Penchants Retors de Éric Allard

Penchants Retors de Éric Allard

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par Bluewitch, le 21 novembre 2009 (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 45 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (15 544ème position).
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Un format court, un fond intense... et retors, oui!

Après avoir sévi au printemps dernier avec la publication des "Corbeaux brulés", recueil de textes courts et hallucinés, Éric Allard persiste dans ce format qui l’habille comme un gant : celui du concis et de l’aiguisé.

Cent textes et un peu plus, comme des pensées galopantes et impérieuses, d’aujourd’hui, d’hier, avec leur côté implacable et, toujours, absurde, fantasmagorique, cérébralisé, poétique. Un brin dérangeant, quand même, mais, ne le nions pas, sacrément audacieux.

On lève le sourcil (le droit, en ce qui me concerne, allez savoir pourquoi) avec plaisir sur le style, les thématiques, la plume. On se dit que c’est redoutable, cet univers. Besoin parfois de les laisser de côté, ces Penchants Retors, c’est quand même pas du light. Tout ça pour mieux y revenir.

Un auteur non balisé. Et c’est tant mieux !

Extrait :

« Paroles d’auteur

Backstage, ma femme est une vipère, une virago, un virus. Elle m’empoisonne la vie. Backstage, elle me donne des coups, des fessées, des gnons, ça vole ! Backstage ma femme me traite de sans grade, de nullard, de roadie de l’asphalte mou. Je n’en mène pas large. Sur scène, elle chante qu’elle m’aime follement et que je suis son souffle, son cœur, les yeux de sa tête. Sur des paroles que j’ai exclusivement composées pour elle. »

Son blog : http://lesbellesphrases.skynetblogs.be

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Les éditions

  • Penchants retors [Texte imprimé] Éric Allard
    de Allard, Éric
    Gros textes
    ISBN : 9782350821023 ; 8 EUR ; 01/10/2009 ; 109 p.
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7 étoiles

Critique de Sissi (Besançon, Inscrite le 29 novembre 2010, 54 ans) - 17 septembre 2012

Cent petits textes à la fois drôles, grinçants, provocants, érotiques, sexuels, surréalistes ou presque blasphématoires.
Des petits coups de pied aux fesses du monde trop lisse dans lequel nous vivons.
On se sent un peu bousculé, et ça fait un bien fou.
Dans une langue imagée, très métaphorique, Eric Allard se défoule, se moque, dénonce, s'amuse.....et fustige la télévision:

"Presse-méninges

J'ai acheté un presse-méninges. J'en avais assez de cogiter à propos de tout et de rien. Mais l'appareil n'était pas des plus performants car, ayant terminé de presser, mon cerveau remuait encore, produisant des semblants d'idées, comme des borborygmes de fin de règne mental. Alors j'ai utilisé mes mains et j'ai écumé le restant, je ne vous dis pas leur état ensuite. Mon chien a tout léché.
L'important, c'est que, depuis, je n'émets plus la moindre pensée. Je n'ai plus, grand bien me fasse, la moindre velléité de comprendre le monde ou quoi que ce soit d'apparenté. Je vis la vie rêvée du légume vert, du protozoaire, de l'électeur lambda du Front National. Affalé sur mon canapé, j'avale tout ce qui fleurit sur mon bouquet satellite. Pendant ce temps, mon chien dévore des encyclopédies."

Gourmandises

8 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 3 mai 2012

Par un dimanche pluvieux de mars, réfugiés avec quelques amis des lettres dans cette taverne bruxelloise que fréquentaient Magritte et une bande de surréalistes, « La Fleur en papier doré », Eric Allard m’a offert, en guise de cadeau de bienvenue, le premier livre qu’il a publié, en 2009, « Penchants retors ». Je viens de déguster ce recueil d‘une bonne centaine de textes courts, même parfois très courts, que les surréalistes n’auraient certainement pas reniés même si Eric exhibe plus la réalité qu’on ne veut pas voir plutôt que la réalité invisible que les amis de Magritte voulaient montrer. Dans ces textes, Il manie avec adresse et talent, le paradoxe, la dérision et l’absurdité dans un langage cru, cruel, charnel, toujours juste et ajusté, pour évoquer l’exploration des corps, les rapports conjugaux ou familiaux, les relations amoureuses et sociales mais surtout la sensualité charnelle, la perversion sexuelle à la limite du raffinement là où se niche le délice érotique.

Mais cette exhibition sensuelle, charnelle, érotique, à la limite de la perversité, cache mal une certaine façon de dénoncer, de stigmatiser, toutes les stupidités de notre société pervertie, la puérilité des pouvoirs, de toute nature, qui polluent notre quotidien, l’incongruité qui encombre sans cesse notre existence. Une manière de nous rappeler que nous avons certainement perdu notre innocence originelle et que nous avons sombré dans le vice et la perversion, victimes de la soif d’avoir, de posséder et de dominer.

Un joli moment de lecture, une gourmandise littéraire - « Depuis que j’ai une maîtresse en chocolat, je mange des caresses chaque fois que je la vois. » - où la crudité sexuelle du langage masque bien mal la sensibilité à fleur de peau de l’auteur et un certain fantasme libertaire inavoué. Ce qui est sûr c’est que nous ne pourrons pas reprocher à Eric de s’être livré avec retenue : « Je me suis déshabillé et j’ai tout vidé : foie, pancréas, glaires et graisses ; cœur, sang, bile, colonne sans fin de l’intestin grêle. »

Et une centaine de textes courts.

6 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 21 avril 2010

Une centaine de textes courts. Sur des penchants. Ceux d’Eric Allard, à n’en pas douter. Mais pas n’importe quels penchants ! Retors, les penchants. Important, l’adjectif « retors » …
Car retors ils le sont ces penchants, indéniablement. Plus proches de l’absurde, du non-sens, de la folie, que de la « retorsité » (nom déposé). Pas absurdes ou non-sens au sens … Boris Vian par exemple. Il y manquerait de la poésie que ce très court format ne permettrait pas d’installer. Non, plutôt une froide absurdité :

« Un soir, j’ai trouvé Dieu en bas de chez moi, sans le sou, sans endroit où dormir, dans un triste état, pour tout dire. Je Lui ai proposé le gîte. Vous vous rendez compte : Dieu dans mon clic-clac, Dieu dans un de mes pyjamas. Dieu en train de me confier ses peines, ses doutes, ses peurs. Il était bien à plaindre, le Tout-Puissant. Depuis, Il vit chez moi. N échange de menus travaux domestiques : Il s’occupe du repassage, Il passe l’aspirateur, Il sort le chien … Quand je rentre, je Le trouve devant la télé ou l’écran de mon pc avec des canettes de soda et des saucisses sèches. »

Le plus souvent ces textes sont axés sur un penchant sur lequel Eric Allard nous a déjà habitué à se pencher : la chose du sexe. L’acte sexuel, la relation homme – femme principalement envisagée sous l’angle charnel sont omniprésents (on pouvait déjà noter ceci dans « Les corbeaux brûlés »). Et donc vous imaginez : penchants … et retors de surcroît. On sait déjà qu’on naviguera en eaux troublées, à défaut d’être troubles, où l’inconscient doit furieusement faire entendre sa voix (ou imposer sa voie ?).
Au niveau style, il est difficile de s’en faire une idée précise compte tenu de la brièveté du format. Il est neutre. L’essentiel n’est pas là. Il est dans le fond. Sous la surface de la forme.

La vie en farce...

9 étoiles

Critique de MOPP (, Inscrit le 20 mars 2005, 88 ans) - 2 janvier 2010

"Il faut regarder la vie en farce." (dixit Louis Scutenaire)

C'est bien la devise de cet auteur, le nommé Eric Allard... Car il n'hésite pas : dès le début, "Je me suis déshabillé et j'ai tout vidé : foie, pancréas," etc. Et de nous conduire dans une folle (j'insiste sur le mot) aventure.

Dans "A charge de revanche", le texte commence par "J'aime les pieds de ma dentiste" (c'est presque le titre d'un poème !)

Au volant de ses rêves, Eric A. atteint la vitesse supersonique.

Autant dire que cet auteur mérite "la compagnie des grands".

A lire... plus d'une fois.

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