La femme aux pieds nus de Scholastique Mukasonga

La femme aux pieds nus de Scholastique Mukasonga

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Littérature => Africaine

Critiqué par Débézed, le 15 septembre 2009 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 450ème position).
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« Le linceul dont je n’ai pu parer ma mère »

« Quand je mourrai, quand vous me verrez morte, il faudra recouvrir mon corps, il ne faut pas laisser voir le corps d’une mère. » Mais, «maman, je n’étais pas là pour recouvrir ton corps et je n’ai plus que des mots … pour accomplir ce que tu avais demandé. » Alors, Scholastique tisse avec ses mots un linceul pour que sa mère ne soit pas une infime partie anonyme d’un immense charnier là-bas du côté de Nyamata au Ruanda où toute sa famille, et bien d’autres Tutsi, ont été déplacés dès la fin des années cinquante.

Et, contrairement à Boris Boubacar Diop qui voudrait inlassablement dire « l’horreur. Avec des mots-machettes, des mots-gourdins, des mots hérissés de clous, des mots nus et des mots couverts de sang et de merde », Scholastique refait revivre sa mère avec tendresse et amour dans un petit livre plein de fraîcheur qui contraste tellement avec le bain de sang que nous connaissons bien maintenant. L’effroi n’en est que plus intense et plus dramatique. Comment a-t-on pu assassiner tant de douceur, d’amour, de tendresse, mais aussi de pugnacité, de courage et de volonté de vivre dans la dignité et le respect des tradition, des us, des rites et des croyances d’une communauté qui refuse de disparaître et veut croire encore en une vie possible dans cette région dénuée de tout où elle a été reléguée.

Dans ce tout petit livre aussi frais que les belles collines du Ruanda où elle est née et dont elle a été chassée, Scholastique raconte avec une grande simplicité, simplicisme diront les mauvaises langues, la vie quotidienne de cette mère famille chassée de chez elle qui dépense des trésors d’énergie, de courage, d’ingéniosité sans jamais mesurer ses efforts, pour que ses enfants puissent survivre et même vivre dans la dignité et la tradition de la communauté et aussi, éventuellement, accéder à une bonne éducation pour sortir de la misère.

Nous connaissons hélas l’issue de ce combat, quand en 1994 …. Mais cela est une autre histoire que Scholastique a déjà racontée dans un autre livre où elle dit aussi comment elle pu échapper à la barbarie pour aujourd’hui témoigner. Ce témoignage nous l’avons reçu et nous n’oublierons jamais ses mères à qui les Hutu faisaient comprendre « Ne donnez plus la vie car c’est la mort que vous donnez en mettant au monde. Vous n’êtes plus des porteuses de vie, mais des porteuses de mort. »

Scholastique nous nous souviendrons :

« Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers

Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés
Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre
Ils ne devaient jamais plus revoir un été. »

Et, Jean Ferrat chante dans le désert, toujours l’histoire répète ses atrocités sans que les hommes jamais ne se lassent.

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Mère Courage

9 étoiles

Critique de Nathafi (SAINT-SOUPLET, Inscrite le 20 avril 2011, 57 ans) - 31 juillet 2013

"Le troisième commandement de Dieu interdisait tout travail le dimanche. Cela ne concernait que l'après-midi, puisque la matinée était consacrée à la messe. Aller aux champs, effectuer de gros travaux ménagers, c'était, nous avait-on appris, gravement offenser le Seigneur et nous risquions, si nous désobéissions à son commandement, de le voir apparaître, sur les nuages sombres, enflammé de colère et entouré de langues de feu comme sur les images que les bons pères nous montraient à la messe."

Stefania avait cette façon de raconter les choses à ses enfants, ancrée dans de multiples croyances, personnifiant les animaux, la nature, les objets... C'est avec cette mère qu'ils ont grandi, une mère courage dont le seul souci était de protéger sa famille et la nourrir.
Ce livre nous raconte leur vie difficile, les multiples combines qui leur permettaient de survivre, nous parle de cet immense courage dont Stefania et d'autres mères de familles faisaient preuve, espérant un avenir meilleur pour leur progéniture, risquant leur vie à tout instant.
On y découvre à foison les us et coutumes des Tutsi, qu'essaie de perpétuer Stefania sur ces terres où elle a été forcée de s'installer.

Un très bel hommage que rend Scholastique à sa mère.

Un récit-temoignage, un poignant hommage

9 étoiles

Critique de Provisette1 (, Inscrite le 7 mai 2013, 12 ans) - 23 juin 2013

Qu'ajouter à la "critique" fort juste de Debezed?

Que ce livre de Scholastique m'a touchée, émue au plus profond de moi-même tant, hormis l'horreur de l'Histoire des Tutsis qu'elle évoque en mots-verités, mots de douleurs, de violences, d’atrocités, tant, donc, son récit nous "parle" aussi d'amour, d’humanité et des coutumes, des traditions, de l'Histoire d'un peuple exilé, assassiné, déporté, "génocidé".

Non, l'Homme n'a jamais été sage: l'humain reste un sauvage.

le quotidien en Afrique

9 étoiles

Critique de Odile93 (Epinay sur Seine, Inscrite le 20 décembre 2004, 70 ans) - 23 juin 2012

Un petit livre - trop petit livre - qui nous laisse entrevoir la vie d'une petite Africaine et de sa maman: les travaux des champs avec la récolte du sorgho, l'école avec les soeurs, la recherche d'un beau mariage, les esprits, les traditions...

Un style alerte, c'est la fille de Stefania qui écrit mais aussi beaucoup de tendresse dans l'écriture...

J'aurais aimé que le livre se prolonge, j'y étais bien et l'ai quitté à regret.

Finalement - à part au début du livre - il est fait peu allusions aux Hutus, ce qui fait que la vie décrite dans ce livre aurait pu se dérouler ailleurs en Afrique.

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