Bon voyage !

Il y a deux ans, si je me souviens bien, j’ai eu le plaisir d’interviewer Emilie Saitas pour son livre « Tout un monde », une excellente bande dessinée-reportage où elle explorait les différents habitats alternatifs qui existaient. Souvent, plus que l’habitat, elle réalisait le portrait des habitants et elle le faisait avec talent après avoir vécu de très belles rencontres. On aurait pu croire à un simple livre teinté d’écologie, en fait c’était un ouvrage humaniste comme on aimerait en lire plus de nos jours !

Après cette rencontre qui avait permis une émission sur RCF en Bourgogne, j’avais suivi sur Internet un voyage-pèlerinage qu’elle a effectué au Japon sur l’île de Shikoku (88 temples, 1200 kilomètres, pour l’essentiel à pied). Je ne savais pas encore qu’elle en ferait un album mais j’avais pris un certain plaisir à la suivre, à lire ses observations, découvrir ses sentiments au fur et à mesure de ce voyage…

Enfin, il y a quelques jours, j’ai pu découvrir son livre, « La mue », une bande dessinée qui est tout sauf un simple carnet de voyage ! Certes, il y a quelques pages qui relèveraient d’un carnet de voyage mais il y a plus car elle offre avec « La mue » un doux mélange de poésie, d’introspection, de spiritualité, de rencontres humaines, de contemplation de la nature… et au bout de quelques pages on se met à cheminer avec elle de temple en temple !

On pourrait croire que « La mue » relèverait, ainsi présentée, d’une sorte de journal intime… alors, qu’en fait, il s’agit bien d’une véritable bande dessinée. Je ne veux pas vous spolier l’album mais on est réellement pris par le récit, on veut savoir comment tout cela se termine car rien n’est gagné au départ. D’ailleurs, 1200 kilomètres, ce n’est pas rien ! Lorsque j’étais jeune adulte, j’ai fait un périple autour de la Sardaigne avec un total kilométrique un peu inférieur. Je sais que je m’en suis souvenu longtemps… La marche, les gens rencontrés, l’accueil de nombreuses familles pour une nuit, les repas partagés… Une véritable tranche de vie ! Je mesure donc d’autant plus ce qu’a vécu Emilie. La seule différence est qu’elle a en plus un talent incroyable pour nous rendre vivant cette traversée dans le Japon, ses traditions, sa religion, son humanité…

Pour ceux qui auraient quelques craintes de voir seulement 88 temples dessinés au fil des pages, je voudrais dire ou préciser que tous les temples ne sont pas dessinés, que l’on a aussi des animaux et même quelques serpents qui ont beaucoup inquiété Emilie, que parfois on est au restaurant ou chez un particulier, dans une chambre d’hôtel pour pèlerin ou même dans la nature… On rencontre d’autres pèlerins, japonais ou occidentaux, avec dialogue ou pas, tous les pèlerins n’ayant pas toujours envie de parler… Quant à Emilie, elle nous parle, à nous les lecteurs, sur ses motivations, l’évolution de sa perception de ce défi qu’elle s’est lancé un peu rapidement, sur son état d’esprit… sur sa mue, en quelque sorte ! Elle nous parle aussi et cela fait réfléchir, du contenu de son sac au fur et à mesure. Elle nous fait comprendre que nous sommes toujours beaucoup trop chargés et cela ne concerne pas que le pèlerinage des temples…

Un très beau moment, une belle lecture, un très bon livre… A lire et offrir !

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  La Mue

  de Saitas, Emilie (Illustrateur)
  Tana éd.
  ISBN : 9791030105933 ; 24,95 € ; 04/09/2025 ; 160 p. Broché

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