L'une et l'autre de Daniel Sada
( Una de los)
Catégorie(s) : Littérature => Sud-américaine
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Es-tu toi?
Deux soeurs, des jumelles, se ressemblent tellement que personne dans leur petit village mexicain ne peut les distinguer l'une de l'autre. Si le jeu les amuse, cette absence d'identité propre finit par les étouffer et l'arrivée d'un fiancé, une aubaine pour ces quarantenaires désespérées de trouver chaussure à leur pied, complique sérieusement l'histoire.
Quel récit dense ! Pas vraiment confus mais serré, à suivre avec attention, sinon gare, on ne sait plus qui est qui de Constitución ou de Gloria !
Je n'ai pas ressenti de coup de foudre pour ce court roman mais une grande curiosité teintée d'un intérêt certain.
Le scénario de base, deux soeurs identiques jusqu'au bout des ongles (à l'exception d'un grain de beauté soigneusement dissimulé) qui se font passer l'une pour l'autre, est assez classique. L'idée du fiancé qu'on se partage n'est pas non plus très originale, mais ma foi, si il fallait s'arrêter dans la littérature contemporaine à tout ce qui n'est pas original, beaucoup d'auteurs et non des moindres passeraient à la trappe !
Si l'histoire est assez quelconque, la sauce à laquelle Daniel Sada la cuisine est remarquable. C'est une fascinante exploration de l'âme de deux soeurs qu'il nous offre ici. Les peurs, les craintes, les joies, les incohérences, l'enfance dont elles ne sont jamais sorties, l'absence de parents bien plus importante qu'il n'y paraît, le regard de l'entourage sur un tel phénomène de gémellité (qui frise par moments une certaine forme de démence), la quête universelle du bonheur et de l'amour, le poids de la tradition... bref autant d'éléments qu'il décortique avec talent, ne laissant rien de côté et poussant certains comportements jusqu'à l'extrême, histoire sans doute d'en démontrer toute l'absurdité ou toute la réalité.
Les éditions
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L'une et l'autre [Texte imprimé] Daniel Sada trad. de l'espagnol (Mexique) par Robert Amutio
de Sada, Daniel Amutio, Robert (Préfacier)
les Allusifs / Les Allusifs
ISBN : 9782922868098 ; 14,20 € ; 10/09/2002 ; 120 p. ; Broché
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Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 14 janvier 2009
Voilà, je n’ai pas tout dévoilé car ce serait dommage de priver le lecteur d’une histoire très amusante à découvrir. Pour l’écriture, j’ai de sérieuses réserves cependant. Pas au niveau de la qualité ni du vocabulaire d’une belle richesse mais les phrases sont rocailleuses, hachurées, difficiles… J’ai dû bien m’accrocher, relire certains paragraphes plusieurs fois afin de bien en saisir tout le sens car Daniel Sada écrit tout en nuances et son écriture ne coule pas, au contraire, elle bondit, s’arrête, revient, repart, et c’est ainsi tout le long du livre. Je m’y suis faite seulement rendue au milieu du livre mais cela vaut la peine de persévérer malgré le fait que le dénouement soit un rien décevant mais enfin… C’est une écriture qui dérange un peu mais que je n’ai pas détestée au contraire ! Le thème de la gémellité y est bien exploité de même que les relations amoureuses, les hauts et les bas de la vie conjugale et les ragots de village.
« Une vie de corvées mesquines et affligeantes. Une vie de soupes et de plats réchauffés, de ragoûts et de vaisselles par-dessus la tête. Une vie de tablier. Et l’homme : roi, seigneur, qui ne sait rien faire d’autre que se rengorger à tout moment et se caresser la moustache bien fournie et noire, noire comme son image de profil ou de face. Ne parlons même pas des enfants ni de girons familiaux. Serait-ce là la récompense pour les baisers dont qui sait même s’ils se poursuivraient ? »
« Et ce « comment » abolissait les prétentions niaises d’un futur rose qui n’appartient qu’aux exaltations de l’imagination, au goût profond des baisers qui sublime tout, pour ensuite, inévitablement, le distordre, et aux doux commencements qui peu à peu se figent. Et c’est qu’à la longue l’amour ne serait pas ce que les rêves suggèrent, mais pain insipide, monotonie satisfaite et finalement pour toujours : amour agenouillé. »
Soeurs avant tout !
Critique de Clarabel (, Inscrite le 25 février 2004, 48 ans) - 7 juin 2005
A d'abord juger le livre en lui-même, j'avoue être séduite par son format, sa souplesse et la jolie teinte écrue des pages. Par contre, la couverture en elle-même est ... disons-le : moche !
Pour l'histoire, rien de sensationnel, effectivement : Gloria et Concepcion, "des calques effrayants", entretiennent l'illusion d'une seule et unique fiancée, "celle de ses rêves", à un pauvre diable de ranchero carrément niais ! Moi j'ai surtout beaucoup apprécié la présentation des personnages, je ne sais pas si le terme "loufoque" convient le mieux, mais j'apprécie la volonté d'humour, de dérision et d'ironie dans le texte. Le narrateur s'amuse, il n'a pas sa langue dans sa poche, il se permet d'intervenir, de présenter la situation, de s'accaparer les protagonistes et les mettre sous son aile. Il est à la fois tendre et moqueur ! C'est clair que le personnage d'Oscar offre à l'auteur un véritable défouloir : c'est le comble de la goguenardise par excellence ! Le type hâbleur, "parfumé jusqu'à la nausée, costumé de vert et la raie partageant le crâne" !!! On voit d'ici la scène ! On se tord de rire.
Bah oui, j'ai beaucoup ricané à la lecture de "L'une est l'autre". J'ai trouvé une fraîcheur et une tonalité pétillante, certes le texte s'agrémente de quelques lourdeurs gonflantes, notamment une entrée en matière un peu longuette et rasante. Mais cette histoire est perfide à souhait, je pense que c'est ce qui m'a enthousiamée. Il y a d'abord le couple des soeurs, des conspiratrices en mal de sensations amoureuses, l'une double l'autre, et l'autre endort son double pour mieux atteindre l'harmonie entre elles. J'ai notamment aimé les résumer à "l'argutie féminine" - subtiles et pleines de finesse ! Un autre personnage très attachant : la tante ! Elle les pousse à se trouver un mari et les inonde de lettres, dont l'une d'elles porte en gros cette exclamation : "Mariez-vous sans délai, espèces de demeurées" ! La palme d'or pourrait revenir au prétendant, Oscar, qui offre au lecteur une perle en formule ampoulée pour la demande en mariage : " Je vous demande votre main pour cheminer ensemble vers l'autel ".
En bref, beaucoup de cocasserie, de burlesque et de gouaillerie dans ce livre ! J'ai passé un agréable moment.
Forums: L'une et l'autre
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Dommage... | 5 | Dirlandaise | 14 janvier 2009 @ 23:10 |