Sur le théâtre de marionnettes de Heinrich von Kleist
( Über das Marionettentheater)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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"Un morceau de philosophie étincelant de raison et de grâce"
Cette citation d'Hofmannsthal décrit parfaitement ce que je peux considérer comme ma découverte littéraire de l'année...
Écrit en 1810, Kleist développe au sein de ce court palimpseste, la théorie de la chute originelle sur le plan esthétique, philosophique et religieux.
La trame est simple: le protagoniste, un danseur, soutient que les marionnettes surpassent l'homme car elles sont exemptes d'affectation. L'homme est un être d'affectation car son âme est faussée, elle "se trouve en tout point autre que le centre de gravité de mouvement". Notre conscience serait donc responsable de notre séparation avec l'état de nature.
Le concept de la grâce est largement développé par Kleist par le biais de ce qu'il considère comme ses équivalences: l'absence totale de conscience et la conscience infinie. L'auteur les considère comme concomitantes. Pour illustrer cette idée, il met en avant le fonctionnement des marionnettes. En effet, soit elles sont soumises aux lois de la pesanteur, soit elles y échappent totalement. Leur grâce provient du fait qu'elles sont en même temps soumises et non soumises aux lois.
Par le biais de la chorégraphie des marionnettes, Kleist met en valeur l'écriture comme trace éphémère de la disparition. C'est ce qui permet au lecteur d'entrevoir l'absence (illustrée dans le texte par le lien -le fil de fer quasiment invisible- unissant la marionnette et son marionnettiste).
La grâce serait donc devant ou derrière l'homme. Elle ne peut appartenir qu'à la matière ou à Dieu et c'est pour cela que nous sommes condamnés à la gesticulation éternelle et inutile de l'entre-deux.
La seconde notion développée par Kleist réside dans l'idée qu'il existe "un point où les deux extrémités du monde circulaire se raccordent". L'une de ces extrémités est la matière, l'autre Dieu, cette circularité est « comme l’image du miroir concave, après s’être éloignée à l’infini, revient soudain juste devant nous : de même la grâce, quand la connaissance est pour ainsi dire passée par un infini, est de nouveau là ; de sorte qu’elle apparaît en sa plus grande pureté dans cette conformation humaine du corps qui, ou bien n’a aucune conscience, ou bien a une conscience infinie, c’est-à-dire dans le mannequin ou dans Dieu ».
Les deux extrémités chercheraient donc constamment à trouver ce point qui comblerait le vide qui les sépare permettant ainsi au cercle d'être bouclé.
C'est donc le mouvement perpétuel des extrémités dans le but de clore l'infini du cercle qui illustre le mouvement de la connaissance, par le biais de la création qui tend à atteindre la grâce au sein même de l'écriture.
Ce livre est un véritable bijou, d'un grande finesse, il apporte de nombreuses clefs de compréhension pour l'ensemble de l'œuvre de Kleist.
Les éditions
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Sur le théâtre de marionnettes [Texte imprimé] Kleist trad. de l'allemand par Jacques Outin
de Kleist, Heinrich von Outin, Jacques (Traducteur)
Éd. Mille et une nuits / Mille et une nuits
ISBN : 9782842053413 ; 4,86 € ; 27/05/1998 ; 30 p. ; Poche -
Sur le théâtre de marionnettes [Texte imprimé] Heinrich von Kleist traduction de Brice Germain
de Kleist, Heinrich von Germain, Brice (Traducteur)
Éd. Sillage
ISBN : 9782916266787 ; 5,00 € ; 30/11/2010 ; 48 p. ; Broché
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La nature de l'art à jamais mystérieuse
Critique de Mario-Le-Sot (, Inscrite le 19 janvier 2013, 52 ans) - 2 février 2013
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Critique de Perlimplim (Paris, Inscrit le 20 mars 2011, 48 ans) - 3 novembre 2011
Les éditions Sillage proposent en complément un autre opuscule "Sur l'éloboration progressive des idées par la parole". Publié en 1806, cet essai rappelle les études philosophiques de Kleist, et le lecteur de Kant qu'il fut. Brillant également, et surprenant.
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