Séjours à la campagne de Winfried Georg Sebald
( Logis in einem Landhaus)
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Critiques et histoire littéraire
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Compagnons de vie de W.G.Sebald
Ce livre contient six portraits d'écrivains , un Français et cinq Suisses de langue allemande auxquels Sebald veut rendre hommage . Leurs oeuvres feraient partie de celles qu'il emporterait sur une île déserte!
Il admire leur opiniâtreté dans l'écriture. Il conclut " Ecrire est de toute évidence une activité dont on ne se défait pas aussi facilement, même quand elle vous est devenue détestable ou difficile....car les pauvres écrivains ...souffrent mais ouvrent parfois des perspectives d'une beauté et d'une intensité que la vie elle-même n'est guère en mesure de faire connaître".
Ces écrivains ; Johann peter Hebel, auteur d'un almanach et de contes célèbres dans toute les pays de langue allemande, Morïke qui personnifie l'idylle Biedermayer mais aussi le basculement des sociétés du Romantisme vers la société de plus en plus régies par l'éthique du travail et de la concurrence, Gotfried Keller (Henri le vert) évoque déjà les dégâts du capitalisme.
En 1850 le progrès du libéralisme a vécu pour laisser la place aux seuls intérêts économiques.
Tous ces écrivains sont à un carrefour de l'histoire occidentale. Certaines révolutions naissent suite à la Révolution française, Napoléon Bonaparte a tenté l'empire, la bourgeoisie installe le commerce et l'industrie, etc..
Jean-Jacques Rousseau est évoqué comme fugitif qui se réfugie sur l'île St Pierre au milieu du lac de Bienne. Son séjour ferait l'objet de la cinquième rêverie du promeneur solitaire.
WG Sebald développe non seulement les motifs de ses attachements littéraires via les oeuvres littéraires mais aussi en y effectuant également de nombreuses promenades . Les lieux gardent de nombreux témoignages du passage de ces artistes.
Le "promeneur solitaire" auquel il est le plus attaché et donc qu'il analyse le plus profondément est Robert Walser(1878-1956). "...sur tous les chemins, Walser m'a sans cesse accompagné..."
Martin Walser est remarquable pour son art de la digression mais aussi parce que son grand-père lui ressemblait. Les photographies illustrant le texte sont remarquables. W.G. est lui-même un grand écrivain-promeneur. Toute son oeuvre est un long voyage dans d'innombrables lieux de mémoire .
Martin Walser serait sans doute resté inconnu sans l'amitié de Car Seelig , son compagnon de randonnée. Mais la maladie mentale le guette. Il écrit sans désemparer, la sentant progresser.
Son oeuvre a été étudiée depuis par Elias Canetti, Walter Benjamin, Nabokov qui l'associe à la tristesse et l'humour fantasque de Gogol.
"Il est l'inventeur de tout un peuple de pauvres âmes" et d'une écriture minuscule ', soit les microgrammes, qu'il a fallu décrypter ."...ils sont les messages secrets de quelqu'un qui se trouve rejeté dans l'illégalité et les archives d'une véritable émigration intérieure".
W.G. Sebald rend aussi hommage au peintre Tripp qu'il avait fréquenté sur les bancs d'école. Celui-ci intervient in fine en évoquant "la manière noire" à propos des textes de Sebald, disparu en 2001.
Ces textes sont de remarquables "modèles " de critique amoureuse.
Pour les amateurs de littérature de langue allemande et de promeneurs solitaires.
Les éditions
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Séjours à la campagne [Texte imprimé] W. G. Sebald par Jan Peter Tripp traduit de l'allemand par Patrick Charbonneau
de Sebald, Winfried Georg Charbonneau, Patrick (Traducteur)
Actes Sud / Lettres allemandes (Arles)
ISBN : 9782742756971 ; 25,53 € ; 06/10/2005 ; 200 p. ; Broché
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Les critiques éclairs (1)
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6 portraits
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 5 août 2011
« Il est dans l’ordre des choses que l’on trouve en fin de volume un essai sur un peintre, non seulement parce que Jan Peter Tripp et moi avons fréquenté un bon moment la même école d’Oberstdorf et que nous partageons le même amour pour Keller et Walser, mais aussi parce que ses tableaux m’ont appris que l’art demande du métier et qu’il faut s’attendre à affronter bien des difficultés quand on veut rendre compte du monde qui nous entoure. »
Une relation plus intime donc avec Jan Peter Tripp. Le même Jan Peter Tripp d’ailleurs dont figure l’hommage rendu à W.G. Sebald en toute fin d’ouvrage ; « Au royaume des ombres ». Il y donne une appréciation intéressante du style et de la manière d’écrire de W.G. Sebald :
« C’est également du noir qu’est issue l’une des plus belles techniques de gravure profonde sur cuivre, la « manière noire ». A la différence de la vénérable taille-douce, de l’eau-forte et de l’élégante pointe sèche, où, sur la plaque de cuivre polie comme un miroir, des traits sont creusés qui s’imprimeront en sombre, la « manière noire » va des ténèbres à la lumière.
…/…
L’appropriation du monde et sa description par W.G. Sebald m’ont toujours semblé procéder d’une méthode analogue. Loin du monde expressif de la gravure sur bois, il installe de vastes panoramas d’une densité et d’une intrication presque incroyables. Et comme dans la « manière noire », il dispose d’une palette inépuisable de gris aux dégradés imperceptibles, qui seule est en mesure de mettre en mouvement les contenus subtils qu’il présente. »
Attention, il ne s’agit pas de portraits aux sens strict ou biographique du terme. Plus de petites touches sur le rapport de l’écrivain concerné à la vie, à son art, à la Nature. L’essentiel de ces portraits nous parle peu à nous, Français. Johann Peter Hebel, Eduard Mörike, Gottfried Keller, Robert Walser ne sont pas précisément des auteurs qui nous évoquent des titres, une œuvre … Jean-Jacques Rousseau nous offre davantage de résonance et c’est à l’occasion d’une visite de W.G. Sebald à l’île de St-Pierre, sur le lac de Bienne, où Rousseau, chassé de partout, poursuivi même par la vindicte de certains trouva un temps, quelques semaines, un rustique havre de paix, que l’idée d’écrire cet essai consacré à Rousseau (« J’aurais voulu que ce lac ait été océan … ») germe.
Ces portraits sont détachés de la réalité, d’une quelconque chronologie. Ce sont en quelque sorte des instantanés qui figent un moment de la vie d’un écrivain et qui, par l’analyse qu’en fait Sebald en disent long sur la personnalité de l’écrivain ainsi épinglé.
Ceci intéressera davantage un public germanophone plus à même de connaître les écrivains dont il est question. Reste que ces essais sont écrits dans une belle langue.
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Donatien, Robert et Martin | 4 | Feint | 5 février 2009 @ 14:09 |