Ernesto Guevara connu aussi comme le Che de Paco Ignacio Taibo

Ernesto Guevara connu aussi comme le Che de Paco Ignacio Taibo
( Ernesto Guevara, también conocido como el Che)

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Lamanus, le 2 février 2005 (Bergerac, Inscrit le 27 janvier 2005, 65 ans)
La note : 10 étoiles
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CHE QUI ?

Avec les deux tomes de Ernesto Guevara connu aussi comme le Che parus en 2001, Paco Ignacio Taïbo II nous met à genoux, nous force à battre des mains et des pieds comme une otarie savante, nous sommes subjugués, sous le charme — un chef-d’œuvre de biographie. À lire toutes affaires cessantes.

Dans mes vertes années — il y a des lustres de cela, quand le président Pompidou bouffissait, le pauvre, et qu’un grand révolutionnaire, surnommé Bon-choix-madame-bon-choix-monsieur, coiffé du doux prénom de Valery (moins poète il est vrai que Paul et ses Variations) entrait dans la guérilla présidentielle pour se faire élire une année plus tard au poste suprême de Commandante Giscardos D’Estaingos — dans mes jeunes années donc, j’arborais sur mon fier poitrail juvénile la marque quasi indélébile (je couchais avec) d’un t-shirt du Che, son célèbre portrait par Korda (mais peut-être ma mémoire m’abuse-t-elle et ce portrait n’était-il pas encore diffusé), et j’aurais sans nul doute défendu celui-ci contre les réactionnaires boutonneux en pantalon de flanelle et veste croisée (ceux qui allaient comploter chez m’sieur le curé des eucharisties répressives et fabriquer des bénitiers piégés qui exploseraient aux doigts des infidèles) mais, malheureusement, je n’en eus pas l’occasion, entouré que j’étais par un nombre inimaginable de Che à manches courtes qui tous, à mon instar, se pensaient la réincarnation de l’Argentin.

Que savais-je, à l’époque, du Che ? Et que savais-je de lui avant de lire le livre de Paco ? Force est de l’avouer, NADA. Cet homme, médecin de formation, qui s’embarquera un jour de fin 1956 avec Fidel — Fidel un peu plus trouble, un peu plus anguille, un peu plus fourbe, bref un avocat —, qui quittera le Mexique pour rejoindre Cuba, qui durant plus de deux années combattra dans la Sierra Maestra pour finalement emporter toute l’île à la force des armes et des convictions révolutionnaires socialistes et cubaines qu’il enseignera comme un saint homme au peuple principalement paysan. Le Che voulait porter la révolution sur tout le continent Sud Américain. Il y laissera la vie en Bolivie. Certains soutiennent qu’il a été vendu par Fidel, d’autres abattus par la CIA (ce qui est exact d’un point de vue purement historique), d’autres soutiennent qu’il n’est pas mort, d’autres vivent dans le souvenir, d’autres font de l’argent avec son image, d’autres en rêvent, d’autres s’en foutent. Paco, lui, se contente, si j’ose dire, de raconter le Che. Et il le raconte extraordinairement bien, pour la simple raison, je crois, qu’il aime.

Qu’est-ce qui différencie le Che de Mère Thérésa ? Rien. Tous les deux étaient pétris d’amour pour leur prochain. Simplement le Che combattait les armes à la main, le discours à la bouche et le béret sur la tête. Paco Ignacio Taïbo II nous fait entrer dans le monde étrange et suffocant de la guérilla. Il donne à connaître ces hommes qu’un idéal menait, et menait bien souvent à la mort. Des hommes pour qui la vie n’avait pas de prix sauf celui du don de soi pour une idée, pour d’autres hommes, pour une cause. Ah ! je vois d’ici les culs-serrés et les pantouflards se gausser. Et quoi-t-est-ce qu’elle est devenue leur soi-disant révolution ? Franchement pas une démocratie Cuba, ah, ah, ah ! Eh bien oui, la révolution cubaine a engendré un monstre totalitaire mais ce monstre n’est pas issu d’une idée, il est né d’un homme, Fidel, un politicien toujours prêt au pire pour favoriser ses petites affaires. Le Che n’était pas un politique, c’était un idéaliste. Comme tous les vrais idéalistes il avait raison. Sans eux le monde ne serait qu’une vaste Sécurité Sociale peuplé de retraités adhérents à des fonds de pensions, prêts à tout pour aller visiter Cuba et y acheter des cigares au meilleur prix, c'est-à-dire le moins cher possible. Le Che pensait à une société de répartition, nous allons vers une société de consommation. S’il y avait un combat à mener de nos jours, à mon humble avis de pantouflard bien au chaud dans ses baskets, ce serait celui de la déconsommation. La consommation est le Bastita des temps modernes, elle fait peser sur nous sa dictature, celle qui impose à des enfants du Tiers-monde de travailler à fabriquer des paires de chaussures de sport que nos chères têtes blondes porteront en même temps qu’un t-shirt du Che.

Paco Ignacio Taïbo II… voilà, par exemple, un beau nom pour un yacht amarré au quai d’honneur face au café Sénéquier à Saint-Tropez. Un yacht où, le soir, de belles cubaines un tantinet déshabillées dansent au son d’une samba endiablée. Le Paco Ignacio Taïbo II, d’où sortirait des fonds de cales un groupe de guérilleros barbus, sales, hirsutes, armés de Garand et autres M1, qui prendraient d’assaut la mairie et proclameraient l’Etat libre Tropézien, ceci en plein été ensoleillé, farci de gros bides bronzés surmontés de bouches lardées de cigares cubains…. mais j’arrête je me fais du mal.

Pourquoi faut-il impérativement lire les deux tomes du livre de Paco ? Parce qu’on en sort complètement retourné, parce qu’on découvre un Che tel qu’il devait être vraiment, parce que l’auteur est un grand biographe, parce que ses livres se lisent d’une traite (j’ai presque honte de dire, se lisent comme un roman d’aventure), parce qu’une fois au moins dans une vie de lecteur il faudra se frotter au Che, alors autant commencer par les bons bouquins.

Et pour ceux que cette lecture aura passionné, je conseille de lire, il faudra se remuer un peu pour trouver l’exemplaire, dans une bibliothèque par exemple, de lire donc : Souvenirs de la guerre révolutionnaire, d’Ernesto Guevara, cahiers libre 94-95, Librairie François Maspero édité en février 1967 avec une préface de Robert Merle.


Ernesto Guevara connu aussi comme le Che Tome 1, Paco Ignacio Taïbo II, 9,76 €, éditeur : Payot (31 mars 2001), Format : Poche - 598 pages, ISBN : 2228894176

Ernesto Guevara connu aussi comme le Che Tome 2, Paco Ignacio Taïbo II, 9,75 €, éditeur : Payot (31 mars 2001), Format : Poche - 571 pages, ISBN : 2228894184

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Les éditions

  • Ernesto Guevara, connu aussi comme le Che [Texte imprimé] Paco Ignacio Taibo II
    de Taibo, Paco Ignacio
    Métailié / Petite bibliothèque Payot (Paris).
    ISBN : 9782228894173 ; 9,95 € ; 31/03/2001 ; 598 p. ; Poche
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  De la belle critique ! 8 Bolcho 27 février 2005 @ 16:58

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