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Veneziano
avatar 02/07/2014 @ 19:07:48
« Un homme qui pense, non à une femme comme au complément d'un sexe, mais au sexe comme au complément d'une femme, est mûr pour l'amour. » André Malraux, in La voie royale

Feint

avatar 02/07/2014 @ 19:54:14
A propos de la citation attribuée sans doute par erreur à Jules Romains, je me demande si le livre de Patrick de Funès n'y est pas pour quelque chose : http://actualite-litteraire.com/blog/index.php/…

Sissi

avatar 02/07/2014 @ 20:36:34
J'y pense, à cette "affaire", dès la semaine prochaine je relis Jules Romains.

Feint

avatar 02/07/2014 @ 20:51:20
C'est une excellente pièce, qui va bien au-delà de la simple comédie. Une efficace réflexion sur le totalitarisme.

Veneziano
avatar 03/07/2014 @ 18:31:54
"Dans chaque histoire d'amour fou il y a un tournant ; cela peut venir plus ou moins vite mais en général cela vient assez vite ; la plupart des couples ratent le tournant, dérapent, font un tonneau et vont s'écrabouiller contre le mur, les quatre roues en l'air.
La raison en est simple : contrairement à ce qu'on avait cru pendant les premières heures, les premiers jours, tout au plus les premiers mois de l'enchantement, l'autre ne vous a pas métamorphosé. Le mur contre lequel on s'écrase après le tournant, c'est le mur de soi. Soi-même : aussi méchant, mesquin et médiocre qu'auparavant. La guérison magique n'a pas eu lieu. Les plaies sont toujours là, les cauchemars recommencent. Et l'on en veut à l'autre de ce qu'on n'ait pas été refait à neuf ; de ce que l'amour n'ait pas résolu tous les problèmes de l'existence ; de ce que l'on ne se trouve pas en fin de compte au Paradis, mais bel et bien, comme d'habitude, sur Terre." Nancy Huston, dans l'Empreinte de l'ange

Stavroguine 03/07/2014 @ 18:42:51
"Dans chaque histoire d'amour fou il y a un tournant ; cela peut venir plus ou moins vite mais en général cela vient assez vite ; la plupart des couples ratent le tournant, dérapent, font un tonneau et vont s'écrabouiller contre le mur, les quatre roues en l'air.
La raison en est simple : contrairement à ce qu'on avait cru pendant les premières heures, les premiers jours, tout au plus les premiers mois de l'enchantement, l'autre ne vous a pas métamorphosé. Le mur contre lequel on s'écrase après le tournant, c'est le mur de soi. Soi-même : aussi méchant, mesquin et médiocre qu'auparavant. La guérison magique n'a pas eu lieu. Les plaies sont toujours là, les cauchemars recommencent. Et l'on en veut à l'autre de ce qu'on n'ait pas été refait à neuf ; de ce que l'amour n'ait pas résolu tous les problèmes de l'existence ; de ce que l'on ne se trouve pas en fin de compte au Paradis, mais bel et bien, comme d'habitude, sur Terre." Nancy Huston, dans l'Empreinte de l'ange


Je trouve ça assez faux (et puis, pas très joli non plus pour ce qui est du style, à vrai dire). Le vrai problème de l'amour fou, selon moi, c'est moins qu'il ne nous a pas changé, que le fait qu'on se rend compte assez vite que l'autre ne correspond pas tout à fait à tout ce qu'on a d'abord projeté sur lui. C'est le fameux rameaux dans les mines de sel.

Sissi

avatar 03/07/2014 @ 19:22:54
Ben je sais que je suis pas mal crevée et sous tension et ceci explique sans doute cela, mais je ne comprends rien à la citation de Nancy Huston (et pourtant dieu sait si c'est un sujet qui m'intéresse!).

Ni aux rameaux dans les mines de sel d'ailleurs!!

Mais j'y reviendrai plus tard.

Oui Feint ça va bien au delà de la comédie, si ça m'a tant marquée c'est parce que ça m'avait rire mais aussi parce que ça m'avait fait peur! (le pouvoir de la manipulation)

Stavroguine 03/07/2014 @ 19:57:05
"On se plaît à orner de mille perfections une femme de l’amour de laquelle on est sûr ; on se détaille tout son bonheur avec une complaisance infinie. Cela se réduit à s’exagérer une propriété superbe, qui vient de nous tomber du ciel, que l’on ne connaît pas, et de la possession de laquelle on est assuré. Laissez travailler la tête d’un amant pendant vingt-quatre heures, et voici ce que vous trouverez. Aux mines de sel de Salzbourg, on jette dans les profondeurs abandonnées de la mine un rameau d’arbre effeuillé par l’hiver ; deux ou trois mois après, on le retire couvert de cristallisations brillantes : les plus petites branches, celles qui ne sont pas plus grosses que la patte d’une mésange, sont garnies d’une infinité de diamants mobiles et éblouissants ; on ne peut plus reconnaître le rameau primitif. Ce que j’appelle cristallisation, c’est l’opération de l’esprit, qui tire de tout ce qui se présente la découverte que l’objet aimé a de nouvelles perfections."

-- Stendhal, De l'amour

L'amour passionnel crée donc une illusion : on ne voit plus la femme telle qu'elle est réellement (un rameau effeuillé), mais telle que notre passion l'a "cristallisée", en a fait un objet parfait (on l'a recouverte de cristaux de sel). Le "tournant" de Huston, selon moi, c'est donc plutôt ce moment où l'on se rend compte qu'on s'est illusionné, qu'on a bien entre les mains un rameau effeuillé et pas une broche en diamant. Je n'ai pas l'impression qu'on ait réellement la sensation de s'être changé soi-même lorsqu'on aime ; lorsqu'on "trouve chaussure à son pied", ce n'est pas notre pointure qui a changé.

Veneziano
avatar 03/07/2014 @ 19:58:53
Oui, il y a de cela, c'est comme cela que je l'ai compris.

Sissi

avatar 03/07/2014 @ 22:03:44
Stendhal, c'est quand même un cran sacrément au-dessus je trouve dans la manière d'exprimer les choses (enfin je dis ça, je n'ai jamais été fan, ça m'est toujours un peu tombé des mains).

Je suis plus d'accord avec Stavro (que je ne savais pas si psychologue...) qu'avec toi, Ven, et je trouve son analyse très juste: l'amour passionnel ne nous change en rien (même si ça galvanise, transcende, nous fait irradier etc.), et le fameux "tournant" ne réside pas dans le fait qu'on réalise qu'on est toujours le/la même, mais dans le fait qu'on cesse d'idéaliser l'autre, de le sacraliser et d'y voir une espèce de "tout".
Ce qu'elle appelle "tournant", je l'appellerais "retour à quelque chose de censé", ce moment où la fusion magique, parfaite (et irraisonnée) cesse, et elle cesse fatalement (sauf quand on reste dans une relation destructrice).

Sissi

avatar 03/07/2014 @ 22:04:57
Par contre "trouver chaussure à son pied", c'est très laid comme expression ;-)

Veneziano
avatar 04/07/2014 @ 18:49:06
"Paris est une grande ville, mais je crois que l'on peut y rencontrer plusieurs fois la même personne et souvent dans les lieux où cela paraîtrait le plus difficile : le métro, les boulevards ... Une, deux, trois fois, on dirait que le destin ou le hasard - insiste, voudrait provoquer une rencontre et orienter votre vie vers une nouvelle direction, mais souvent vous ne répondez pas à l'appel. Vous laissez passer ce visage qui restera pour toujours inconnu et vous en éprouvez un soulagement, mais aussi un remords." Patrick Modiano, in Accident nocturne

Veneziano
avatar 05/07/2014 @ 14:44:03
"Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l'étourdissement des paysages et des ruines, l'amertume des sympathies interrompues.
Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore. Mais le souvenir continuel du premier les lui rendait insipides ; et puis la véhémence du désir, la fleur même de la sensation était perdue."
Gustave Flaubert, in L'Education sentimentale

Feint

avatar 05/07/2014 @ 16:12:54
"Il voyagea.
Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l'étourdissement des paysages et des ruines, l'amertume des sympathies interrompues.
Il revint.
Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore. Mais le souvenir continuel du premier les lui rendait insipides ; et puis la véhémence du désir, la fleur même de la sensation était perdue."
Gustave Flaubert, in L'Education sentimentale
Dernier chapitre. Une sorte de renoncement au récit. La suite ne vaut pas la peine d'être racontée, puisque l'histoire n'a pas eu lieu. Magnifique.

Veneziano
avatar 05/07/2014 @ 17:00:18
J'ai choisi cet extrait en pensant à nos échanges sur ce roman.

Veneziano
avatar 06/07/2014 @ 10:51:34
"La vie de l'esprit est comme une spirale qui emprunte les mêmes trajets mais s'arrête aux même haltes à des niveaux différents." Jean d'Ormesson, in Histoire du Juif errant

Antinea
avatar 06/07/2014 @ 11:08:22
"Celui-là seul qui a éprouvé l’extrême infortune est apte à ressentir l'extrême félicité. Il faut avoir voulu mourir, Maximilien, pour savoir combien il est bon de vivre."

Dit le Comte de Monte Cristo à Maximilien Morrel par la plume d'Alexandre Dumas/ Auguste Maquet.

Feint

avatar 06/07/2014 @ 11:48:31
"La vie de l'esprit est comme une spirale qui emprunte les mêmes trajets mais s'arrête aux même haltes à des niveaux différents." Jean d'Ormesson, in Histoire du Juif errant
Et celle-ci tu l'as choisie pour le contraste avec la précédente ! ;)

Sissi

avatar 06/07/2014 @ 11:57:06
"La vie de l'esprit est comme une spirale qui emprunte les mêmes trajets mais s'arrête aux même haltes à des niveaux différents." Jean d'Ormesson, in Histoire du Juif errant

Et celle-ci tu l'as choisie pour le contraste avec la précédente ! ;)


:-)))))
On dirait presque du Bobin...




Cette page m'a donné envie de me concocter un petit programme de relecture pour l'été, je vais donc relire "L'Education sentimentale" que j'adore, "Le Comte de Monte Cristo" dont je ne me souviens plus très bien, et puis bien sûr, comme convenu, "Knock" de Jules Romains parce que ça ne me fera pas de mal et que je pourrai vérifier si la fameuse phrase y est ou non (en même temps je ne me souviens plus de la phrase -réplique- en question...)

Sissi

avatar 06/07/2014 @ 11:58:30
Ah si, ça y est:


« La santé est un état précaire qui ne laisse présager rien de bon".

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