Au seul souci de voyager de Paul Morand

Au seul souci de voyager de Paul Morand

Catégorie(s) : Littérature => Francophone , Littérature => Voyages et aventures

Critiqué par Jlc, le 10 février 2009 (Inscrit le 6 décembre 2004, 80 ans)
La note : 6 étoiles
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L'homme pressé

Paul Morand est l’exemple parfait de l’écrivain voyageur. Mais c’est aussi un voyageur pressé avec « toujours cette envie d’être ailleurs » et cette impatience d’arriver. La vitesse, la mobilité comptent autant que le voyage en soi. Il est parti à l’étranger très tôt, passant un an à Oxford dès 1908-1909, avant, ayant choisi la diplomatie, d’aller de poste en mission puis de vivre dans la solitude et l’exil moral toutes les années qu’il dut passer en Suisse, après la guerre.

La collection « Voyager avec » est fondée sur le choix de textes d’un écrivain sur le voyage commentés par un autre, ici le poète Michel Bulteau qui a pris le parti de respecter l’ordre chronologique.

Enumérer ses voyages d’Asie aux Caraïbes, d’Afrique à New York, d’Amérique du Sud aux villes européennes pourrait relever du catalogue touristique. Ce qui est ici intéressant, c’est la description qu’en fait Morand dont l’œil alerte, la plume acérée, la phrase rythmée offrent des plaisirs de lire, de découvrir, d’imaginer un monde aujourd’hui disparu. Il donne aussi des recommandations pour bien voyager, notamment sans argent pour rester libre car « les poètes savent bien que seuls les vagabonds ne se trompent jamais de route ». Il parle très bien de l’excitation du départ et du bonheur du retour. "Avec le retour, le départ est certainement ce qu’il y a de plus agréable."

A l’inverse d’un Simenon qui tout au long de ses voyages va chercher « l’homme nu », Morand préfère décrire ce qu’il voit. Il est écrivain et voyageur là où le Liégeois est observateur et reporter. Ainsi la ville de Bassorah, aujourd’hui ravagée dans la tourmente irakienne, était alors « l’arabe, déjà persane par ses jardins, [dormant] sous ses dattiers célèbres, confite comme ses dattes dans une oisiveté passive ».

Il fait le portrait de trois villes qu’il aime, New York et Londres « qui sont une même chose, à cent ans de distance » et Bucarest avec « ses façons province d’un premier chapitre de Gogol. » avant de succomber au charme vénéneux de Venise qu’il appellera ailleurs « ville nénuphar » et pour qui il imagine cette fin sublime : « Venise se noie, c’est peut être ce qui pouvait lui arriver de plus beau ? »

Si les textes sont bien choisis, si on a toujours plaisir à relire Morand le styliste, en revanche les commentaires de Bulteau sont pour le moins limités, sans apport réel et donc décevants. Service minimum en quelque sorte. C’est dommage car il y avait certainement bien des choses à dire sur ce personnage complexe et son besoin de fuir.

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