Noces de Albert Camus
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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À la gloire du monde, de la vie et de la pensée
Camus, c’est le penseur de « l’ Etranger », « la Peste », « le Mythe de Sisyphe » et « l’ Homme révolté », mais c'est aussi un formidable amoureux de la vie !
Cette facette de sa personnalité est plus méconnue du grand public. Pour beaucoup, Camus est d'abord une sorte de mythe, confiné au rôle d’un des grands penseurs du vingtième siècle, comme Sartre ou Malraux.
Dans ce volume, nous avons deux textes importants pour éclairer un peu plus sa personnalité. Chacun est divisé en plusieurs parties.
Dans « Noces », Camus nous parle de l’amour sans bornes qu'il porte à l’Algérie, à ses lumières, à sa terre, à ses pierres, à la mer, mais aussi à ses hommes. Et il les connaît bien ! Avec leurs qualités et leurs défauts. Les unes comme les autres découlent, pour lui, de leur environnement. Cette terre où tout est brutal ne peut pas donner des hommes aux goûts et aux comportements mesurés.
Il faut jouir de ce pays et vite, car il est fait pour les jeunes. La vie y est déjà finie à trente ans. Jouir de la vie, c'est jouir de ce qu’elle offre, sans compter, tant qu’il en est temps. Elle offre la nature immortelle aussi dure que douce, comme peut l’être le soleil au fur et à mesure de sa courbe. La mer et la lumière sont les cadeaux fait à tous, pauvres ou riches et l’ensemble fait que ceux qui sont capables d'en jouir peuvent dire : « …nous étalons tous l’heureuse lassitude d'un jour de noces avec le monde. »
Mais Camus, s’il peut jouir de ce que la vie lui offre, du seul présent, puisque seul lui existe, ne peut pas ne pas penser non plus. Et ce texte fourmille de pensées sur la vie, la mort, l’espoir, le renoncement, l’absurde, la condition et la grandeur de l’homme.
Dans les différents essais repris sous le titre global de « L’Eté », nous retrouvons l'Algérie, mais dans des textes plus tardifs, ainsi que des impressions et pensés recueillies par Camus lors d’un voyage en Italie et à Florence en particulier.
L’auteur du « Mythe de Sisyphe » se bat aussi pour l'avenir de l'homme, de la pensée. Il dit qu’il nous appartient de lutter pour ne pas être dominés par le glaive et le vingtième siècle nous demande d’énormes efforts en ce sens, sous peine d'être terrassés. La notion d'équité, si chère aux Grecs anciens, qui définissait un équilibre et des limites, est des plus menacée. « Notre Europe, au contraire, lancée à la conquête de la totalité est fille de la démesure. Elle n'exalte qu'une seule chose qui est l'empire futur de la raison. Elle recule dans sa folie les limites éternelles et, à l'instant, d’obscures Érinyes s’abattent sur elle et la déchirent… Nous tournons le dos à la nature, nous avons honte de la beauté. Nos misérables tragédies traînent une odeur de bureau et le sang dont elles ruissellent a couleur d'encre grasse."
L’homme trahit Prométhée en se soumettant à l’histoire, en en devenant l'esclave. Mais :
" Oui, il suffit d'un soir de Provence, d’une colline parfaite, d’une odeur de sel, pour apercevoir que tout est encore à faire. "
Nous devons incarner les mythes, leur rendre vie, et tout peut redevenir possible !
Les éditions
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Noces [Texte imprimé] Albert Camus
de Camus, Albert
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070360161 ; 6,90 € ; 27/01/1972 ; 192 p. ; Poche
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Des textes magnifiques
Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 2 février 2019
Dans ces courts essais, Camus décrit l'Algérie qu'il aime avec ses qualités et ses défauts. Ses descriptions sont vivantes et pittoresques. Le lecteur a l'impression de déambuler lui aussi dans ces villes algériennes et sur les plages. L'on a l'impression de ressentir la chaleur, les odeurs et l'ambiance de ces terres méditerranéennes. L'attachement de l'écrivain à cette terre est communicatif et donne véritablement envie de découvrir ce pays que l'on côtoie aussi dans "L'étranger" et dans "La Peste". Certains passages lyriques sont très poétiques. La prose de Camus dans ces essais est bien différente de celle de "L'étranger", même si dans ce dernier la scène du meurtre et la scène finale ont tout de même des accents que l'on retrouve dans ces essais.
Dans "L'été", le texte sur l'écrivain et sa fonction est très intéressant et permet de voir quelles sont les intentions de l'écrivain. Il remarque aussi qu'on ne cesse de le rattacher au mouvement de l'absurde alors qu'il n'a pas le sentiment que toute son oeuvre se rapproche de cette pensée. Et puis Camus n'est pas si sombre. Il oppose tragique et malheur et nous rappelle que la conscience du tragique nous rend libres. Et cette liberté est précieuse. Les mythes aussi occupent une grande place dans ces essais. Camus indique au lecteur qu'ils attendent que nous les incarnions. L'écrivain joue avec ses références universelles et s'en sert pour expliquer notre monde. C'est que ce qu'il faisait déjà avec l'opéra d'Orphée dans "La Peste".
Il est des livres que l'on a hâte de terminer pour connaître la fin et puis il y en a d'autres que l'on fait durer tant ils nous bercent et tant on retarde la séparation avec l'auteur. Ces essais sont vraiment beaux, riches et touchants. Dans un essai, le lecteur se rapproche davantage de l'auteur et entre dans les pensées secrètes ou profondes de ce dernier. En lisant ces essais de Camus, on passe un moment passionnant avec un auteur emblématique.
Un bel hommage à un lieu cher
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 24 juillet 2018
La poésie du Sud
Critique de Bételgeuse (, Inscrite le 7 décembre 2007, 45 ans) - 10 décembre 2007
Essais, fragments, ...
Critique de Banco (Cergy, Inscrit le 6 août 2004, 42 ans) - 10 août 2004
Quoi qu'en disent les bibliographies, Noces ou l'été ne peut être considéré comme un essai. Aucun des deux ouvrages n'offre une thèse forte ou une argumentation rigoureuse. Bien au contraire, les deux ouvrages sont des recueils de tentatives littéraires de Camus. Pas des brouillons ou des ouvrages inachevés. Simplement des textes courts qui trouvent en eux leur propre cohérence nous emmènent généralement en Algérie, pays de sable et de poussière où les villes ont encore l'audace de tourner le dos à la mer qui les borde et de leur préférer les pierres du désert.
Dans ces deux recueils, Camus se livre à des évocations lyriques de son pays natal auxquelles il oppose la froideur de la vie européenne, contrainte par le Passé et l'Histoire. Toutefois, il lui arrive de tomber dans l'essai promotionnel, certains se veulent plaidoyer, tract publicitaire, brochure touristique et Camus, malgré son talent d'écriture, se laisse aller à avancer l'argument puéril que seules les grandes âmes et les beaux tempéraments peuvent jouir du voyage en Algérie.
Les meilleurs essais dans l'été forment tout au plus des balades agréables et critiques dans les grandes villes algériennes, Alger et Oran surtout dont il décrit l'aspect poussiéreux, le dédale de ruelles qui détourne la ville de la mer et le travail sisyphéen des hommes qui déplacent les cailloux des jetées dans la mer.
Mais jamais dans ces deux recueils qui se répondent parfaitement et se font parfois écho quand on s'approche de Tipasa, jamais Camus ne parvient à transcrire ces noces avec le paysage algérien, avec la vie algérienne qu'ils annoncent dans le titre du premier recueil. Pour le lecteur même plein de bonne volonté, ces essais restent les descriptions des paysages et des villes algériennes dans l'été qui les révèle.
Une erreur et une précision
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 28 décembre 2001
Quant à la réponse que tu m'as donnée (le mythe de Prométhée oui, pas les mythes religieux), elle me semble parfaitement juste. Je crois simplement ceci: "Noces" est un écrit qui, je crois, est antérieur au "Prométhée" qui est un texte de 1950. Il me semble que dans ce dernier texte, celui auquel je fais allusion dans ma critique, Camus a davantage explicité sa notion du mythe, parce que, personnellement, j'interprète ta phrase comme tu le fais, à savoir: tous les mythes et surtout les religieux évidemment.
En parlant du mythe de Prométhée, il évoque un mythe qui lui semble bon parce qu'il pousse l'homme vers l'avant. Spartacus, cité par lui dans "L'homme révolté" est aussi devenu un mythe et est un exemple au même titre que Prométhée. Comme ce dernier, Spartacus, en se révoltant, crie à la face du monde qu'il ne peut pas accepter le sort qui lui est fait. Parce qu'il est un homme, il se doit de se révolter et, ce faisant, il grandit tous les hommes. Il clame à tous ce que sont leurs droits d'êtres humains, tout simplement parce qu'ils sont humains. Ce qui n'est pas acceptable pour lui ne l'est pas plus pour n'importe quel homme ! Or Camus, dans sa notion de révolte a évolué avec le temps. Dans un premier temps il a surtout défendu la révolte individuelle, comme celle de Meursault face à la société et aux juges. Par la suite, il a poussé sa recherche dans le sens de la révolte collective.
J'en déduis que tu n'avais pas tort pour cette phrase là. Camus me semble tout simplement avoir précisé davantage sa pensée et, aussi, avoir affiné sa notion du mythe.
A propos du mythe
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 28 décembre 2001
"Bien pauvres sont ceux qui ont besoin de mythes."
Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 27 décembre 2001
En effet, l'une des phrases clés de ce livre s'oppose radicalement à cette vision : "Bien pauvres sont ceux qui ont besoin de mythes" proclame Camus dès les premières pages de "Noces à Tipasa". Et, au début du "vent à Djémila" : "Il est des lieux où meurt l'esprit pour que naisse une vérité qui est sa négation même." Pour Camus, en tout cas dans cette oeuvre, il ne s'agit pas, me semble-t-il, "d'incarner les mythes" mais de s'incarner, soi, de "vivre le plus", comme il l'écrit à la fin du "Mythe de Sisyphe". Une dernière remarque... il est vrai que ce petit livre fourmille de pensées, que ces pensées nous interrogent, éveillent notre intelligence. Mais le plus grand plaisir que puissent nous procurer ces douze textes, d'après moi, tient davantage à la somptueuse écriture de Camus ainsi qu'à la simple et grande beauté des paysages qu'elle vise à évoquer, telle cette Florence des jardins Boboli qui s'offre à nous dans la dernière page du "désert" : "Florence! Un des seuls lieux d'Europe où j'ai compris qu'au coeur de ma révolte dormait un consentement. Dans son ciel mêlé de larmes et de soleil, j'apprenais à consentir à la terre et à brûler dans la flamme sombre de ses fêtes. J'apprenais... mais quel mot? quelle démesure? comment consacrer l'accord de l'amour et de la révolte? La terre! Dans ce grand temple déserté par les dieux, toutes mes idoles ont des pieds d'argile."
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