Un pamphlet qui fait long feu

Tintin ne semble pas se démoder, la littérature qui se rattache à ce personnage légendaire et à son créateur, Hergé, ne cesse de s'amplifier.
Voici une nouvelle plaquette de l'écrivain, Maxime Benoît-Jeannin lequel, en 190 pages, jette un regard critique et virulent sur l'oeuvre et surtout les fréquentations de Hergé avant et pendant la dernière guerre.
" J’ai lu ses albums disponibles entre six et treize ans et je les ai revisités avec mon fils : leur racisme et leur esprit réactionnaire m'ont immédiatement sauté à la figure “ . Et de citer le nom de Blumenstein ( qui perdra son patronyme pour celui, bruxellois, de Bohlwinkel), qui apparaît dans l’étoile mystérieuse , album que l'Auteur analyse minutieusement en lui trouvant ici et là des relents suspects.
L’auteur rappelle que Hergé " a été élevé dans le sérail et à l'école de la presse catholique réactionnaire, " et surtout qu’il a collaboré au journal Le Soir, pendant la guerre, après l’arrêt de parution du " Petit vingtième " . On sait que le dessinateur a été mis a l'index à la libération , quarantaine qui n’a pas duré bien longtemps, puisque l'hebdomadaire Tintin vit le jour en 1946 sous la houlette de Raymond Leblanc, ancien résistant.
Benoît-Jeannin veut " arracher “ le masque de Hergé qui avait comme mentor, avant guerre, le fameux abbé Wallez, maurrassien, admirateur de Mussolini (Churchill l'était aussi à cette époque). Hergé le secourut après la guerre, ainsi que d'autres, et l’auteur admet sa générosité. Il est vrai que
ce livre paraît aux éditions Golias , dirigée Christian Terras, qui publie un magazine " Au carrefour du politique et du religieux, catho et grinçant ". Cette maison d'édition a publié le “ Trombinoscope des évêques " (1990), s’attaque à de nombreux sujets à polémique comme “ Histoire d’une dérive (les scouts), l'Inquisition romaine, les Faussaires de l'histoire, Lyon, capitale de négationnisme, etc.
Le livre de Benoît-Jeannin - par ailleurs auteur romans de science-fiction et autres, et qui écrit aussi pour le cinéma et la télévision -, ne détonne pas dans cette collection. Il est pourtant certain que le passé d’Hergé avait déjà été mieux mis en lumière dans la somme que Pierre Assouline, remarquable biographe (Albert Londres, Gallimard, etc) lui a consacré...
Rien de nouveau, donc, dans ce pensum, si ce n'est la férocité de son auteur qui fait de savantes exégèses par exemple sur le personnage de Rastapopoulos, archétype du racisme et de l'antisémitisme rampant supposé de Hergé. Le marchand d'armes Basil Bazaroff serait une forme sournoise de son antisémitisme (?), alors que ce genre de personnage est plus que jamais d’actualité, sur notre planète.
En fait, l’auteur a lu Hergé, en tout cas ses premiers livres, il ne les mésestime pas, mais ce qu'il déteste surtout, c'est son entourage. Il essaye de laisser apparaître le créateur de bandes dessinées comme
ayant été pendant la guerre, hypocrite, lâche, vénal, aveugle.
Il faut du courage pour arriver au bout de ce court pamphlet. N'en déplaise à l'auteur, Hergé a été le plus grand créateur de bande dessinée du XXe siècle, et son affirmation selon laquelle il échangerait toute l'oeuvre d’Hergé contre une seule toile d'Alechinsky est déplacée. En plus, il était un homme de coeur, passionné notamment par le drame des Indiens qu'il rencontra en Amérique.
Le créateur de Quick et Flupke a exercé son bienfaisant pouvoir de fascination. Il continuera à façonner l’imaginaire de dizaines de millions d’enfants et d'adultes, et à procurer du bonheur à ceux et à celles qui achèteront encore ses albums.

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  Le mythe Hergé [Texte imprimé] Maxime Benoît-Jeannin

  de Benoît-Jeannin, Maxime
  Golias / Les Enquêtes de Golias.
  ISBN : 9782914475006 ; 32,13 € ; 13/09/2001 ; 190 p. ; Broché

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