Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Un roman d'une profonde noirceur qui met à nu les lâchetés de l'âme humaine
Ce sera peut-être notre seule contribution à l'effervescence de la rentrée littéraire et de ses innombrables sorties qui s'empilent chez les libraires.
Mais nous étions sortis frustrés de notre lecture précédente de Philippe Claudel : le Café de l'Excelsior; sa plume méritait donc une seconde chance : Le rapport de Brodeck.
Bien sûr, on y retrouve les tournures savamment peaufinées qui nous avaient un peu agacés dans le Café.
Toutefois Le rapport de Brodeck s'avère plus consistant et au fil des pages les effets «m'as-tu-lu» de Philippe Claudel se diluent dans une histoire prenante et oppressante.
Une histoire qui se dit intemporelle et universelle mais qui fait clairement référence à deux guerres (la deuxième avec son cortège d'exactions et d'exterminations) et à un petit pays d'Europe centrale au dialecte germanique.
À la fin de cette deuxième guerre, quand Brodeck, réchappé d'un camp, retrouve son village, c'est pour être pratiquement le témoin d'un assassinat collectif, le quasi lynchage d'un étranger, d'un «Autre» (ils l'appellent l'Anderer). Les villageois vont lui demander d'écrire un rapport sur cet événement et les causes qui les ont amenés à cet acte abominable.
[...] ... si j'avais été dans l'auberge, je n'aurais rien fait pour empêcher ce qui s'est produit, je me serais fait le plus petit possible, et j'aurais assisté impuissant à l'épouvantable scène. Cette lâcheté, même si elle n'avait pas eu lieu, me dégoûtait. Au fond, j'étais comme les autres, comme tous ceux qui m'entouraient et qui m'avaient chargé de ce Rapport dont ils espéraient qu'il allait les disculper.
L'enquête de Brodeck constitue un roman construit de façon astucieuse et savante : tout est prétexte pour passer du coq à l'âne et du fil à l'aiguille. On navigue sans cesse d'un personnage à un autre, d'une époque à une autre. Sans que cela devienne confus ou embrouillé, on devine par petites touches successives le passé, la face cachée des uns et des autres, de Brodeck aussi. C'est ce qui fait tout le charme de cette lecture.
Un peu comme si l'on découvrait peu à peu les pièces d'un grand puzzle.
Un puzzle où il s'agirait de reconstituer un tableau.
Mais un tableau de Jérôme Bosch. Car c'est bien l'horreur et la noirceur que l'on découvre derrière chaque image.
«- C'est toi qui a lavé le sol ?
- Il faut bien que quelqu'un le fasse ...
- Et cette tache qu'est-ce que c'est ?
- À ton avis Brodeck ?»
Je me suis retourné vers Schloss.
« À ton avis ...» répéta-t-il d'un air las.
Brodeck vit dans un village où le curé est devenu un ivrogne : obligé de boire pour «oublier» tout ce qu'on est venu lui confier sous le sceau du secret de la confession.
Très vite, on a bien sûr une vague idée du tableau d'ensemble et l'on se doute que le lynchage de l'Anderer cache en réalité un drame encore plus sombre, comme si l'on disposait du modèle pour notre puzzle.
Mais cela ne suffit pas à la démonstration et tout l'art de Philippe Claudel est bien de nous amener, pièce par pièce, à prendre conscience de cette mécanique infernale et sous une apparence anodine de fable philosophique, il nous entraîne au plus noir de l'âme humaine.
Si certains croyaient encore que le rire est le propre de l'homme, ils découvriront que Brodeck est d'un tout autre avis : pour lui, c'est de lâcheté qu'est pétrie l'humanité.
Les éditions
-
Le rapport de Brodeck [Texte imprimé], roman Philippe Claudel
de Claudel, Philippe
Stock
ISBN : 9782234057739 ; 21,85 € ; 22/08/2007 ; 414 p. ; Broché -
Le rapport de Brodeck [Texte imprimé], roman Philippe Claudel
de Claudel, Philippe
le Livre de poche / Le Livre de poche
ISBN : 9782253125723 ; 7,20 € ; 01/04/2009 ; 384 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (53)
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Une lecture pesante mais qui mérite de s'y attarder.
Critique de Sundernono (Nice, Inscrit le 21 février 2011, 41 ans) - 15 octobre 2021
Je dois avouer avoir été agréablement surpris par ce roman délicat et bien écrit et qui pourtant au départ ne m’emballait pas plus que cela.
Une lecture originale.
Un roman qui frappe et qui marque
Critique de Cédelor (Paris, Inscrit le 5 février 2010, 53 ans) - 28 mars 2018
Et maintenant que je l’ai fini, je n’ai eu aucun regret de l’avoir commencé mais en ai eu de l’avoir fini. C’est vous dire que c’est vraiment un excellent livre. Encore meilleur que « Les âmes grises » qui était déjà très bon. Philippe Claudel m’épate, il est vraiment un très très bon écrivain ! Est-il un grand écrivain ? J’inclinerai à l’affirmer.
Cette histoire de rapport que doit écrire un homme sur un crime, dans un village proche de la frontière allemande, au sortir de la seconde guerre mondiale, un homme qui est déjà lui-même rescapé des camps de la mort, rescapé donc d’un crime plus grand encore, est édifiante. Philippe Claudel aime à scruter les âmes pour en faire sortir la noirceur. Mais toutes les âmes ne sont pas noires, même si beaucoup ont leur part d’ombre, et Philippe Claudel sait aussi faire ressortir les âmes qui réussissent à conserver une part positive d’elles-mêmes, et qui ne sont pas les plus nombreuses. Tout n’est pas que corruption et méchanceté. Ce sont surtout les circonstances qui, soit forcent certains à s’abaisser, ou, chez d’autres, révèlent leur force d’âme.
Et l’on se dit, comme l’ont déjà fait plusieurs des commentateurs, dans les critiques de CL : « qu’aurais-je fait, moi, placé dans ces mêmes circonstances ? » La réponse est impossible à connaître, tant qu’on n’y a pas été confronté. Les personnages du rapport de Brodeck ont pu y répondre, eux.
Ce roman est servi par une belle écriture, sans concessions, dotée d’une grande faculté d’analyse et d’introspection, mais sans fioritures et qui va à l’essentiel en évitant les détours. Un roman qui frappe et qui marque, même longtemps après en avoir reposé le livre sur son étagère.
fable sur notre inhumanité
Critique de Deinos (, Inscrit le 14 février 2009, 62 ans) - 5 juin 2016
Il y a le récit, noir, prenant, voguant parfois entre rêve et réalité... laissant l'esprit libre de maintes interprétations... il y a cette lâcheté humaine... la peur de l'autre, la peur de ce qu'on est aussi soi-même, la petitesse... un récit évoquant une époque pas si lointaine mais néanmoins intemporel...
Un livre d'autant plus noir que nul homme n'a en soi quelque aspect positif... Brodeck lui-même ayant sa part d'ombre... seules les femmes semblent épargnées, îlots d'humanité hélas assaillies et salies par les hommes...
Ce côté peut-être un peu réducteur et désespérant me paraît d'ailleurs nuire en soi au récit... de par ce systématisme... mais n'en amoindrit guère la force... juste un peu naïf*...
Un beau récit sur la mémoire... ne se termine-t-il pas sur "de grâce, souvenez-vous, Brodeck"
* : étant donné que je lis en ce moment "Les furies de Hitler"
L'expérience de l'autre
Critique de Angreval (Brossard, Inscrit le 11 août 2010, 78 ans) - 27 novembre 2015
En contre-point, l'histoire de Brodeck, étranger lui-même, réduit à l'état sous-humain dans les camps de la guerre, dérives extrêmes de cette peur de l'autre qui déshumanise autant la victime que le bourreau. Le Rapport de Brodeck présente un cheminement possible pour la suite des choses: l'oubli, le besoin d'oublier même si dans la tête de la victime, rien ne s'efface.
Le récit fond les deux trames: les événements suite à l'arrivée de l'Anderer et l'histoire de Brodeck, le narrateur et le témoin. Si l'auteur passe de l'un à l'autre comme suivant le fil de la pensée de Brodeck, on ne s'y perd pas, une histoire venant renforcer le sens de l'autre. Le tout est écrit dans une langue très riche, imagée, évocatrice de cette vallée, de son village, de ses forêts. Un microcosme d'un monde où, on le sait, toutes les dérives sont possibles.
la folie des gens normaux
Critique de Ellane92 (Boulogne-Billancourt, Inscrite le 26 avril 2012, 49 ans) - 19 mai 2015
Comme on ne lui laisse pas vraiment le choix, Brodeck se met à l'ouvrage, alternant l'arrivée et la vie de l'étranger dans le village avec son vécu dans le camp de travail où il a (sur)vécu pendant un an. Il va évoquer sa femme également, qui depuis son retour, passe son temps à chantonner devant la fenêtre, incapable de s'exercer à d'autres activités. Et puis il va parler de sa fille, ou à sa fille aussi, peut-être et surtout.
Je suis tombée sous le charme de ce livre, dès les premières pages. Sous couvert d'un rapport administratif, Brodeck nous dépeint sans concession la lâcheté humaine, qu'elle soit la sienne propre face à l'impitoyable réalité des camps ou vis-à-vis de l'étranger, celle du curé qui tente d'oublier dans le vin le contenu des confessions dont il a la charge, celle de ce village où l'on reconnait tous les villages. P. Claudel démonte la mécanique qui amène à dénoncer son voisin, les hontes partagées, qu'il faut cacher à tout prix, surtout quand le regard de l'Autre menace de nous les dévoiler en plein jour. Il dénonce également l'intolérable intolérance faite aux étrangers, aux différents, en condamnant les modes de fonctionnement des petits villages bien de chez nous. Enfin, il fait la part belle à l'humanisme, et à l'espoir de pouvoir faire autrement.
Le rapport de Brodeck est un livre qui percute et dérange, qui interpelle et sonne comme une claque, et qui, bien que triste, n'est pas dépourvu d'une note d'espoir. A découvrir d'urgence !
Depuis, j'y ai beaucoup songé à ce beurre, ce petit morceau de beurre qui faisait défaut dans le garde-manger. On ne se rend jamais trop compte combien le cours d'une vie peut dépendre de choses insignifiantes, un morceau de beurre, un sentier que l'on délaisse au profit d'un autre, une ombre que l'on suit ou que l'on fuit, un merle que l'on choisit de tuer avec un peu de plomb, ou bien d'épargner.
L'homme est ainsi fait qu'il préfère se croire un pur esprit, un faiseur d'idées, de songes, de rêves et de merveilles. Il n'aime pas qu'on lui rappelle qu'il est aussi un être de matières, et que ce qui s'écoule entre ses fesses le constitue autant que ce qui s'agite et germe dans son cerveau.
O petite Poupchette… certains te diront que tu es l'enfant du rien, que tu es l'enfant de la salissure, que tu es l'enfant engendrée de la haine et de l'horreur. Certains te diront que tu es l'enfant abominable conçue de l'abominable, que tu es l'enfant de la souillure, enfant souillée déjà bien avant de naître. Ne les écoute pas, je t'en supplie, ma petite, ne les écoute pas. Moi je te dis que tu es mon enfant, et que je t'aime. Je te dis que de l'horreur naît parfois la beauté, la pureté et la grâce. Je te dis que je suis ton père à jamais. Je te dis que les plus belles roses viennent parfois sur une terre de sanie. Je te dis que tu es l'aube, le lendemain, tous les lendemains et que seul compte cela qui fait de toi une promesse. Je te dis que tu es ma chance et mon pardon. Je te dis ma Poupchette, que tu es toute ma vie.
Déception
Critique de AE73 (, Inscrite le 25 janvier 2013, 57 ans) - 24 mars 2013
Concernant Borgès, pour l'anecdote un de ces recueils de nouvelles s'intitule le Rapport de Brodie, seulement 2 lettres de différences dans le titre, est-ce un hasard ?
"Toutes blessent, une tue"
Critique de Prouprette (Lyon, Inscrite le 5 février 2006, 40 ans) - 5 septembre 2012
Brodeck nous laisse nous introduire dans sa tête, et fouiller comme on fouine dans un vide-grenier. Les idées viennent a priori sans logique, comme des bribes de souvenirs qui surgissent au hasard... Mais la logique est là, et le talent d'écriture est pour moi non négociable! Claudel arrive à transmettre au lecteur la confusion et l'état de perdition de Brodeck rien qu'à sa manière d'écrire.
Les phrases s'enchainent, les idées fusent, et caché sous cette rivière de souvenirs, Claudel nous transporte dans un récit noir et tristement trop réel avec une logique et un savoir-faire plein de subtilité.
Vous l'aurez compris, j'ai adoré! Le rapport à Levi (Primo hein, pas l'autre!^^) se fait forcément, et pourtant, ce livre me semble unique!
Quel livre magnifique
Critique de Bobo (, Inscrit le 10 décembre 2009, 65 ans) - 27 avril 2012
Immanquablement il me fait penser à Primo Levi, pas de haines, pas de jugements, des faits et encore des faits.
La vengeance n'y pensons pas, les faits et encore des faits.
Tout est suggéré, progressivement nous comprenons la vérité ou du moins nous tentons.
Et qui est l'Anderer ? pour moi je pense qu'il le père ou du moins a un lien de parenté avec les trois jeunes filles assassinées.
Une très belle écriture, simple, du grand art.
Inutile de dire que j'ai adoré
Démonstration des principes du racisme
Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 2 février 2012
Son écriture et la manière dont il tient le lecteur en haleine démontrent, s'il s'en fallait encore, qu'il est un grand auteur.
Il est vrai que la noirceur et le pessimisme sont des caractéristiques dominantes de ce roman, à l'image d'autres oeuvres de l'auteur. Je reprends le titre d'une autre critique, après les âmes grises, le roman aurait pu s'intituler les âmes noires.
Je recommande cependant ce roman qui interpelle et qui peut donner l'envie de lire d'autres romans de Philippe Claudel.
Belle découverte
Critique de A2line (La Rochelle, Inscrite le 9 août 2011, 37 ans) - 9 août 2011
La quatrième de couverture est intrigante et quand je me suis plongée dans le livre j'ai été tout de suite transportée dans l'atmosphère étrange qui règne tout au long du roman. Il est à la fois poignant, dérangeant, triste, révoltant... Une chose est sûre, à peine une page tournée que je voulais découvrir la suite.
Une belle découverte de cet auteur dont je ne connaissais rien jusqu'à maintenant, et qui me donne envie d'en lire plus de sa plume.
En tout cas ce livre mérite vraiment ma première critique !!
La pervenche des ravines !
Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 5 août 2011
Parce qu'il n'est pas utile de nommer les peuples.
Parce qu'il n'est pas utile de qualifier ces attitudes humaines.
Pour toutes ces raisons et tant d'autres , je confirme l'avis du grand nombre ; cet ouvrage est un chef-d'oeuvre .
" Je m'appelle Brodeck et je n'y suis pour rien " . Phrase qui ouvre et referme le roman .
Je ne reviendrai pas sur l'histoire , maintes fois retracée par les précédentes critiques .
Si vous souhaitez néanmoins y goûter , je vous invite à vous rapporter à celles de BMR & MAM , JLC et Alma.
Après le succès des " âmes grises " , Philippe Claudel descend d'un cran, dans les bas-fonds de l'âme humaine ; là ou se logent les plus vils actes et pensées.
Là où le Groupe permet de dissoudre la petitesse individuelle.
Une oeuvre qui aborde les thèmes ;
de " l'Autre " ( l'Etranger , le traître , l'ordure ... )
de la mémoire ( " tu vas raconter l'histoire , tu seras le scribe " )
de la croyance ( même le prêtre ne croit plus en Dieu )
de la Culture face à l'ignorance.
de l'Amour pour survivre et donner du sens.
de l'Art ( L'Anderer est un artiste , un créateur , un " miroir " pour les hommes )
Une oeuvre puissante , magnifiquement écrite, au style original ( flash-back permettant de reconstituer les pièces du puzzle )
Des phrases " chocs ",sans fioritures :
" C'est la peur qui gouverne le monde "
" N'oublie pas que c'est l'ignorance qui triomphe toujours, Brodeck , pas le savoir "
" L'unique morale qui prévaut , c'est la vie. Seuls les morts ont toujours tort . "
" Ces femmes qui nous ont mis au monde et qui nous regardent le détruire "
Je dois vous l'avouer , j'ai pris une énorme claque à la lecture de ce petit bijou.
Une pépite de la littérature française.
Déçue
Critique de Poki (, Inscrite le 1 mars 2010, 50 ans) - 22 juillet 2011
déçu...
Critique de Dabe78 (, Inscrit le 12 juillet 2011, 54 ans) - 12 juillet 2011
Une découverte pour moi ce Claudel...
Critique de Jonath.Qc (, Inscrit le 6 juillet 2011, 46 ans) - 7 juillet 2011
C'est en errant sur votre site que j'ai découvert Le rapport de Brodeck, du même coup ce Philippe Claudel, et je dois dire que j'ai dévoré ce roman.
Une plume juste et imagée, une histoire où se côtoient, dans la plus parfaite harmonie, des images de guerre, d'amour, le fantastique...tout cela en un mélange hautement réussi.
Pour nombre de générations, la deuxième guerre n'est que souvenirs des autres. On n'a qu'une infime connaissance des atrocités quotidiennes vécues par ceux qui ont subi les camps. Le roman atteint sa cible, celle de nous rappeler l'existence de cette inhumaine deuxième guerre.
Beau. Touchant. Dur.
Un livre qui donne envie de lire Claudel en entier.
Les âmes noires
Critique de Chameau (, Inscrit le 10 novembre 2010, 44 ans) - 3 mai 2011
Un portrait qui nous hante
Critique de Bafie (, Inscrite le 19 juillet 2004, 63 ans) - 8 février 2011
Il faut dire que ce livre nous parle de l’âme humaine et de sa noirceur, de la peur et de la bêtise qui font commettre d’horribles crimes, de ces temps où l’humain perd toute humanité.
Et pourtant il est beau ce livre.
Et Brodeck, son héros, est une belle âme, une âme sensible aux parfums des bois, au souffle du vent dans les cimes, une âme apeurée par la violence, une âme ensanglantée, une âme sensible.
Ce roman est magnifique monsieur Claudel, il nous confronte à l’humanité tour-à-tour magnifique ou pitoyable...MERCI
Dans mon panthéon
Critique de Papyrus (Montperreux, Inscrite le 13 octobre 2006, 64 ans) - 15 janvier 2011
Voilà, je viens de finir ce livre, qu’une « dealeuse » de mots m’a fait découvrir. C’est un très beau roman, beaucoup plus subtil qu’il n’y paraît, qui malheureusement n’a pas su conquérir certains lecteurs, mais que j’accrocherai, quant à moi sans hésitation, dans la grande galerie des peintures de l’âme humaine.
Une attente dévorante
Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 9 décembre 2010
Cette attente qui monte m'a beaucoup plu, ainsi que la description des paysages, de ce village de montagne. On a presque l'impression d'être un de ces villageois. Par son thème, ce roman m'a aussi fait penser à celui de Jean Teulé "mangez-le si vous voulez", sur le phénomène de foule dans des villages un peu retirés, sur la peur de l'altérité.
Une très bonne lecture
Difficile de rentrer dans le livre
Critique de Marthe (, Inscrite le 19 novembre 2010, 54 ans) - 23 novembre 2010
Une belle allégorie
Critique de Florian1981 (, Inscrit le 22 octobre 2010, 43 ans) - 22 octobre 2010
Un beau jour un homme, on ne sait pas qui il est et on ne le saura jamais, arrive dans ce village (situé on ne sait où) et à partir de là la tension monte parmi les villageois jusqu'à l'assassinat de cet homme. Les villageois chargent Brodeck de rédiger un rapport pour raconter ce qu'il s'est passé. Celui-ci s'exécute, sans enthousiasme, mais à côté de ce rapport "officiel" il va rédiger également un rapport non expurgé dans lequel il va raconter son histoire avant le camp, son arrivée et sa vie dans un petit village, sa déportation et sa vie dans le camp de concentration, sa libération et son retour au village et sa nouvelle vie qui redémarre. Attention, le récit n'est pas linéaire chronologiquement mais ces différents moments de la vie de Brodeck se croisent pour insuffler beaucoup de vie au roman.
Philippe Claudel manie à la perfection le mystère et l'émotion pour aboutir à une allégorie sur la méchanceté de certains hommes et le courage et la bravoure d'autres. Un 5/5 amplement mérité
???
Critique de Ginicoui (Montréal, Inscrite le 24 septembre 2009, 47 ans) - 23 septembre 2010
Incompréhension
Critique de Listelle (Bordeaux, Inscrite le 25 juillet 2010, 38 ans) - 18 août 2010
Je n'ai pas accroché, l'écriture, l'histoire...
Peut-être que je dois recommencer.
Greffier de la barbarie
Critique de Jlc (, Inscrit le 6 décembre 2004, 81 ans) - 19 juillet 2010
Ce terrible roman est celui de la barbarie humaine faite d’intolérance, de cruauté, de désespérance, d’ignominie quand le mal n’est plus qu’une banalité ordinaire. Philippe Claudel en ne situant pas précisément son récit dans le temps et l’espace lui a ainsi donné une dimension tragique parce qu’universelle. Bien sûr on pense au nazisme quand Brodeck parle de l’autodafé dans la Capitale, quand il évoque la nuit blanche qui est une transposition de la nuit de cristal en 1938. A la description de la vie au Camp, comment ne pas se remémorer les photos atroces de la jeune soldate américaine, Lynndie England, tenant en laisse un prisonnier nu dans la prison d’Abou Ghraib en Irak. Et quand il dit que c’est la peur plus que la haine qui victimise on se souvient de ce que les dernières années nous ont appris sur les méthodes du KGB, de la Stasi ou de la Securitat du dictateur mégalomane Ceausescu pour n’en citer que quelques uns. Dans ce monde tragique, même les victimes ne sont pas innocentes ; si « de tous les dangers celui de la mémoire est un des plus terribles », les victimes restent « des plaies qui jamais ne guériront ». Devoir de mémoire mais à quel prix car «la guerre ravage et révèle ». Nous sommes concernés, comme acteurs ou comme spectateurs restés passifs ? Qu’aurions nous choisi, s’il peut y avoir un choix, entre l’ambiguïté maligne, l’hésitation morale et la résistance ? Que ferons nous ?
Ce livre admirablement construit est écrit avec un vocabulaire somptueux, dans une langue pure. Si Claudel décrit les hommes comme « grands mais jamais à la hauteur d’eux-mêmes », il leur oppose par son style et ses mots la beauté de la nature comme par exemple « de la pluie. Simplement de la pluie, de la pluie frappant des tuiles et des vitres ». Il sait comme Brodeck « ce que racontent les forêts, les bêtes, les arbres, le ciel, les rochers des montagnes, aussi les autres hommes quand on sait les écouter ». J’ai toutefois regretté que le ton soit un peu trop monocorde, parfois un peu lassant. Cette histoire demandait plus de révolte que de sagesse.
La fin qui est une fuite m’a désespéré malgré le geste d’Emelia. Mais Emelia, Fedorine et la petite existent-elles vraiment quand on trouve dans les dernières pages une histoire que raconte la vieille à la petite et qui nous renvoie à un autre ouvrage de Claudel « La petite fille de M.Linh » ?
Philippe Claudel signe, avec ce rapport, un des premiers grands livres du vingt et unième siècle en travail de mémoire des drames du vingtième.
Lueur d’espoir dans ces ténèbres : le fait que ce soit nos enfants ou nos petits enfants, qui aient décerné à l’auteur le prix Goncourt des lycéens.
De la nature de l'homme
Critique de Fa (La Louvière, Inscrit le 9 décembre 2004, 49 ans) - 6 juillet 2010
L'ouvrage réussit à merveille à créer une atmosphère et le décor lui-même se prend des traits de personnages.
Quant aux principaux personnages, ils se caractérisent par leur complexité : Brodeck étant à la fois une victime qui choisit de ne plus accepter ce statut, l'anderer qui représente la figure du sacrifié, le tavernier qui ne supporte plus le poids de ses remords, le curé qui fuit la réalité dans l'alcool et l'aliénation.
J'ajouterais une grande maîtrise de l'attente dans la narration, qui donne toujours envie de continuer à s'aventurer plus loin dans le récit et dans la noirceur de l'homme.
Un livre essentiel.
Critique de Ellcrys (Marseille, Inscrite le 24 décembre 2009, 40 ans) - 24 décembre 2009
Nécessaire car je n'arriverai jamais, malgré mes nombreuses lectures (romans, essais, témoignages) à comprendre la folie humaine, le besoin pour un être humain (homme ou femme) de faire souffrir, d'humilier, d'anéantir un de ses semblables. Car entendons-nous bien, tous les êtres humains, quels qu'ils soient sont identiques... Je suis peut-être trop naïve, mais je n'arrive pas à comprendre pourquoi tant de personnes en détestent d'autres au point d'en commettre des actes innommables. Chaque page de l'ouvrage de Philippe Claudel dépeint toute cette monstruosité qui pourrit le monde, à m'en faire venir la nausée. Chaque page montre les faiblesses humaines, ne cherchant pas à les excuser, mais plutôt d'essayer vainement, de comprendre ce qui pousse un individu à agir ainsi... Et comment un seul homme, avec une idéologie infâme, peut-il ainsi entraîner des millions d'hommes à la mort ?
J'ai toujours, depuis mes années collèges et l'étude de ces périodes sombres de l'histoire, été horrifiée (le mot n'est certainement pas assez fort) de voir jusqu'à quel point l'humain peut tomber. J'imagine la douleur, le courage qu'il a fallu à Philippe Claudel pour essayer de raconter tout cela. Tout au long du livre, Brodeck nous raconte l'atrocité qu'il a vécu, qu'il vit et les poisons que lui-même a pu infliger à d'autres. Mais Brodeck, à travers ces pages, semble tellement différent de ces bourreaux, car il a conscience de l'horreur, de la rage, des ténèbres berçant ce monde et il en a honte ; cette honte le ronge. Il m'a été très sympathique, j'ai eu parfois envie de le prendre dans mes bras, comme le ferait une mère, et de le rassurer, de le protéger...
Souvent à cette lecture j'ai pleuré au point de devoir fermer le livre et le mettre de côté un moment, mais le talent de l'auteur et la voix de Brodeck m'obsédait tellement, jusqu'à n'en plus pouvoir dormir. Ce récit m'habitera sûrement encore fort longtemps. L'auteur signe là une oeuvre majestueuse, émouvante, intense et horrible à la fois. Mais ce livre est nécessaire et, il me plaît à croire que de tels ouvrages, lus par des millions, des milliards d'êtres humains, permettront que de telles monstruosités ne se répètent plus jamais... mais ce n'est qu'un rêve qui chaque jour, lorsque je lis les journaux, se retrouve réduit à néant. Merci Brodeck, merci Philippe Claudel.
Rhaaa, Claudel...
Critique de Tommyvercetti (Clermont-Ferrand, Inscrit le 18 décembre 2006, 36 ans) - 20 décembre 2009
La façon dont au début, on arrive dans cette narration décousue, sans informations, sans indices, comme un cheveu dans la soupe. On ne comprend rien, et puis Brodeck commence à parler. De lui, d'avant, des gens du village, et de son travail...
Et puis, peu à peu, on commence à y voir plus clair. On situe l'histoire, on devine des choses qui nous font frémir, car sans être dites, elles sont suggérées. Brodeck parle de tout ça non pour nous le raconter ; toute son histoire n'intervient que comme anecdotique, pour lui, aussi ne prend-il pas la peine de nous l'expliquer. C'est à nous de comprendre par nous-même, à nous de voir ce qui s'est passé.
La façon que Claudel a de percer à jour les sentiments et la psychologie humaine... déjà dans "La petite fille de M. Linh" j'avais été émerveillé... Il voit tout ce que nous savons sans oser nous le raconter, et il le montre à travers une histoire, et tout ce que ces actes, ces comportements, peuvent amener de terrible. Ce comportement humain qu'est celui que tous ont partagé dans ce village, humain et pourtant tellement monstrueux. Encore une fois, il nous fait réfléchir sur la possibilité d'une telle chose, comme des gens peuvent en arriver à ces conséquences ?
Comment ? Comme tout le monde, vous, moi, lui, le premier venu. C'est la "banalité du mal".
Hop, prochain Claudel, "les âmes grises", je l'ai déjà acheté =p
Tristesse infinie et somptueuse écriture
Critique de Ori (Kraainem, Inscrit le 27 décembre 2004, 89 ans) - 21 novembre 2009
Son hameau, où il a tant bien que mal repris sa place parmi les habitants aux manières frustes et aux consciences endormies, Brodeck nous le raconte en alternant anecdotes quotidiennes et atroces réminiscences de ces camps de la mort dont il n’a réchappé que pour souffrir.
Mais survient alors sur son cheval un étonnant saltimbanque, habillé de blanc, poudré, parfumé, et tirant un âne chargé de bagages. Ce clown mystérieux, que dans leur dialecte les villageois surnommeront l’Anderer (l’Autre) va désirer s’installer définitivement parmi eux, mais peine perdue : l’âme du village est ombrageuse et l’opération de rejet finit étrangement par conduire à la mise à mort collective du visiteur.
Quasiment le seul lettré de son village, Brodeck est alors chargé, pour les Archives, de rédiger un Rapport au sujet de ce meurtre, et ce, en des termes qui devraient épargner la bonne conscience du village ... Mais, déjà brisé par ses souffrances personnelles et en butte à la surveillance inquiète des habitants qui guettent la sortie de son Rapport, notre héros prend une décision pathétique que l’on ne dévoilera pas.
Le style de Philippe Claudel fait de ce roman une complainte immense, aux résonances quasi-poétiques, et dont on ne sait s’il faut d’abord retenir la tristesse infinie ou la somptueuse écriture …
L'humanité en noir
Critique de Gg de coat canton (, Inscrit le 30 septembre 2009, 84 ans) - 30 septembre 2009
Alle verwunden, eine tödtet.
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 27 septembre 2009
Cette citation est en allemand, et les patronymes des protagonistes également, et les noms de lieux … C’est la seule concession de Philippe Claudel pour « situer » le cadre de son roman ; en pays de langue germanique (ou assimilée), quelque part en Europe Centrale. Rien ne sera plus précis, non plus que l’époque, encore que la référence à la guerre qui s’y déroule soit quasi explicitement celle qu’on appelle « la seconde guerre mondiale ». Elliptiquement, on comprendra qu’il fera référence au « système nazi », à leurs actes barbares, mais pas que …
Un peu à l’image de la trilogie d’Agota Kristof. D’ailleurs je situerais « Le rapport de Brodeck » comme un croisement de cette trilogie avec « La route » de McCarthy. Noir (non, gris !), glauque, et fable sur la face mauvaise de l’homme : sa lâcheté, sa cruauté, sa peur de l’autre.
L’autre, chez Philippe Claudel, c’est l’Anderer. Littéralement traduit de l’allemand : l’autre. C’est par lui qu’arrivera le détonateur final, celui qui provoquera le « rapport » demandé par le village à Brodeck, et qui provoquera la rédaction par celui-ci d’un rapport bien plus vaste que celui sur l’autre ; celui de son histoire à lui, Brodeck.
C’est qu’il lui en est arrivé dans sa maigre vie, à Brodeck. Et d’évènements heureux, guère. Les points saillants étant son internement dans ce qu’on comprendra comme étant un camp de concentration (d’où la comparaison de certains avec « Acide Sulfurique » d’Amélie Nothomb), et le sort subi par Emelia, sa femme, en son absence, un sort hélas partagé par tant de femmes en contrées en guerre ou instables.
C’est dur, c’est cruel. Mieux vaut avoir une bonne santé psychologique pour aborder « Le rapport de Brodeck » (comme pour Agota Kristof, comme pour McCarthy) afin de ne pas sombrer dans le pessimisme le plus cruel. Mais qu’est-ce que c’est beau et combien les thèmes abordés, comme dans une fable complexe, sont essentiels. C’est une vision de l’humanité désenchantée, mais certainement celle que doit en avoir la plus grande partie de la population humaine en dehors de nos contrées favorisées.
« Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache.
Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer.
Mais les autres m’ont forcé : « Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as fait des études. » J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir. »
Magistral de suspense, de construction, d’émotion
Critique de Lutzie (Paris, Inscrite le 20 octobre 2008, 60 ans) - 21 septembre 2009
Je veux voir dans le choix des lycéens (Goncourt 2007) le désir d'une humanité meilleure, comme dans le geste d'Emelia vers son mari, à la fin, un sursaut contre la nuit.
Bien mené
Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 6 septembre 2009
C’est d'ailleurs plutôt Brodeck, son personnage, qui nous y emmène, sans crainte : il ne peut plus avoir peur de rien après ce qu’il a vécu.
Une universalité troublante ; et pour preuve, voici un roman qui traite des horreurs de la Shoah sans pour autant jamais employer le terme de Juif, Allemand, Nazi.
Mais voila que je m’embrouille en voulant clarifier le récit. En effet, je n’ai pas le talent de Claudel qui enchaine ellipse sur ellipse, qui entremêle à merveille chaque période de sa vie sans pour autant abandonner en route ni lecteur, ni témoin, ni lui-même.
Ce Rapport de Brodeck m’a rappelé Acide Sulfurique d’Amélie Nothomb, roman assez controversé car pour certains critiques, la “mode” en est aux récits sur les camps de concentration. Pourtant aucun des millions de livres qui retracent avec tant de fidélité l’abominable humanité n’a emmené à moins de guerres, d’injustice et de souffrance.
Il faudra encore beaucoup de Claudel si l’on veut atteindre le nirvana, ou plus modestement, l’égalité.
(prix Goncourt lycéen pour cet ouvrage, nominé pour le Goncourt.)
Pauvre Brodeck...
Critique de Lindy (Toulouse, Inscrite le 28 mai 2006, 46 ans) - 3 septembre 2009
A travers l'histoire d'un village dans la période après-guerre 39-45, Philippe Claudel présente ce que la nature humaine a de plus sombre en soit et ce, par les yeux de son personnage principal, Brodeck.
J’ai toujours plus de difficultés à dire pourquoi j’ai aimé un roman que l’inverse… Il s’agit d’une histoire écrite avec prudence, avec suspense et qui nous présente des personnages hauts en couleurs, crédibles. Une écriture fluide, simple et pudique à la fois qui rend le tout fabuleusement agréable à lire (malgré une intrigue et un tout assez glauque !).
un classique universel
Critique de Didier.verna1@free.fr (, Inscrit le 14 mars 2009, 65 ans) - 20 mars 2009
Je n'ai pas lu plus beau livre depuis des années et mes étagères sont pourtant pleines de beaux souvenirs littéraires! Merci M. claudel pour les moments magiques partagés avec votre talent ...et à celui qui m'a conseillé de courir l'acheter.
remarquable, mais...
Critique de Phineus (Bordeaux, Inscrit le 16 février 2009, 87 ans) - 16 février 2009
Pas simple !.
Noirceur
Critique de Manumanu55 (Bruxelles, Inscrit le 17 février 2005, 45 ans) - 11 décembre 2008
Certains passages, sur les camps évidemment font "mal à lire", comme souvent sur le sujet. Et les portraits sont très très bien écrits... mais malgré tout le roman reste assez indigeste sur certains points, entre autre le côté "allemand" (moi j'ai mélangé tous ces noms de personnages d'ailleurs).
Mitigé donc, même si le contenu vaut vraiment le coup !
Se souvenir de sombres choses
Critique de El grillo (val d'oise, Inscrit le 4 mai 2008, 51 ans) - 10 octobre 2008
On navigue sans cesse entre passé et présent. Le passé des camps de concentration, et le présent fait de rencontres des personnalités du village. J'avoue avoir moins accroché à ces passages où Brodeck dépeint au fur et à mesure les gens qui l'entourent, des personnes qui ont tant de choses à cacher, bonnes ou mauvaises. Je reconnais toutefois le talent de l'auteur qui sait nous distiller ses informations au compte goutte, maintenant un "suspens" constant. Les passages sur le camp sont plus relevés, plus accrocheurs.
Pour ces raisons, j'ai eu beaucoup de mal a rentrer dans l'histoire. C'est un roman d'ambiance, où il est bon d'entrer d'un coup. Ainsi, je conseillerai d'avoir du temps devant soi pour attaquer les pages. Je lis par périodes courtes, je pense que cela a été préjudiciable à ma lecture.
Ce roman est une réussite
Critique de Naturev (DOLE, Inscrit le 29 mai 2008, 58 ans) - 9 septembre 2008
L’auteur, avec un style simple, une écriture coulante, des mots peu recherchés, arrive à décrire une atmosphère, un paysage, une culture d’une façon qu’on les visualise et ressente immédiatement avec une limpidité nette. Un secret lourd dans un village, un passé lourd du personnage principal d’une origine obscure et dramatique, une guerre qui vient de se finir, une atmosphère particulièrement sombre qui tient en haleine, un village isolé de montagne de type alémanique étouffant ou chaleureux perdu dans les montagnes, voilà quelques ingrédients de ce roman.
L’histoire, dans un cadre culturel existant et bien typé, reprend l’essence du nationalisme et du nazisme pour en tirer une trame imaginaire sur la quel se déroule ce roman. Il fait penser à une adaptation de la théorie de la « banalité du mal » que l’auteur met en application dans le quotidien déréglé de villageois. On met ici en mouvement la part de noirceur profonde d’individus quelconques, et le refuge de l’oubli.
Une grande réussite, qui met le lecteur face à ce qu’il y a de plus sombre et mesquin dans l’espèce humaine, avec la grande et petite histoire que l'auteur bâtit en conséquence. Bravo aux lycéens qui n’ont pas laissé passer cet ouvrage ; à se dire que ce manque de concession pour l’espèce humaine ne pouvait être nominé que par l’intransigeance de l’adolescent pour le monde des adultes.
époustouflant
Critique de Campanule (Orp-Le-Grand, Inscrite le 10 octobre 2007, 62 ans) - 8 septembre 2008
Tout a été dit
Critique de Agnes (Marbaix-la-Tour, Inscrite le 19 février 2002, 59 ans) - 9 juin 2008
Un appel à la tolérance
Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans) - 17 mai 2008
Et pourtant, ne pas lire le livre de Philippe Claudel revient à passer à côté d’un petit chef d’œuvre au style clair, précis, ciselé, si facile à lire que j’en ai dévoré les 400 pages en moins de deux jours ! Quel connaisseur de l’âme humaine que ce romancier ! Quelle monstrueuse mécanique que cet engrenage d’intolérance et de haine qui se déchaîne dans le cœur des masses humaines à certains moments de leur histoire !
Après une guerre assez monstrueuse et qui a de vagues ressemblance avec la seconde guerre mondiale, un étranger un peu bizarre vient s’installer dans un petit village perdu d’Europe centrale où l’on parle une sorte de dialecte vaguement bas allemand. Accueilli dans une certaine indifférence, cet homme si différent des frustes villageois (il semble avoir des moyens, il écrit sur un carnet et esquisse des croquis), finit par exaspérer le village qui va se débarrasser de cet « Anderer », cet étranger, cet autre, ce « différent » qui finit par lui devenir insupportable. Et comble de paradoxe, les villageois demandent au petit Brodeck, autre étranger, que l’on découvre être juif d’ailleurs, d’écrire une sorte de rapport les disculpant de leur faute. Brodeck est le plus cultivé du village, tous se sont même cotisés pour lui payer des études dans la capitale.
Ce livre est une fable, une parabole, un conte philosophique de très haute tenue. Aucun lieu, aucun contexte particulier n’est vraiment identifié. Cette triste affaire aurait pu se passer n’importe où, n’importe quand. La monstrueuse réalité humaine qu’elle révèle est universelle. Les personnages sont des archétypes. Ils posent plus de question qu’ils n’en résolvent. Qui est l’Anderer ? Que vient faire cet artiste dans ce trou perdu ? Qui sont ces villageois si pleins de défauts ? Chacun d’entre nous ne porte-t-il pas quelques traits des uns et des autres ? Comment réagirions-nous dans certaines circonstances ? Derrière une vision très pessimiste de l’humain, un appel à la tolérance, au droit à la différence en un mot à l’amour du prochain.
« Mais ici-bas, mieux vaut ne jamais avoir raison. C’est une chose qu’on vous fait ensuite toujours payer très cher. »
Sombre et difficile glissement de l'humanité
Critique de BONNEAU Brice (Paris, Inscrit le 21 mars 2006, 40 ans) - 15 avril 2008
Situant son histoire une fois de plus pendant la guerre, Philippe Claudel qui “écrit des choses souvent graves, souvent tragiques, mais toujours éclairées par des lumières ou des espoirs“, interroge le lecteur sur son humanité et sa volonté d’oublier, d’effacer ou de conserver en mémoire. “Je voulais observer l’humanité quand elle devient inhumaine“, déclare-t-il dans une interview. Existe-t-il meilleure période que celle de la guerre pour évoquer la dérive des hommes et des esprits ?
Dans un lieu sans nom et une histoire sans date, qu’on comprend être un village d’une région frontalière de l’Allemagne après la seconde guerre mondiale, Brodeck est chargé par les habitants de son village de rédiger un rapport sur un évènement venant juste de se produire, un soir où les esprits sont échauffés par l’alcool et les véhémences du nombre. “D’avantage touché par la suggestion que par l’évidence“, Philippe Claudel ne nomme jamais rien, et laisse le lecteur comprendre par lui-même les évènements passés à l’aide de descriptions et petits indices qu’il glisse.
Le rapport de Brodeck est un roman sombre et difficile, décrivant ce glissement de l’humanité qui se produit quand l’effet du groupe dilue les consciences et la culpabilité. Rejet des différences, méfiance de l’autre, de celui qui ne parle pas la même langue ou n’a pas les mêmes manière, autant de sujets que Brodeck aborde dans un rapport qu’il rédige secrètement et en parallèle du rapport officiel commandé par le village. Le seul reproche qu’on pourra trouver à ce roman serait celui de ce flou permanent, censé recentrer le lecteur sur le fond de l’histoire, et non sur le décors. A en préférer presque Les âmes grises…
Résumé du livre le rapport de Brodeck
Critique de Bernadette COUTURIER (, Inscrite le 29 octobre 2004, 72 ans) - 4 avril 2008
Les habitants du village confrontés au portrait de leur propre personnage dévideront leur rancoeur sur l'Anderer et même sur le Fremdër !
Roman bouleversant , inoubliable.
Critique de Nana31 (toulouse, Inscrite le 29 janvier 2006, 55 ans) - 14 février 2008
Le coeur des hommes...
Critique de Saperlipop (, Inscrite le 8 mars 2006, 42 ans) - 4 février 2008
On étouffe dans le camp pendant les persécutions du pauvre Brodeck et de ses co-détenus. Mais on étouffe aussi dans ce village perdu où rien ne change jamais, et surtout rien ne doit jamais changer !
On désespère de la noirceur des hommes qui ont pu faire les pires atrocités dans les camps. On désespère encore quand on les voit au quotidien, refuser l'étranger, menacer le différent...
Heureusement, il y a ce petit homme qui parvient à braver l'opposant, à sa façon, en survivant ! Et puis, ce petit homme qui prend le risque d'être différent pour combattre l'injustice.
Mais, au final, à 100 contre 1...
Espérons qu'il y aura plus de Brodeck et moins de pleutres !
Incontestablement brillant
Critique de Critique (Trets, Inscrite le 9 novembre 2004, 64 ans) - 20 janvier 2008
Une écriture juste, une façon détournée d'aborder un sujet mille fois traité, la douleur (la nature ?) humaine exposée dans sa plus grande lâcheté, l'espoir perdu, la tolérance, le désir d'aboutir malgré tout... et le tout écrit en dehors des règles traditionnelles chronologiques sans que cela ne perturbe le moins du monde ! Du génie...
La représentation de l' "Anderer" jouerait-elle le rôle de cassure en apportant une pointe d'éclairage à tant d'ombre ?
Quel brillant auteur ! On ne reste pas indifférent après une telle lecture. A conseiller aux amateurs de Claudel en particulier et d'émotions fortes en général. A déconseiller aux plus jeunes lecteurs, ils auront bien le temps de découvrir l'horreur humaine, laissons-leur le temps de prendre un certain recul.
de la lâcheté des hommes
Critique de Amanda m (, Inscrite le 10 janvier 2008, 57 ans) - 10 janvier 2008
C’est un roman magnifique et bouleversant. Un roman qui aborde les peurs, l’intolérance, la mémoire, le pardon, la culpabilité ; un roman qui est aussi et surtout extrêmement bien écrit, Philippe Claudel tisse des mots pour en faire récit qui malgré sa noirceur, n’en reste pas moins rempli de douceur et de beauté.
Une fable sur l'altérité
Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 23 décembre 2007
J’ai été particulièrement sensible à la portée universelle de l’ouvrage . Philippe Claudel dépasse la simple dénonciation des persécutions nazies (auxquelles il renvoie malgré tout notamment grâce à l’emploi de termes d’un dialecte germanique) en situant son récit dans un lieu géographiquement et historiquement indéterminé . Il entrelace habilement dans la confession de Brodeck la description de la vie du village au moment de la présence de l’Anderer, les retours sur les trois étapes importantes de la vie de Brodeck : son errance avant d’arriver au village, sa vie d’étudiant dans la Capitale où il est témoin des premiers pogroms, son expérience de « chien » dans le camp ; cet aller-retour du passé au présent de la narration du rapport permettant un éclairage mutuel de chaque période .
Il fait de Brodeck non seulement le simple scribe chargé de relater l’Ereigniës, mais celui qui distingue le double sens des mots , le second sens constituant une sorte de menace et qui montre le glissement progressif du sens neutre ou positif au sens négatif ou dépréciatif . Ainsi l’adjectif « fröh » qui signifie content mais aussi vigilant, le nom « fremder » étranger mais aussi traître ou ordure selon le contexte .
Tout comme l’Anderer, Brodeck est l’être venu d’ailleurs, celui que le village livre pour assurer sa survie quand il est menacé par un prédateur . Il est aussi un être de savoir, acquis lors de ses études dans la capitale . On peut d’ailleurs noter que les personnages positifs sont détenteurs de connaissances :Diodème : l’instituteur, Ernst Peter Limet : le vieux maître d’école, Stern : celui qui connaît les secrets des renards, la mère Pitz qui connaît le pouvoir des plantes . Comme l’Anderer qui , en peignant les yeux des villageois est capable de révéler leur face malsaine, Brodeck , par la plume de Philippe Claudel, sait, par une écriture sobre, mais dense, riche et fluide , témoigner d’une grande sensibilité aux images, sons et odeurs de la nature et tracer des villageois des portraits brefs mais évocateurs . Deux ou trois lignes suffisent pour camper un personnage dans sa singularité, par l’emploi notamment d’images animales . Si les hommes portent en eux les traces d’un animal, comme Göbbler qui ressemble aux coqs qu’il élève, les bêtes (porcs, renards, chiens, papillons) sont présentées comme des allégories des vices humains . La description des êtres et des choses, chez Claudel, n’est jamais simplement ornementale ; elle s’intègre parfaitement à la narration des faits .
Le choc que j’ai ressenti à la lecture de ce roman ne tient pas seulement aux qualités d’écriture de Claudel, mais à l’humanité qui émane des personnages . Les bons portent en eux aussi leur part d’obscurité, de mal et leur grandeur est d’oser la confesser (Diodème, Brodeck) ou de chercher à l’expier (Brodeck et son compagnon de train Kelmar) . L’émotion qui se dégage à la lecture de l’œuvre persiste longtemps une fois le roman terminé….
Je n’oublierai ni les bourreaux, ni les victimes ; ni les figures féminines de la vieille Fédorina, de Emélia , de Poupchette ; ni celles des villageois lâches ; ni celles des personnages hantés par leur péché……
« Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien
Brodeck, c’est mon nom
Brodeck,
De grâce, souvenez-vous
Brodeck »
Non Monsieur Brodeck, je n’oublierai pas votre voix …
La peur de l’autre
Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 29 novembre 2007
La description de la brutalité dans les camps est éprouvante. D’autant plus que le reste du bouquin est en tons de gris. On étouffe. Lorsqu’il se permet un peu de fantaisie – avec cette conclusion brillante et subtile à propos du talent de « l’Anderer » – je me suis délecté. Une nouvelle avenue pour cet auteur? Le réalisme magique / fantastique.
Le rapport que doit produire Brodeck est important pour la mémoire collective. Encore plus pour nous, cette histoire d’un homme qui se rend compte que la noirceur dans le cœur de ses anciens bourreaux, réside aussi dans celui de ses amis et concitoyens…
(Goncourt des lycéens)
les plus nombreux ont raison
Critique de Crosp (, Inscrit le 18 novembre 2007, 47 ans) - 25 novembre 2007
Belle écriture.
C'est indéniable, Philippe Claudel écrit bien.
J'appréhendais ce livre car je ne suis pas du tout intéressé par le thème de la persécution des juifs, sujet trop traité sans doute.
Et bien, pas une seule fois P. Claudel n'utilise ce mot.
Il transfère cette persécution sur un personnage totalement atypique, De Anderer, venu de nulle part, qui va être au centre de toutes les haines sans que l'on sache pourquoi tout au long du roman.
Je ne l'ai donc pas lâché et l'ai bien apprécié.
Bémol : les changements d'époque trop fréquents à mon goût, à chaque chapitre voire en plein milieu d'un paragraphe. Mais même là dessus, Claudel s'en sort bien puisqu'au moment où je me faisais la réflexion, le chapitre suivant explique que tout est désordonné, et que c'est comme çà.
Na.
Beau livre sur la nature humaine dans le microcosme d'un petit village totalement perturbé par l'arrivée de l'Anderer, l'artiste miroir...
A découvrir.
noirceur, peur et lâcheté
Critique de Printemps (, Inscrite le 30 avril 2005, 66 ans) - 10 novembre 2007
Le rapport sur la peur.
Critique de Laurent63 (AMBERT, Inscrit le 15 avril 2005, 50 ans) - 5 novembre 2007
L'histoire de Brodeck, son enfance difficile, sa déportation dans un camp, son retour au village avec la découverte du viol de sa femme, et tous les secrets de son village nous sont racontés avec un regard humain, plein de compassion. Le "Rapport" dont le charge les coupables du meurtre de l'étranger est un poids suplémentaire pour Brodeck. Les découvertes qu'il fera seront tout aussi édifiantes et dur pour lui. Ce livre est un peu comme un puzzle, le narrateur nous raconte l'histoire du meurtre et son histoire personnel, et finalement on s'aperçoit que tout est lié. C'est la peur qui empêche Brodeck de se révolter contre les commanditaires du "Rapport", c'est la peur aussi qui fait de lui un chien dans le camp et enfin c'est la peur qui pousse les gens d'un village à tuer un étranger qui à su comprendre beaucoup de chose sur eux.
L'auteur a su saisir les nuances de la peur et nous les faire comprendre. Ce roman est fort en émotion, il marque les mémoires et nous laisse un goût amer en travers de la gorge, mais il est bon de se souvenir, même du pire...
D'une originalité et d'une maîtrise incontestable
Critique de Matthias1992 (, Inscrit le 27 août 2007, 32 ans) - 4 octobre 2007
En effet "Le rapport de Brodeck" s'avère d'une grande richesse et d'un grand intérêt. Dans une langue déconcertante de fluidité et de simplicité, Claudel crée une ambiance oppressante de village isolé tout en bouleversant complètement l'ordre chronologique des faits et en accumulant les analepses.
Pourtant, si étonnant que cela puisse paraître, l'ensemble n'est ni confus ni désorganisé; il semble que l'auteur ait longtemps médité sur l'ordre dans lequel il aborderait des thèmes tels que l'arrivée de l'Anderer (personnage assez différent des villageois de par ses manières et ses rites), l'expérience de Brodeck dans les camps de concentration ou encore ses études dans une ville du nom de la Capitale.
Incitant beaucoup à la réflexion, "Le rapport de Brodeck" se démarque donc en premier lieu par les choix d'écriture originaux faits par Claudel (faits non racontés dans l'ordre chronologique, manque de repères spatio-temporels, personnage principal d'une force peu commune, emploi d'un patois germanique) et s'impose comme un livre largement recommandable.
Chronique de la noirceur de l'humanité
Critique de Ardigazna (, Inscrite le 9 novembre 2004, 51 ans) - 23 septembre 2007
à cette parfaite maîtrise de l'intrigue, savamment orchestrée, énonçant le meurtre d'un homme dès l'incipit, comme dans "Chronique d'une mort annoncée" de Gabriel Garcia Marquez, pour ensuite nous imprégner de l'atmosphère de ce village et de son passé dé-peint au grand jour, distillée à petites gouttes au moyen de va et vient temporels, d'hésitations du narrateur entre le réel et la fiction, de réflexions sur le pourquoi, sur ce mélange de peur et de bêtise collectives, sur le pardon, d'interrogations sur l'Histoire comme somme d'expériences particulières, alliant construction réfléchie et souci du détail, concision et justesse du style, il manquerait juste cette petite pointe d'originalité qui nous aurait fait crier au chef d'oeuvre... mais si vous ne deviez n'acheter qu'un roman français faisant l'actualité de cette année, ce serait bien celui-là ! C'est un bon et beau roman, que dis-je, c'est un très beau roman. Gageons, je l'espère, que Philippe Claudel ne se contentera pas cette fois de figurer parmi les concourables, mais qu'il verra son dernier roman s'orner d'un prix, lequel du coup retrouvera lui-même un peu de son prestige.
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