L'automne à Cuba de Leonardo Padura

L'automne à Cuba de Leonardo Padura
(Paisaje de otoño)

Catégorie(s) : Littérature => Sud-américaine , Littérature => Policiers et thrillers

Critiqué par Tistou, le 6 mai 2011 (Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 214ème position).
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En attendant l’ouragan

C’est en attendant l’ouragan « Félix » que le Commissaire Mario Conde, de la Havane (Cuba), s’attelle à la rude tâche de résoudre en 3 jours un meurtre aux apparences sadiques commis sur un citoyen américain ex-transfuge cubain. Il a négocié ces 3 jours pour obtenir en échange une signature d’approbation au bas de sa lettre de démission. Car, oui, Mario Conde (snif !) veut quitter la police cubaine. Il veut … écrire. ( je ne sais pas si Leonardo Padura fut policier dans une autre vie !)
Leonardo Paduro, à l’instar de Zoé Valdès, ne nous épargne rien de la sordide réalité cubaine – là nous sommes fin des années 90 – ses manques, ses privations, et la vie qui pourtant se poursuit, aux accents tropicaux (dans le genre « la misère est moins triste au soleil »).
C’est vrai. La misère est moins triste au soleil mais à la tombée du troisième jour, ce qui attend Mario Conde, c’est, simultanément ; la résolution d’une enquête délicate, sa démission acceptée de la police, son anniversaire fêté à grands coups de rhum chez son meilleur ami (et organiser un anniversaire dans la misère de La Havane semble une entreprise démente) et donc l’arrivée de Félix, Félix le cyclone, l’ouragan.
Leonardo Padura a par moments l’écriture un peu heurtée mais il y a aussi de bien jolis passages et des idées développées d’une bonne originalité (qu’un cubain ne raisonne pas comme un occidental européen me parait la moindre des choses !).

« Et ils se replongèrent dans les archives. C’était seulement dans des moments pareils que le Conde regrettait l’efficacité des ordinateurs, capables de cracher un nom – Garcia Abreu, peut-être – et de raconter toute une histoire, photos comprises. Pour le reste, handicapé cybernétique, il voyait ces machines comme une aberration de l’intelligence humaine, qui avait peut-être créé, à travers elles, un des monstres qui l’autodétruirait. La confiance infinie déposée dans le raisonnement électronique de ces appareils dépourvus de sensibilité lui faisait peur : il n’était pas admissible que l’homme déverse tout son savoir et sa capacité d’analyse dans ces monstres dénués d’âme sans que cet acte contre-nature ait des effets dévastateurs. Heureusement pour le Conde, le sous-développement chronique de l’île et de son propre intellect pré-post moderne l’avait vacciné contre cette pandémie mondiale. »

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un condé

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 25 août 2023

Comme dans tout bon roman policier qui se respecte, l’enquête criminelle est prétexte à une mise en lumière des aspects les moins reluisants de la société. Le roman de Leonardo Padura, clôturant la série des "Quatre saisons", ne déroge pas à la tradition. On suit dans sa toute dernière enquête Mario Conde (sic), flic désabusé, accroc à l’alcool et aux femmes, souhaitant donner sa démission à la suite de la mise à l’écart, totalement injustifiée d’après lui, de son mentor le major Rangel, en pleine période de purges dont est coutumier le régime castriste. On lui propose de retarder ce moment pour une affaire particulièrement délicate nécessitant de faire appel à sa sagacité légendaire. Il accepte , pour trois jours seulement, non négociables. Et le voilà parti pour découvrir par qui et pourquoi a été assassiné Miguel Forcade Mier, ancien haut fonctionnaire en charge de la "redistribution" des biens confisqués aux riches suppôts de Batista, déchu de ses fonctions, exilé à Miami et revenu tout récemment à La Havane pour une mystérieuse raison. On est en 1997, en attente de l’arrivée annoncée d’un terrible ouragan. Dans cette atmosphère anxiogène au possible l’inspecteur Conde va devoir délier les langues de celles et ceux préférant se taire, et se plonger dans les secrets de l’expropriation des œuvres d’art, censées profiter au peuple cubain et dont celui-ci, comme de bien entendu, ne profitera jamais. Une mise à nu salutaire d’un régime totalitaire où les idéaux les plus nobles sont bafoués pour le profit de quelques-uns. Leonardo Padura, qui n’a pourtant jamais quitté La Havane, a réussi un tour de force en dépit de la censure, en plein règne de celui qui se fit nommer "El Commandante". Un véritable polar qui plaira aux amateurs du genre, mais aussi un regard acéré sur une société en perdition, que ne maintenait plus hors de l’eau le puissant régime soviétique…

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