Le trépasseur de Eoin McNamee

Le trépasseur de Eoin McNamee
( Resurrection man)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Eireann 32, le 5 juin 2005 (Lorient, Inscrit le 7 novembre 2004, 76 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 657ème position).
Visites : 3 729  (depuis Novembre 2007)

L'horreur absolue

Belfast dans les années 1970. Des petites frappes des bas fonds protestants de Belfast passent du statut de voyous à celui d’icônes pour une partie de la population. Devenus membres de groupes para- militaires, ils dérapent et deviennent incontrôlables.
Victor Kelly, beau gosse charmeur, est le chef incontesté d’une bande de tueurs sadiques, leurs cibles sont des catholiques se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment. Manipulé par Mc Clure, politicien nazillon, soutenu en sous-main par certains militaires et bénéficiant d’une certaine mansuétude policière, ils terrorisent les populations catholiques. Trop de choses politiques et d’argent sont en jeu et tous les coups sont permis, même les pires. Mais leur cruauté gratuite finit par devenir trop voyante. L’image de Belfast, ville en état de guerre civile, avec ses castes dominantes dont le seul souci est le pouvoir, est terrifiante. La violence règne, les lois sont ignorées. La drogue commence ses ravages, la haine intercommunautaire est palpable. Victor possède en lui son aversion de l’autre : «Portant le nom de Kelly, il savait qu’on le soupçonnerait toujours d’être catholique ». Entre une mère qui remue ciel et terre pour lui, et un père silencieux mais qui semble comprendre qu’il est un assassin, il est lui aussi victime d’évènements qui le dépassent. Mais les Mc Clure et compagnie sont encore là aujourd’hui et trouvent toujours des sympathisants.
Ce roman noir, très noir est basé (et c’est en cela qu’il est édifiant) sur une histoire vraie. En 1972 sévissaient (quel autre terme employer ?) «Les Bouchers de Shankill», qui enlevaient des passants catholiques et les torturaient toute la nuit, même leur communauté les désavoua. Très dur dans le fond et la forme, loin de l’image irlandaise.

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Les éditions

  • Le trépasseur [Texte imprimé], roman Eoin McNamee trad. de l'anglais (Irlande) par Freddy Michalski
    de McNamee, Eoin Michalski, Freddy (Traducteur)
    Gallimard / Noire
    ISBN : 9782070741175 ; 18,60 € ; 24/05/1996 ; 326 p. ; Broché
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Le retour des Entre-morts

7 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans) - 4 décembre 2011

Ce roman est avant tout une chronique de Belfast dans les années soixante-dix, quand la lutte entre les deux communautés religieuses et les divers factions, milices, groupuscules, etc…, manipulés par des forces extérieures, étaient à son paroxysme, que les assassinats, exécutions et autres violences étaient monnaie courante et que la terreur était quotidienne et banale. Quand Victor Kelly, un fils de catholique, persécuté par ses camarades de classe protestants qui le traitaient de « taig » - catholique –, fasciné par le cinéma, surtout par les films évoquant le gangster Dillinger, voulait se faire passer pour plus protestant que les extrémistes protestants et, avec quelques seconds couteaux, avait constitué un petit groupe pour intimider, menacer, corriger, estropier, torturer, assassiner, exécuter tous ceux qui n’étaient pas fidèles à sa cause. Il se croyait investi d’une mission divine pour éliminer les catholiques. Et ces meurtres perpétrés au couteau, arme des puristes contrairement à l’arme feu qui n’est que l’outil du pleutre et du faible, génèrent la peur dans le milieu, dans les institutions qui essaient de maintenir un semblant d’ordre, et dans la presse qui préfère ne pas voir. Seuls deux journalistes essaient encore de comprendre qui tue de cette façon, pour quoi et pour qui ?

McNamee a trempé sa plume dans le sang pour écrire ce roman râpeux comme un whiskey trop jeune, trouble comme un petit matin brumeux sur Belfast, cynique comme un couteau qui découpe sans tuer. Un roman mis en scène comme un film, qui se réclame du cinéma noir américain du début de l’autre siècle mais qui évoque aussi les « Entre-morts » ces bandits d’Edimbourg qui, à une autre époque, n’hésitaient pas à fabriquer des cadavres pour alimenter les laboratoires londoniens.

« C’était comme un truc qu’on voit dans les films », le tableau de la vie ordinaire d’une ville baignée dans la terreur quotidienne où grouillent toutes sortes de forces parallèles plus irrégulières les unes que les autres, où la violence est la seule loi, où le sadisme devient une échelle de valeur. Une descente vers les enfers, une banalisation de la violence et quelques questions qui resteront à jamais sans réponses : qui est responsable, qui est coupable, qui n’a pas voulu voir ? En attendant, les familles explosent, les classes sociales se décomposent et la société se délite.

DURE REALITE

8 étoiles

Critique de Spirit (Ploudaniel/BRETAGNE, Inscrit le 1 février 2005, 63 ans) - 22 octobre 2005

C’est vrai que ce livre est d’une extrême dureté, pas tant sur le plan du polar que celui de l’atmosphère, de la description non pas d’une ville mais de Belfast, à une époque ou les drames ne sont pas que ceux d’une ville « normale ». La haine de l’autre transpire à toutes les pages, les vents marins semblent porter dans chaque rue une violence qui ne demande qu’à exploser.
La description de Belfast est glauque, l’atmosphère est glauque, l’écriture est dure avec des mots comme autant de coups de poings.
C’est un véritable drame social et politique aux imbrications inextricables. Rien n’est facile ni évident en Ulster.
Ce livre demande une ouverture sur les problèmes de l’Irlande afin de ne pas simplement le lire comme un polar, à cet condition il en apprend beaucoup et apporte son lot d’informations que nous cachent par ailleurs les médias.

Le peu de temps que j’ai passé à Belfast ne m’a pas permis de saisir la totalité de cette tension, pour autant le passage avec une voiture de la République du sud dans un quartier protestant et la mise en garde que nous avions eu au préalable m’a convaincu que les problèmes sont réels et que le jour commence à peine a se lever pour les Irlandais.

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