La saison des adieux de Karel Schoeman
( Afskeid en Vertrek)
Catégorie(s) : Littérature => Africaine , Littérature => Européenne non-francophone
Moyenne des notes : (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : (13 271ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
Visites : 4 778 (depuis Novembre 2007)
Violence sud-africaine
Karel Schoeman est sud-africain et écrit en afrikaans. Auteur d'une quinzaine de romans, il se veut le témoin d'une société meurtrie qui a vécu d'atroces douleurs, dont certaines ne sont pas encore éteintes. Schoeman est un homme discret, il se refuse à donner une quelconque leçon de morale ou à se vouloir le porte-parole d'un courant précis; il n'empêche, il est considéré comme une autorité morale en Afrique du sud.
Dans ce récit, écrit entre 1986 et 1989, Schoeman nous place au Cap dans les années 70, celles de la répression, de la terreur et de la fuite. C'est le début de la "violente décennie", juste après le soulèvement de Soweto, avec les couvre-feux, les fouilles, les meurtres et toute la violence que l'on sait. Une partie de la population, la plus nantie, a fui. L'autre est restée et a enduré. Haine et intolérance sont partout, tout comme le rationnement et la paralysie du système éocnomique. La population noire paie le prix plein de sa volonté de liberté, la population blanche s'accroche comme elle peut à ses privilèges.
Au milieu de ce chaos il y a un homme, un poète afrikaans, Adriaan, qui contemple avec tristesse un musée abandonné. L'homme est connu, respecté, on va fêter son dernier ouvrage avec toute l'élite de la ville, mais Adriaan n'en a cure, il observe avec recul et lucidité ce qui arrive à son pays. Ses amis quitent le navire, il appréhende la solitude et la destruction de toute une société. Son regard proche et distant à la fois apporte beaucoup au récit.
Karel Schoeman plonge son lecteur en pleine tourmente, sociétale et politique. Humaine avant tout. A travers le personnage d'Adriaan, c'est tout un monde qui souffre, vivant grâce à l'espoir que demain, peut-être, avec l'arrivée du printemps, les jours seront meilleurs. Beaucoup de douceur et de sensibilité dans la plume de Schoeman qui connaît le sujet, ce qui lui évite de tomber dans certains clichés ou de prendre ouvertement parti. Il ne juge pas, il raconte, tente de comprendre à travers un poète et se pose beaucoup de questions. Un roman porteur d'avenir mais aussi d'un message, celui de l'indispensable nécessité à tirer enseignement du passé et dialoguer avec l'autre, ne serait-ce que pour le comprendre, afin de mieux l'accepter.
Les éditions
-
La saison des adieux [Texte imprimé], roman Karel Schoeman trad. de l'afrikaans par Pierre-Marie Finkelstein
de Schoeman, Karel Finkelstein, Pierre-Marie (Traducteur)
Phébus / D'aujourd'hui. Étranger (Paris)
ISBN : 9782859409296 ; 20,30 € ; 03/09/2004 ; 320 p. ; Broché -
La saison des adieux [Texte imprimé] Karel Schoeman traduit de l'afrikaans par Pierre-Marie Finkelstein
de Schoeman, Karel Finkelstein, Pierre-Marie (Traducteur)
10-18 / 10-18. Série Domaine étranger
ISBN : 9782264046796 ; 3,48 € ; 02/04/2008 ; 350 p. ; Poche
Les livres liés
Pas de série ou de livres liés. Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série
Les critiques éclairs (1)
» Enregistrez-vous pour publier une critique éclair!
Les changements difficiles
Critique de Paofaia (Moorea, Inscrite le 14 mai 2010, - ans) - 26 novembre 2013
Les années 70, au Cap. Il pleut, il ne fait que pleuvoir, et la ville glisse lentement dans les ténèbres.. Ces ténèbres, on ne sait pas tellement bien ce que c'est , en fait, car les personnages du livre ne veulent surtout pas le voir. Ils appartiennent à la communauté blanche, recroquevillée sur elle-même, désarçonnée par les changements autour d'elle, et dont la plupart des membres n'a plus qu'une envie, partir.
Et dans cette communauté, un petit groupe d'intellectuels cherche encore à faire semblant , dans de tristes réunions mondaines où presque tous -même un journaliste...- vivent dans un déni complet de la tragédie de leur pays. Presque tous car un écrivain, poète, un des seuls à exercer sa lucidité, va apprendre le détachement , la solitude et le renoncement.
Ceux qui avaient frappé autrui furent frappés à leur tour, ceux qui avaient fait tomber autrui trébuchaient et tombaient à leur tour; soudain nous comprîmes que ce sang sur nos mains était le nôtre et plus celui des autres. Les gens gisaient à terre dans la position qu'ils avaient en tombant et nous, qui errions parmi les cadavres en hésitant afin de ramasser les vêtements épars , nous rendions compte avec surprise que cette veste était la nôtre, que ces chaussures étaient à notre pointure: pour la première fois, ces visages que nous voyions, tombés face contre terre, le nez dans la poussière, nous étaient familiers; désormais, ces visages étaient les nôtres. De quel droit pensions-nous que nous serions les seuls à être épargnés?
Nous apprîmes l'humiliation et nous apprîmes aussi à être humbles, à courber l'échine, à chercher parmi les cadavres , à nous traîner au-delà des barbelés des postes de contrôle,à attendre dans des files interminables dans les halls de gare et sur les quais; enfin, du moins le croyons-nous. Laissez-nous espérer que nous avons appris à réfléchir, à comprendre, que nous avons appris la pitié et la compréhension, sans quoi nous n'aurions rien appris, et tout aurait été vain.
Ce n'est pas la violence de Coetzee,mais la puissance du texte est la même, c'est extrêmement mélancolique et triste, magnifiquement écrit ( avec là aussi une mention pour le traducteur!)
Forums: La saison des adieux
Sujets | Messages | Utilisateur | Dernier message | |
---|---|---|---|---|
Karel Schoeman | 4 | Débézed | 19 mars 2009 @ 19:57 |