La petite Bijou de Patrick Modiano

La petite Bijou de Patrick Modiano

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Jules, le 30 avril 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 6 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 9 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (15 254ème position).
Visites : 11 434  (depuis Novembre 2007)

Angoissant, le vide dans lequel l'être se perd

La « Petite Bijou » n'est pas ici le tendre diminutif donné par une mère à sa fille. Il s'agit du nom d'artiste donné à une petite fille, le jour où elle vivait encore avec sa mère.
La jeune héroïne de ce livre s'appelle Thérèse. Pour elle, sa mère est partie au Maroc et elle n'a jamais connu son père. Un jour, elle devait avoir neuf ou dix ans, sa mère l’a conduite à la gare d'Austerlitz avec une étiquette autour du cou : « Thérèse Cardères, chez Madame Chatillon, chemin du Bréau à Fossombronne-la-Forêt .
Elle y vivra des années, Frédérique Chatillon étant une amie de sa mère. Comme seuls souvenirs de celle-ci elle aura un portrait et une boîte avec son carnet d'adresses et quelques photos. Bientôt on lui dira que sa mère est morte au Maroc.
Nous sommes des années plus tard et Thérèse est installée à Paris, à Montmartre. Elle exerce le métier de vendeuse dans une boutique et garde une petite fille pendant quelques heures par semaine. Un soir, dans la foule du métro Châtelet, elle a le regard attiré par une femme à la démarche de danseuse, avec un manteau jaune. Elle la suit et est certaine qu'il s’agit de sa mère…
Ce livre, comme plusieurs Modiano, met en scène un personnage sans attaches réelles, perdu dans la foule de la grande ville. Elle flotte dans sa vie comme un bouchon sur l'eau : tantôt bercé, tantôt submergé par une vaguelette. Elle va repasser tout le fil de sa vie dans sa tête, mais tout est flou. Qui était sa mère, qui était son père, qui était son « oncle » ?. Et nous voguons avec elle dans cet énorme Paris, d'angoisses en angoisses, avec presque rien comme points de repères. A peine deux ou trois personnes, une petite fille, une rue, la Porte Maillot et la Porte d'Orléans.
Triste et angoissant. Bien que je sois certain qu’il doit y avoir pas mal de personnes portant ainsi leur vie comme un poids de dix tonnes sur les épaules, ce livre ne m’ a pas accroché. C'est un Modiano parmi d’autres et, même s’il écrit très bien, ses ambiances, personnages et schémas sont un peu trop répétitifs. De livre en livre, il nous porte du malaise vers le néant.

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Perdue dans la ville et la vie

8 étoiles

Critique de Nathafi (SAINT-SOUPLET, Inscrite le 20 avril 2011, 57 ans) - 2 mars 2016

Contrairement à d'autres livres de Patrick Modiano qui ne m'ont pas emballée dès les premières pages, celui-ci m'a bien plu. Peut-être que Thérèse m'a émue, cette jeune fille paumée, petite chose qui se cherche et cherche désespérément sa mère, des souvenirs, un être auquel se rattacher.

Perdue dans Paris, son quotidien, ses jardins, ses cafés, son métro...
Perdue dans sa vie, seule, livrée à elle-même...
Et perdue dans sa tête, aussi...

Alors, les quelques gestes de douceur, le plus petit intérêt qu'on lui porte lui font un bien immense, sur l'instant. Elle replonge ensuite au coeur de sa tristesse, en attendant de croiser à nouveau ces êtres bienfaisants qui se font trop rares.

"La petite Bijou" est attendrissante, insignifiante dans ce Paris gris et froid, luttant contre des souvenirs trop douloureux et un avenir incertain. C'est sûrement ce qui m'a plu dans ce livre, ce petit être en perdition avec tous ses questionnements...

Un passé à reconstituer

8 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 14 juillet 2011

Cette jeune femme abandonnée recherche sa mère, disparue au Maroc, sans trop se l'avouer, et erre au sein de ses petits boulots et de ses fréquents déplacements en métro. L'ensemble des petits détails de sa vie, et de celle des autres qui alimente la sienne par procuration, n'auraient pas d'importance si elle ne souffrait pas de la vacuité de son existence, qui est le fruit d'un manque. Ce constat, elle finit par le comprendre ; au fur et à mesure, les choses deviennent plus nettes, la tension grandit, en effet.

La trame est bien menée ; on y est attiré, on y repense. Le style clinique rend l'ensemble un peu froid et distancié, ce qui permet de traduire et comprendre les errements de la protagoniste. S'il n'y a rien de transcendantal dans ce roman, un peu trop dans l'introversion, il reste assez touchant et bien conçu.

La Petite Bijou: une fille solitaire...

8 étoiles

Critique de MvDijk (, Inscrite le 20 octobre 2009, 38 ans) - 20 octobre 2009

Dans le livre de Patrick Modiano « La Petite Bijou », on suit Thérèse, une fille de dix-neuf ans. Elle pense qu’elle reconnaît sa mère disparue dans un station de métro à Paris. La femme avec un manteau jaune et râpé ressemble à une photo que Thérèse avait encore de sa mère. Sa mère qui l'avait abandonnée, il y a douze ans…
À proportion que le récit avance, Thérèse obtient des contours plus nets. On découvre que, au fond, il ne s’agit plus de la recherche de sa mère, mais que Thérèse est en train de se rechercher elle-même. La confusion intense et le désespoir chez Thérèse résultent d’une sensation dominante de la solitude.
Une fois, elle est sur le point de culbuter dans un trou noir, l’autre fois, elle se rappelle à l’ordre : « il faut couper les ponts ».
Patrick Modiano décrit le récit de Thérèse avec des belles métaphores subtiles. Il décrit la sensation « d’être inopportun », près de laquelle il remue le poignard dans la plaie.
Ça donne au lecteur une sorte de la mélancolie ; mais pas une mélancolie erronée.

Paumé

6 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 22 mai 2008

Patrick Modiano dans le texte. Bon, pas d’amnésie, d’amnésique mais un problème lié quand même à la connaissance, la reconnaissance, et toujours, comme bien souvent dans Modiano, cette vérité qui fuit, qui se dérobe, impalpable … Y a-t-il même une vérité ?
La petite bijou le voudrait bien qu’il y ait une vérité, et pouvoir être sûre de la personne qu’elle a cru reconnaître comme étant sa mère ! Il faut dire qu’elle a de quoi être perturbée : élevée jusqu’à neuf ans sans père et par une mère qui ne lui montre aucun amour. Expédiée par train, à neuf-dix ans donc, une pancarte au cou chez une amie de sa mère, elle ne reverra plus celle-ci. On lui dit qu’elle est partie au Maroc. Puis on lui dit qu’elle est morte au Maroc.
La “petite bijou”, Thérèse de son prénom a donc bien du mal à construire sa personnalité, ne pouvant s’appuyer que sur des sables mouvants. D’ailleurs, l’appellation “la petite bijou” est un élément perturbant de plus ; c’est le nom de scène que, toute petite, sa mère lui donnât, lorsqu’elle tenta de l’utiliser comme élément théâtral sur scène. Comme l’explique Thérèse, rien d’affectueux là-dedans :

“ "Quand j'avais sept ans, on m'appelait la Petite Bijou." Il a souri. Il trouvait certainement cela charmant et tendre pour une petite fille. Lui aussi, j'en étais sûre, sa maman lui avait donné un surnom qu'elle lui murmurait à l'oreille, le soir, avant de l'embrasser. Patoche. Pinky. Poulou. "Ce n'est pas ce que vous croyez, lui ai-je dit. Moi, c'était mon nom d'artiste." »

Donc elle a perdu sa mère, jusque dans son image mentale. Ne lui restent que quelques souvenirs qu’elle a du mal à ordonner et quelques objets symboliques tels photos en vrac dans une boîte (classique ! ) et un carnet d’adresses. Elle a perdu sa mère et un beau soir (elle est maintenant jeune femme), sur le quai du métro, elle est troublée par la démarche d’une femme, avec un manteau jaune. Elle acquiert immédiatement l’intime conviction qu’il s’agit de sa mère (elle l’a perdue (de vue ?) depuis 10_15 ans), la prend en filature en quelque sorte …
Le reste est du Modiano pur jus, qui joue avec l’ambiguïté, la faillibilité de la mémoire, la fragilité des repères humains, … Modiano qui semble répéter à l’infini la même trame de roman dans la quête désespérée, désespérante, d’un être à la recherche de sa vérité, d’une histoire qui serait vraie et la sienne et qui se dérobe en permanence.

un surnom de fantaisie

7 étoiles

Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 19 juin 2002

Jules pointe justement l’objet du désarroi de la narratrice : son petit nom.
« Du temps où on m'appelait la petite bijou », répète-t-elle, car cette appellation qui aurait pu devenir un diminutif synonyme de la tendresse qu'on lui aurait un jour porté n'est qu’un surnom dont on l’a affublée pour mettre en valeur sa mère, tel un colifichet, un signe de fausse richesse.
Modiano excelle à parler de ces gens (nous tous, sans doute) qui vivent par l’entremise des autres et sur ces rares instants où ils ont cru côtoyer les étoiles, se trouver sous les feux de la gloire. Cet univers est très attachant et Modiano a mis là en exergue un ressort profondément ancré dans la nature humaine et qui, plus est, en situant presque toujours ses personnages dans la période de l'après-guerre. Mais ce livre ne fait pas, non plus, partie de mes préférés, les effets y sont, il me semble, trop appuyés (cette petite fille qui vit le même parcours que la narratrice). De plus, on sent Modiano un peu à l'étroit dans ce rôle de jeune fille. On observe un auteur qui, à partir de l'éclatement initial du récit, en recolle les morceaux de façon trop propre, trop appliquée, sans laisser de ces blancs qui font se mobiliser le rêve.

Le monde de Modiano

7 étoiles

Critique de Francesco (Bruxelles, Inscrit le 16 février 2001, 79 ans) - 2 septembre 2001

L'histoire se déroule dans les années 60 : l'héroïne Thérèse , surnommée " la petite bijou" aperçoit un jour à la station Châtelet du métro parisien la silhouette d'une femme blonde en manteau jaune en laquelle elle croit reconnaitre sa mère. Cette dernière l'avait abandonnée peu de temps après la guerre. Elle va suivre cette femme jusqu'à son domicile mais sans oser l'aborder de peur de découvrir sa propre histoire d'enfant triste et abandonnée. Elle savait que sa mère était décédée après avoir suivi un amant au Maroc. La petite bijou va alors procéder à une enquête pour essayer de savoir s'il s'agit vraiment de sa mère. Elle n'a pas des souvenirs précis de son enfance si ce n'est de la solitude et du désarroi dans lesquels elle a été plongée. L'auteur nous livre par ci par là des indices et des éléments de réponse sans plus. On se retrouve comme toujours dans le monde de Modiano entre rêve et réalité, face à un puzzle dont le lecteur peut essayer de reconstituer les pièces : rues , quartiers , personnages réels ou fantomatiques. C'est tout le charme de l'univers de Modiano présent dans chacun de ses romans.

Décevant

5 étoiles

Critique de Stéphanie (Chevreuse, Inscrite le 12 juillet 2001, 53 ans) - 27 août 2001

J'ai été attirée par les critiques de la presse et par le classement du livre dans le palmarès des ventes. Erreur ! J'ai été déçue. En lisant le livre, j'attendais toujours la ligne, la page suivante pour être happée par l'histoire et puis finalement je suis arrivée à la dernière page et je suis sortie du livre sans y être réellement entrée. Et pourtant, c'est très bien écrit, encore heureux ! ("Voyage de noces" du même auteur m'avait déjà fait le même effet).

C'est mon premier Modiano!

8 étoiles

Critique de Chat pitre (Linkebeek, Inscrite le 23 février 2001, 53 ans) - 3 juin 2001

Et je ne peux pas dire que ce livre m'a laissé insensible. Une angoisse de plus en plus forte au fil des pages qui vous prend et ne vous quitte plus même le livre refermé. Un vide immensément bien retranscrit. Le néant écrit. Il m’a donné envie de découvrir l'univers de Modiono que l’on dit si mystérieux.. Je l’ai vu chez Bernard Pivot et il y avait tant de détresse à ne pas savoir exprimer ce qu'il est qu'il était très touchant. Je vous laisse juge

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