainsi qu’émanera des idées nouvelles pour une oeuvre créatrice et assurera un résultat unique et personnel.

Un peu déçu de l'ouvrage

6 étoiles

Critique de Calepin (Québec, Inscrit le 11 décembre 2006, 43 ans) - 28 novembre 2007

Il y a longtemps que je voulais lire ce livre dont j’ai tant entendu parler. Suite à une première lecture des lettres en tant que telles, je ne peux que m’émerveiller de la profonde lucidité de Rilke envers la création, mais surtout, la vie en général. Son discours mature, assuré, empreint d’une sagesse peu commune pour un si jeune âge (mi-vingtaine) m’a touché. J’ai particulièrement apprécié l’accent mis sur la solitude nécessaire dans la création et dans la vie. Il est dommage, par contre, que le texte ait tendance à s’égarer à certains moments ce qui a douché mon intérêt. D’ailleurs, les multiples annotations, destinées sans doute à des lecteurs plus érudits et plus passionnés que moi, n’y ont rien changé. Le reste de l’ouvrage m’a surtout ennuyé plus qu’autre chose : des phrases avec trop de compléments et un style trop ampoulé. Il est certain qu’en m’y attardant davantage, j’ai pu sentir là l’essence poétique de Rilke flirter entre les mots, mais ça n’a pas suffi à garder mon attention, encore là. À partir de là, il ne restait guère de place pour m’attaquer à la section « poésie », surtout que je n’aime pas la poésie rimée.

Toujours est-il que j’ai l’impression de ne pas avoir retiré tout ce que ce livre peut offrir. Une deuxième lecture, peut-être ?

Je n'ai pas accroché.

7 étoiles

Critique de Fa (La Louvière, Inscrit le 9 décembre 2004, 49 ans) - 25 août 2006

Tout d'abord, je félicite l'éditeur pour la publication du texte en version bilingue, j'ai essayé de le lire en allemand, mais mon niveau est insuffisant pour une oeuvre aussi difficile, j'ai donc largement voyagé dans le texte français.

Cela dit, je doix avouer n'avoir jamais ressenti ce que d'autres lecteurs ont ressenti sur ce site. Je ne pense simplement pas que ma personnalité colle avec cette oeuvre trop introspective à mon goût.


Une force créatrice

8 étoiles

Critique de FightingIntellectual (Montréal, Inscrit le 12 mars 2004, 42 ans) - 3 janvier 2006

La force créatrice, tel est le sujet d'interrogation de ce monsieur Kappus, comment avoir la force de créer d'abord et avant tout. Vraiment rien a redire sur ces superbes critiques. Ce petit recueil de lettre est un manuel de vie à l'usage de ceux qui ont le doute. Ca m'a fait chaud au coeur de le lire.

à tous ceux qui doutent

10 étoiles

Critique de Desdemona (, Inscrite le 20 octobre 2005, 47 ans) - 5 novembre 2005

pour tous ceux, artistes ou non, qui doutent à un moment de leur vie, Rilke apporte des réponses et un réel soulagement ... voilà ce que j'ai ressenti à la lecture de ces lettres ...Je me suis sentie moins seule en le lisant ... et pour ça un grand merci ...

Réflexion sur la création poètique

7 étoiles

Critique de Krystelle (Région Parisienne, Inscrite le 10 juin 2004, 44 ans) - 25 juillet 2005

Les lettres de Rilke proposent une réflexion intéressante sur ce qui peut pousser un écrivain a écrire, à créer.
Ces textes sur la vocation du poète et l’acte créateur ont bouleversé l’idée de que je pouvais me faire de la production littéraire mais, a posteriori, je me dis que ces lettres ne sont qu’une forme de réponse, celle de Rilke, et que la portée de sa réflexion n’est peut-être pas universelle.

Un chemin initiatique

8 étoiles

Critique de Monito (, Inscrit le 22 juin 2004, 52 ans) - 25 juillet 2005

L’essentiel est dit dans les critiques précédentes. Juste un ajout peut être, le sentiment d’un chemin initiatique que trace Rilke pour Kappus. Un guide, une écoute, une invitation à trouver en soi les ressources de l’art et de vérifier ou plutôt de se voir naturellement imposer le besoin créatif.

Une correspondance univoque où l’absence de Kappus (du moins de ses lettres) donne encore plus de puissance et de force aux perspectives esquissées par Rilke. Un vraiment moment de poésie en prose…

Aplanissez ses chemins ...

10 étoiles

Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 21 janvier 2004

Au hasard de ces quelques lettres écrites par le poète Rilke pour un jeune poète en herbe, on tombe sur des passages merveilleux, qui réconfortent et nous encouragent à partir sur les chemins solitaires, vers ce qu'Etty Hillesum appelle le puits très profond qu'il faut parfois déblayer pour laisser passer la lumière. En lisant ce livre j'ai d'ailleurs pensé à Etty Hilesum, une mystique juive morte dans un camps de concentration, qui parle beaucoup de Rilke dans son carnet intime "Une vie bouleversée". Elle en était véritablement amoureuse et ça ne m'étonne pas, car Rilke parle du même chemin qu'Etty Hillesum, celui de l'intériorité, il parle de cet endroit où notre propre intelligence n'a pas accès, qu'on ne pénètre que dans notre heure la silencieuse, dans une ample et profonde solitude intérieure.

Mais il aborde d'autres sujets. Les oeuvres d'art. Comment savoir si on est destiné à en créer ? La réponse est à rechercher au plus profond de soi (lisez la citation reprise dans la critique principale). Comment les comprendre ? Il convient avant tout d'ignorer les critiques et de ne faire confiance qu'à ses propres sentiments. Il recommande aussi la patience. "Le temps, ici, ne sert pas de mesure, une année, ici, est sans valeur et dix années ne sont rien; être un artiste ce n'est pas calculer ni compter, c'est mûrir comme l'arbre qui ne presse pas sa sève et affronte tranquillement les tourmentes printanières sans craindre qu'ensuite un été puisse ne pas venir".

Il parle des démons enfouis en nous : "Comment pourrions-nous oublier ces mythes antiques à l'origine de tout les peuples, ces mythes où des dragons, à l'ultime moment se changent en princesses; peut-être tous les dragons de notre vie sont-ils des princesses qui n'attendent que le moment de nous voir un jour beaux et courageux ?".

Et quand les grandes tristesses s'abattent sur vous, restez à l'écart et cherchez la solitude pour vous laisser transpercer pas ces tristesses qui transforment. Un autre conseil que je trouve merveilleux : "Essayer d'être proche des choses qui, elles, ne vous abandonneront pas; il y aura toujours des nuits et les vents qui font frissonner les arbres et parcourent tant de pays". Là il me fait penser à Etty Hillesum qui avait une relation presque sensuelle avec un après-midi printanier et le contact de la caresse de l'air sur ses bras.

Un dernier conseil : "Ne prêter attention qu'à ce qui se lève en vous et placez le au-dessus de tout ce que vous observez autour de vous".

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