Ouest de François Vallejo

Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques , Littérature => Francophone

Critiqué par Aaro-Benjamin G., le 20 octobre 2006 (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 16 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (696ème position).
Visites : 6 587  (depuis Novembre 2007)

Un huis-clos fabuleux

Quelque part dans l’Ouest de la France au 19e siècle, le jeune Baron de l’Aubépine succède à son père. Rapidement, l’homme excentrique – pour ne pas dire à moitié cinglé – fait le ménage dans son entourage et ne tolère sur sa propriété que son garde-chasse Lambert, et sa famille, pour laquelle il exprime une certaine affection.

Lambert, le garde-chasse rustre mais fier, s’engage alors dans une relation maître-valet singulière où l’espace restreint entre la servitude et un minimum d’affirmation de soi devient un plancher délicat, prêt à craquer à la moindre inconvenance. La situation est d’autant plus périlleuse que ce dernier s’explique mal la folie politique ainsi que les extravagances du Baron, surtout lorsque celui-ci se fait raser de la tête aux orteils par des femmes de peu de vertu et qu’il les fait courir nues dans les corridors du château des Perrières.

Doucement, l’auteur fait monter la tension, révélant de plus en plus le côté sinistre du Baron. Le pauvre Lambert se verra coincé entre la morale et la survie des siens.

Il faut quelques pages pour s’habituer au style littéraire singulier. Par la suite, le pouvoir immersif de cette histoire sombre est fulgurant. L’atmosphère moite et suffocante complimente l’affrontement de deux personnages que tout oppose et qui doivent cohabiter ensemble.

Un roman délicieusement tordu et définitivement original, « Ouest » est une grande joute psychologique mais aussi d’une rare violence.

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Face à face inégal

6 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 17 février 2017

Lambert est le garde-chasse au domaine des Perrières. Il connaît bien son travail et ses chiens. Il connaît aussi sa place, ainsi que celle d'Eugénie, son épouse.
Monsieur de l’Aubépine l'Ancien, était un "blanc", un chouan fidèle aux traditions de l'Ouest.
À son décès, son fils prend la succession. Mais ce noble est républicain.
Ce qui perturbe Lambert.
Et il y a de quoi. L'homme est non seulement adepte d'une cause opposée à son rang, mais c'est aussi un homme malade, un manipulateur, un odieux personnage à la limite de la folie
" ...il a peur (Lambert), ce type épais comme deux, dépassant de la tête tous ceux du pays, solide dans ses bottes, une moustache fournie bien noire qu'il doit soulever pour aspirer sa soupe, une barbe un peu longue aussi, taillée en carré, avec ses premiers poils blancs, un crâne à déchirer sa casquette de cuir, comprend que le vrai peureux, ce n’est pas son nouveau maître, comme il l'a cru, c'est lui. Et il a peur d'un homme plutôt pâlichon, maladif toute sa jeunesse, et peut-être bien encore malade."

Il m'aura fallu arriver à plus de la moitié du livre pour avoir une impression curieuse de déjà lu ; quand le baron est obsédé par sa rencontre avec Victor Hugo.
Ce n'est qu'en notant le livre, que je me suis aperçue que je l'avais lu , il y exactement 10 ans ! Il ne m'avait donc pas laissé un souvenir impérissable.
Si je trouve ce face à face intéressant, entre deux mondes, deux caractères, deux personnages, un Lambert têtu mais conscient, protecteur de sa place, et surtout de sa famille ; aimant ses chiens ; "il a l'air bien convaincu de ce qu'il dit. Pourtant cela ressemble encore à un de ces mensonges qu'il nous sert jour après jour. Il veut nous impressionner ; nous ne sommes pas des naïfs." et Monsieur de l'Aubépine, odieux, pervers, manipulant, utilisant un chantage abject, j'ai trouvé ce rythme très lent ; le ton monotone, les dialogues intégrés au texte.

Un avis final mitigé à la fin de cette re-lecture entre l'originalité du sujet, l'intelligente construction des personnages et cette impression de longueur.

Western à la française

9 étoiles

Critique de Mallollo (, Inscrite le 16 janvier 2006, 42 ans) - 18 janvier 2015

"Ouest", avant que je ne commence ma lecture, je pensais qu'il s'agissait d'un roman de cowboys, un western à l'ancienne avec la poussière qui tourbillonne dans la moiteur de l'après-midi, un affrontement tendu dans un silence pesant.

C'est et ce n'est pas ça, "Ouest". Nous sommes bien au 19e siècle, mais au beau milieu de la France. Enfin, dans l'Ouest de la France, où les changements politiques successifs depuis la Révolution n'ont pas eu grande incidence sur la vie d'un peuple encore au service des seigneurs locaux, par habitude. Les autres critiques résument clairement l'intrigue, pas besoin de la répéter.

Le style particulier, entremêlé de dialogues, impressions et monologues intérieurs de plusieurs personnages (sans indication qu'on est dans l'un ou l'autre cas, l'écriture au kilomètre, mais la ponctuation respectée) semble être assez controversé. Effet de style gratuit ou à propos? Qui nuit à la lecture ou met en relief le récit? Je me suis posé la question tout au long de ma lecture. J'étais prise au piège par le récit, embarquée par Vallejo dans le face-à-face entre Lambert et le baron d'Aubépine, spectatrice de la lente et implacable détérioration de l'homme et ses relations.
Et de relations il est bien question, parce qu'au centre du roman se trouve la relation sociale ambiguë entre ces deux personnages qui ne sont décidément pas sur la même longueur d'onde. L'un se raccroche à l'habitude d'être le serviteur de son maître, l'autre cherche à effacer la distance sociale entre lui et son garde-chasse, en lui imposant une relation affective malsaine. Pour moi, il était inévitable que leurs voix se mélangent, quitte à embrouiller le lecteur de temps en temps. Le style impose un rythme de lecture plus lent, ce qui aide d'autant plus à faire monter la tension au fil du récit.

"Ouest", ce n'est pas un western à l'ancienne mais c'est un magnifique affrontement tendu dans un silence pesant, dans l'Ouest sauvage de la France.

Il est bon Vallejo !

9 étoiles

Critique de Gg de coat canton (, Inscrit le 30 septembre 2009, 84 ans) - 30 septembre 2009

Un aristo illuminé et un serviteur enraciné dans sa servitude :
"J'aime quand vous me désobéissez Lambert, cela fait de vous un homme libre." Une révolution à l'envers, qui part du haut !Très bon livre, très belle écriture.

Quel bonheur que ma découverte de François Vallejo !

8 étoiles

Critique de Ori (Kraainem, Inscrit le 27 décembre 2004, 88 ans) - 16 février 2009

Une langue d'époque qui vous ramène 150 ans en arrière, un remarquable talent de conteur, une concision très personnelle dans l'écriture des dialogues, et enfin une belle et fine analyse psychologique opposant un châtelain fou à son rugueux garde-chasse.

Je me réjouis déjà de poursuivre mes découvertes du filon Vallejo !

Très bien écrit

8 étoiles

Critique de Kroquett (, Inscrite le 15 février 2009, 49 ans) - 15 février 2009

Le style est peu commun. L'histoire n'est pas forcément captivante mais on se laisse happer par le style. C'est à la fois onirique et très plausible.

Du style, indiscutablement !

9 étoiles

Critique de Lutzie (Paris, Inscrite le 20 octobre 2008, 60 ans) - 14 janvier 2009

C’est vrai qu’on est happé, très vite. Et quand on croit avoir atteint un sommet entre les deux protagonistes, l’auteur en remet une dose, et c'est comme ça tout au long de l’histoire. Non, il ne va pas oser ?!! (le châtelain, l’auteur, au choix). Ben si, prends-toi ça (mauvais serviteur ou fidèle lecteur, au choix). Et fidèle, on l’est, et indécollé du bouquin, on reste, jusqu’au point final. Toujours surpris, malgré les redondances, les attendus. Grâce aussi à ce style, mélange réussi de suranné et de contemporain, une part essentielle du livre. Et qui, revers de la médaille, m’a empêchée de lire le dernier opus de l’auteur. Ah non, pas encore !

Improbable merveille

10 étoiles

Critique de Ena (Le Gosier, Inscrit le 25 octobre 2004, 62 ans) - 16 juillet 2008

A une époque ou beaucoup d’auteurs optent pour le style "easy reading" , vite lu vite oublié, ou pour un style formaté version scénario de séries télé, on est ici dans quelque chose de résolument très éloigné de tout cela.
Mine de rien, la tension créée par les rapports entre les personnages que tout oppose et même temps rapproche s’installe et augmente au fil du récit pour atteindre un paroxysme.
C’est déroutant, étonnant et brillant, bravo encore à l’auteur.

une ambiance hitchkockienne

8 étoiles

Critique de Prince jean (PARIS, Inscrit le 10 février 2006, 50 ans) - 9 juin 2008

Le roman de Vallejo est une vraie réussite. Il maîtrise parfaitement la progression de l'histoire et fait entrer le lecteur doucement, mais sûrement, dans les méandres psychologiques des personnages. Les relations entre le garde chasse et son seigneur deviennent de plus en plus complexes. Soumission / domination. Folie, crises, viols, meurtres.
bref ! un livre géant qui aurait mérité le Goncourt (à la place d' Alabama song) à lire d'une traite !

La toute puissance de l'Animal

9 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 18 mai 2008

En ouvrant son roman par un parallèle entre les clichés de la prison d’Abou Graib et la photo d’un garde-chasse face à un molosse, François Vallejo révèle déjà que le véritable patron du domaine des Perrières n’est ni le propriétaire : le baron de l’Aubépine, ni Lambert : le garde-chasse mais l’Animal tirant sa force de la meute, soumis à ses instincts destructeurs . Les chiens dont les cris hantent les jours et les nuits du château sont ceux par qui la mort du Baron arrive et dont la disparition entraîne la déchéance de Lambert et du domaine . Rajah, dont le nom suffit à connoter la puissance devient l’un des protagonistes du roman : personnage ambivalent ,à la fois compagnon, protecteur, et gardien mais pouvant à tout moment se transformer en ogre .
Dans ce roman qui frôle sans cesse avec le fantastique, l’auteur restitue les rapports ambigus du couple maître /serviteur dont les destins sont liés, chacun dominant l’autre à son tour ; et tout en rendant compte du quotidien d’un hobereau , plonge le lecteur dans le contexte politique du milieu du 19e siècle, où s’affrontent République et Empire, Napoléon III et Victor Hugo .
La réussite du roman tient aussi à son écriture dont le rythme syntaxique perturbé mais constamment maîtrisé traduit le monologue intérieur de Lambert :le taiseux et des personnages féminins : Eugénie et Magdeleine dont l’auteur a joliment traduit la gêne et l’insouciance, l’éveil à la conscience et à la sensualité .
« Ouest », c’est tout à la fois la région où se déroule l’intrigue, une allusion à la folie du Baron « à l’ouest », mais aussi la direction du couchant, celle du crépuscule d’une noblesse qui voit ses terres et son prestige disparaître .

c'est aussi à l'ouest que se trouve la terre à délits

8 étoiles

Critique de Bertrand-môgendre (ici et là, Inscrit le 9 mars 2006, 69 ans) - 26 mars 2007

Ouest de françois Vallejo

Surpris, dérangé par la force de cette écriture caractérielle, caricaturale, je me suis plongé dans cette ambiance peu habituelle, avec un mauvais a priori. Resté à l’affût d’une quelconque proie littéraire sans grand intérêt, je fus étrangement happé par le récit, vivant cette aventure peu commune comme défileraient sous mes yeux les lignes d’un carnet de campagne poussiéreux.
Loin d’être attachants les personnages sont scabreux, rugueux, bruts de décoffrage.
Où est-il le temps de la clémence, perdu entre deux mondes dans lesquels s’affrontent des personnes (le baron et le garde chasse) aussi têtus l’un que l’autre ?
Il leur faut à tour de rôle lâcher du lest pour parvenir un instant seulement à comprendre l’homme qu’ils considèrent si différemment comme ennemi, maître ou esclave.

Sans interruption du récit, l’écriture parlée devient langage, transcrit au présent des passés simples des composés, sur lie d’indifférence rapprochée. Lambert garde-chasse donne cette réplique équivoque :
« les temps que nous vivons, ne sont pas des temps ».
Cet homme cru tonne des réflexions, pleines du bon sens des gens de la terre,
Extrait tiré d’une partie de chasse, à la période où le baron souhaite renverser le régime en place « Taisez-vous, monsieur à la fin, c’est vous qui faites fuir le gibier à parler haut dans les fougères. On vous entend venir à deux lieues. Comment voulez-vous vaincre un tyran, si la plus petite perdrix rouge vous échappe sans effort ? Sauf votre respect, on n’attrape pas un Bonaparte comme une fille de l’Ouest. ».

Loin de concurrencer l’excellent « coup de fouet » de Bernard du Boucheron, François Vallejo donne aux scènes de chasse une autre vision, une autre approche.
Pour son originalité, je vous invite à découvrir ce roman.
Pour son écriture tendue, haletante, n’ayez pas peur de vous embarquer dans cette aventure.(bertrand-môgendre).

Baron bourreau

8 étoiles

Critique de Jean Meurtrier (Tilff, Inscrit le 19 janvier 2005, 49 ans) - 23 janvier 2007

Dans quel bourbier s’est donc empêtré Lambert, le garde-chasse du château des Perrières dans l’Ouest. N’aurait-il pas du quitter le château, comme le reste du personnel, dès l’arrivée de la descendance du baron de l’Aubépine? Combien de temps va-t-il fermer les yeux sur les agissements de ce blanc qui se veut bleu, voire rouge ? La plus grave n’est pas sa tendance politique, mais plutôt son esprit tordu, ses attitudes malsaines vis-à-vis de la gente féminine (en ce compris Magdeleine, fille de Lambert), son irrespect envers la nature et les animaux en particulier.
Ce grand écart entre moralité et lâcheté opéré jusqu’à la déchirure par la conscience de Lambert nous est narré dans un style provincial désuet mais très tonique. L’absence totale de guillemet et de tiret pour signaler les dialogues ne gène quasiment pas la lecture. L’auteur dynamise ainsi l’enchainement des répliques.
Une des critiques précédentes (qui en dévoile un peu trop à mon goût) qualifie de défauts certains aspects du roman que je considère pour ma part adéquats. Quand Lambert ressasse les mêmes expressions, c’est une manière pour lui de se rassurer, de raison garder. Il représente la sagesse populaire tentant de s’accommoder des excentricités du maître. Par ailleurs, l’auteur rend effectivement certains faits hautement prévisibles. Est-ce un mal ? De cette manière le lecteur appréhende d’autant plus la suite. Et progressivement la tension augmente.
Je reconnais que je m’attendais tout de même à la surprise du chef, qui ne survient pas vraiment. Peut-être est-ce mieux ainsi tout compte fait.

On est toujours le dominateur de quelqu'un

9 étoiles

Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 11 décembre 2006

François Vallejo m'a agréablement surprise à plus d'un titre. Tout d'abord par le procédé narratif qu'il emploie, cette histoire racontée par les protagonistes eux-mêmes sans jamais utiliser le moi et le je et tout en se plaçant au centre du récit en qualité de narrateurs. Tout est dit avec des phrases courtes, un ton vif et réaliste, l'histoire se déroule sous nos yeux tels divers tableaux composant un spectacle.
Par la force de son huis-clos ensuite. Un face-à-face violent entre divers personnages, plus particulièrement le garde-chasse Lambert et le baron de l'Aubépine, mais aussi entre l'Empire et la République, entre l'utopie et la raison, entre la peur et la colère, entre le rêve et la folie. La défense, aussi, d'un certain idéal, qui pourrait paraître désuet aux yeux de beaucoup. Pas de super héros dans ce roman au style classique et élégant, pas de scènes de rebondissements ou d'actions sans modération, rien de tout cela, juste une histoire qui s'écoule lentement au coeur du domaine des Perrières, avec quelques attendus et autres scènes prévisibles, ce qui ne diminue pourtant en rien la qualité du récit. Parce que même lorsque l'on devine ce qui va se produire, même lorsque l'arrivée d'un événement semble cousu de fil blanc, là n'est pas l'essentiel et le talent de Vallejo est d'insuffler de la force là où on ne s'y attend pas toujours. On devine, on suppute, on imagine, on croit et la croyance en quelque chose, même un mensonge, même une supposition, devient tout à coup un instrument puissant qui fait de nous un maître et permet d'inverser les rôles. Lambert domine Monsieur le Baron qui aura pourtant le dernier mot, à sa manière. Ce rapport de force existe dans tout le récit, du début à la fin, conduisant le lecteur à s'attacher à tous les personnages, à pleinement s'impliquer dans chacun et s'immerger complètement dans l'histoire.
Pas besoin de procédés stylistiques avec effets de mode, loin de là et c'est tant mieux. Une écriture simple, belle et classique pour un roman qui fut une très bonne lecture. Belle et cruelle.

Noir

7 étoiles

Critique de Café noir (, Inscrit le 30 novembre 2006, 62 ans) - 30 novembre 2006

Pas complètement faux ce que tu dis là. Moi aussi je me suis un peu traîné dans cette lecture qui accroche, avec redondances et stéréotypes. Mais je trouve quand même ce livre bon, à cause du seul personnage vraiment crédible ici : la folie et ses pouvoirs. Vallejo fait fort sur ce sujet, il en explore de nombreuses pistes, il s’immisce dans son glauque, il nous embourbe dans ses revers. Pas très drôle tout ça ! On s’prendrait bien un petit café.

Style original

8 étoiles

Critique de Anouk (, Inscrite le 22 juin 2006, 59 ans) - 22 novembre 2006

C'est justement le style utilisé qui m'a happée : est-ce qu'il est à la mode ou pas ? peu importe. L'auteur arrive à le maintenir tout au long du roman.
J'ai bien aimé l'intrigue : le personnage de Lambert est imposant et tout de même touchant dans ses hésitations entre ses accès de courage et de lâcheté. Le personnage du baron m'a paru moins crédible.

Glauque et embrouillé: à la mode!

5 étoiles

Critique de Philduch (Aix en Provence, Inscrit le 17 février 2006, 57 ans) - 17 novembre 2006

Rien de tel, de nos jours, qu'un style haché et une histoire glauque pour obtenir le tonnerre d'applaudissements de nos critiques branchouillardes. Lacis de monologues intérieurs, Ouest en devient difficile à lire, répétitif, ennuyeux. Mais voilà, le texte se donne des airs de totale modernité; la meute, rassasiée, hurle à la "plongée intérieure" dans le délire du baron l'Aubépine et de son benêt de garde-chasse Lambert. Du flan! Une fois grattée, la dorure laisse entrevoir la faible crédibilité des personnages, leur lourdeur aussi, comme celle du style, avec ses répétitions, ses tics ("non, il ne faut pas, Lambert, il ne faut pas). Le rythme est louvoyant, l'intrigue souvent prévisible (oui le baron va essayer de se faire la fille du garde-chasse, oui le baron va se faire bouffer par les chiens du garde-chasse), les personnages secondaires sont laissés à leur plus simple expression (un maire plein de mots en Majuscules dans ses phrases, les métayers du domaine archi-transparents, la jeune Magdeleine gnan-gnan comme ses oies, la parisienne bête-comme-chou tombée là par le plus grand des hasards...)
Le plus dommage là-dedans, ce n'est pas le roman lui même (on ne peut en effet nier l'atmosphère oppressante qu'il dégage, ni, je pense, la sincérité de son auteur) mais l'extase bêlante d'admiration des commentaires de presse, preuve qu'en matière de littérature française, point n'est besoin d'une belle histoire et d'un texte limpide pour faire un carton. Sûr que Arthur, Ardisson et les Inrock' vont adorer!

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