Le mépris de Alberto Moravia
(Il Disprezzo)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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Le ciel couvert du mépris
*ATTENTION DÉPRIMÉS CHRONIQUES, PASSEZ VOTRE TOUR POUR CELUI CI*
Ayant à travailler sur l'adaptation filmographique de Godard, j'ai dû passer par l'original de Moravia, histoire de Riccardo Molteni et de sa femme Emilia, pris dans une spirale infernale qui ruine leur vie conjugale. Vous connaissez tous le problème Émilia n'aime plus Riccardo, elle le méprise. Pourquoi? Rien de sûr.
Pourtant la narration à la première personne de Moravia s'avère beaucoup plus touchante que le jeu de Piccoli. Riccardo souffre du comportement étrange et froid de sa femme. Je me suis souvent dit au cours de la lecture: "Merde Riccardo, laisse la, c'est pas dur, LAISSE LA"
Pendant tout le roman je me suis senti déprimé et frustré de voir cette relation perdurer alors qu'elle aurait dû finir.
Pour ceux qui aiment les longues agonies amoureuses... pas ma tasse de thé
Les éditions
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Le mépris [Texte imprimé] Alberto Moravia trad. de l'italien par Claude Poncet
de Moravia, Alberto Poncet, Claude (Traducteur)
Librio / Librio (Paris)
ISBN : 9782290335062 ; 3,00 € ; 07/07/2003 ; 154 p. ; Poche -
Le Mépris [Texte imprimé] Alberto Moravia trad. de l'italien par Claude Poncet introd., bibliogr. et chronologie par Jean-Michel Gardair
de Moravia, Alberto Gardair, Jean-Michel (Editeur scientifique)
Flammarion / G.F..
ISBN : 9782080705259 ; 5,90 € ; 07/01/1993 ; 256 p. ; Poche -
Le mépris [Texte imprimé] Alberto Moravia trad. de l'italien par Claude Poncet
de Moravia, Alberto Poncet, Claude (Traducteur)
Flammarion
ISBN : 9782080684400 ; 15,30 € ; 15/11/2002 ; 260 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (8)
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Une odyssée intérieure
Critique de Ravenbac (Reims, Inscrit le 12 novembre 2010, 59 ans) - 24 mars 2019
Petit à petit, au fil de la vie qui passe, par de petits indices de la vie quotidienne, des attitudes, un ton, Riccardo prend conscience du fait que sa femme a cessé de l’aimer.
Le jour où Riccardo fait la connaissance du metteur en scène Rheingold chez le producteur Battista et se retrouve invité dans sa villa à Capri pour écrire l'adaptation de L’Odyssée, leurs problèmes d’argent semblent temporairement réglés.
Riccardo, qui voit un rapprochement entre sa situation de couple et celle d'Ulysse et de Pénélope, veut construire un scénario à partir de sa vie personnelle. La comparaison Richard / Ulysse et Emilia / Pénélope vient en support de l'analyse psychologique des personnages du roman et des affects liés aux événements.
Pressée par les questions de son mari, Emilia finit par lui avouer la cause de ce désamour : elle le méprise… Pour quelles raisons ce mépris ? Comment reconquérir Emilia ?"
Source: extrait du Résumé de https://fr.wikipedia.org/wiki/…
Un véritable coup de coeur !
Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 45 ans) - 22 août 2017
Ce roman psychologique nous plonge totalement dans l'esprit de Riccardo. Le lecteur suit le moindre mouvement de sa pensée, ses interrogations, ses doutes, ses espérances. Bien entendu certains questionnements sont récurrents dans le roman, mais le sujet s'y prête parfaitement. Le personnage principal souffre du désamour de son épouse, de son indifférence et même pire de son mépris. Il aimerait comprendre cette situation, la débloquer, retrouver la femme qu'il aime, donc sa souffrance ne peut pas durer uniquement dix minutes. Elle l'obsède durant des jours. La prise de conscience que l'on va perdre un être que l'on aime est violente et cruelle et ne se résout malheureusement pas en quelques heures. Ou alors ce n'était pas de l'amour qui unissait les deux êtres. Bien entendu, Riccardo ressasse les mêmes idées, mais cela est nécessaire.
J'ai été absorbé par ce roman et par l'écriture de Moravia. Dès les premières lignes du roman, on sait que l'on lit une oeuvre de qualité. Le climat est parfois étouffant. On sent ce personnage désemparé, malheureux et en même temps lucide. Il est pleinement un héros tragique qui n'a donc aucune emprise sur sa destinée. Il n'accepte pas ce qui lui arrive et c'est bien pour cela qu'il souffre. Le cadre idéal de Capri n'y peut rien non plus.
J'ai beaucoup aimé ce roman qui est bien plus riche qu'une simple description d'un couple qui se délite. Les liens avec L'Odyssée d'Homère permettent d'aller beaucoup plus loin. Un véritable coup de cœur !
Question existentielle des points de vue
Critique de DomPerro (, Inscrit le 4 juillet 2006, - ans) - 22 novembre 2013
Par sa composition, par ses phrases qui rebondissent d'un thème à un autre, toujours en mouvement, et par son rapport aux mots, à cette distance nécessaire pour analyser une situation pour mieux l'écrire, le roman de Moravia, paru en 1960, me rappelle étrangement le style de la Nausée, paru en 1938, par Jean-Paul Sartre. Dans ces deux romans, il y a une volonté très affirmée d'un individu, d'un esprit profond, qui veut voir clairement son existence, des rapports humains aux différentes scènes vues de son quotidien.
Contrairement aux autres opinions exprimées sur Critiques Libres qui placent le trouble amoureux avec Émilie au coeur du roman, le sujet du Mépris se situe davantage, à mes yeux, chez Molteni même, ce scénariste idéaliste qui rêve de travailler sur un projet personnel, et non sur les projets (insignifiants) des autres, et, surtout, sur son rapport au monde.
En clair, le Mépris, c'est l'histoire d’un homme qui ne veut plus faire ce qu’il devrait normalement faire et qui, dans sa chute, interroge et critique plusieurs valeurs sociales, un peu à la manière d'un Bartleby : des ''formalités diverses des réceptions bourgeoises : le café - un ou deux morceaux de sucre? - (...) les propos oiseux qui font passer le temps...'' allant jusqu'à ''l'automatisme qui nous permet de vivre sans trop de fatigue en nous rendant inconscients de la plupart de nos mouvements'' en passant par cette remise en question : ''Parce que le monde d'aujourd'hui est fait de telle manière que personne ne peut choisir la voie qu'il désire et doit faire au contraire ce que veulent les autres... pourquoi l'argent tient-il une telle place dans ce que nous faisons, ce que nous sommes (...)?''
Comme s'il s'observe constamment, étudiant ses paroles ou gestes, Molteni remarque ''que plus on est envahi par le doute, plus on s'attache à une fausse lucidité d'esprit avec l'espoir d'éclaircir par le raisonnement ce que le sentiment a rendu trouble et obscur.'' Qui est le plus fou, entre l'homme lucide qui refuse de participer à la folie du monde ou celui qui s'y perd sans s'en rende compte?
Je le répète : le Mépris est avant une torture psychologique, pour ne pas dire un roman existentiel, et non simplement une histoire tragique d'amour déchu.
Ce doute (existentiel) qu'entretient Molteni, qui exerce pourtant le métier de scénariste, sera tellement profond qu'il remet en cause l'usage de la parole : ''J'avais besoin de parler, j'avais tant de choses à dire et en même temps je sentais que désormais les mots étaient inutiles (...). Je me taisais donc, non certes avec la sensation détendue et tranquille d'un homme qui n'éprouve pas le besoin de parler, mais de celui dont l'esprit bouillonne de choses à dire et en est conscient mais qui se heurte en vain contre cette conscience comme contre les barres de fer d'une prison.''
Notons que dès les premières lignes du roman, Molteni nous avoue que durant les deux premières années, entre lui et Émilie, ''l’accord complet et profond de nos sens s’accompagnait de cet obscurcissement ou, si l’on préfère, de ce silence de l’esprit qui, en de telles circonstances, suspend toute critique et s’en remet à l’amour seul pour juger la personne aimée.''
Ce silence béni d'un amour heureux est-il la cause d'un malentendu dans ce couple, malentendu qui donnera naissance au mépris de plus en plus affirmé d'Émilie contre Molteni? Ou est-ce plutôt les nombreuses questions de Molteni posées à Émilie pour éclaircir ce malentendu qui provoqueront la chute de leur union?
L'art de Moravia, dans ce roman, est de faire sans cesse diversion, créant des effets spéciaux, comme dans un film spectaculaire, pour dissimuler l'aspect psychologique du personnage central. D'ailleurs, comme l'arbre qui cache la forêt, la mise en abyme du projet de film d'Ulysse est un artifice pour détourner l'attention, bien qu'il offre des points de vue intéressants sur ce récit d'Homère.
Molteni, cet homme pleinement conscient de l'absurdité de sa vie, qui est paralysé par le mépris d'Émilie, pour employer ses propres mots, subit donc deux ''couches de mépris'', si j'ose dire : existentiel et amoureux.
Le mystère est opaque. Rien n'est simple entre Émilie, qui est beaucoup moins idéaliste, et Molteni, car ce dernier n'est pas simple. Au contraire, il se perçoit comme le seul être sensé dans ce monde dérangé. ''En substance, j'étais l'homme civilisé qui dans une situation de caractère primitif, en face d'une faute contre l'honneur, se refuse au geste du coup de couteau.''
Émilie reproche à Molteni : ''Tu n'es pas un homme... tu ne te conduis pas comme un homme!'' Mais, comme rien n'est simple, pour Molteni, il s'agit peut-être plus de ''l'impossibilité pour le pauvre d'être un homme.'', d'un idéaliste perverti par le marché et les lieux communs.
Le Mépris serait-il donc un roman d'apprentissage sur comment (ne pas) devenir un homme?
L'indifférence, cette arme des faibles
Critique de Antihuman (Paris, Inscrit le 5 octobre 2011, 41 ans) - 21 août 2013
Sans dévoiler le récit, tout cela se termine d'ailleurs dans une sorte d'étrange ménage à trois, mais dont le lecteur peut être indifférent au final tant Emilia est idôlatre, odieuse et superficielle (au fond, on pourrait d'ailleurs dire de même pour Ricardo.)
Le Mépris est donc une oeuvre solaire, point trop misérabiliste, et la nemesis de l'histoire est ce riche Battista qui renforce ensuite son noeud gordien: en fait de quoi l'auteur aurait pu définir son oeuvre comme le second volet du conte "la Belle et la Bête" - quoique ce millionnaire est si médiocre qu'il ne réalisera même pas un bon anti-héros !
J'ai plutôt aimé, mais l'issue est tellement commune qu'il est vrai que ce petit livre peut lasser en définitive.
Moravia ou l'expression de la puissance de l'amour
Critique de Provisette1 (, Inscrite le 7 mai 2013, 12 ans) - 19 mai 2013
Par ailleurs, les parallèles faits avec "L’odyssée" d’Homère ou le "Ulysse" de Joyce sont très judicieux et ne viennent qu'en appui "démonstratif" de la réflexion de l'auteur, de la constante introspection de Riccardo, du cheminement de son "périple" amoureux si cruel, si douloureux.
Quant à la fin, elle ne m'a guère surprise!
J'avoue que depuis la lecture de "L'amour conjugal- que j'avais trouvé 1000 fois plus déprimant- Moravia est un enchantement de lecture!
Ecriture pénétrante et puissante: un grand.
Un très grand.
le mépris et la différence
Critique de Lisab (Bruxelles, Inscrite le 10 juillet 2012, 79 ans) - 20 août 2012
Comment accepter la vérité de l'autre sans explications ? Comment accepter qu'après l'aveuglement de la passion, il n'y ait plus que la réalité de deux êtres différents incapables de se comprendre ?
Richard a le sentiment d'avoir tout fait pour Emilie et pourtant elle le méprise, il la dégoûte.
Incompréhension, soupçon, responsabilités, douleur, révolte, remords: Tout se mêle se démêle dans la tête de Richard. Ses états d'âme sont complexes et il ne veut prendre la décision de quitter sa femme que lorsqu'il aura compris pourquoi ce n'est plus comme avant et pourquoi ils ne peuvent repartir sur de nouvelles bases. Cela prend du temps dans la vie et.... des pages dans le roman.
Il aime toujours sa femme et même s'il sait qu'il se berce d'illusions et d'oubli il espère toujours un miracle et c'est le destin tragique qui s'en chargera.
Riccardo, il va falloir qu'on t'explique des choses...
Critique de Boitahel (Paris, Inscrite le 27 janvier 2010, 40 ans) - 24 novembre 2010
Au final, je rejoins la critique principale..."Riccardo... pourquoi tu t'entêtes : laisse tomber!!!!! Quand c'est fini, c'est fini!! On ne peut pas forcer les gens à aimer!! "...et les parallèles interminables avec l'Odyssée... trop souvent imbuvables!
Des questionnements incessants : "je lui parle", "je ne lui parle pas", "je fais ce scénario", "je ne fais pas ce scénario", "je lui demande si je dois faire ce scénario"...
Qui peut lui expliquer qu'il faut prendre des décisions tout seul comme un grand et mettre les choses à plat plutôt que de laisser une situation n'envenimer?? Cette passivité m'a exaspérée à certains moments!! Dans la vraie vie, je l'aurais secoué pour qu'il se bouge un peu!!!!
En fin de compte, je trouve que le livre n'est pas mal écrit, mais il y a un écart notable entre la triturage de cerveau permanent du livre et le rendu du film... et mon coeur penche pour le film!
Un couple mal assorti qui se disloque
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 26 décembre 2005
Est-ce l'adultère ? La lassitude de l'habitude ? Leur logement ? Leur condition de vie ? Finalement, on découvre qu'il s'agit de leur trop grande différence. Il est intellectuel, il est scénariste de cinéma - bien qu'il préfèrerait travailler pour le théâtre - et en vue, elle ne travaille pas et n'a juste qu'une formation de dactylographe et son physique de mannequin à offrir. Trop différents, ces deux-là, ça ne pouvait pas coller, et on le sent assez bien
Elle refuse d'admettre la lassitude, puis, à force de la tanner, elle avoue, par colère, qu'elle le méprise, mais qu'elle se refusera toujours à lui dire pourquoi et qu'elle s'engage à rester.
Comment cette charmante godiche belle comme un astre, amenée à se montrer dans les plus beaux lieux de l'Italie, Capri, la Via Appia, peut-elle rester de marbre face aux tentations ?
Il y a Battista qu'elle n'aime pas. Il a des manière rustres, une morphologie de singe - dixit Riccardo - et manque de finesse. Serait-il finalement plus proche d'Emilia ?
Elle finit par quitter son mari, je ne vous dis pas avec qui, elle lui spécifie qu'elle préfère cela à la solitude. Puis, à l'extrême fin, se passe un drame
On sent à peu près tout venir, sauf la toute fin. L'intérêt de cette nouvelle est la psychologie du narrateur, et cela tombe bien qu'on découvre cette histoire par ses yeux.
Il y a un assez intéressant parallèle avec le couple d'Ulysse et Pénélope. Riccardo doit élaborer un scénario adapté de l'Odyssée, et se rend compte des similitudes avec sa propre union, que souligne le producteur allemand.
Pas mal, et plutôt mieux que le film de Godard, beau esthétiquement, solaire comme une page d'hebdomadaire people. Bardot est pas mal en idiote incongrue dans ce couple. Il me semble avoir lu qu'Emilia était brune, ce qui justifie certainement la scène de l'essai de la perruque. Mais il est malaisé de transposer un écrit psychologique, surtout quand le décor est aussi beau et léché que celui-là, voulu par l'auteur lui-même, mais qu'il est plus facile, selon moi, de ne pas voir, pour mieux entrer dans l'ambiance.
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