La ballade d'Iza de Magda Szabó
(Pilátus)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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Vivre dans ses souvenirs
Encore sous le charme de "La Porte", j'ai entamé la lecture de "La ballade d'Iza" avec le plaisir d'une nouvelle découverte, celle d'un personnage auquel Magda Szabo donnerait vie comme elle sait si bien le faire. Aucune déception ne m'attendait, bien au contraire. Magda Szabo donne tellement de volume à ses héroïnes, sans doute parce qu'il y a beaucoup d'elle derrière tout cela. Dans "La Porte", elle parlait d'Emerence qui a partagé sa vie en qualité de femme de ménage, confidente, organisatrice et bien d'autres choses encore pendant vingt ans. Dans ce livre, elle évoque l'oppression ressentie dans une grande ville qui étouffe et enlève toute individualité aux êtres qui fleurissent un peu trop. A l'image de l'écrivain elle-même, longtemps humiliée dans son pays, victime d'un régime politique hongrois qui n'appréciait guère sa manière de penser et de concevoir le monde, celui de la liberté.
Vince est un ancien magistrat, mis au ban de la société pour avoir prononcé un jugement qui ne plaisait pas au régime. Il est aujourd'hui mourant, atteint d'un cancer. Ses derniers mots, ses confidences, ses secrets sont recueillis par une infirmière dévouée qui ne le quitte pas. La mort arrive, son épouse se retrouve seule, complètement perdue, elle ignore comment elle pourra continuer à vivre sans son mari. Sa fille Iza la déracine de sa Hongrie rurale pour l'emmener avec elle en ville, à Budapest, dans un tout petit logement où la vieille femme se sent prisonnière. Elle prend cependant garde de n'adresser aucun reproche à sa fille, elle sait que celle-ci a agi pour bien faire seulement voilà, elle se sent déracinée et va mal. Alors Madame Szöcs erre de parc en square, elle nourrit les pigeons, elle se parle, elle vit dans ses souvenirs et la nostalgie d'un passé révolu. Puis elle nourrit un rêve, celui de rentrer chez elle et d'élever une belle pierre tombale pour son mari; ça devient son but, son unique raison de vivre.
Magnifique texte de Magda Szabo tout en pudeur et en sensibilité pour nous raconter l'errance et le désoeuvrement d'une veuve déracinée, mal aimée par une fille trop occupée, perdue dans une ville sans âme. On devine derrière ces lignes la douleur de l'exil et le poids du silence qui ont dû longtemps hanter l'auteur. J'ai été touchée par l'intimité qu'elle glisse dans des mots simples, en racontant la vie de tous les jours, en se glissant (avec un talent!) dans les pensées de ses héroïnes.
Merci à l'éditeur pour la réédition de ce titre de Magda Szabo, qui est un auteur à découvrir absolument, son écriture mérite amplement de sortir de l'oubli.
Les éditions
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La ballade d'Iza [Texte imprimé] Magda Szabó trad. du hongrois par Tibor Tardös rev. et corr. par Chantal Philippe et Suzanne Canard
de Szabó, Magda Tardos, Tibor (Traducteur)
V. Hamy / Littérature Etrangère
ISBN : 9782878581997 ; 22,50 € ; 13/01/2005 ; 261 p. ; Broché -
La ballade d'Iza [Texte imprimé]
de Szabó, Magda
le Livre de poche / Le livre de poche
ISBN : 9782253070214 ; EUR 7,90 ; 11/10/2017 ; 384 p. ; Poche
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la douce mélancolie de Magda Szabor
Critique de Faby de Caparica (, Inscrite le 30 décembre 2017, 62 ans) - 17 mars 2020
Ed. Le livre de Poche
Bonjour les fous de lectures ....
Beaucoup ont découvert Magda Szabo, auteure hongroise , en lisant " la Porte".
Voici un récit tout autant passionnant si pas plus.
Un père qui se meurt, une mère perdue et une fille directive mais qui croit bien faire.
Voici les trois personnages principaux de ce livre mélancolique où nous retrouvons la jolie écriture de Magda Szabo.
Iza, fille unique choyée, quitte la campagne où elle a grandi pour s'installer à Budapest comme médecin.
A la mort de son père, elle décide d'installer sa mère dans un appartement en ville sans trop lui demander son avis.
Iza a l'habitude de tout régenter et surtout qu'on ne lui résiste pas.
Dès lors, un malaise croissant s'installe chez la vieille dame.
Un jour, elle décide de s'enfuir et de retourner chez elle..
Iza ne comprend pas ...
Réflexion sur la difficulté d'aimer, sur l'impossible communication entre une mère et sa fille, sur la vieillesse .
Ballade d'Iza, pauvre Iza qui se cherche, mais également ballade de la mère qui, elle, étouffe de chagrin, de frustration et qui aspire à vivre autrement.
Histoire déchirante, remplie de non-dits.
Histoire d'amours qui finissent mal.
Histoire que je recommande chaudement.
N'hésitez pas à découvrir les autres écrits de Magda Szabo, grande dame de la littérature hongroise.
Un superbe livre !
Critique de Arturo Bandini (Bruxelles, Inscrit le 19 octobre 2009, 38 ans) - 20 octobre 2009
Tout en délicatesse, tout en grâce, laissant deviner derrière les brumes filandreuses les jardins suspendus et lumineux de l’âme humaine.
Ce livre est difficilement descriptible, peut être aussi parce qu’il est assez insaisissable : en vérité, quoi de plus dans cet ouvrage que les multiples et médiocres petits griefs et incompréhensions entre une mère et sa fille ? Quoi de plus que les souvenirs d’une vieille femme au sujet du temps révolu et de l’amour perdu ? Quoi de plus que le portrait d’une femme, Iza, l’enfant trop aimé de la famille, autour de laquelle gravitent tous les personnages, et qui bien que combative et entreprenante, docteur en médecine, courageuse et aidante, n’en n’est pas moins une femme autoritaire, assez froide et incapable d’aimer ?
Et pourtant ce livre est beau, émouvant comme la vie lorsqu’elle vous surprend en dehors de la banalité du quotidien, c'est-à-dire rarement, précieusement. En fait c’est ça : La ballade d’Iza est un livre rare ! Rare par sa capacité à rendre compte de la complexité des relations humaines, sans pour autant bannir de ce regard lucide et un peu cruel la tendresse et l’amour qui ennoblissent les personnages. Rare aussi pour l’écriture, subtile, dense, agréable après les quelques premières pages, après qu’elle nous ait prouvé, que dis-je, imposé ! Sa force de caractère. Rare et étonnant enfin pour la mélancolie qui se dégage de cette évocation du commun des mortels : un deuil, un divorce, des amours finis ou en commencement, des choses qui ne sont pas dites, des rancœurs, et au final la difficulté d’aimer, celle d’Iza en particulier ; sa ballade très solitaire ressemble pas mal à un blues, à une mélopée d’animal blessé, à une chanson d’esclave.
Un livre dont on ressort sonné, comme après une introspection.
A lire !
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